Archive pour colonialisme racisme et hégémonie

Racisme et antiracisme comme outils de la division et de l’ingénierie sociale (Thierry Meyssan)

Posted in actualité, altermondialisme, crise mondiale, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, militantisme alternatif, pédagogie libération, politique et lobbyisme, politique et social, politique française, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , on 23 juin 2020 by Résistance 71

 

“Bref, ni le pouvoir et la puissance de l’État centralisé, ni les enseignements doctrinaires de la haine mutuelle et de la lutte sans merci qui vinrent parés des atours de la science, en provenance de philosophes et sociologues obéissants, n’ont pu se débarrasser du sentiment de solidarité humaine, profondément logé dans la compréhension des hommes et dans leur cœur, parce que ceci a été chéri et cajolé par toute notre évolution précédente.
[…] Et l’Homme est appelé à être guidé dans ses actes, non pas seulement par l’amour qui est toujours personnel, ou au mieux tribal, mais par la perception de son unicité, du sentiment de ne faire qu’un avec chaque être humain.”
~ Pierre Kropotkine, “L’entraide, un facteur de l’évolution” ~

L’ouvrage mentionné et cité ci-dessus est l’antidote absolu à l’idée même de hiérarchie des espèces et des “races”, un antidote au racisme qui n’est qu’une construction sociale, un artifice construit pour maintenir le rapport dominant / dominé sous toutes les coutures possibles. Analyse intéressante de Thierry Meyssan sur le sujet et dont nous adhérons à la conclusion.

~ Résistance 71 ~

 


« Les martyrs, cher ami, doivent choisir d’être oubliés,
raillés ou utilisés ; quant à être compris, jamais. »
~ A. Camus, « La chute », 1956 ~

 

Racisme et antiracisme comme mensonges

 

Thierry Meyssan

 

16 juin 2020

 

url de l’article original:

https://www.voltairenet.org/article210211.html

 

Les idéologies de l’antiracisme et du racisme se fondent sur la même imposture : il existerait des races humaines distinctes ne pouvant avoir de descendance commune en bonne santé ; postulat stupide dont chacun peut constater l’ineptie. Interrogés à ce sujet, les partisans de ces deux idéologies ne peuvent qu’assurer parler au figuré, mais reprennent peu après leur interprétation raciale de l’humanité et de son histoire. Comme le montre Thierry Meyssan, ce couple passionné n’a jamais servi que les intérêts des puissances dominantes.

Les communautés humaines ont tendance à surestimer leur mode de vie et à se méfier de celui des autres. Pour maintenir la cohésion de leur groupe, certains de ses membres ont un réflexe de rejet des nouveaux arrivants. Cependant, dès qu’ils font leur connaissance, qu’ils comprennent que ce sont des hommes comme eux, les tensions s’apaisent.

À ce fonctionnement ethnologique, des idéologies sont venues s’ajouter au XIXème et XXème siècle : le racisme et l’antiracisme. Dans le contexte de l’impérialisme britannique et du développement de la biologie et de la génétique, ces théories permettaient de justifier la hiérarchie ou l’égalité en droits des populations.

Le racisme scientifique

Suite aux théories de Charles Darwin (1809-1882) sur l’évolution des espèces animales, Herbert Spencer (1820–1903), posa qu’il existait des races humaines distinctes et que la sélection naturelle avait abouti à la supériorité des Blancs. C’était le début du « social-darwinisme ». Un cousin de Darwin, Sir Francis Galton (1822-1911), étalonna les races et relia le taux de fécondité des femmes à la dégénérescence des individus. Il put ainsi non seulement prouver la supériorité des Blancs sur les gens de couleur, mais aussi des riches sur les pauvres.

Un « consensus scientifique » établit que les accouplements interraciaux étaient à l’origine de nombreux handicaps. Dès lors, il devenait indispensable de les interdire au même titre que l’inceste pour préserver chaque race. C’était l’« eugénisme ». La mise en application de ce principe fut d’autant complexe que, quelle que soit la définition de chaque race, aucun individu n’est de race pure, par conséquent chaque situation est sujette à discussion. Aux États-Unis cette logique ne conduisit pas seulement à décourager la formation de couples entre Européens d’un côté et Indiens, Noirs ou Chinois de l’autre, mais aussi à privilégier les Blancs Anglo-Saxons sur les Blancs non-Anglo-Saxons (Italiens, Polonais, Serbes, Grecs etc.) (Immigration Act en vigueur de 1924 à 1965).

L’Institut du Kaiser Wilhelm (équivalent allemand du CNRS français) démontra que non seulement la préservation de la race exigeait de ne pas se reproduire avec des individus de race différente, mais aussi de ne pas s’accoupler du tout. En effet, dans le cas de pénétration anale, les gènes de l’un et de l’autre se mêlaient bien que n’ayant pas de descendance. D’où la prohibition de l’homosexualité par les nazis.

Il fallut attendre la chute du nazisme et la décolonisation pour que le « consensus scientifique » se retourne et que l’on prenne conscience de l’incroyable diversité au sein de chaque race supposée. Ce qui nous ressemble chez certains individus d’autres races supposées est beaucoup plus important que ce qui nous distingue d’individus de notre race supposée.

En juillet 1950, l’Unesco proclame l’inanité du « darwinisme social » et de l’« eugénisme ». Tout simplement, l’humanité est certes issue de plusieurs races d’homo sapiens préhistoriques distinctes, mais ne constitue qu’une seule race dont les individus peuvent s’accoupler sans risques. Évidemment, il n’était pas nécessaire d’être scientifique pour le remarquer, mais les idéologies impérialiste et coloniale avaient provisoirement obscurci l’esprit des « savants ».

Le racisme juridique

Alors que les scientifiques retrouvaient leur unité, les juristes se divisaient en deux manières différentes d’aborder la question. Cette fois ce ne sont pas les idéologies impérialiste et coloniale qui les séparent, mais leurs conceptions de la Nation. Pour les Anglo-Saxons, celle-ci est un rassemblement ethnique (au sens culturel), tandis que pour les Français, elle est un choix politique. Le principal dictionnaire juridique US dispose : « Nation : Un grand groupe de personnes ayant une origine, une langue, une tradition et des coutumes communes constituant une entité politique » (“Nation : A large group of people having a common origin, language, and tradition and usu. constituting a political entity,” Black’s Law Dictionary, 2014). Au contraire la France depuis la Révolution dispose : Nation : « Personne juridique constituée par l’ensemble des individus composant l’État » (Arrêté du roi Louis XVI du 23 juillet 1789).

La vision française est aujourd’hui à peu près universelle, celle des Britanniques n’est défendue que par eux et par leurs créations coloniales : les Frères musulmans et le RSS indien [1].

Ainsi malgré les progrès de la science, les Britanniques vivent aujourd’hui sous le Race Relations Act 1976 (Lois sur les relations raciales de 1976) et sont arbitrés par la Commission for Racial Equality (Commission pour l’égalité raciale), tandis que les textes officiels français parlent de « prétendue race ». Dans la pratique, les deux sociétés n’établissent pas de différences « raciales », mais de classe sociale pour les Britanniques et de niveau social pour les Français.

L’antiracisme

En Occident, l’antiracisme est désormais confondu avec l’antifascisme. Alors même qu’il n’y a plus de racisme faute de races, ni de fascisme, faute des situations économiques auxquelles cette pensée répondait. Les groupes qui se réclament de ces idées ont aujourd’hui la particularité de se réclamer de l’extrême-gauche anticapitaliste, mais d’être subventionnés par le spéculateur George Soros et de travailler pour le compte de l’Otan, champion du capitalisme. Ils disposent donc d’un entraînement militaire.

C’est non sans délectation que le président turc Recep Tayyip Erdoğan n’a pas manqué de souligner, lors d’un entretien téléphonique avec son homologue US le 8 juin 2020, que l’Otan avait utilisé les Brigades internationales antifascistes à la fois contre la Syrie et contre la Turquie [2] ; les mêmes « Antifas » qui coordonnent les émeutes antiracistes actuelles aux États-Unis.

En réalité, le racisme et l’antiracisme sont les deux faces d’une même pièce. Tous deux se fondent sur le fantasme des races dont nous savons pourtant qu’elles n’existent pas. Dans les deux cas, il s’agit d’un conformisme à l’air du temps. Les racistes correspondaient aux idéologies impérialiste et coloniale, les antiracistes à la globalisation financière. Leur unique utilité politique commune est d’occuper le terrain pour masquer les authentiques luttes sociales.

Notes :

[1] « Histoire mondiale des Frères musulmans » (6 parties), Thierry Meyssan, 21 juin 2019. « Déjà 10 mois de confinement du Jammu-et-Cachemire », par Moin ul Haque, Dawn (Pakistan) , Réseau Voltaire, 10 juin 2020.

[2] « Les Brigades anarchistes de l’Otan », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 12 septembre 2017.

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Il n’y a pas de solution au sein du système, n’y en a jamais eu et ne saurait y en avoir !

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

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4 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie

 


Décolonisons le monde !… Croire que nous vivons
dans un monde « post-colonial »
quand la marchandise a tout colonisé est…
pure utopie ! Le racisme est un dérivé marchand…

Résistance au colonialisme: Tribunal sur le génocide dans les pensionnats pour Indiens… Justice ou blanchiment ?…

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Complémentaire de notre article juste traduit et publié: « Ethnocide et génocide… 22-24 Octobre 2014 tribunal dans le Wisconsin sur le génocide des pensionnats pour Indiens ».

— Résistance 71 ~

 

Blanchiment de génocide en vue dans le Wisconsin ?

 

Mohawk Nation News

 

9 Octobre 2014

 

url de l’article original:

http://mohawknationnews.com/blog/2014/10/09/wisconsin-whitewash/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Blue Skies Inc. va organiser une supposée “Commission de la vérité sur les pensionnats pour Indiens” dans le Wisconsin du 22 au 24 Octobre courant. Les Etats-Unis exportent leur programme de génocide. L’Holocauste de l’île de la Grande Tortue est bien connu. Plus de 150 millions d’indigènes furent éliminés. Le Canada est un état policier bien connu pour maltraiter ses peuples indigènes. Les dictateurs de pays corporatistes envoient des membres de leurs gouvernements pour étudier comment les Etats-Unis et le Canada ont commis le “crime parfait” et pensent avoir échapper à ses conséquences. Ils sont ici pour rafiner leurs propres procédures et les remener dans leurs propres pays. Quelqu’un doit bien faire le sale boulot. Ces porte-flingues seront aussi sûrement éliminés.

Les tribunaux et commissions corporatistes sont mis en place et les voyous y siègent comme juges et commissaires pour entendre et enregistrer nos horribles témoignages de camps de la mort. Ils écoutent, discutent, puis perfectionnent en secret la recette pour que le meurtre de masse soit perpétué dans d’autres états policiers corporatistes. L’Afrique du Sud a étudié de près la théorie du quota sanguin de l’Indian Act canadien et en développa son régime d’apartheid. L’Afrique du sud ne suit plus le régime d’apartheid, le Canada lui, continue.

Nous parlons de notre propre expérience ainsi les peuples indigènes des autres pays pourront échapper à la même tragédie.

L’Agenda 21 de l’ONU remplit tous les critères requis pour le crime et le génocide. Les actionnaires des nations/entreprises, les perpétrateurs veulent une recette miracle pour l’assassinat afin de pouvoir continuer à tuer et que personne ne puisse être tenu pour responsable.

Les agences, fondations, corporations/entreprises qui se déguisent sous la forme de pays, de nations sont enregistrés avec le Vatican. Ils opèrent sous le chef de bien des fronts corporatistes afin de tromper les pauvres et de les piétiner. Contrôler l’économie et mettre en place des écoles du lavage de cerveau mimiquant l’éducation font partie de cet agenda.

Meurtre caractérisé, maladies, épidémies, prisons, camps de la mort, attaques directes et fournir des armes des deux côtés d’une belligérence sont quelques unes de leurs tactiques. Être le maître implique de mentir, de tuer et de manipuler le monde. Il y aura un retour de bâton. Même au sein de leurs propres peuples, le lavage de cerveau commence à sérieusement flancher. Encore et toujours ces assassins de masse ont été jugés et condamnés. La punition arrive. Nous, les indigènes, devons être capables de transcender nos histoires d’horreur. Nous devrions collecter des fonds à ces réunions et traduire le Vatican en justice pour le génocide des peuples de l’Île de la Grande Tortue. La seule cour de justice qui ne représente pas l’amirauté est la Cour Internationale de Justice de la Hague. Juges, commissaires, combien d’argent pouvez-vous nous donner pour y parvenir ? La nouvelle classe de millionnaires canadiens est constituée des 630 chefs indiens du Canada (NdT: pas les chefs traditionnels, seuls légitimes, mais les chefs issus des élections de conseils de bandes, institution émanant directement de l’Indian Act et donc du gouvernement répressif colonial qui ne “traite” qu’avec les corrompus qu’il a lui-même mis en place et qui n’ont AUCUN pouvoir légal vis à vis de la gouvernance traditionnelle autochtone que le pouvoir s’évertue à faire oublier par l’ethnocide organisé et la corruption du système éducatif…). Ceux-ci travaillent jour après jour pour mettre en place les politiques génocidaires (et ethnocidaires) de l’Indian Act colonial. Frères, avez-vous cent balles ?

Blue Skies Inc. De Grande-Bretagne n’est pas le même blus skies chanté par Willie Nelson : “Blue skies smiling at me. Nothing but blue skies do I see. Blue days all of them gone. Nothing but blue skies from now on.” Sing it, Willie! Willie Nelson. “Blue Skies”.

http://www.blueskiesfoundation.info/ScheduleOfEvents.pdf Commission on Residential Schools.

Blue Skies Foundation: http://www.blueskies.com/newsletter/august2011.pdf

Read. Bill Gates owns Ebola.

Lutte contre le colonialisme au sein de l’empire: Ethnocide et génocide sont les deux mamelles du colonialisme occidental…

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Excellente analyse de Steven Newcomb, le directeur et le co-fondateur de l’Institut de Droit Indigène et grand spécialiste du droit institutionnel et indigène, sur les rouages du colonialisme plus que jamais présent en Amérique du Nord. Cet article est le pendant de l’article précédemment traduit et publié: « Comment la langue parlée nous trahit« .

Mettre fin à l’empire, c’est mettre fin au colonialisme dans sa forme pratique certes mais aussi idéologique, qui s’exerce insidieusement sur toutes et tous, car « Nous sommes tous des colonisés« … Seul le degré d’application varie.

— Résistance 71 —

 

Une meilleure façon de concevoir notre être et notre existence

 

Steven Newcomb

 

14 Novembre 2013

 

url de l’article original:

http://indiancountrytodaymedianetwork.com/2013/11/14/better-way-conceive-our-being-and-existence

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Avant l’invasion et la colonisation par les monarchies chrétiennes et les nations d’Europe, notre monde culturel et spirituel était intact. Nos ancêtres libres et indépendants avaient une compréhension spirituelle de leurs propres identités en tant que nations et peuples distincts.

Quand les envahisseurs vinrent, ils travaillèrent pendant des siècles à détruire nos langues originelles, nos cultures et nos traditions. Ils travaillèrent à remplacer notre existence originelle libre avec leurs propres langages européens et traditions toutes fondées sur le christianisme. Jusqu’à aujourd’hui, nous vivons dans ce qui a succédé à cette domination imposée, de laquelle certains d’entre nous pensent que nous avons tous les droits de nous libérer, nous, nos peuples et nos nations.

L’évangélisation chrétienne à cette époque fut violemment dirigée contre les peuples non-chrétiens, en insistant que tout le monde, surtout chaque enfant en bas âge, soit baptisé dans ce que les chrétiens appelaient la “seule véritable foi”. Les non-chrétiens étaient catalogués hors-la-loi et ennemis de l’état qui devaient soit être tués, ou “réduits” à la “civilisation” chrétienne, souvent au moyen de la mise en esclavage et la conversion forcée. Ceux qui n’étaient pas baptisés pouvaient être tués en toute impunité, ou mis aux travaux forcés jusqu’à épuisement, bafoués, volés et déportés collectivement de leurs territoires ancestraux afin de laisser place libre à la vie et au monde chrétien.

Quand je regarde ce que nous avons traversé aux mains des envahisseurs et des gouvernements qui ont émergés de ces schémas invasifs, il est clair que ce fut un effort de nous éradiquer en tant que nations distinctes. C’est comme si les envahisseurs avaient dit tout ce temps: “Vous êtes requis d’accepter notre domination.”

Ce qui est appelé aujourd’hui la “loi fédérale indienne” (NdT: aux USA et “Indian Act” loi sur les Indiens au Canada) aux Etats-Unis n’est rien d’autre qu’une construction métaphorique du système de réalité européo-chrétien. Bien que nous soyons les nations originelles de ce continent et de cet hemisphère, nous avons vécu pendant des générations sous l’effet hypnotique de ce système de croyance européo-chrétien avec sa présupposition sous-jacente que cela est la “seule véritable réalité”. Comme si les dominants avaient dit: “Vous devez volontairement accepter le système de métaphores que nous avons mentalement créé pour votre mise sous contrôle ; ceci représente la seule réalité et c’est de fait la loi.”

Si nous continuons à répliquer et à maintenir “la domination générée par la loi fédérale indienne”, nous sommes les seuls à blâmer. Répéter la même réalité disfonctionnelle et folle encore et toujours et en attendre l’émergence d’une réalité fonctionnelle et saine n’est qu’une autre forme de folie. Si nous embrassons consciemment les concepts, idées et attitudes dont nous savons le résultat être toujours les mêmes problèmes que nous disons vouloir résoudre, alors comment pouvons-nous vouloir blâmer quelqu’un d’autre pour le résultat ?

De plus, la société dominante a mis au point des mots et phrases particuliers pour notre intégration politique dans son système. A chaque fois que nous pensons, parlons et écrivons à propos de nous-mêmes en termes des idées que la société dominante a établi pour ce but précis, nous travaillons contre notre propre intérêt. Nous faisons ceci à chaque fois que nous parlons de nous-mêmes en termes et phrases qui construisent une forme de réalité dominante pour nous, comme les termes “tribus”, “nations tribales”, “nations domestiques dépendantes”, “quasi-souveraineté”, “fier d’être américain (ou canadien)”, “nos pères fondateurs” (NdT: Qui est l’équivalent nord-américain du tristement célèbre “nos ancêtres les Gaulois” enseigné aux élèves indochinois et d’Afrique de l’Ouest et du Nord colonisés par la France…) , “nous devons accepter le pouvoir pléniaire des Etats-Unis”, etc, etc…

Plus nous utilisons des mots et des phrases qui nous diminuent, plus nous refusons d’émettre des alternatives, et plus rapidement nous détruisons notre distinction politique en tant que nations et peuples originels de ce continent et de cet hémisphère. L’auto-intégration politique marche en nous nommant nous-mêmes en les termes que le système politique dominant a inventé comme moyen de mélanger nos nations et nos peuples dans son corps politique prédateur.

A chaque fois que nous utilisons sans questionner le vocabulaire d’auto-domination, nous assistons le corps politique prédateur à digérer (incorporer) nos nations et nos peuples. La seule façon d’arrêter ce processus est de refuser de nous identifier nous-mêmes en termes de leur système de réalité dominant. Le problème de la “découverte” (NdT: au sens de la “doctrine chrétienne de la découverte” comme édictée par les bulles papales de 1455 (Romanus Pontifex) et 1493 (Inter Caetera) a été un moyen de nous focaliser sur un problème plus profond: L’effort incessant de la société dominante d’éliminer notre identité en tant que nations libres et indépendantes originelles de ce continent et de cet hémisphère du globe.

Nous faire nous identifier avec ce même système qui a travaillé si dur à détruire notre existence a été le but ultime de la société dominante depuis des générations. Ce fut le but quant à la mise des membres de nos familles dans des centres d’endoctrinement programmés où ils furent abusés, centres appelés “pensionnats” ou “écoles résidentielles” pour Indiens.

Maintenant un nouveau et troublant développement  point à l’horizon. L’effort de certains pour nous convaincre qu’au nom du “processus de construction retardée de nation” (à des fins de “cicatrisation” et de “réconciliation”…), nous devrions volontairement nous incorporer dans le système de domination qui nous est imposé. Il a été faussement suggéré que la subjugation et la destruction qui se sont abattues sur nos nations et nos peuples vont magiquement se transformer en quelque chose de bénéfique au travers d’un processus “d’incorporation” qui est étiqueté “cicatrisation/healing” et “réconciliation”. On nous dit que ceci sera accompli en nous “incorporant” dans le système politique de l’état, qui a travaillé si diligemment à nous détruire. Tout ce que nous avons à faire en fait est de donner notre consentement informé au système politique dominant.

Ma suggestion : N’y croyez pas un seul instant.

=  =  =

Steven Newcomb (Shawnee, Lenape)  a étudié le droit fédéral indien et le droit international depuis le début des années 1980.  Il est le directeur et le co-fondateur de l’Institut de Droit Indigène et auteur du livre “Païens en terre promise: Décoder la doctrine de la découverte chrétienne” (éditions Fulcrum, 2008) 

Résistance politique: Comprendre l’idéologie du génocide pour mieux rejeter le colonialisme qui vérole la planète…

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Très complémentaire de notre traduction de l’Introduction du livre de Kevin Annett « A découvert: génocide au Canada passé et présent »

Il est vital pour un changement de paradigme que nous comprenions les tenants et aboutissements du colonialisme d’hier et d’aujourd’hui et d7en rejeter l’idéologie, il en va de notre survie tout simplement.

— Résistance 71 —

 

Pas finale !

 

Mohawk Nation News

 

19 Septembre 2013

 

url de l’article original:

http://mohawknationnews.com/blog/2013/09/19/not-final/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Ce programme de sysématiquement nous assassiner fut mis en application lorsque les envahisseurs venus d’Europe mirent les pieds sur nos côtes. Plus de 100 millions d’entre nous (NdT: depuis 1492 en Amérique du sud, centrale, du nord et dans les Caraïbes) ont été massacrés. Cela continue jusqu’à aujourd’hui. En 1920, Duncan Campbell Scott (NdT: Haut commissaire aux affaires indiennes) mit en place la “solution finale” du “problème indien” sous forme de politique: “Je veux me débarasser du problème indien… Notre objectif est de continuer jusqu’à ce qu’il n’y ait plus un seul Indien au Canada qui n’ait pas été absorbé dans le corps politique et qu’il n’y ait plus de question indienne.” La Canada nazi tente toujours d’exécuter systématiquement son plan de notre extermination totale, de nous, de nos communautés et de nos identités. La raison en est de pouvoir faire le braquage total de l’hémisphère occidental à leur profit. Nous avons toujours résisté à ces sales prédateurs !

Des milliers ont été tués par des escadrons de la mort et dans des pogroms de masse. Nous sommes sur leur chemin. Les “leaders” de l’entreprise guerrière connue sous les noms de Canada et Etats-Unis ont planifié depuis longtemps de tuer les autochtones d’une manière ou d’une autre. Un jour ces conseils de bandes / tribus entrepreneuriaux et leurs “injuns” vendus, corrompus qui aident à entretenir le génocide, seront amenés devant leur peuple. Ces traîtres répondront devant nous de leur traîtrise.

Les banquiers ont créé l’entreprise Canada et la grille de contrôle indigène par le conseil de bande afin de mettre en pratique la théorie du génocide. Le meurtre est le but final. La violence l’effet à long-terme. Des comptes d’apothicaires sont faits sur chaque aspect de notre existence et archivés dans les archives nationales et le bureau des affairs indiennes. Voler notre terre, mettre nos enfants dans des camps de la mort “pensionnats”, nous faire vivre dans des conditions du tiers monde, le coût de la résistance autochtone et l’utilisation de la force, tout est calculé. On ment aux masses.

Le leader de l’Allemagne nazie Adolf Hitler a copié le programme de Scott pour sa “solution finale de la question juive”. Le génocide dans l’hémisphère occidental continue. Le meurtre de masse et l’incarcération de notre peuple se pratiquent toujours dans de nouvelles prisons privées. Les accords et les traités pour vivre pacifiquement avec nous en accord avec la Grande Loi de la Paix et la ceinture Wampum à deux rangées, sont violés en permanence. Tous les colons sont des occupants illégaux de l’Ile de la Grande Tortue.

Nous continuons à demander à ces entreprises étrangères de nous montrer la preuve qu’elles possèdent en droit quoi que ce soit. Nous sommes les titulaires naturels de tout ce qui est au dessus et en dessous de la surface de notre Terre-Mère. Quelques personnes frustrées pensent que la seule place qui reste est la lune.

Sivert Hoyem sing: Sivert Hoyem: “Moon Landing”. ”For now I’ve had enough from you/I’m done and so are you/Go see what you can do/While the universe is expanding/The silence is commanding ..”

 

Dean Neu, Richard Therrien. Accounting for Genocide: Canada’s Bureaucratic Assault on Aboriginal People. Halifax: Fernwood Publishing, 2003. vi + 194 pp. $19.95 (paper), ISBN 978-1-55266-103-1.“Accounting for Genocide”

“Final Solution of the Indian Problem”.

Histoire et science sociale: Eurocentrisme et la persistance du colonialisme

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Fondements et permanence du colonialisme

 

Nils Andersson

 

10 Novembre 2011

 

url de l’article:

http://www.anticolonial.net/spip.php?article2316

 

Pendant des millénaires, premières colonisations : Égypte et Mésopotamie, monde gréco-romain et monde musulman, Asie hindouisée et sinisée, empire mongol, l’Eurasie et l’Afrique du Nord, furent des terres de conquêtes et de barbarie. Le plus ancien traité connu « de fraternité et d’amitiés » conclu vers 1280 av. J.-C, entre le roi d’Egypte, et le roi des Hittites fait l’objet d’un accord sur les frontières mais il est implacable envers les populations. Les souverains s’accordent d’extrader les fugitifs des deux camps qui cherchent asile soit en Égypte soit en pays hittite, le territoire est plus important que le sort des populations. C’est là une première permanence du système colonial et impérialiste, la primauté du territoire sur les populations.

Navigateurs, explorateurs et marchands vont êtres les premiers colonisateurs. En 1493, un arbitrage du pape accorde toutes les terres « trouvées ou à trouver, reconnues ou a reconnaître » à l’Espagne et au Portugal. Il s’agit d’un colonialisme mercantile et de mercenaires, avec le « système de l’exclusif ». La puissance coloniale s’assure le monopole des importations et exportations, ainsi les conquistadors s’attribuent pour leurs rois et pour eux-mêmes les richesses de l’Afrique et de l’Amérique. Au XIXe siècle, avec l’expansion du capitalisme industriel, la liberté du commerce, va prévaloir et modifier le système colonial en rationalisant et intensifiant l’exploitation économique, sociale et humaine des peuples colonisés. L’accaparement des richesses naturelles est la deuxième permanence du système colonial.

Autre composante constitutive du colonialisme, le goupillon, trois bulles du pape confient aux rois d’Espagne et du Portugal la christianisation des territoires « découverts et à découvrir ». Imposer sa religion fut tout au long de la conquête coloniale une composante essentielle de la mission civilisatrice de l’homme blanc. Évangéliser est la troisième permanence du système colonial.

Pour compenser la chute de la démographie qui résulte en Amérique de l’extermination des Indiens, du travail forcé auquel ils sont soumis et des maladies contagieuses amenées par les Européens, il est organisé dès le XVIIe siècle le plus ignoble des commerces, la traite négrière. Pendant trois siècles l’esclavagisme participera du système colonial. Si la traite négrière a été abolie, la « force noire » du général Mangin lui succéda, avec l’enrôlement massif comme chair à canon pour les guerres impérialistes des tirailleurs sénégalais, malgaches, algériens, marocains, tunisiens et indochinois, puis les colonisés deviendront une main d’œuvre exploitable sans limite dans les métropoles. Quatrième permanence du système colonial, l’exploitation sociale et humaine des peuples colonisés.

Le goupillon accompagne le glaive. La violence dont se vante le capitaine de Montagnac lors de la conquête de l’Algérie : « Toutes les populations qui n’acceptent pas nos conditions doivent être rasées. Tout doit être pris, saccagé, sans distinction d’âge ni de sexe… » est inhérente au colonialisme. Violence que justifie Alexis de Tocqueville – grande référence de la pensée libérale et démocratique – quand il écrit : « Du moment que nous avons admis cette grande violence de la conquête, je crois que nous ne devons pas reculer devant les violences de détail, qui sont absolument nécessaires pour la consolider. » Cinquième permanence du système colonial, le recours à la violence de la guerre et de la répression.

À la violence physique s’ajoute une entreprise de dépersonnalisation, symbolisée par le Code de l’indigénat en Algérie, l’apartheid en Afrique du Sud, la ségrégation aux États-Unis et ailleurs. règles fondées sur la supériorité de l’homme blanc. Le Code de l’indigénat, par exemple, était un régime d’exception avec la mise en place de deux collèges électoraux, un pour les Français, un pour les indigènes. L’interdiction faite aux Algériens d’être maire ou président d’une assemblée qui comprend des Français, leur exclusion de certaines écoles ou interdiction faite à un officier « indigène » de commander un officier français même d’un grade inférieur au sien. De plus les Algériens sont soumis à la loi de la « responsabilité collective », non seulement ils ne sont pas des citoyens égaux mais leur individualité est niée, ils sont une masse. Déniant leur identité aux peuples colonisés, les colonisateurs vont imposer leur langue, leur culture, leur idéologie, fondée sur la supériorité de l’homme blanc. Racisme et colonialisme ne font qu’un. L’aliénation du colonisé est la sixième permanence du système colonial.

Il n’y a pas eu un mais des colonialismes, des distinctions peuvent être opérées, mais dans l’échelle de l’abomination tous les colonialismes sont égaux. Et dans le nouvel ordre colonial, comme dans l’ancien on retrouve ces six permanences : primauté du territoire sur les populations, accaparement des richesses naturelles, imposition de la religion du colonisateur, exploitation sociale et humaine, recours à la violence de la guerre et de la répression, aliénation culturelle et idéologique du colonisé.

S’il est paru important de rappeler ces permanences du colonialisme, ce n’est pas pour énumérer les maux du colonialisme, mais pour inscrire notre débat dans les luttes émancipatrices présentes car, sans une approche globale du système colonial, il ne peut y avoir de sortie du colonialisme.

Sortir du colonialisme : désaliénation et luttes communes

L’indépendance nationale acquise au prix de grands sacrifices par la lutte armée ou accordée par le colonisateur est une étape essentielle de la décolonisation, mais elle n’est et ne pouvait être qu’une étape. Comment aurait-il été possible que le colonisé se libère de son aliénation du seul fait d’être indépendant. Rompre avec les chaines de siècles d’oppression politique, d’exploitation économique, de soumission idéologique demande un temps long. Il est donc normal que l’on se pose aujourd’hui, la question : comment sortir du colonialisme ?

Pour sortir du colonialisme au stade d’une « mondialisation » qui est inscrite dans le processus même des conquêtes coloniales, il y a deux démarches obligées : rompre avec l’aliénation coloniale et créer les conditions pour que les peuples colonisés, ex-colonisés et les peuples des métropoles mènent des luttes communes.

Rompre avec l’aliénation, Fanon dénonce combien les comportements humains des « damnés de la terre » sont gangrenés par le colonialisme et le racisme, la radicalité de Fanon répond à un besoin de survie identitaire. Il souligne l’importance du regard porté sur les résistances au colonialisme. Mais Enzo Traverso fait le constat : « Une large partie de l’historiographie dite post-coloniale, revisite le passé à travers le prisme de la victime, dans un horizon privé de toute utopie, où il n’y a plus de place pour la mémoire des luttes émancipatrices des esclaves et des colonisés… » Il faut rompre avec toute logique victimiste du colonisé, subissant l’oppression coloniale. Il faut au contraire redonner place à la longue mémoire des luttes de résistance et émancipatrices qui ont porté les peuples colonisés il y a un demi-siècle au centre de l’Histoire.

Quel chemin parcouru depuis 1885, summum de l’arrogance coloniale, où la Conférence de Berlin décide des règles de partage de l’Afrique où il est convenu que « toute puissance européenne installée sur la côte peut étendre sa domination vers l’intérieur jusqu’à rencontrer une ‘sphère d’influence’ voisine. » Plus simplement dit : là où l’homme blanc pose le pied, le sol et les gens lui appartiennent.

L’ordre colonial est à son apogée. Le monde se partage entre les Empires coloniaux anglais et français dominants, les empires espagnols, portugais et hollandais déclinants (lutte d’indépendance en Amérique latine), les nouveaux empires coloniaux allemand, italien et belge et les États-Unis et la Russie conquérants. Les possessions britanniques, première puissance coloniale, représentent alors un quart des terres du globe et un quart de la population mondiale. Seule puissance non occidentale à mener une politique impérialiste, le Japon.

La domination coloniale paraît alors sans fin. Mais les peuples colonisés s’organisent politiquement, certains engagent des luttes de libération nationale, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est affirmé dans le cadre des Nations Unies. C’est le temps des ruptures, des sacrifices aussi, de Bandoeng, de la révolution AAA (Afrique, Asie, Amérique latine), amenant un bouleversement historique majeur. On ne peut sortir du colonialisme sans faire vivre cette mémoire.

De très nombreuses contributions des ex-colonisés sur les effets de la colonisation et ceux, tout aussi ravageurs, du néo-colonialisme – favorisé par la complicité et la corruption d’une grande partie des élites locales – témoignent d’une désaliénation du colonisé. Émancipation nationale et sociale mais également culturelle, identitaire, au pays et de l’émigré. Mais cette question n’est pas prise dans toute sa dimension si nous ne posons pas cette autre question, la désaliénation concerne-t-elle le seul colonisé ?

Certes non. Il en est pour le colonisateur comme, pour le colonisé. Les peuples victimes du colonialisme doivent se construire, s’émanciper, se libérer de ce passé et du présent néo-colonial où suppôts des anciens colonisateurs maintiennent leurs peuples sous leur dépendance et celle des anciens maîtres. Mais l’homme occidental doit lui aussi assumer son histoire, se libérer de sa propre aliénation de colonisateur, il doit lui aussi faire, « peau neuve », sans quoi il ne cesse de reproduire son aliénation dominatrice et raciste. On reste dans l’attente que les « élus du ciel », les colonisateurs, comprennent la nécessité de mettre en question leur identité de colonialistes qui continue à pervertir leur raison et leurs comportements.

On ne peut créer les conditions de modifier les rapports de force dans le monde sans sortir du double piège de l’aliénation du colonisé et de celle du colonisateur, dans laquelle nous maintient l’actuel ordre mondial. Face à la gangrène raciste, xénophobe, qui se répand dans le discours politique, intellectuel et médiatique, il faut dénoncer, inventer, découvrir, rompre avec la pensée dominante, y compris dans ce qu’elle gangrène nos rangs.

Autre obligation, créer les conditions de mener des luttes communes. Je voudrais rapporter ici à ce propos un colloque tenu à Milan au Centre Franz Fanon en 1962, il y a donc 50 ans, dans un moment de grandes avancées des mouvements de libération nationale, colloque qui avait pour thème, la gauche occidentale et le tiers-monde. Il a été souligné lors de ce colloque que la responsabilité historique de la gauche européenne est « de ne pas avoir compris la véritable importance des révolutions du Tiers monde, d’avoir considéré ces révolutions comme un fait particulier, isolé, dans le processus révolutionnaire mondial. » Faute de cette compréhension « nous avons pu assister, alors même que le cours de la décolonisation changeait le monde à un renforcement indiscutable du pouvoir capitaliste, à un affaiblissement progressif des forces démocratiques en Europe… »

Il a été lors de ce colloque posé la question « Le passage pour les mouvements de libération de la lutte armée avec l’accession à l’indépendance à des luttes revendicatives, démocratiques, une fois l’indépendance acquise, fera-t-il apparaître avec plus de clarté que l’ennemi est commun et que la décolonisation n’est pas un épisode particulier, historiquement isolé », qu’il appartient au mouvement général d’émancipation et que sans une solidarité active avec les peuples sortis du colonialisme, « la gauche européenne n’aura aucune efficacité. »

Cinquante ans après le constat est là, entre la gauche européenne et les peuples ex-colonisés ou encore colonisés, pris dans la nasse de l’économie de marché, soumis à la logique du néo-libéralisme dominante, il ne s’est pas créé une réelle solidarité et la question de l’efficacité de la gauche européenne reste posée.

Le monde a changé, les rapports de forces interétatiques ne sont plus les mêmes, les rapports de forces politiques, sociaux et économiques ne sont plus les mêmes, les rapports de force Nord-Sud ne sont plus les mêmes, les épicentres des mouvement d’émancipation et libérateur ne sont plus les mêmes. Mais le nouvel ordre mondial a aggravé les rapports dominants/dominés, colonisateurs/colonisés. Le capitalisme est toujours au fondement de la domination et de l’exploitation coloniale et sociale, nous sommes soumis aux mêmes maîtres, des maîtres dont les décisions sont de plus en plus exterritorialisées, loin de toute intervention et de tout contrôle citoyen, des maîtres qui nous mettent en concurrence, nous soumettent aux mêmes lois. Ce qui rend d’autant plus impératif de mener des luttes communes.

Sans cette solidarité, sans se sortir du double piège de l’aliénation colonialiste, dont nous ne sommes pas encore libérés et de l’aliénation néolibérale à laquelle il manque encore la radicalité d’un Fanon pour être dévoilée, on ne peut se libérer, ni les uns ni les autres, des lois de l’économie de marché, de la domination de l’idéologie néo-libérale auxquelles nous sommes soumis, nous ne pouvons faire prévaloir de la démocratie. Pour citer Jacques Bidet : « Auparavant n’existait que l’internationale : chaque classe exploitée se confrontait à sa classe exploiteuse, chaque peuple colonisé à son colonisateur. Et il pouvait s’établir entre eux une solidarité internationale. Aujourd’hui la logique du capital dessine l’horizon commun d’une histoire partagée. La lutte d’émancipation acquiert une perspective mondiale ».

Sortir du colonialisme, qui n’est nullement un système archaïque mais est aujourd’hui un constituant du système globalisé c’est, partant de mouvements locaux et nationaux, là où nous sommes, avec nos différences, nos expériences, en conjuguant nos mouvements, se donner la capacité d’influer sur l’ordre mondial.

 

Résistance politique: Combattre et éradiquer le fléau colonial, première nécessité

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“L’histoire du système mondial moderne a été pour sa plus grande partie, une histoire de l’expansion des États et peuples européens sur le reste du monde… L’expansion a impliqué dans la très vaste majorité des régions du monde incriminées, la conquête militaire, l’exploitation économique et d’énormes injustices.”

~ Immanuel Wallerstein, “European Universalism” ~

 

“Du moment que nous avons admis cette grande violence de la conquête, je crois que nous ne devons pas reculer devant les violences de détail, qui sont absolument nécessaires pour la consolider.”

~ Alexis de Tocqueville ~

 

Nous sommes tous des colonisés !

 

Résistance 71

 

16 Mai 2013

 

2ème partie

 

Le problème du colonialisme et de son avatar néo-colonial dans la société “post-coloniale” dans laquelle nous sommes censée vivre, est LE problème vital de notre temps à notre sens car il reflète, recycle et applique sur le terrain toutes les idéologies religieuses, devenues pseudo-scientifiques, de justification de l’oppression du vaste nombre par l’infime minorité.

Il n’y aura pas de changement sociétaire sans une refonte totale de la pensée et de l’attitude occidentales envers le monde en général et de l’occident lui-même en particulier.

Le nœud gordien du problème se situe au cœur même du credo économique de nos sociétés, celui de la propriété privée (à ne pas confondre avec la possession, cf. Proudhon), nous renverrons a ce sujet nos lecteurs aux écrits et démonstrations de Proudhon à ce sujet, car nous nous attacherons ici plus aux phénomènes sociologiques, psychologiques et anthropologiques du problème. Nous nous attacherons ici à montrer que d’un fondement religieux (la chrétienté contre les sauvages et les hérétiques), la raison d’être du colonialisme a glissé vers la pseudo-science une fois la racine religieuse chrétienne tombée en désuétude au XIXème siècle. Quoi qu’il en soit, tout part du même principe, celui d’une suprématie, et du sentiment de supériorité de la civilisation occidentale.

Dans son ouvrage classique et incontournable sur le sujet: “Discours sur le colonialisme” (1955), Aimé Césaire nous dit ceci:

Le grand responsable dans le domaine de la colonisation est le pédantisme chrétien pour avoir posé les équations malhonnêtes:

Christianisme = Civilisation et paganisme = sauvagerie, d’où ne pouvaient que s’ensuivre d’abominables conséquences colonialistes et racistes, dont les victimes devaient être les Indiens, les Jaunes, les Nègres.”

Au nom d’un dieu aussi aléatoire qu’oppresseur, l’occident a fait main basse dès la fin du XVème siècle, sur les terres du nouveau monde et au nom de “l’universalisme” culturel (aujourd’hui devenu “l’humanisme” occidental fondement du “droit d’ingérence” dans les affaires d’autrui…), a massacré, pillé, torturé, mis en esclavage les peuples indigènes aux nouveaux territoires, puis du continent africain et d’une bonne partie de l’Asie. A ce sujet, les écrits à la fois de Christophe Colomb dans son journal et ceux du prêtre, défenseur des indiens, Bartolomé de La Casas, sont formels et sans équivoque: massacres et mise en esclavage furent le lot quotidien au nouveau monde.

Comme l’a fait justement remarquer Nils Andersson, le système colonial est fondé sur six permanences:

  • La primauté du territoire sur les populations
  • L’accaparement des richesses
  • L’évangélisation
  • L’exploitation sociale et humaine des peuples colonisés
  • Le recours à la violence de la guerre et de la répression
  • L’aliénation du colonisé

Si la motivation économique de la colonisation est indéniable, surtout depuis la fin du XVIIIème siècle ; elle ne peut être possible que par une double aliénation.

Celle à la fois du colonisé et du colonisateur. Pour que le concept d’universalisme religieux, revendiqué très tôt par l’Europe, puisse être inculqué, puis lorsque la religion eût faibli, le relais soit pris par le concept d’universalisme culturel, d’humanisme universel de l’occident justifiant le principe d’ingérence toujours de rigueur aujourd’hui, il faut que les esprits de l’opinion soient formatés par une doctrine suprémaciste, que le peuple colonisateur soit convaincu du bien-fondé de la mission à assumer “au nom de l’humanité”. Ainsi la doctrine est simple, elle assume et clâme que l’occident a inventé la science, que de toutes les sociétés, seule l’occident à le pouvoir de penser, que la connaissance est son apanage et le reste du monde n’est qu’une nuit de pensées primitive ne demandant qu’à être éclairée. Nous sommes ici dans l’archétype même de l’ethnocentrisme et de la pensée totale éronnée s’auto- proclamant universelle.

De la même manière, les peuples colonisés doivent-ils être convaincus de la supériorité affirmée de leurs oppresseurs, de leurs bourreaux. Dans un cas comme dans l’autre, ceci relève de la manipulation psychologique totale et n’a aucun fondement scientifique.

Aimé Césaire disait:

Il faudrait d’abord étudier comment la colonisation travaille à déciviliser le colonisateur, à l’abrutir au sens propre du mot, à le dégrader, à le réveiller aux bas instincts enfouis, à la convoitise, à la violence, à la haine raciale, au relativisme moral et montrer qu’à chaque fois qu’il y a au Vietnam une tête coupée et un œil crevé et qu’en France on accepte, une fillette violée et qu’en France on accepte, un Malgache supplicié et qu’en France on accepte, il y a un acquis de la civilisation qui pèse de son poids mort, une régression universelle qui s’opère, une gangrène qui s’installe, un foyer d’infection qui s’étend… et alors, un beau jour, la bourgeoisie est réveillée par un formidable choc en retour: les gestapos s’affairent, les prisons s’emplissent, les tortionnaires inventent, raffinent, discutent autour des chevalets… Avant d’être victime du nazisme on en a été complice, que ce nazisme là on l’a supporté avant de le subir, on l’a absous, on a fermé l’œil dessus, on l’a légitimé, parce que jusque là, il ne s’était appliqué qu’à des peuples non européens…

Le politique primant l’économique (l’État naît de la division de la société en oppresseurs et opprimés indépendamment de l’économique, le clivage est d’abord politique avant d’être économique, comme l’a montré fort à propos l’anthropologue Pierre Clastres dans ses travaux de echerche), colonisés et colonisateurs sont tous deux opprimés par le même schéma d’expression de l’autorité: le tribut. Pour assoir son pouvoir, l’oligarchie a très tôt fait payer le tribut à son peuple, car c’est en faisant payer le tribut que l’oligarchie établie son autorité coercitive et c’est en acceptant de payer le tribut que le peuple se soumet à ses maîtres. Ce tribut s’est ensuite tout naturellement étendu aux territoires colonisés sous la forme de l’exploitation en règle des resssources naturelles et humaines tout autant que du tribut que doivent continuer de payer les colons aux oligarques en place. Le principe de colonisation est en fait un phénomème “à tiroir”, exploitant colons et colonisés (certes à des degrés différents, mais ce n’est qu’une question de degré…) au profit du même tout petit nombre, servi par un lot de fonctionnaires parasites accrochés aux basques du système.

Toute la supercherie réside à faire admettre sur des bases on ne peut plus fragiles, que l’État en première instance est source de loi, sécurité, culture, progrès et égalité (dans sa forme de “démocratie représentative”) et que celui-ci, au nom donc de l’universalisme de la suprématie de la culture occidentale (qui n’est qu’un concept eurocentrique surrané…) représente la lumière qui doit rayonner sur le monde, d’abord à la maison, puis chez les “sauvages” incultes, païens et non-civilisés qui doivent se soumettre.

Ainsi, comme le dit Césaire plus avant: “Entre colonisateur et colonisé, il n’y a de place que pour la corvée, l’intimidation, la pression, la police, l’impôt (note de l’auteur: du tribut…), le vol, le viol, les cultures obligatoires, le mépris, la méfiance, la morgue, la suffisance, la mufflerie, des élites décérébrées et des masses avilies.” Et à ceux qui prétendent et veulent toujours croire que la colonisation c’est: les écoles, les routes, l’éducation, les canaux et les chemins de fer, tous essentiellement bien plus bénéficaires aux colons qu’aux colonisés, Césaire répond:

Moi, je parle de milliers d’hommes sacrifiés au Congo-Océan. Je parle de ceux, qui, à l’heure où j’écris ces lignes (1955), sont en train de creuser à la main le port d’Abidjan. Je parle de millions d’hommes arrachés à leurs dieux, à leur terre, à leurs habitudes, à leur vie, à la vie, à la danse, à la sagesse. Je parle de millions d’Hommes à qui on a inculqué savamment, la peur, le complexe d’infériorité, le tremblement, l’agenouillement, le désespoir et le larbinisme.”

Le dogme colonialiste est fondé sur un eurocentrisme forcené, un délire mythomane déclarant comme l’a souligné Immanuel Wallenstein:

La science sociale européenne était résolument universaliste en affirmant que quoi qu’il se fut passé en Europe du XVIème au XIXème siècles, représentait un schéma qui était applicable partout, soit parce que c’était un résultat progressiste de l’humanité qui était irréversible ou parce que cela représentait l’assouvissement des besoins les plus basiques de l’humanité en enlevant les obstacles artificiels à sa réalisation. Ce que nous voyons en Europe n’est pas seulement bon, mais représente le visage du futur partout […] Quand les colonisateurs français du XIXème siècle parlaient de la ‘mission civilisatrice’, ils voulaient dire que par les moyens de la conquête coloniale, la France, ou plus généralement l’Europe, imposerait aux peuples non-européens les valeurs et les normes qui étaient comprises par ces définitions de la civilisation. ”

Comment colonisé et colonisateur s’accommodent-ils de leur situation ? Comment l’un comme l’autre se satisfont-ils du statu quo imposé ? Ceci relève du domaine psychologique et idéologique. En empruntant beaucoup à la théorie gramscienne de l’hégémonie culturelle et à une vision libertaire, anarchiste de la société, le pédagogue critique brésilien Paolo Freire nous donna en 1970 des éléments de réponse dans son brillantissime ouvrage: “La pédagogie des opprimés”, en analysant de manière critique l’idéologie muselant à la fois colonisé et colonisateur, il devisa une pédagogie de la libération, de l’émancipation culturelle, politique et sociale.

Pour le colonisateur, l’oppresseur, tout lui est dû de par la conviction faite sienne de sa supériorité tant culturelle, que raciale. Citons en exemple Jules Ferry, chantre colonialiste de la IIIème république française, qui disait lors d’une intervention à la chambre des députés en 1885 la chose suivante:

Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! il faut dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures… (il est coupé par d’autres députés indignés, puis reprend) Je répète qu’il y a pour les races supérieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures...” Ceci fut la ligne historique du colonialisme français de la IIIème république qui mena la France dans les méandres de l’ignominie raciste dont elle ne s’est toujours pas défaite aujourd’hui quoi qu’on en dise et veuille le faire croire (cf. le dogme néo-colonial de la Françafrique toujours si vivace…)

Tout devient dès lors objet de sa domination. Freire analyse: “Pour l‘oppresseur, la conscience, l’humanisation de l’autre, n’apparaît pas comme le but d’une humanité totale, mais plutôt comme une subversion.”

Les colonisateurs/oppresseurs ne perçoivent pas leur monopole, leur hégémonie comme un privilège qui déshumanise les autres. Au delà de leur complexe de supériorité raciale, ils affirment avec aplomb qu’avoir toujours plus est un “droit inaliénable”, un droit qu’ils ont acquis par leur “courage à prendre des risques” et que par conséquent si les autres n’ont pas plus, c’est parce qu’ils sont incompétents, paresseux, voire les deux…  Le colon oppresseur va donc se préserver mentalement et physiquement de la “jalousie” du colonisé/oppressé et confronté aux faiblesses évidentes de ce raisonnement, s’enfoncera dans une dissonnance cognitive pathologique.

Ceci implique qu’en retour du complexe de supériorité de l’oppresseur, il y ait un complexe d’infériorité de l’oppressé, du colonisé. Celui-ci existe, ce complexe d’infériorité savamment entretenu du reste à grand renfort de pseudo-science sociale telles que le malthusianisme et le darwinisme social, qui ont débouchés sur des dogmes ethnologiques et sociologiques erronés, depuis démontés par les travaux d’ethnologues modernes tel Pierre Clastres, est une réalité toute aussi pathologique mais pas irréversible.

Les quatre piliers essentiels de l’oppression (dont le colonialisme fait partie…) selon Paolo Freire sont les suivants:

  • La conquête (physique, culturelle)
  • La Division pour mieux régner
  • La manipulation
  • L’invasion culturelle

Notons au passage que ceci peut à la fois se référer au colonisé mais aussi aux membres d’une nation colonisatrice, qui tombent eux-aussi  sous le coup de la domination, celle du consentement et de sa fabrication à grand renfort de propagande et de fausse-science.

Ainsi pour se libérer de la tutelle oppressive, les peuples doivent faire preuve de:

  • Coopération
  • D’unité pour la libération
  • D’organisation
  • De synthèse culturelle

Ainsi Freire et la pédagogie critique nous indiquent que: “L’authentique libération, le processus d’humanisation, n’est pas un autre dépôt fait dans la tête des Hommes. La libération est une praxis, c’est a dire une réflexion et une action des hommes et des femmes sur leur monde avec pour but de le transformer… Ici, personne n’enseigne à personne, personne ne s’auto-instruit. Les gens s’enseignent les uns aux autres, modérés par leur monde, par les objets connus qui dans un système banquier d’éducation, sont détenus par l’enseignant.

A cela vient s’ajouter une chose essentielle, à notre avis, pour garantir le succès de la sortie et de l’éradication du colonialisme sous toutes ses formes et le possible retour à un paradigme de droit égalitaire et de véritable progressisme libre et non dogmatique où tous et toutes y gagneraient et non pas l’habituelle clique de parasites en contrôle ; comme le note très bien Nils Andersson dans son essai “Fondements et permanences du colonialisme”:

Pour sortir du colonialisme au stade d’une ‘mondialisation’ qui est inscrite dans le processus même des conquêtes coloniales, il y a deux démarches obligées:

  • Rompre avec l’aliénation coloniale
  • Créer les conditions pour que les peuples colonisés, ex-colinisés ET les peuples des métropoles mènent des luttes communes.”

Andersson plus loin dit on ne peut plus pertinemment:

Il en est pour le colonisateur comme pour le colonisé. Les peuples victimes du colonialisme doivent se construire, s’émanciper, se libérer de ce passé et du présent néo-colonial, où suppôts des anciens colonisateurs maintiennent leurs peuples sous leur dépendance et celles des anciens maîtres. Mais l’Homme occidental doit lui aussi assumer son histoire, se libérer de sa propre aliénation de colonisateur, il doit lui aussi faire ‘peau neuve’, sans quoi il ne cesse de reproduire son aliénation domintarice et raciste.”

En conclusion de son essai, Andersson rejoint les thèses d’un auteur natif nord-américain (Mohawk de la confédération iroquoise) dont nous présenterons sur ce blog la traduction de larges extraits d’un texte essentiel pour mieux comprendre le colonialisme dont sont victimes toujours aujourd’hui les peuples natifs des Amériques, le professeur de science politique et spécialiste du droit natif Taiaaiake Alfred, lorsqu’il écrit:

Sortir du colonialisme, qui n’est nullement un système archaïque mais est aujourd’hui un constituant du système globalisé c’est, partant de mouvements locaux et nationaux, là où nous sommes, avec nos différences, nos expériences en conjugant nos mouvements, se donner la capacité d’influer sur l’ordre mondial.

Dans quel but ? Celui de nous émanciper, d’échapper au paradigme mortifère induit par une mini-élite dont l’hégémonie culturelle n’a que trop duré. Le salut sociétaire de l’humanité réside dans la libération du dogme suprémaciste parasite et criminel pour enfin vivre égaux, libres et heureux.

Ceci passe immanquablement par le fin du colonialisme, de son avatar néo-colonialiste, du capitalisme et de l’état garde-chiourme, tous instruments d’oppression de la vaste majorité par le petit nombre.

Lorsque l’occident et ses peuples aliénés auront réalisé et transcendé les leurres et les crimes d’un système qui n’a aucun lieu d’être, alors une révolution copernicienne politique et sociale populaire prendra place, la seule qui libèrera le monde à tout jamais.

Nous sommes tous dans le même bateau comme l’a entrevu parfaitement la 6ème déclaration de la jungle de Lacandon en 2005 par l’EZLN zapatiste du chiapas au Mexique:

Les capitalistes essaient de dominer le monde entier, la planète terre, le néolibéralisme est la théorie, le plan, qui fait fonctionner la globalisation, et le néolibéralisme a ses plans économique, politique, militaire, et culturel. L’objectif de chacun de ces plans est de dominer et de commander à tous et ceux qui n’obéissent pas sont réprimés et exclus afin d’éviter qu’ils contaminent les autres avec des idées de rebellion… Des nations très puissantes comme les Etats-Unis veulent tourner le monde en une gigantesqe entreprise, un marché géant pour vendre et acheter tout ce qui est possible et pour cacher l’exploitation faite autour du monde. Voici pourquoi le mouvement zapatiste EZLN dit que la mondialisation néolibérale est une guerre de conquête du monde entier, une guerre mondiale, une guerre déclenchée par le capitalisme pour dominer la Terre entière. Cette conquête est parfois faite par des armées qui envahissent des nations, mais souvent elle est faite avec l’économie, par le système de la dette et en amenant leur culture capitaliste, qui est la culture de la marchandise, du profit et du marché.”

Les oppressés natifs du sud du Mexique ont le dernier mot de la lucidité. Tendons-leur la main, à eux et à tous les colonisés, qui en retour nous aiderons à surmonter notre culpabilité d’avoir réduit le monde à ce triste paradigme mercantile et obscène.

Bibliographie:

  • Aimé Césaire, “Discours sur le colonialisme”, 1955
  • Nils Andersson, “Fondements et permanence du colonialisme, 2011
  • Jules Ferry, “Les fondements de la politique coloniale”, 1885, archives de l’Assemblée Nationale
  • Georges Clémenceau, “La colonisation est-elle un devoir de civilisation?”, 1885
  • Saïd Bouamama, “L’espace mental colonial comme matrice du racisme contemporain”, 2013
  • Immanuel Wallerstein, “Eurocentrism and its Avatars: the Dilemmas of Social Science”, 1997
  • Pierre Clastres, “La société contre l’État”, 1974
  • Paolo Freire, “La pédagogie des oppressés”, 1970
  • Ira Shor & Paolo Freire, “A Pedagogy for Liberation”, 1987
  • Russell Means, “Where White Men fear to Tread”, 1995
  • Taiaiake Alfred, “Peace, Power, Righteousness”, seconde édition, 2009
  • Taiaiake Alfred, “Wasase”, 2005
  • Diane Engelstad & John Bird, “Nation to Nation, Aboriginal Sovereignty and the Future of Canada”, 1992
  • Peter Nabokov, “Native American Testimony”, revised edition 1999
  • Gloria Munoz Ramirez, “Le Feu et le Mot, une histoire du mouvement zapatiste”, 2008

2ème partie