L’article que nous avons traduit ci-dessous est intéressant à nos yeux à deux titres:
1- Il éclaire sur une période pas ou très peu connue du début de l’histoire coloniale de l’Amérique du Nord…
2- Il éclaire également sur une méthodologie narrative qu’on peut légitimement soupçonner de complaisante avec le système colonial toujours en place. En effet, l’auteure tout en dénonçant des malversations coloniales, sème également une sémantique de soumission à l’état colonial toujours en place aux Etats-Unis et au Canada. Nous avons commenté trois exemples distincts dans l’article. Ceci a t’il été fait à dessein ou est-ce le résultat involontaire d’un conditionnement social ? Difficile à dire à la lecture, donnons à l’auteure le bénéfice du doute… Si c’est volontaire, alors ceci peut-être considéré comme un bel exemple de « dissidence contrôlée » dans ce domaine particulier.
~ Résistance 71 ~
Histoire amérindienne: Jour de commémoration, le massacre des Péquots se produisit en 1637
Alysa Landry
26 Mai 2014
url de l’article original:
http://indiancountrytodaymedianetwork.com/2014/05/26/native-history-its-memorial-day-1637-pequot-massacre-happened-155017
~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~
Cette date fait partie de l’histoire amérindienne: le 26 Mai 1637, une force anglaise puritaine renforcée par quelques alliés autochtones, a massacré un campement Péquot dans le Connecticut, tuant quelques 500 hommes, femmes et enfants, brûlant complètement leur village.
L’attaque juste avant l’aube sur le fort Mystique marqua la toute première défaite des Péquots, a éclairé Kevin McBride, professeur d’anthropologie de l’université du Connecticut et directeur de recherche au Mashantucket Pequot Museum and Research Center.
Le massacre marqua également un tournant dans la guerre des Péquots, une guerre de trois ans pour la conquête des terres traditionnelles de la nation, environ 400 km2 dans la partie sud-est de ce qui est aujourdhui le Connecticut et le tout premier conflit important entre les colons et les Indiens natifs de la Nouvelle-Angleterre.
“Pendant les huit premiers mois de la guerre des Péquots, ceux-ci ne perdirent jamais une bataille contre les Anglais”, a dit McBride. “Les Péquots étaient tactiquement bien supérieurs et ce même sans armes à feu. Les Anglais n’arrivaient pas à les comprendre. Jusqu’au massacre de Mystique, les Péquots avaient gagné chaque engagement.”
Le sud-est du Connecticut fut la terre originelle de quelques 8 000 Péquots résidant dans 15 à 20 villages. En réponse à l’arrivée des Hollandais en 1611, la nation Péquot créa une confédération de douzaines de tribus afin de contrôler le commerce des fourrures et renforcer leur pouvoir politique et économique (NdT: cette remarque de l’auteure est typiquement ethno-eurocentrique dans la mesure où les nations amérindiennes n’avaient cure du “pouvoir” qui était dilué dans le peuple et était exercé collectivement dans des sociétés à la chefferie sans pouvoir. Si l’échange était pratiqué, ces sociétés refusaient le concept de “surplus” et refusait toute base “économique” à leur société, non pas parce qu’ils ne “savaient pas”, mais parce qu’ils ne le voulaient pas… nuance… l’arrivée des colons génocidaires blancs changea la donne pour ces sociétés contre l’État, pour reprendre l’expression de l’anthropologue politique Pierre Clastres. Nous nous devions de faire ici cette note qui s’imposait à notre sens pour mieux comprendre l’affaire et son narratif…).
Jusqu’à l’arrivée des Anglais dans les années 1630, les Hollandais et les Péquots contrôlaient le commerce des fourrures de la région. Avec l’addition des colons et commerçants anglais, un déséquilibre se créa. La guerre des Péquots éclata lorsque des nations sous la subjugation des Péquots s’allièrent avec les Anglais. (NdT: Là encore, l’auteure entre en contradiction avec elle-même avec cette déclaration qui impliquerait que les Péquots coercitivement “subjuguèrent”, dominèrent les autres nations autochtones voisines dans une “alliance” donc forcée, alors qu’elle vient juste de dire qu’ils formèrent une confédération, qui par définition est une association LIBRE et non coercitive de quelque manière que ce soit. Personne ne peut être forcé contre son gré dans une véritable confédération…)
Les affaires se compliquèrent lorsque les Péquots tuèrent plusieurs colons et commerçants anglais, a dit McBride. Les Anglais demandèrent que les meurtriers leur soient livrés, la guerre commença lorsque les Péquots refusèrent.
McBride a appelé les Péquots une “société complexe” et la guerre des Péquots est un des évènements le plus controversé et significatif de l’histoire coloniale. L’attaque sur le fort Mystique, qui fut le premier de trois massacres qui se produisirent durant la guerre, changea la façon dont les forces autochtones regardèrent la technique de la guerre (contre les colons).
Le massacre, mené par le capitaine anglais John Mason, fut la première utilisation documentée de “guerre totale” contre les Amérindiens, à savoir que les Anglais massacrèrent tous les Péquots avec lesquels ils vinrent en contact, ne faisant plus aucune distinction entre des hommes armés et des femmes, enfants et personnes âgées sans défense.
“Par quelque standard qu’on étudie l’affaire, ce fut un massacre”, a dit McBride. “Les Anglais y allèrent avec l’intention de tuer tout le monde là-bas, mais ils ne le firent pas pour voler la terre ou pour contrôler le commerce. Ils le firent par peur que les Péquots et leurs alliés natifs n’attaquent les colonies anglaises de toute la région.”
Justifiant sa conduite, la capitaine Mason décara que l’attaque fut un acte de dieu, il écrivit dans sa Brief History of the Pequot War, publiée à titre posthume en 1736:
“Dieu se moqua de ses ennemis et des ennemis de son Peuple et engouffra les Péquots dans une fournaise… Ainsi fut le jugement de dieu parmi les païens, emplissant Mystique de cadavres…”
Le massacre se produisit environ deux heures avant l’aube lorsque 70 soldats anglais et 250 alliés attaquèrent le fort, dit Laurie Lamarre, chercheur au Mashantucket Pequot Museum and Research Center. L’attaque fut inattendue à la fois dans le timing et sa technique, dit-elle.
“C’était le type de guerre anglais et ce fut complètement différent de tout ce qu’ils avaient expérimenté auparavant”, dit-elle. “Les Péquots, la nation a plus forte de la zone, étaient vaincus”.
Mais les Péquots ne furent pas vaincus sans combattre, dit McBride. Les Anglais perdirent environ 50% de leurs hommes au début de la bataille et ne brûlèrent le fort que lorsqu’ils réalisèrent qu’ils perdaient la bataille.
“Le terme massacre prend la connotation de gens sans défense. Ce que les historiens ne réalisent pas, c’est que les Anglais faillirent perdre cette bataille malgré tout. S’ils n’avaient pas brûlé le camp et coincé les Péquots dans les bâtiments, ils auraient perdu cette bataille.”
Les guerriers Péquots, furieux, se lancèrent aussi à la poursuite des Anglais sur 7 ou 8 km durant leur retraite, dit McBride ; mais le campement était dévasté et le massacre marqua un grand tournant dans l’histoire des Péquots et dans l’histoire native.
“Le massacre eut des implications importantes”, explique McBride, “Ce que firent les Anglais envoya un message très fort en pays Indien: nous avons la volonté politique et les moyens militaires pour forcer notre volonté sur vous, Après la guerre des Péquots, commence la politique d’assimilation. Après cette guerre, il n’y eut plus de tentative de diplomatie: les relations avec les Indiens furent fondées sur la menace militaire.”
Dans les mois qui suivirent, les Anglais massacrèrent deux autres villages Péquots, les 5 juin et 28 juillet. La plupart des Péquots qui survécurent furent vendus comme esclaves ou s’échappèrent pour rejoindre d’autres nations du sud de la Nouvelle-Angleterre.
Mais les Péquots revinrent et une fois de plus sont redevenus une des nations les plus importantes en Amérique du Nord. Dans les années 1970, plus de 300 ans après la guerre des Péquots, les membres de la nation commencèrent à revenir dans la zone d’origine et à restaurer leur terre et communauté.
Au début des années 1980, la nation reçut une reconnaissance fédérale et peu de temps après lança la première phase du Foxwoods Resort Casino, le second plus grand casino du pays.
Note de Résistance 71: Cette conclusion est pathétique et confirme une certaine connivence, affiliation de l’auteure avec le système fédéral colonial. En clair, elle explique, que malgré le passé, ils sont revenus… Ils ont reçu une “reconnaissance fédérale”, c’est à dire qu’ils existent comme toute nation autochtone, sous les auspices du gouvernement colonial fédéral américain (et canadien dans le cas du Canada…) dont ils sont soi-disant les pupilles, que leur “souveraineté” n’est reconnue que tant qu’elle se soumette au gouvernement et lois fédérales et que dans le fond… Bah ! tout çà est de l’historiette ancienne et que donc les Péquots et tout autre nation autochtone, doivent tourner la page et exister sous le joug fédéral en acceptant la “manne” des casinos accordée ; réduisant ainsi en une conclusion lapidaire le sort et la destinée des nations et peuples originels à n’être plus que des “sujets” soumis, profitant des casinos (et de la vente de cigarettes détaxées), gérés par la mafia des “conseils de tribus” inféodés au Bureau des Affaires Indiennes (BIA) et à la loi et politique fédérale sur les Indiens. Cette conclusion est somme toute insultante pour les Péquots et autres nations et peuples amérindiens.
Cet article est assez typique de l’ambivalence de bien des Amérindiens et des non-autochtones qui parfois se font portes-parole, ils assènent quelques coups au système, mais se gardent bien d’en faire trop… L’auteure prend en apparence une position rebelle, mais par son phrasé même, trahit son attitude du politiquement correct. Un cas d’école ! Est-ce volontaire ou le résultat d’un conditionnement social ? Donnons-lui le bénéfice du doute.