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France et colonialisme: Tout colonialisme est ethnocidaire et génocidaire, pourquoi le colonialisme français serait-il différent ?

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, documentaire, France et colonialisme, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, média et propagande, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, politique et lobbyisme, politique et social, politique française, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , on 6 janvier 2014 by Résistance 71

La France et l’esclavage, la France et le colonialisme, sont deux choses avec lesquelles peuple, politiques et intelligentsia se rejoignent souvent dans la dissonance cognitive qui les accompagne, en cela dûment induite par la propagande oligarchique.

Le colonialisme français a été aussi ignoble et meurtrier que les autres, la clef de notre futur est de le reconnaître et de nous en débarrasser, parce que nous ne l’avons toujours pas fait. L’auteure de l’article nous dit au premier paragraphe que la « la France ne possède plus de colonies à moins que vous ne désigniez par-là la Corse ; ce dont je doute. » Ceci est en fait erroné, que dire en effet des DOM-TOM ?… Des terres françaises « naturelles » par leur géographie ?… La France est toujours un pays colonial et cela doit cesser. Le grand mouvement planétaire de soutien aux peuples colonisés, bafoués, humiliés et massacrés durant plus de cinq siècles de vol, de viol, de pillage et de crimes impunis, prend une ampleur inégalée, qui verra bientôt naître une véritable résurgence humanitaire dans son universalité égalitaire.

« Aucune armée ne peut venir à bout d’une idée dont l’heure est venue » (Victor Hugo)

— Résistance 71 ~

 

Droit de Réponse à Marion Maréchal Le Pen

 

Farida Bemba Nabourema

 

5 janvier 2014

 

url de l’article:

http://www.legrandsoir.info/droit-de-reponse-a-marion-marechal-le-pen.html

 

« Dans nos colonies, nous n’avons jamais appliqué l’Apartheid. On peut en faire une fierté «  (Marion Maréchal Le Pen)
Mlle Le Pen, je peux écrire 1000 tomes d’un livre d’1 million de pages chacun pour vous relater la politique nauséabonde de votre chère France dans ses anciennes colonies… Je peux peindre avec le sang des dizaines de millions personnes que la France a bombardées, fusillées, pendues, trempées dans de l’acide, brulées vives, décapitées, enterrées vivantes, chacun des millions de murs en France, et toujours manquer de place pour y peindre les larmes qu’ont fait couler et continue à faire couler votre France dans ses anciennes colonies…

Mlle Marion Le Pen, je souhaiterais avant tout vous informer que la France ne possède plus de colonies à moins que vous ne désigniez par-là la Corse ; ce dont je doute.

Depuis de nombreuses années que je tombe à chaque fois par hasard sur les déclarations des membres de votre parti le Front National, et plus précisément de ceux de votre famille à savoir votre grand-père Jean-Marie Le Pen et votre tante Marine Le Pen, je n’ai jamais jugé bon de répondre aux multiples inepties que vos proches ont tendance à pondre. Mais cette fois, suite à votre déclaration incongrue qui sans nul doute affiche votre ignorance béante de ce pays que vous prétendez représenter à l’Assemblée Nationale, j’ai décidé de vous répondre car je n’ose pas croire que vous êtes une imbécile pour vous répondre par mon silence comme j’en ai pris l’habitude avec votre tante Marine.

Mlle Marion Le Pen, par cette déclaration « Dans nos colonies, nous n’avons jamais appliqué l’Apartheid. On peut en faire une fierté » que vous aviez faite sur BFM TV le 16 Décembre dernier lors d’une émission au cours de laquelle vous sembliez rendre hommage à Nelson Mandela, ce monsieur que votre « papy Jean Marie » traitait affectueusement de « terroriste » dans les années 80, vous ne m’avez point choquée car je sais que la France dans laquelle vous aviez grandi ne vous a jamais appris dans ses écoles, les horreurs qu’elle a commises dans ses anciennes colonies.

Vous êtes de cette génération à qui la France ment et à qui la France cache son linge sale que vous avez pourtant le devoir de laver afin de réduire le degré de haine et de dégout que ressentent ceux-là que votre pays dont vous êtes si fière a humiliés, déshumanisés, torturés, exploités, opprimés, réprimés et continue de martyriser. Comment pouvez-vous laver le linge sale de votre chère France si durant toute votre vie, les gens, comme votre grand-père, qui avaient soutenu l’Apartheid, ont passé leur temps à vous faire croire que la France n’a fait qu’aider les « autres » à se « civiliser ». Oui, la civilisation de la sauvagerie et de l’avilissement !

Mlle Le Pen, à 24 ans, vous êtes la plus jeune députée de France, et étant votre cadette de quelques mois seulement, je peux donc conclure que vous et moi sommes de la même génération et pourrai alors dire qu’à cet âge et avec le poste que vous occupez, vous devriez connaitre la vraie histoire de votre pays la France… si et seulement si vous eûtes fait preuve de moins de paresse intellectuelle en ne vous contentant pas que des histoires que vous raconte « Papy Jean-Marie » mais hélas ! Je vais donc vous rendre un très petit service en parcourant avec vous quelques-unes des politiques de la France dans ses anciennes colonies qui étaient pires que l’Apartheid en Afrique du Sud.

Avant tout, laissez-moi vous rappeler que vos ancêtres font partie de cette espèce d’êtres humains qui ont jugé noble d’acheter, de vendre d’opprimer et de massacrer d’autres êtres humains. Le Code Noir qui désigne l’ensemble de textes juridiques codifiant la vie des esclaves noires dans les anciennes colonies françaises (Indes françaises) est ordonné par le roi Louis XIV en 1685. Dans ce code, l’un des rois les plus adulés des « français de souches » comme vous Mademoiselle, a tout simplement animalisé les Noirs (pratique que des membres de votre parti telle qu’Anne-Sophie Leclère continuent) et dénigré d’autres peuples pour le simple fait que ceux-ci avaient une couleur de peau ou pratiquaient une religion différente de la vôtre.

L’article 1er du Code Noir nous dit :

« Voulons que l’Édit du feu roi de glorieuse mémoire, notre très honoré seigneur et père, du 23 avril 1615, soit exécuté dans nos îles ; se faisant, enjoignons à tous nos officiers de chasser de nos dites îles tous les juifs qui y ont établi leur résidence, auxquels, comme aux ennemis déclarés du nom chrétien, nous commandons d’en sortir dans trois mois à compter du jour de la publication des présentes, à peine de confiscation de corps et de biens. »

Le Code Noir chère Mlle Le Pen est le fondement même des systèmes de ségrégation raciale et raciste comme l’Apartheid et l’on peut dire que les Boers d’Afrique du Sud se sont inspirés de la cruauté de vos ancêtres pour établir une version beaucoup plus diluée du Code Noir en Afrique du Sud. De la même manière que les Noirs étaient interdits de se regrouper durant l’Apartheid, Le Code Noir stipule dans son article 16 :

« Défendons pareillement aux esclaves appartenant à différents maîtres de s’attrouper le jour ou la nuit sous prétexte de noces ou autrement, soit chez l’un de leurs maîtres ou ailleurs, et encore moins dans les grands chemins ou lieux écartés, à peine de punition corporelle qui ne pourra être moindre que du fouet et de la fleur de lys ; et, en cas de fréquentes récidives et autres circonstances aggravantes, pourront être punis de mort ».

En Afrique du Sud, bien que les Noirs fussent extrêmement sous-payés, ceux-ci recevaient quand même une compensation, aussi infime soit elle, pour leur travail, et avaient le droit d’exercer certaines petites activités commerciales.

Mais dans l’article 18 du Code Noir, Mlle Le Pen, il est dit ceci : « Défendons aux esclaves de vendre des cannes de sucre pour quelque cause et occasion que ce soit, même avec la permission de leurs maîtres, à peine du fouet contre les esclaves, de 10 livres tournois contre le maître qui l’aura permis et de pareille amende contre l’acheteur. » car vos ancêtres voulaient absolument éviter que les Noirs ne disposent de ressources financières qui risqueraient de leur permettre d’acheter leur liberté à leurs maitres comme c’était le cas dans certaines colonies britanniques et portugaises.

Dans les anciennes colonies françaises, les esclaves ne pouvaient même pas rêver acheter leur propre liberté. Durant la période de l’esclavage, de nombreux historiens révèlent que plus d’un million de Noirs ont été massacrés dans les colonies françaises seules. Vous me répondrez peut être que la République Française et plus précisément la 5ème République du héros Charles De Gaulle n’a rien à avoir avec cette France esclavagiste. Et bien c’est vrai ! Votre 5ème République Française est pire que la France de Louis XIV : elle est la France de la barbarie pure et simple.

Mlle Le Pen, serez-vous toujours fière de votre chère France en apprenant que celle-ci a massacré froidement et sans remords 120 mille camerounais en trois ans, de 1959 à 1962 pour le simple fait que ceux-ci ont réclamé leur droit le plus inaliénable qui est celui de l’auto-détermination ? Je n’invente pas les chiffres car c’est le journaliste du Monde André Blanchet qui le dit suite à ses enquêtes alors que les camerounais quant à eux parlent de plus de 200 mille morts.

En Algérie, il fut question de 700 mille morts durant cette guerre coloniale que la France niait jusqu’en 1999 et qu’elle désignait affectueusement par « évènements d’Algérie ». Au cours de la guerre d’Algérie, la France de De Gaulle avait créé des camps de concentration qu’elle avait rebaptisés « camp d’internement » dans lesquels elle torturait et abattait sauvagement les arabes qu’elle y emprisonnait. Des milliers de jeunes filles, pour la plupart des adolescentes, ont été arrachées à leurs parents qui furent exécutés, et réduites en esclaves sexuelles que les soldats français, que votre 5ème République a fièrement décoré plus tard, violaient passionnément et collectivement. Certaines des survivantes raconteront plus tard qu’elles étaient violées par au moins 100 soldats en une seule journée. Nombreuses furent celles qui tombèrent enceinte et eurent des « enfants sans père » qu’aujourd’hui vos camarades appellent amicalement « la racaille ».

Mlle Le Pen, comparer l’Apartheid aux bestialités de la France dans ses anciennes colonies est comme comparer une gifle à une décapitation. Loin de moi l’intention de minimiser les exactions du régime de l’Apartheid contre les Noirs d’Afrique du Sud ou encore moins de justifier l’Apartheid mais il est important que je vous apprenne que votre France, dont vous êtes si fière, fut et continue d’être l’une des puissances impérialistes les plus cruelles de l’histoire de l’humanité.

Dans mon pays le Togo, durant la conquête coloniale, les soldats français ont coupé les deux pouces à l’aide d’une hache, aux guerriers de l’ethnie Konkomba qui résistaient à l’occupation française munis de leurs arcs et flèches.

Mlle Le Pen, s’il vous est difficile d’imaginer la douleur que ces milliers d’hommes ont ressenti, je me propose de vous faire cette expérimentation mais malheureusement j’ai peur d’abimer vos maigres doigts qui n’ont surement jamais tenu une houe et un coupe-coupe de leur existence. C’est avec ces outils rudimentaires que des millions d’Africains ont cultivé des centaines de milliers d’hectares de force pour épargner la famine à votre peuple avant, pendant et après les deux guerres mondiales et la crise économique de 1929 qui ont rendu la France plus pauvre et plus féroce qu’elle ne l’était déjà .

Votre pays la France a établi après l’abolition de l’esclavage et bien entendu du Code Noir, un autre code cordialement appelé « Le Code de L’Indigénat ». Ce code qui fut adopté en Juin 1881 et imposé aux peuples des colonies françaises en 1887, « distinguait deux catégories de citoyens : les citoyens français (de souche métropolitaine) et les sujets français (les indigènes). »

Ce complexe de supériorité qui régente votre peuple et que votre parti ne cesse de témoigner à travers ses discours provocateurs vous donne le droit d’appeler les autochtones des pays que vous êtes partis piller, des « indigènes ». Ce code de l’indigénat réduisait de nouveau les Noirs à l’esclavage ; rebaptisé en « travaux forcés ». Dans les anciennes colonies françaises, les Noirs devaient travailler de force pour la France sans compensation aucune. Certains avaient le devoir de cultiver le café, le cacao, le coton et autres produits agricoles qui ne peuvent jamais germer sur votre pauvre sol français.

D’autres devraient quant à eux construire les chemins de fer et les wharfs qui devraient permettre à la France d’exporter les produits qu’elle volait aux colonies et d’autres enfin, devraient servir les administrateurs de colonies comme hommes de chambres, cuisiniers, vaguemestres, coursiers etc. La punition était les coups de fouet, l’amputation, ou la mort pour ceux qui voulait résister à la bestialité française. Entre 1908 et 1909, plus de 1500 « infractions » au Code de l’Indigénat ont été réprimées au Congo-Brazzaville seul et « en 1928, Albert Londres journaliste au Petit Parisien » découvre que la construction des voies ferrées ou les exploitations forestières provoquent un nombre effroyable de morts parmi les travailleurs africains du Sénégal au Congo et dans son article il écrira ceci : « Ce sont les nègres des nègres. Les maîtres n’ont plus le droit de les vendre. Ils les échangent. Surtout ils leur font faire des fils. L’esclave ne s’achète plus, il se reproduit. C’est la couveuse à domicile. »

La répression dans les colonies françaises était si aigüe que des millions de personnes ont fui leurs villages pour s’installer dans les colonies britanniques. Robert Delavignette haut fonctionnaire, directeur de l’École de la France d’outre-mer et spécialiste des questions coloniales a rapporté la migration de plus de 100,000 Mossis de la Haute Volta (actuelle Burkina Faso) à la Gold Coast britannique (actuel Ghana). Le journaliste Albert Londres quant à lui, révéla aussi que plus de 600,000 personnes ont fui les colonies françaises d’Afrique de l’ouest vers la Gold Coast et plus de 2 millions ont fui les colonies d’Afrique centrale et une partie de l’Ouest vers le Nigeria qui était aussi une colonie britannique. La barbarie inouïe des colonisateurs français était insupportable aux « indigènes » qui ont préféré la domination britannique à la domination française. Ne dit-on d’ailleurs pas « qu’entre deux maux il faut choisir le moindre ? »

Cependant, notez-bien Mademoiselle que la cruauté de cette France dont vous êtes si fière ne s’est pas arrêtée là. Afin de combler le vide dans ses colonies que les populations désertaient du faite de sa répression intense, la France « exportait » de force, comme des troupeaux, les Africains d’un pays à un autre pour les faire travailler dans ses plantations. Des milliers de personnes ont été parachutées de la Cote d’Ivoire à la Centre Afrique, du Sénégal au Congo et j’en passe.

Et quand ces dernières se sont décidées à obtenir leurs liberté de la France et à mettre fin à leur exploitation, domination, oppression et répression, la France les a massacré comme au Cameroun, en Algérie ou encore au Madagascar ou plus de 100,000 Malgaches ont été massacrés par les soldats français suite à leur soulèvement en 1947.

Mlle Le Pen, je peux écrire 1000 tomes d’un livre d’1 million de pages chacun pour vous relater la politique nauséabonde de votre chère France dans ses anciennes colonies. Je peux également passer des années à réciter les exactions commises par votre adorable France dans ses anciennes colonies qui surpassent de très loin ce que les Noirs d’Afrique du Sud ont connu avec les Boers. Je peux peindre avec le sang des dizaines de millions personnes que la France a bombardées, fusillées, pendues, trempées dans de l’acide, brulées vives, décapitées, enterrées vivantes, chacun des millions de murs en France, et toujours manquer de place pour y peindre les larmes qu’ont fait couler et continue à faire couler votre France dans ses anciennes colonies.

Et pour finir, notez pour votre gouverne que les Mandela de ces anciennes colonies à savoir Toussaint Louverture, Sylvanus Olympio, Ruben Um Nyobé, Barthélémy Boganda, Félix Moumié, Outel Bono, Modibo Kéita, Marien N’Gouabi, Ali Soilih, Mahamoud Harbi Farah, Germain Mba, Aline Sitoé Diatta, Thomas Sankara pour ne citer que ceux-la, ont été exécutés par cette France dont vous êtes si fière.

Ne venez surtout pas Mademoiselle remuer le couteau dans notre plaie qui refuse de guérir parce que des ignares se permettent à chaque fois de débiter des sordidités comme vous le faites.

Farida Nabourema, Washington, le 19 Décembre 2013.

 http://faridabemba.over-blog.org/article-droit-de-reponse-a-marion-mar…

 

Ingérence politique: La cour pénale international outil de la recolonisation de l’Afriquee

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La Cour Pénale Internationale (CPI): Une machine de guerre occidentale pour la recolonisation de l’Afrique

 

Luc Michel

 

2 Octobre 2013

 

url de l’article:

http://www.alterinfo.net/LA-CPI-UNE-MACHINE-DE-GUERRE-OCCIDENTALE-POUR-LA-RECOLONISATION-DE-L-AFRIQUE_a95390.html

 

Le cas Blé Goudé (Côte d’Ivoire) :

Réquisitoire contre la CPI et la pseudo justice internationale

 

PCN-SPO / Focus / 2013 10 01 /

Focus : Le fait du jour décrypté par Luc MICHEL

pour le Service de Presse du PCN / PCN-SPO

 

Lu sur le Fil de Belga (Bruxelles)

Ce 1er octobre 2013 :

« Côte d’Ivoire: mandat d’arrêt de la CPI contre Charles Blé Goudé.

La Cour pénale internationale a rendu public mardi un mandat d’arrêt contre un troisième suspect des violences postélectorales ayant déchiré la Côté d’Ivoire en 2010 et 2011: Charles Blé Goudé, chef des « jeunes patriotes » ivoiriens et proche de l’ancien président Laurent Gbagbo » …

# Les juges ont en effet décidé de lever les scellés apposés au mandat d’arrêt, initialement émis le 21 décembre 2011. Car, comme les tribunaux politiques du IIIe Reich nazi où les Cours spéciales de Vichy, la pseudo CPI émet des mandats d’arrêt et des inculpations secrètes. Monstruosités juridiques !

 

Intervient ici la « gaffe d’Abidjan ». Où une manipulation du camps Ouattara ? L’annonce de la CPI pourrait être liée, selon l’AFP, à la « gaffe » du ministre de la Justice ivoirien, Gnénéma Mamadou Coulibaly, qui avait annoncé il y a dix jours que « Charles Blé Goudé (faisait) effectivement l’objet d’un mandat d’arrêt », ce que ni le gouvernement ivoirien ni la CPI n’avaient jusqu’alors souhaité confirmer.

LA CIBLE BLE GOUDE

Ex-ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo et chef des « jeunes patriotes », activistes pro-Gbagbo, Blé Goudé avait été arrêté le 17 janvier 2013 au Ghana après plus d’un an et demi de cavale et extradé dès le lendemain vers la Côte d’Ivoire, où il est détenu. Après Laurent Gabgbo et son épouse Simone, il est le troisième suspect à faire l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI pour les violences ayant fait plus de 3.000 morts des deux côtés à la suite de l’élection d’Alassane Ouattara, contestée par le président sortant Laurent Gbagbo. La CPI « soupçonne » Charles Blé Goudé, 41 ans, de « quatre chefs de crimes contre l’humanité, à savoir meurtre, viol, persécution et autres actes inhumains, commis entre le 16 décembre 2010 et le 12 avril 2011 ».

Dans le mandat d’arrêt, les juges aux ordres des USA et de l’OTAN – car c’est bien cela –« estiment qu’il y a des motifs raisonnables de croire (sic) que Charles Blé Goudé recevait des instructions de la part de Laurent Gbagbo, qui le consultait également sur des questions politiques importantes ». Il aurait exercé un « contrôle conjoint sur les crimes, dans la mesure où il avait un pouvoir de contrôle et donnait des instructions directement aux jeunes qui étaient systématiquement recrutés, armés, formés et intégrés à la chaîne de commandement des Forces de défense et de sécurité ivoiriennes (FDS) », selon la même source. Selon les juges, il est également « raisonnable de croire » (resic) que « les attaques lancées par les pro-Gbagbo ont été menées dans le cadre d’un plan commun, pensé par Laurent Gbagbo et son entourage, auquel appartenait Charles Blé Goudé ».

LIQUIDER POLITIQUEMENT LE CAMPS GBAGBO

Le président Laurent Gbagbo est écroué depuis fin 2011 à La Haye par la CPI, qui le « soupçonne de crimes contre l’humanité ». Début juin, les juges avaient indiqué qu’ils avaient besoin de preuves supplémentaires pour décider de mener ou non un procès à son encontre. La procureur-générale de la CI Dialou, une de ces noirs qui servent l’Occident, avait présenté une prestation lamentable et faible. Et les avocats de Gbabdo l’avaient mise en difficulté, notamment lors de la présentation comme preuves truquées de photos prises dans un autre pays africain …

Son épouse Simone fait elle aussi l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI, mais Abidjan refuse de la remettre à la Cour, au motif que la justice ivoirienne est désormais en capacité d’assurer équitablement son procès.

Considéré par des ONG internationales occidentales, ce bras armé pseudo humanitaire de l’impérialisme et du néocolonialisme, comme « responsable de nombreuses violences », Charles Blé Goudé, surnommé « général de la rue » ou encore « ministre de la rue » pour sa capacité de mobilisation populaire, avait régulièrement été cité comme une cible possible de la CPI.

LE REGIME OUTARRA ET SA JUSTICE DES VAINQUEURS

Dans une période post-conflit où le régime de Ouattara est accusé de pratiquer une « justice des vainqueurs », aucune figure de son camp n’ayant été inquiétée par la CPI, les ONG occidentales aux ordres ou les médias de l’OTAN, pour les graves crimes commis par ses milices durant la dernière crise, la réaction d’Abidjan sera scrutée par l’opposition.

Le dilemme de Ouattara est bien exposé par l’AFP : « Livrer l’ex-chef des Jeunes patriotes à la juridiction internationale serait très mal vu en période de réconciliation nationale. Mais ne pas le faire, au motif que la justice ivoirienne est désormais compétente pourrait valoir à la Côte d’Ivoire de fortes critiques de la communauté internationale ».

Roselin Bly, président intérimaire du « Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples » (COJEP), fondé par M. Blé Goudé et organisation clé de la galaxie des « patriotes », a assuré à l’AFP que « ce mandat d’arrêt est inopportun dans un contexte où le gouvernement pro-Gbagbo ivoirien vient de refuser le transfèrement de Simone Gbagbo ». « Si le gouvernement ivoirien affiche sa claire intention de juger ses compatriotes sur son sol, comment comprendre un nouveau mandat d’arrêt contre un autre proche de Gbagbo? », a interrogé M. Bly, avant de répondre fort justement : « la CPI encourage la manifestation de la justice des vainqueurs ».

LA CPI RECLAME BLE GOUDE A UN MOMENT CRITIQUE POUR ELLE

Le mandat d’arrêt de la CPI intervient à un moment critique, à plus d’un point, pour la CPI. En effet, le pseudo tribunal fantoche de l’OTAN fait face à la fois à un mouvement de révolte des états africains. Mais aussi, séquelle du chaos instauré par l’OTAN dans la Libye post Kadhafi, à un défi lancé par les ex-alliés de l’Alliance – la milice islamiste de Zinten – et par ses domestiques de Tripoli. Qui refusent de livrer à la CPI (1) le fils de Kadhafi Saïf al-Islam, que Tripoli entend juger en Libye et que ses geôliers de Zinten refusent de livrer.

L’Union Africaine organise en effet un sommet spécial en ce mois d’octobre pour aborder un « retrait en masse » de la Cour Pénale Internationale, « en signe protestation envers les procès des dirigeants kényans ». Une lettre envoyée par les dirigeants africains à la CPI explique que la présence du vice-président kényan William Ruto à son procès à La Haie allait désavantager le Kenya.

L’Union Africaine avait déjà accusé avec une raison absolue la CPI de « chasser des dirigeants africains » et « d’ignorer les atrocités commises ailleurs ».

La CPI répond sans rire « qu’elle défend les victimes de crimes où qu’elles soient » (sic).

Le sommet extraordinaire se tiendra dans la capitale ethiopienne Addis Abeba, siège de l’UA, le 13 octobre. Se retirer ou non du Statut de Rome « sera une décision prise par chaque Etat individuellement, l’UA n’interviendra en aucun cas dans cela », a précisé le vice-président de la Commission de l’UA Erastus Mwencha. Le sommet pourrait cependant marquer le début d’un exode des Etats africains parties à la Cour. 34 des 54 pays membres de l’Union Africaine ont ratifié le traité de la CPI.

Quelques jours avant le début du procès de William Ruto à la CPI en septembre dernier, le parlement kényan avait voté un retrait de la CPI. Ce vote n’affectera cependant pas le procès de M.Ruto, ni celui du president kényan Uhuru Kenyatta en novembre. Tous deux sont poursuivis « pour crimes contre l’humanité pour leur rôle présumé dans les violences ethniques ayant déchiré le Kenya après l’élection présidentielle de 2007 » (2).

QUE SONT VRAIMENT LA CPI ET SES PREDECESSEURS LES PSEUDO TPIY ET TPIR ?

La CPI a eu deux prédécesseurs : le TPIY – Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (instauré illégalement par le Conseil de sécurité, qui n’en avait pas la compétence et au Moment où la Troisième Yougoslavie, démembrée en 2003, existait encore) – et le TPIR – Tribunal pénal international pour le Rwanda (après le génocide).

Le TPIY a été une machine de guerre de l’OTAN contre ses ennemis : la troisième Yougoslavie de Milosevic et son coeur la Serbie. J’ai bien connu le TPIY que j’ai longuement combattu de 2001 à 2006 en compagnie du regretté Jacques Vergès (3). J’ai même mené avec Me Vergès le seul débat public ayant jamais opposé les porte-paroles officiels du TPI et ses adversaires sur la chaîne de télévision « LCP-PUBLIC SENAT » (Paris) et qui tourna à la défaite des domestiques de l’OTAN (4).

Pendant toute son action, les magistrats aux ordres du TPIY ont servi de bélier à l’OTAN pour déstabiliser Belgrade, épargnant les criminels de guerre de Zagreb et Sarajevo. Sans oublier les crimes de guerre de l’OTAN – le TPIY a déclaré irrecevables tous les recours contre les généraux de l’Alliance – et ceux des mafieux de l’UCK kosovare. Y compris comme l’a reconnu l’ex procureur-général du TPIY Carla Del Ponte en fermant les yeux sur un trafic d’organes à grande échelle impliquant l’actuel premier ministre kosovar, grand ami des BHL, Kouchner et autres général Clark (5).

Le TPIY a lancé la chasse à l’homme contre les Serbes et protégé les crimes des mafieux kosovards, des milices et généraux fascistes croates et des islamistes radicaux bosniaques. Elle a fait mourir le Président yougoslave Milosevic, malade et sans traitement approprié, dans ses geôles de La Haye. Aller voir les condamnations des rares dossiers non-serbes et celles des politiciens et officiers yougoslaves ou serbes et comparez ! Ces magistrats indignes ont laissé pendant des années les mafieux de l’UCK albano-kosovare enlever des prisonniers serbes, les dépecer vivant et vendre leurs organes. Del Ponte attendra d’avoir quitté le TPIY – et cherchant sans pudeur ni vergogne de la publicité pour son livre de mémoires – pour dénoncer ce crime de guerre islamiste. C’est un Suisse, honorable celui-là, Dick Marty qui a mené l’enquête et dévoilé le honteux scandale dissimulé par le TPIY et ses maîtres de l’OTAN.

Le jumeau maléfique du TPIY, le TPIR a lui servi surtout à protéger les têtes et les complices du génocide rwandais : la Françafrique et l’Elysée, le roi Baudouin Ier et la Belgique, la mafia catholico-sectaire du Renouveau Charismatique (auquel appartenait la Cour belge et les dirigeants génocidaires rwandais), l’ONU qui a laissé faire … Des petites têtes sont tombées certes, poudre aux yeux et rideau de fumée pour dissimuler les vrais coupables et les vrais responsables.

Puis est arrivé la pseudo CPI. Digne successeur des deux autres. Machine à poursuivre uniquement les Africains. Et pas n’importe lesquels mais les seuls adversaires de Washington et de l’OTAN : les Kadhafi, le président soudanais, Kenyatta, le camps Gbagbo, et j’en passe …

On notera encore que cette imposture qui sert si bien les USA ne les concerne pas. Il n’ont pas signé le traité. Et pire ont voté des lois spéciales, à compétence universelle car Washington entend imposer illégalement et illégitimement ses lois au monde – qui excluent ses généraux, ses soldats et ses mercenaires du ressort de la CPI. Hypocrisie que cautionnent sans limite les médias de l’OTAN !

Le cas Blé Goudé est aujourd’hui, après tant d’autres, le symbole de la fausse justice impérialiste internationale. Un cas de trop au moment où la question du retrait des états africains de la CPI se pose plus que jamais ?

 

Luc MICHEL

 

http://www.lucmichel.net/2013/10/01/luc-michel-focus-la-cpi-une-machine-de-guerre-occidentale-pour-la-recolonisation-de-lafrique/

 

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# Notes et renvois :

 

(1) Sur le bras de fer CPI – Tripoli, cfr. :

Luc MICHEL, ELAC & ALAC / CPI VERSUS TRIPOLI SUR LE PROCES DE SAIF AL-ISLAM KADHAFI: FARCE JUDICIAIRE ET CHANTAGE ENTRE AUXILLIAIRES DE L’OTAN AU MILIEU DU CHAOS LIBYEN !,

Sur : http://www.lucmichel.net/2013/09/19/elac-alac-cpi-versus-tripoli-sur-le-proces-de-saif-al-islam-kadhafi-farce-judiciaire-et-chantage-entre-auxilliaires-de-lotan-au-milieu-du-chaos-libyen/

Et Luc MICHEL, ELAC & ALAC / RAPPORT: CHASSE AUX SORCIERES ET TRIBUNAUX FANTOCHES CONTRE LES DIRIGEANTS KADHAFISTES ET SAIF AL-ISLAM DANS LA LIBYE OCCUPEE DE L’OTAN,

Sur : http://www.lucmichel.net/2013/09/19/1373/

 

(2) Sur le dossier Kenya versus CPI, cfr.

Luc MICHEL, KENYA REPORT 2013 / LA PRESIDENTIELLE 2013 SOUS HAUTE TENSION,

Sur : http://www.eode.org/eode-think-tank-kenya-report-2013-la-presidentielle-2013-sous-haute-tension/

 

(3) Nous avions combattu ensemble au sein du « COMITE INTERNATIONAL POUR LA DEFENSE DE SLOBODAN MILOSEVIC » (ICDSM) (*) – dont il était le Conseil et moi le président -, étroitement de 2002 à 2006, organisant entre La Haye et Paris, la défense du Président Milosevic détenu dans les geôles de l’OTAN – dont le pseudo TPI n’est qu’un appendice honteux – à La Haye. Le combat pour Milosevic fut long et difficile. Parce que nous devions combattre sur tous les fronts : contre les médias de l’OTAN, la machine du TPI, les médiamensonges. Mais aussi contre un ennemi intérieur, des militants trotskistes et sionistes, à New-York et aux Pays-Bas, infiltrés dans nos rangs et qui sabotaient sans cesse notre action, semant la zizanie …

Sur l’ICDSM, cfr. Les NOTES de :

Luc MICHEL, Luc MICHEL, IN MEMORIAM JACQUES VERGES 1925-2013,

http://www.lucmichel.net/2013/08/16/luc-michel-in-memoriam-jacques-verges-1925-2013/

 

(4) Emission « Paroles d’Europe » sur LCP SENAT. Une émission présentée par Caroline de Camaret et « destinée à mieux faire connaître les enjeux européens et l’impact de la construction européenne sur la vie quotidienne des Français.

En direct le lundi 8 avril 2002, sur le thème « FAUT-IL JUGER MILOSEVIC ? ».

Avec Luc MICHEL(ICDSM), Christian CHARTIER, porte-parole officiel du TPI, Maître Jacques VERGES, avocat de Slobodan Milosevic, Patrick BAUDOIN, président d’honneur de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme.

 

(5) Cfr. Luc MICHEL, FOCUS/ IMPERIALISME HUMANITAIRE : REVOILA KOUCHNER ET CARLA DEL PONTE SUR LA SYRIE !,

sur : http://www.syria-committees.org/luc-michel-focus-imperialisme-humanitaire-revoila-kouchner-et-carla-del-ponte-sur-la-syrie/

Guerre et ingérence en Syrie: Le colonialisme franco-britannique au bout du rouleau…

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Si l’analyse de Meyssan est pertinente dans la conjoncture géopolitique actuelle, elle ne peut que nous (re)confirmer une chose qui s’impose comme de plus en plus évidente: Les États et leur système d’oppression perpétuelle d’une manière ou d’une autre, sont totalement obsolètes… Le monde est entré dans une prise de conscience massive qu’il y a un avenir sans l’État et son appareil inéluctable de domination, de colonialisme ouvert ou feutré, de répression et de violence perpétuelle. La vision d’un monde plus politiquement et socialement juste et équitable est en train d’émerger de l’empirisme des peuples. Jamais on a autant parlé d’autodétermination, d’autogestion, comme en Amérique du sud et en occident. 

La seule façon de tuer le colonialisme, c’est de tuer l’État, dont la fonction n’est que de garantir les privilèges du petit nombre, ceci est historiquement établi, quel que soit la forme de gouvernement que prend ce « plus froid des monstres froids », pour reprendre le qualificatif de Nietzsche.

— Résistance 71 —

 

La fin du colonialisme français

 

Thierry Meyssan

 

22 Septembre 2013

 

url de l’article original:

http://www.voltairenet.org/article180329.html

 

Le président Poutine vient d’écrire dans le New York Times que la guerre de Syrie opposait l’État au jihadisme international. Dans le même temps, le président Hollande a affirmé à TF1 qu’il s’agissait d’une guerre pour la démocratie. Le second se trompe, comme le montre la continuation de son raisonnement avec un champ de bataille à trois camps. Derrière ces contradictions rhétoriques, c’est la fin du colonialisme qui se joue.

Les États-Unis et la Russie sont convenus, lors de la conférence de Genève 1, en juin 2012, de se partager le Proche-Orient sur les décombres des accords Sykes-Picot de 1916. Ce que l’on présentait comme une volonté de trouver une paix juste et durable signifiait en réalité à la fois revenir à un monde bipolaire comme à l’époque de l’Union soviétique, et exclure les Britanniques et les Français de la région.

Ce projet pouvait sembler illusoire. Pourtant, quatorze mois plus tard, il trouve un début de réalisation.

Jusqu’à présent, les Européens avaient bien joué. En novembre 2010, Nicolas Sarkozy et David Cameron signaient le Traité de Lancaster House par lequel leurs deux pays mettaient en commun leurs forces de projection, c’est-à-dire leurs forces coloniales. Comme convenu avec Washington, les deux États attendaient le début du « printemps arabe » pour fomenter des troubles en Libye et en Syrie. À leurs agents libyens, ils donnaient le drapeau de l’ancien roi Idriss, collaborateur des Britanniques. Tandis qu’à l’Armée syrienne libre, ils donnaient le drapeau du mandat français. Il suffisait de voir leurs symboles pour comprendre que ces mouvements prétendument révolutionnaires étaient des fabrications des anciens occupants.

Avec l’aide du Qatar et de l’Arabie saoudite, ils arrivaient à semer la confusion dans les deux pays. Une partie des oppositions à Moammar el-Kadhafi et à Bachar el-Assad se ralliaient un temps avec les jihadistes de l’Otan. Cependant, si la Jamahiriya libyenne succomba sous les bombardements, faute d’alliances internationales, la Syrie ne fut pas bombardée et résista. La question n’était plus de renverser les institutions, mais de choisir son avenir. Progressivement les malentendus se dissipèrent. Aujourd’hui, comme dans toutes les guerres, il ne reste que deux camps : l’État laïque d’un côté, contre le jihadisme international de l’autre.

De la même manière, durant la Seconde Guerre mondiale, Charles de Gaulle fut isolé lors de son appel du 18 juin 1940. Très peu de Français lui répondirent, soit qu’ils pensaient la guerre perdue avant d’être commencée, soit qu’ils ne supportaient pas son caractère autocratique. Pourtant, quatre ans plus tard, il rassembla derrière lui 95 % des Français, d’une part parce qu’il les conduisait à la victoire et d’autre part parce qu’il avait su fédérer autour de lui les différentes sensibilités politiques.

Alors qu’aujourd’hui le président el-Assad rassemble derrière lui l’immense majorité des Syriens, la France ne sait plus que faire. Dans un entretien à TF1, le président François Hollande a prétendu que cette guerre avait pour but la démocratie. Selon lui, les Occidentaux devraient donc porter au pouvoir à Damas les démocrates syriens, c’est-à-dire précisa-t-il ni Bachar el-Assad, ni les jihadistes. Cette analyse absurde revient à dire que sur le champ de bataille, il y aurait trois camps. La vérité est qu’il n’y en a que deux et que les démocrates se sont rangés du côté de l’État syrien, c’est-à-dire avec le président el-Assad.

C’est au fond là que réside l’enjeu international de cette guerre : la colonisation n’a plus de sens au XXIe siècle. Si les États-Unis et la Russie veulent se partager la région en zones d’influence, comme le leur permet leur statut, ils doivent le faire sur une autre base que les Britanniques et les Français, il y a un siècle. Ils doivent raisonner en termes d’alliance et non plus de domination.

Résistance politique: Les voix anti-colonialistes se lèvent…

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La France doit se réinventer ou périr

 

Fernand Agbo

 

22 Août 2013

 

url de l’article original:

http://www.cameroonvoice.com/news/news.rcv?id=12161

 

Des voix plus autorisées et des éminences plus techniques pourront certainement traduire en des chiffres et termes plus appropriés ce que nous allons exposer en des mots simples, sans prétention savantes.
 
La France est en récession et ne fait pratiquement plus de croissance, nous apprennent quotidiennement les médias français. Mais en vérité, c’est peu dire. La France connait une grave crise économique et sociale qui menace de l’emporter. Comment un état européen, régnant encore sur un véritable empire colonial resté intact, si on s’en tient aux profits à moindre frais qu’il continue d’en tirer sans discontinuer, peut-il ainsi partir en vrille ? Incompétence, mauvaise gestion, rythme de vie au-dessus des moyens objectifs ?, pourrait-on s’interroger.
 
Pour pallier les effets de la descente aux enfers, une seule et même méthode frappée de péremption, un seul et même moyen séculaire : la prédation, la rapacité et le carnage. Encore et toujours. Contre des nations plus faibles. Comme si le monde n’avait pas évolué depuis un siècle. D’autres peuples sont contraints de faire les frais de la gabegie et du train de vie bourgeois d’une France qui rechigne à réinventer autrement son développement.

La question ou le problème de la France, aujourd’hui en pleine dérive sociale, économique et financière, n’est pas de mettre toujours plus de pays ou d’ex-colonies africaines dans sa besace en y menant la guerre, des guerres prétendument « humanitaires », pour les droits de l’homme et la démocratie, ou en fomentant des coups d’Etat contre des nationalistes et des souverainistes africains, ou des chefs d’Etat insoumis à l’exécutif français ou devenus récalcitrants, pour y installer des pantins prêts à brader leur pays et ses ressources à vil prix, sous des dehors d’élections démocratiques encadrées par l’Elysée, comme cela a dernièrement été le cas au Mali. Et comme c’est le cas dans la plupart des pays africains, anciennement (?) colonies françaises : Côte d’Ivoire, Niger, Togo, Tchad, Mauritanie, Burkina Faso, Guinée, Gabon, Centrafrique, Congo Brazzaville, Cameroun, Bénin, Sénégal.
 
Le problème de la France, c’est qu’elle fait montre d’une absolue incapacité à se réinventer, prise en otage et dirigée qu’elle est par un groupuscule de francs-maçons complètement sclérosés et une oligarchie occulte qui ne rêve que, non pas de servir les français et de les rendre heureux, mais de mettre la France et l’Europe au service des ambitions nouvel-ordre-mondialistes des américains dont le scandale du programme de méga-surveillance et de contrôle planétaire, PRISM, dévoilé par le jeune informaticien transfuge de la NSA, Edward Snowden, n’est que la pointe de l’iceberg des projets obscurs états-uniens contre l’humanité.

Les exécutifs successifs de la France continuent de recourir à des recettes du moyen-âge (guerres de conquête et de reconquête, butins de guerre) pour gouverner un état moderne (dont la gestion nécessite invention, management et travail), en pleine mondialisation, devant une concurrence aussi intelligente que virulente des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Ils n’ont pas de réponses aux problèmes des français, bondissent au plafond pour une croissance (somme toute médiatique) de 0,1% (qui en réalité est de zéro, si ce n’est bien moins) quand tous les indicateurs sociaux et économiques virent au rouge sang, font du surplace et enrobent cette incompétence notoire dans des campagnes médiatiques (guerres « humanitaires et démocratiques ») destinées à polir l’image de chefs d’Etat en réalité franco-dépressifs pratiquants – puisque ne croyant qu’en leurs seules thèses et solutions – et aussi désespérants les uns que les autres.

Singulièrement les deux derniers, Nicolas SARKOZY et François HOLLANDE.
 
Français, ces deux pro-américains-là, authentiques fantoches si l’on peut dire, n’ont rien pour vous. Reprenez en main votre destinée aux prochaines élections, ou vous pouvez tirer un trait sur la « grandeur » de la France. Ouvrez enfin les yeux et voyez l’inéluctabilité de votre déclin, de votre déchéance, si une nouvelle « révolution » n’a pas lieu. Une vraie, cette fois. Pas une du genre de celle qui vous a enfermés dans cette prison dorée appelée REPUBLIQUE qui n’est en fait que l’émanation d’un pouvoir occulte qui vous oppresse et qui vous conduit dans le mur, en vous chantant des sérénades. Pays des droits de l’Homme ? C’est à reconsidérer. N’est-ce pas juste une illusion, une entourloupe sémantique ? Quand on a encadré un génocide au Rwanda et quand on a installé et qu’on soutient militairement et diplomatiquement des dictateurs en Afrique qui oppriment et pillent leurs peuples, encore et toujours, quand on sème mort et désolation en Côte d’Ivoire, en Libye et en Syrie, sous des prétextes fallacieux et franchement indignes, avec l’appui ou sous les ordres de l’ogre américain, peut-on y prétendre ? Certainement pas, à notre avis.
 
Un de vos illustres chefs l’avait dit : « Les français sont des veaux ! ». Nous laissons la déclinaison de son identité à votre sagacité. C’est malheureusement ainsi qu’ils continuent à vous percevoir, quand ils vous regardent, enfoncés dans vos canapés douillets, à déguster vins et fromages, attachés à un confort factice qui vous sera bientôt ôté avec une France en chute libre morale et économique (nous n’avons pas l’intention de vous être désobligeants mais souhaitons sincèrement fouetter votre orgueil). Rendez-vous enfin compte que vous êtes « la prochaine Grèce » ! Ce n’est pas nous qui le disons, mais le magazine hebdomadaire britannique « The Economist ». Et ce sera bien pire, croyez-nous. Parce qu’on vous ment sur tout – c’est un secret de polichinelle – et vous cache tout. Les chiffres de votre économie et vos déficits – c’est encore ce journal qui le dit – sont trafiqués, pour vous donner le sentiment que votre situation n’est pas aussi désespérée. Elle l’est parfaitement !
 
Sauriez-vous renverser l’implacable tendance ?

L’Histoire nous le dira. Pour l’heure, réveillez-vous ! Parce que l’on ne peut comprendre qu’un pays comme l’Allemagne, sorti exsangue de la deuxième guerre mondiale et presqu’entièrement détruit, se relève après seulement un demi siècle pour devenir en une soixantaine d’années, la première puissance européenne, elle qui n’a ni pré-carré, ni chasse-gardée, ni prébende, ni monopole, ni chefs d’autres Etats aux ordres comme les marionnettes africaines aux pieds de l’exécutif franc-maçon français, ni départements et territoires d’Outre-mer. Mais qui a une inventivité et une capacité d’innovation incroyable, une force de travail hallucinante et une rigueur de gestion implacable. Quand on se sait sorti de guerre, c’est une exigence prioritaire. Et le mérite de l’Allemagne est encore plus grand et plus éclatant quand on note qu’elle a d’abord dû rattraper un retard abyssal dû à l’immensité de la désolation d’après-guerre, reconstruire tout ce qui a été détruit, avant de prendre un envol fulgurant.
 
Mais, nous semble-t-il, la France, tout aussi brisée par la guerre, mais adoubée vainqueur avec les alliés, n’en a pas tiré les mêmes leçons. Puisqu’elle s’est contentée de partager avec les libérateurs de l’Europe d’alors le gâteau du monde et de vivre du lait, non pas de son travail et de sa propre sueur, mais de celui des mamelles de ses ex-colonies (?), comme à une source intarissable. La poule aux œufs d’or et la vache à lait ont été et continuent à être pressées à souhait. Jusqu’à l’étouffement.

Malheureusement, la France a changé et n’est plus tout à fait la même, sa population s’est considérablement accrue depuis lors, ses besoins aussi dans les mêmes proportions, tout naturellement. Il faut donc plus de richesses, plus de ressources minières et de matières premières bon marché, plus d’argent. Plus de lait et d’or, en somme. La vache à lait et la poule aux œufs d’or durent-elles périr, à force d’exploitation et d’abus. Elle n’en a cure !
 
Il se trouve justement que chaque état, même vassal, a aussi sa prétention à « l’émergence à l’horizon X » (suivez notre regard). Comment donc continuer à les vampiriser et manger leur chair sans mettre à mal leurs économies et leur développement, et sans déstructurer gravement la configuration géopolitique régionale ou sous-régionale, au péril de tous, Africains comme Occidentaux (cas de la Libye et du Mali) ? Pas si sûr que ces nombreux Etats africains acceptent indéfiniment – du moins, leurs peuples – de se laisser tondre ad vitam aeternam et de rester éternellement dans les liens du sous-développement. Ce lait cessera bien de couler un jour, et cette manne, de vous être gracieusement donnée, très chère France. Et peut-être, sera-ce d’une façon absolument brutale.
 
On a trop tiré sur la corde. Elle va bientôt craquer. Malgré cela – c’est-à-dire malgré toutes les richesses volées à nos peuples, nos devises et gains à l’exportation engrangées avec une désinvolture scélérate dans les comptes d’opérations criminels du Trésor français, nos recettes budgétaires transportées chaque semaine (sans laisser de traces comptables) dans des mallettes en Hexagone pour aider au fonctionnement de l’Elysée, pour financer les partis politiques français, pour enrichir plus que de nature leurs responsables (Droite et Gauche, de façon indifférenciée) et se payer au passage des biens mal-acquis – la France continue à sombrer.

C’est ce type de relation-là entre la France et l’Afrique, judicieusement baptisé par Houphouët-Boigny, FRANÇAFRIQUE, qui tue l’Afrique… et qui tue la France ! Qui fait qu’elle n’a pas appris à innover économiquement, commercialement et technologiquement, à réétudier son marketing et sa force de vente, à accepter de perdre stratégiquement quelques recettes aujourd’hui pour en gagner davantage demain, à se battre à armes égales avec ses adversaires dans l’impitoyable concurrence commerciale internationale (où elle est gravement défaillante, ayant toujours tout reçu sur un plateau d’or à travers monopoles, prébendes, contrats léonins et prédation, et ayant fini par en être totalement sclérosée).
 
Une ligne d’esprit (au final) qui fait qu’elle est impuissante sinon incapable d’explorer de nouvelles pistes de développement, de se remettre fondamentalement en cause et d’impulser la douloureuse mais combien indispensable refonte de son modèle social et économique, inutilement couteux et désormais inadapté (coût de production élevé et peu concurrentiel, coût de la vie et de l’habitat facticement élevé à cause d’impôts excessifs, démesurés, et aussi à cause de la préservation injuste de privilèges de quelques familles milliardaires – onze ou douze en tout – qui tiennent la quasi-totalité de l’économie française, qui ont toujours plus de profit, qui embauchent peu et qui s’enrichissent outrageusement).
 
La France devra également reconsidérer sa perception actuelle du travail, dans un monde globalisé où la quête de productivité et de rentabilité et la conquête des marchés sont infernales ; un monde globalisé qu’elle appelle curieusement de tous ses vœux, sous l’égide américaine. Cette globalisation qu’elle peine à suivre et qui menace justement de la phagocyter. Et avec elle, une partie de l’Europe.
 
Que fait la France du fruit de tout ce pillage organisé et de cette prédation scandaleuse en Afrique, depuis des décennies, et dans nos pays exsangues, pour être aussi mal en point, aujourd’hui ? L’Allemagne en aurait eu le quart que nous n’osons pas imaginer ce qu’elle serait devenue dans le monde. Voyez ce qu’elle fait avec si peu !

A la vérité, ce n’est pas la raréfaction ni même l’insuffisance (au regard des besoins actuels hexagonaux) de cette manne financière à moindre coût directement déversé dans l’économie française ou les comptes privés français qui est en cause (elle n’a jamais manqué), mais la gestion qui en est faite. « La France n’est grande que montée sur les épaules de l’Afrique », c’est vrai, on le sait tous et on ne le dira jamais assez. Elle ne serait rien du tout sans l’Afrique. C’est à nous que la France doit son prestige. Que ce soit économiquement, militairement ou diplomatiquement (ONU). Même sous ce cliché, elle fait pitié à voir. Parce que malgré tout ce dont elle spolie l’Afrique, elle est quand même dans les cordes du déclin. Qu’en serait-il alors advenu d’elle si elle n’avait pas la mainmise sur les destinées de ces ex-colonies (?). Rien qu’à y penser, on est saisi d’effroi. Tant la médiocrité de la gestion hexagonale sidère.

Mais en France, ce sont les mêmes qui s’enrichissent. Et toujours plus. Ce sont eux qui sont, en réalité, montés sur nos épaules et qui sont, à dire vrai, les seuls véritables bénéficiaires de cette manne africaine (marchés gré à gré, pots-de-vin, rétro-commissions, mallettes privées, ventes et trafics d’armes, exploitations pétrolières et minières). Le français moyen n’en voit pas la couleur ni n’en sent l’odeur. Lui qui devrait créer la richesse nationale et l’accroître. Pas étonnant donc qu’il s’appauvrisse toujours davantage. A ce rythme, il n’y a pas grand-chose à espérer de la France, parce que sa chute sera lourde et dévastatrice. C’est juste une question de timing. A moins qu’elle ne se réinvente et ne soit plus gérée comme un petit club d’amis, affairistes insatiables, enfants gâtés et capricieux, bourgeois arrogants et sans âme.

Que DIEU aie pitié de la France !

DINDE Fernand AGBO

Lutte anti-néocolonialiste: La dette arme de destruction économique massive…

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“Je voudrai laisser derrière moi la conviction que si nous maintenons une certaine attention et organisation, nous méritons la victoire… Vous ne pouvez pas accomplir des changements fondamentaux sans une certaine dose de folie. Dans ce cas précis, cela vient de l’anticonformisme, du courage de tourner le dos aux vieilles formules, du courage d’inventer le futur. Il a fallu les fous d’hier pour que nous soyons capables d’agir avec une extrême clareté aujourd’hui. Je veux être un de ces fous, Nous devons oser inventer le futur.”

Thomas Sankara, 1985

=  =  =

Lorsque Sankara fit ce discours devant l’assemblée de l’OUA à Addis Abeba en Juillet 1987, il n’avait plus que 2 mois et demi à vivre… Nous pouvons émettre l’avis que ce discours particulier où il expliquait pourquoi la dette ne serait pas payée, ne devait pas être payée, fut son arrêt de mort décidée peu après par la finance criminelle internationale.

Thomas Sankara, le héros du peuple burkinabé fut assassiné avec 12 de ses aides lors d’un coup d’état le 15 Octobre 1987. Après Patrice Lumumba du Kongo et Nasser d’Egypte, un quart de siècle avant Mouammar el Kadhafi, Sankara, une des grandes consciences pan-africaines anticolonialistes du XXème siècle, était éliminé par l’oligarchie.

~ Résistance 71 ~

 

 

Un front uni contre la dette

 

Thomas Sankara

29 juillet 1987, Thomas Sankara assiste à Addis-Abeba aux travaux de la vingt-cinquième Conférence au sommet des pays membres de l’OUA. Il y délivre le discours ci-après. Il a été retranscrit à partir d’un enregistrement. Le président de séance était Kenneth Kaunda de Zambie. Ce texte est tiré du numéro de février de Coumbite, une revue trimestrielle publiée à Paris.

Nous l’avons repris en mars 2010 à partir du livre « Thomas Sankara Oser inventer l’avenir » qui contient de nombreux discours , après qu’un internaute nous ait signalé qu’il manquait quelques passages. Ce discours a été filmé intégralement et il est largement diffusé sur le net. Nous l’avons reproduit à l’adresse: http://thomassankara.net/spip.php?article351

Monsieur le président,

Messieurs les chefs des délégations,

Je voudrais qu’à cet instant nous puissions parler de cette autre question qui nous tiraille : la question de la dette, la question de la situation économique de l’ Afrique. Autant que la paix, elle est une condition importante de notre survie. Et c’est pourquoi j’ai cru devoir vous imposer quelques minutes supplémentaires pour que nous en parlions.

Le Burkina Faso voudrait dire tout d’abord sa crainte. La crainte que nous avons c’est que les réunions de l’OUA se succèdent, se ressemblent mais qu’il y ait de moins en moins d’intéressement à ce que nous faisons.

Monsieur le président,

Combien sont-ils les chefs d’Etat qui sont ici présents alors qu’ils ont dument appelés à venir parler de l’Afrique en Afrique ?

Monsieur le président,

Combien de chefs d’Etats sont prêt à bondir à Paris, à Londres, à Washington lorsque là-bas on les appelle en réunion mais ne peuvent pas venir en réunion ici à Addis-Abeba en Afrique ? Ceci est très important.[Applaudissements]

Je sais que certains ont des raisons valables de ne pas venir. C’est pourquoi je voudrais proposer, Monsieur le président, que nous établissions un barème de sanctions pour les chefs d’Etats qui ne répondent pas présents à l’appel. Faisons en sorte que par un ensemble de points de bonne conduite, ceux qui viennent régulièrement, comme nous par exemple, [Rires] puissent être soutenus dans certains de leurs efforts. Exemple : les projets que nous soumettons à la Banque africaine de développement (BAD) doivent être affectés d’un coefficient d’africanité.[Applaudissements] Les moins africains seront pénalisés. Comme cela tout le monde viendra aux réunions.

Je voudrais vous dire, Monsieur le président, que la question de la dette est en question que nous ne saurions occulter. Vous-même vous en savez quelque chose dans votre pays où vous avez du prendre des décisions courageuses, téméraires même. Des décisions qui ne semblent pas du tout être en rapport avec votre age et vos cheveux blancs. [Rires] Son Excellence le président Habib Bourguiba qui n’a pas pu venir mais qui nous a fait délivrer un important message donné cet autre exemple à l’Afrique, lorsque en Tunisie, pour des raisons économiques, sociales et politiques, il a du lui aussi prendre des décisions courageuses.

Mais, Monsieur le président, allons-nous continuer à laisser les chefs d’Etats chercher individuellement des solutions au problème de la dette avec le risque de créer chez eux des conflits sociaux qui pourraient mettre en péril leurs stabilités et même la construction de l’unité africaine ? Ces exemples que j’ai cités, il y en a bien d’autres, méritent que les sommets de l’OUA apportent une réponse sécurisante à chacun de nous quant à la question de la dette.

Nous estimons que la dette s’analyse d’abord de par son origine. Les origines de la dette remontent aux origines du colonialisme. Ceux qui nous ont prêtés de l’argent, ce sont eux qui nous ont colonisés. Ce sont les mêmes qui géraient nos économies. Ce sont les colonisateurs qui endettaient l’Afrique auprès des bailleurs de fond, leurs frères et cousins. Nous sommes étrangers à la dette. Nous ne pouvons donc pas la payer.

La dette c’est encore le néo-colonialisme ou les colonialistes qui se sont transformés en  » assistants techniques « . En fait, nous devrions dire en assassins technique. Et ce sont eux qui nous ont proposé des sources de financement, des  » bailleurs de fonds « . Un terme que l’on emploie chaque jour comme s’il y avait des hommes dont le « bâillement » suffirait à créer le développement chez d’autres. Ces bailleurs de fonds nous ont été conseillés, recommandés. On nous a présenté des dossiers et des montages financiers alléchants. Nous nous sommes endettés pour cinquante ans, soixante ans et même plus. C’est-à-dire que l’on nous à amenés à compromettre nos peuples pendant cinquante ans et plus.

La dette sous sa forme actuelle, est une reconquête savamment organisée de l’Afrique, pour que sa croissance et son développement obéissent à des paliers, à des normes qui nous sont totalement étrangers. Faisant en sorte que chacun de nous devienne l’esclave financier, c’est-à-dire l’esclave tout court, de ceux qui ont eu l’opportunité, la ruse, la fourberie de placer des fonds chez nous avec l’obligation de rembourser. On nous dit de rembourser la dette. Ce n’est pas une question morale. Ce n’est point une question de ce prétendu honneur que de rembourser ou de ne pas rembourser.

Monsieur le président,

Nous avons écouté et applaudi le premier ministre de Norvège lorsqu’elle est intervenue ici même. Elle a dit, elle qui est européenne, que toute la dette ne peut pas être remboursée. Je voudrais simplement la compléter et dire que la dette ne peut pas être remboursée. La dette ne peut pas être remboursée parce que d’abord si nous ne payons pas, nos bailleurs de fonds ne mourront pas. Soyons-en surs. Par contre si nous payons, c’est nous qui allons mourir. Soyons-en surs également. Ceux qui nous ont conduits à l’endettement ont joué comme au casino. Tant qu’ils gagnaient, il n’y avait point de débat. Maintenant qu’ils perdent au jeu, ils nous exigent le remboursement. Et on parle de crise. Non, Monsieur le président, ils ont joué, ils ont perdu, c’est la règle du jeu. Et la vie continue.[Applaudissements]

Nous ne pouvons pas rembourser la dette parce que nous n’avons pas de quoi payer. Nous ne pouvons pas rembourser la dette parce que nous ne sommes pas responsables de la dette. Nous ne pouvons pas payer la dette parce qu’au contraire les autres nous doivent ce que les plus grandes richesses ne pourront jamais payer, c’est-à-dire la dette de sang. C’est notre sang qui a été versé.

On parle du Plan Marshall qui a refait l’Europe économique. Mais l’on ne parle pas du Plan africain qui a permis à l’Europe de faire face aux hordes hitlériennes lorsque leurs économies étaient menacés, leurs stabilités étaient menacées. Qui a sauvé l’Europe ? C’est l’Afrique. On en parle très peu. On parle si peu que nous ne pouvons, nous, être complices de ce silence ingrat. Si les autres ne peuvent pas chanter nos louanges, nous en avons au moins le devoir de dire que nos pères furent courageux et que nos anciens combattants ont sauvé l’Europe et finalement ont permis au monde de se débarrasser du nazisme.

La dette, c’est aussi la conséquence des affrontements. Lorsque on nous parle de crise économique, on oublie de nous dire que la crise n’est pas venue de façon subite. La crise existe de tout temps et elle ira en s’aggravant chaque fois que les masses populaires seront de plus en plus conscientes de leurs droits face aux exploiteurs.

Il y a crise aujourd’hui parce que les masses refusent que les richesses soient concentrées entre les mains de quelques individus. Il y a crise parce que quelques individus déposent dans des banques à l’étranger des sommes colossales qui suffiraient à développer l’Afrique. Il y a crise parce que face à ces richesses individuelles que l’on peut nommer, les masses populaires refusent de vivre dans les ghettos et les bas-quartiers. Il y a crise parce que les peuples partout refusent d’être dans Soweto face à Johannesburg. Il y a donc lutte et l’exacerbation de cette lutte amène les tenants du pouvoirs financier à s’inquiéter.

On nous demande aujourd’hui d’être complices de la recherche d’un équilibre. Equilibre en faveur des tenants du pouvoir financier. Equilibre au détriment de nos masses populaires. Non ! Nous ne pouvons pas être complices. Non ; nous ne pouvons pas accompagner ceux qui sucent le sang de nos peuples et qui vivent de la sueur de nos peuples. Nous ne pouvons pas les accompagner dans leurs démarches assassines.

Monsieur le président,

Nous entendons parler de clubs – club de Rome, club de Paris, club de Partout. Nous entendons parler du Groupe des Cinq, des Sept, du Groupe des Dix, peut être du Groupe des Cent. Que sais-je encore ? Il est normal que nous ayons aussi notre club et notre groupe. Faisons en sorte que dès aujourd’hui Addis-Abeba devienne également le siège, le centre d’ou partira le souffle nouveau du Club d’ Addis-Abeba contre la dette. Ce n’est que de cette façon que nous pourrons dire aujourd’hui, qu’en refusant de payer, nous ne venons pas dans une démarche belliqueuse mais au contraire dans une démarche fraternelle pour dire ce qui est.

Du reste les masses populaires en Europe ne sont pas opposées aux masses populaire en Afrique. Ceux qui veulent exploiter l’Afrique sont les mêmes qui exploitent l’Europe. Nous avons un ennemi commun. Donc notre club parti d’Addis-Abeba devra également dire aux uns et aux autres que la dette ne saura être payée. Quand nous disons que la dette ne saura payée ce n’est point que nous sommes contre la morale, la dignité, le respect de la parole. Nous estimons que nous n’avons pas la même morale que les autres. La Bible, le Coran, ne peuvent pas servir de la même manière celui qui exploite le peuple et celui qui est exploité. Il faudra qu’il y ait deux éditions de la Bible et deux éditions du Coran. [Applaudissements]

Nous ne pouvons pas accepter leur morale. Nous ne pouvons pas accepter que l’on nous parle de dignité. Nous ne pouvons pas accepter que l’on nous parle du mérite de ceux qui paient et de perte de confiance vis-à-vis de ceux qui ne paieraient pas. Nous devons au contraire dire que c’est normal aujourd’hui que l’on préfère reconnaître que les plus grands voleurs sont les plus riches. Un pauvre quand il vole ne commet qu’un larcin, une peccadille tout juste pour survivre et par nécessité. Les riches, ce sont eux qui volent le fisc, les douanes. Ce sont eux qui exploitent le peuple.

Monsieur la président,

Ma proposition ne vise pas simplement à provoquer ou à faire du spectacle. Je voudrais dire ce que chacun de nous pense et souhaite. Qui, ici, ne souhaite pas que la dette ne soit purement et simplement effacée ? Celui qui ne le souhaite pas peut sortir, prendre son avion et aller tout de suite à la Banque mondiale payer ; Applaudissements.

Je ne voudrais pas que l’on prenne la proposition du Burkina Faso comme celle qui viendrait de la part de jeunes sans maturité, sans expérience. Je ne voudrais pas non plus que l’on pense qu’il n’y a que les révolutionnaires à parler de cette façon. Je voudrais que l’on admette que c’est simplement l’objectivité et l’obligation.

Je peux citer dans les exemples de ceux qui ont dit de ne pas payer la dette, des révolutionnaires comme des non-révolutionnaires, des jeunes comme des vieux. Je citerai par exemple : Fidel Castro. Il a déjà dit de ne pas payer. Il n’a pas mon âge même s’il est révolutionnaire. Egalement François Mitterrand a dit que les pays africains ne peuvent pas payer, que les pays pauvres ne peuvent pas payer. Je citerai Madame le premier ministre de Norvège. Je ne connais pas son âge et je m’en voudrais de le lui demander. Rires et applaudissements. Je voudrais citer également le président Félix Houphouët Boigny. Il n’a pas mon âge. Cependant il a déclaré officiellement et publiquement qu’au moins pour ce qui concerne son pays, la dette ne pourra être payée. Or la Côte d’Ivoire est classée parmi les pays les plus aisés d’Afrique. Au moins d’Afrique francophone. C’est pourquoi, d’ailleurs, il est normal qu’elle paie plus sa contribution ici. [Applaudissements]

Monsieur le président,

Ce n’est donc pas de la provocation. Je voudrais que très sagement vous nous offriez des solutions. Je voudrais que notre conférence adopte la nécessité de dire clairement que nous ne pouvons pas payer le dette. Non pas dans un esprit belliqueux, belliciste. Ceci, pour éviter que nous allions individuellement nous faire assassiner. Si le Burkina Faso tout seul refuse de payer la dette, je ne serai pas là à la prochaine conférence ! Par contre, avec le soutient de tous, donc j’ai grand besoin, [Applaudissements] avec le soutien de tous, nous pourrons éviter de payer. Et en évitant de payer nous pourrons consacrer nos maigres ressources à notre développement.

Et je voudrais terminer en disant que nous pouvons rassurer les pays auxquels nous disons que nous n’allons pas payer la dette, que ce qui sera économisé n’ira pas dans les dépenses de prestige. Nous n’en voulons plus. Ce qui sera économisé ira dans le développement. En particulier nous éviterons d’aller nous endetter pour nous armer car un pays africain qui achète des armes ne peut l’avoir fait que contre un Africain. Ce n’est pas contre un Européen, ce n’est pas contre un pays asiatique. Par conséquent nous devons également dans la lancée de la résolution de la question de la dette trouver une solution au problème de l’armement.

Je suis militaire et je porte une arme. Mais Monsieur le président, je voudrais que nous nous désarmions. Parce que moi je porte l’unique arme que je possède. D’autres ont camouflé les armes qu’ils ont.[Rires et applaudissements]
Alors, chers frères, avec le soutien de tous, nous pourrons faire la paix chez nous.

Nous pourrons également utiliser ses immenses potentialité pour développer l’Afrique parce que notre sol et notre sous-sol sont riches. Nous avons suffisamment de quoi faire et nous avons un marché immense, très vaste du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest. Nous avons suffisamment de capacité intellectuelle pour créer ou tout au moins prendre la technologie et la science partout où nous pouvons les trouver.

Monsieur le président,

Faisons en sorte que nous mettions au point ce Front uni d’Addis-Abeba contre la dette. Faisons en sorte que ce soit à partir d’Addis-Abeba que nous décidions de limiter la course aux armements entre pays faibles et pauvres. Les gourdins et les coutelas que nous achetons sont inutiles. Faisons en sorte également que le marché africain soit le marché des Africains. Produire en Afrique, transformer en Afrique et consommer en Afrique. Produisons ce dont nous avons besoin et consommons ce que nous produisons au lieu de l’importer.

Le Burkina Faso est venu vous exposer ici la cotonnade, produite au Burkina Faso, tissée au Burkina Faso, cousue au Burkina Faso pour habiller les Burkinabé. Ma délégation et moi-même, nous sommes habillés par nos tisserands, nos paysans. Il n’y a pas un seul fil qui vienne d’Europe ou d’Amérique.[Applaudissements] Je ne fais pas un défilé de mode mais je voudrais simplement dire que nous devons accepter de vivre africain. C’est la seule façon de vivre libre et de vivre digne.

Je vous remercie, Monsieur le président.

La patrie ou la mort, nous vaincrons ! [Longs applaudissements]

=  =  =

La vidéo du discours (en français):

https://www.youtube.com/watch?v=hqhautm_LVE

Excellent reportage d’Arte sur Sankara (51 minutes):

http://www.youtube.com/watch?v=l6_7aDUDkrk

Résistance politique: Combattre et éradiquer le fléau colonial, première nécessité ~ 2ème partie ~

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, France et colonialisme, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, ingérence et etats-unis, militantisme alternatif, pédagogie libération, philosophie, politique et social, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , on 1 juillet 2013 by Résistance 71

“Le grand responsable dans le domaine de la colonisation est le pédantisme chrétien pour avoir posé les équations malhonnêtes: Christianisme = Civilisation et Paganisme = Sauvagerie, d’où ne pouvait que s’ensuivre d’abominables conséquences colonialistes et racistes, dont les victimes devaient être les Indiens, les Jaunes et les Nègres.”
~ Aimé Césaire ~

*  *  *

“Au travers des années, les anthropologues ont réussi à enterrer les communautés indiennes si complètement sous une masse d’information sans aucune importance que l’impact total de la communauté universitaire sur les peuple indigène est devenu celui d’une simple autorité… Dans les grandes largeurs, les nègres étaient considérés comme des bêtes de somme, tandis que les peaux-rouges étaient considérés comme des animaux sauvages, les niakoués comme des animaux domestiques et les chicanos de marrantes bestioles fainéantes.”

~ Vine Deloria Jr. ~

 

 

Tuer le colon intérieur pour sauver l’homme

 

Résistance 71

 

1er Juillet 2013

 

Nous avons emprunté pour titre de cet exposé, en la paraphrasant, une déclaration tristement célèbre d’un capitaine de l’armée américaine, Richard Pratt, qui en 1892 déclara qu’il fallait “Kill the Indian and save the man” (“Tuer l’indien pour sauver l’homme” c’est à dire tuer l’indien à l’intérieur de lui-même pour sauver l’homme). Ceci fut le motto d’une des plus atroces campagnes de génocide culturel de l’Histoire, concernant les populations natives d’Amérique du Nord, qui vit les enfants indigènes arrachés de leur environnement pour être endoctrinés par la force dans des pensionnats où les histoires d’horreur d’abus d’autorité, de viols et de meurtres, tant sous l’égide des autorités étatiques que religieuses, sont légions. Pratt fut en charge du programme et ouvrit la première école à cet effet: la Carlisle School de sinistre renommée.

Nous avons vu dans notre précédent article sur le sujet “Tous colonisés”, que si la colonisation est le plus grand fléau de l’humanité, elle n’a pu être possible que parce que l’oligarchie qui la commandite a d’abord réussi à endoctriner les masses occidentales pour qu’elles acceptent le concept arrogant, fondamentalement raciste et criminel de la colonisation. Il a fallu que nous soyons “convaincus” du bien fondé de “l’universalisme occidental”, du “devoir de civilisation” de l’occident, si chers aux criminels tels Jules Ferry, larbins des cartels monopolistes industriels et banquiers en France et ailleurs en occident.

Si la colonisation est incontestablement plus dure dans les pays conquis, elle n’en est pas moins le résultat d’une colonisation des esprits à la maison, c’est en cela que nous sommes tous des colonisés, sous le joug de la même pensée unique doctrinaire et réactionnaire, qui écrase les peuples et annihile les consciences et les cultures.

Le devoir des peuples aujourd’hui, si nous voulons réellement échapper à l’emprise mortifère qui nous opprime tous, colonisés et colons pour la plupart involontaires, est le devoir de “décolonisation”. Nous devons décoloniser comme on dératise.

Grâce à un certain nombre de travaux ethnologiques et sociologiques, tels ceux de gens comme Aimé Césaire, Frantz Fanon pour la France ou Vine Deloria et Taiaiake Alfred pour l’Amérique du Nord (Deloria étant in Sioux, Alfred Iroquois, Mohawk, tous deux professeurs de science politique) nous avons une très bonne compréhension de ce qu’est la colonisation, ses tenants et aboutissants et certains principes pour l’éradiquer. Nous reprendrons ici en l’adaptant la méthode résultant d’une analyse de fond d’Alfred, pour permettre aux nations indigènes de rester sur le chemin de la décolonisation. Cette méthode peut et doit également être appliquée sur nous, afin que nous sortions de la transe suprémaciste factice forcée sur nous par une oligarchie avide de maintenir son pouvoir privilégié exclusif d’abord sur nous, puis sur les peuples des nations conquises, colonisées.

Les cinq points clés pour demeurer sur le chemin de la décolonisation:

(source: Taiaiake Alfred, professeur de science politique à l’université de Victoria, Colombie Britannique, Canada et directeur du programme d’étude sur la gouvernance indigène)

 

  • Langage: ne pas laisser la langue être annihilée, restaurer / maintenir le langage traditionnel
  • Territoire: connexion, relation à la terre ancestrale
  • Nourriture: retour à un régime alimentaire traditionnel
  • Peur: arrêter d’avoir peur, la peur est l’outil du contrôle
  • Pratique: mettre en pratique en groupe et étendre la sphère d’influence peu à peu

 

Ces cinq points clés ont été identifiés comme étant le meilleur moyen de garder les peuples colonisés sur le chemin de la décolonisation sans être récupérés, co-optés par les entités étatiques dont les fonctions sont de promouvoir le consensus du statu quo et la survie du pouvoir colonialiste. Ce chemin de la décolonisation est emprunté par un certain nombre de nations indigènes des Amériques, parfois avec grand succès ; citons par exemple la confédération iroquoise, qui a la particularité de se situer de part et d’autre de la frontière américano-canadienne, les nations de l’Ouest canadien en Colombie Britannique, la nation Lakota (Sioux) avec la création de la république des Lakotas après un retrait unilatéral du traité de Fort Laramie de 1868, la nation Mapuche au Chili et bien sûr les nations indigènes du Chiapas au sud du Mexique, dont nous relayons l’actualité sur ce blog le plus souvent possible et tous ceux que nous omettons qu’ils nous en excusent.

En quoi donc ceci peut-il être adapté aux peuples occidentaux, eux-mêmes colonisés par la pensée unique mortifère oligarchique, qui a historiquement forcée les peuples à accepter cette escroquerie de la “mission civilisatrice de l’occident” à des fins hégémoniques. Reprenons donc point par point le chemin de la décolonisation et voyons comment nous pourrions l’utiliser pour nous libérer nous-même de la transe maléfique dans laquelle nous avons été plongés il y a trop longtemps déjà.

1-   Le langage:

En ce qui nous concerne, nous devons faire attention à deux choses. La première est de ne pas laisser les langages dégénérer comme cela est en train de se faire avec l’ère électronique et l’avènement du code, de la convention de langage SMS et internet d’un côté et d’un autre côté de l’intégration de mots d’origines étrangères dans la langue. Si toute langue vivante évolue de manière naturelle, l’évolution d’une langue n’implique aucunement sa désintégration dans une bouillie pseudo multi-culturelle.
La seconde chose est le danger de l’imposition par la caste privilégiée d’une novlangue directement sortie du roman “1984” de George Orwell. Aujourd’hui, l’occident ne fait plus la guerre, il “intervient humanitairement pour la paix et la démocratie”, chez Orwell “la guerre est la paix”. Aujourd’hui, l’occident ne supprime pas les libertés individuelles, il “lutte contre le terrorisme”, ceci impliquant la surveillance de tout le monde et la perte des libertés individuelles (voir les lois liberticides en vigueur et le dernier scandale en date des écoutes mondiales de la NSA américaine). Aujourd’hui, comme chez Orwell, “le mensonge est vérité” et les ministères de la propagande occidentaux veillent au grain pour que le décryptage propagandiste ne puisse pas se faire à grande échelle. Ce fut vrai pendant un bon nombre de décennies, mais depuis plusieurs années, la résistance à la sémantique totalitaire a gagné pas mal de terrain.

2-   Le territoire:
Si la relation des peuples colonisés à la terre ancestrale est plus évidente, il n’en demeure pas moins vrai que chaque colons a souvent des relations dans le pays d’origine de sa famille. Prenons le cas d’une famille canadienne dont le père serait d’origine allemande (un des berceaux du Canada et de ses premiers colons est la ville de Lunenbourg en Nouvelle Ecosse, qui constituait une grosse communauté germanophone dès le XVIIème siècle) et la mère d’origine anglaise ou irlandaise ou écossaise. Il est plus que probable que ces personnes ont encore de la famille en Europe qu’elles visitent de temps en temps et réciproquement. Il en va de même avec les Québecois et la France, les Australiens, Neo-Zélandais et Etats-Uniens avec leurs racines européennes ou moyen-orientales (diaspora libanaise par exemple). Même pour les colons de la xème génération, la relation à la terre d’origine est toujours forte et s’amplifie avec l’âge semblerait-il. Beaucoup de retraités décident de “retourner aux sources”, symbolisant par là même un malaise refoulé, voire pour certains un sentiment de culpabilité assumé au delà d’une curiosité à assouvir.
Ainsi la connexion à la terre ancestrale demeure souvent réelle. Pour ceux des occidentaux qui n’ont pas physiquement participés à la colonisation mais n’en sont pas moins des colonisés de l’esprit à domicile, il est important de conserver son petit coin de terre originelle et de ne pas oublier ses racines, ni sa langue, ni ses traditions régionales.

3-   La nourriture:
Ici nous pouvons parler d’une véritable hégémonie “culinaire” du fast food et du “plat préparé”, qui nous a été imposée à des fins purement commerciales et de domination alimentaire. Si la France résiste et garde une certaine tradition culinaire, la qualité des produits agricoles est en chute libre depuis déjà un bon moment. Dans le domaine de l’agro-alimentaire, nous sommes passés de l’empoisonnement des populations par nécessités économiques (agriculture intensive, rentabilité sur des stratégies chimiques) à un empoisonnement programmé génocidaire des populations par l’oligarchie.
Reconquérir notre nourriture traditionnelle, celle faite avec des produits de qualité (connexion supplémentaire au point précédent de la terre ici…) et donnant une quantité et surtout une qualité nutritionnelle optimale, est une nécessité absolue. Le seul moyen  de reconquérir notre nourriture passe par le boycott des cartels agro-alimentaires et le patronage des petits agriculteurs, des maraichers et des éleveurs de terroir à la qualité de produits avérée. Ici, nous parlons d’une stratégie délibérée de reconquête de notre nourriture, cela est parfaitement possible dans un laps de temps relativement court, même si bon nombre de sols agricoles sont “grillés” chimiquement pour plusieurs dizaines d’années, l’espace de création existe toujours, il suffit de mieux gérer en faisant la promotion du local et de la qualité.

4-   La peur:
Essentiel ! Arrêtons d’avoir peur… Peur des représailles, peur du système en place, peur du futur, peur de l’inconnu d’un nouveau paradigme. Ceci représente souvent la plus grande des peurs: se retrouver devant l’inconnu et se décider à franchir le pas. Tout consiste en le “lâcher prise” d’avec les anciennes valeurs devenues obsolètes mais auxquelles on se rattache comme à une bouée en pleine eau. Pour vaincre la peur, le point #5 est essentiel…

5-   La pratique:
Créer de petits groupe de réflexion et de travail, appliquer ce qu’on décide à petit échelle, gardant à l’esprit que le but est d’élargir la portée de cette praxis (réflexion + action) pour déboucher sur un nouveau paradigme d’organisation de la société à bien plus vaste échelle, dans le style d’une confédération de communes libres et autogérées par exemple. La pratique et la mise en commun des idées en suivant une ligne politico-sociale déterminée par toutes et tous, aide à supprimer la peur initiale de l’inconnu, à reprendre confiance et à pratiquer et encourager la seule qualité humaine au-delà de l’intelligence qui nous a permis non seulement de survivre mais d’évoluer sur le chemin du bien commun: la solidarité faite d’entre aide mutuelle et de coopération.
C’est cela que nous devons redécouvrir, ensemble.

Nous avons vu que les points clés déterminés comme étant essentiels pour que les colonisés demeurent sur le chemin de la décolonisation et retrouve la voie identitaire, peuvent parfaitement s’appliquer à nous, peuples occidentaux. Pourquoi donc si nous étions si différents et incompatibles comme l’oligarchie nous l’assène depuis la fin du XVème siècle ? Simplement parce que nous sommes également colonisés, la colonisation de nos esprits par la pensée oligarchique qui a déployée une foule d’artifices pour générer un consentement sinon de fait du moins tacite des masses, est responsable de ce que nous n’ayons pas été suffisamment critiques des horreurs de la colonisation et de son inutilité factuelle.

Nous pensons que le monde s’émancipera définitivement de la tutelle étatique, raciste, arrogante et mortifère de l’oligarchie hégémonique, lorsque les peuples colonisés (indigènes) et les peuples colonisés de l’esprit (nous) joindront leurs forces et créeront ensemble la société du futur, une société égalitaire, fraternelle, solidaire et donc libre, où l’intérêt commun sera en permanence l’objectif de toute action intentée.

En cela les peuples colonisés et la décision des peuples occidentaux de se tenir à leurs côtés, détermineront la destinée de la planète.

 

=  =  =

 

Note:

Ceci peut bien évidemment être appliqué par tout peuple victime du néo-colonialisme occidental. Nous n’avons pas spécifiquement mentionné ici les peuples africains simplement parce qu’officiellement du moins, la colonisation “n’existe plus” et les nations anciennement colonisées sont devenues indépendantes. Nous sommes parfaitement conscients que les relations internationales dites “post-coloniales” ne sont qu’un travesti de ce qui devrait être. L’occident non seulement ne respecte pas les peuples africains devenus souverains mais s’est rendu coupable de la mise en place d’un système mafieux de contrôle des pays et des ressources naturelles et humaines par le biais de l’impositino de gouvernements fantoches. L’Afrique vit ajourd’hui et ce depuis les indépendances des nations, sous un de facto joug néo-colonial, encouragé par le clientélisme politico-financier.

Le seul peuple y subissant aujourd’hui une oppression similaire aux indigènes du continent américain étant le peuple palestinien soumis au colonialisme sioniste et dont les territoires se réduisent à une peau de chagrin depuis 1947.

 

Bibliographie:

  • Aimé Césaire, “Discours sur le colonialisme”, 1955
  • Frantz Fanon, “Peau noire, masque blanc”, 1952
  • Vine Deloria, “Custer died for your sins”, 1969
  • Taiaiake Alfred, “Heeding the Voices of our Ancestors”, 1995
  • Taiaiake Alfred, “Peace, Power, Righteousness, An Indigenous Manifesto”, 1999, 2009
  • Taiaiake Alfred, “Wasase, Indigenous Pathways of Action and Freedom”, 2005
  • Nils Anderson, “Fondements et permanence du colonialisme”, 2011
  • Saïd Bouamama, “L’espace mental colonial comme matrice du racisme contemporain”, 2013
  • Immanuel Wallerstein, “Eurocentrism and its Avatars: the Dilemmas of Social Science”, 1997

Résistance politique: Combattre et éradiquer le fléau colonial, première nécessité

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“L’histoire du système mondial moderne a été pour sa plus grande partie, une histoire de l’expansion des États et peuples européens sur le reste du monde… L’expansion a impliqué dans la très vaste majorité des régions du monde incriminées, la conquête militaire, l’exploitation économique et d’énormes injustices.”

~ Immanuel Wallerstein, “European Universalism” ~

 

“Du moment que nous avons admis cette grande violence de la conquête, je crois que nous ne devons pas reculer devant les violences de détail, qui sont absolument nécessaires pour la consolider.”

~ Alexis de Tocqueville ~

 

Nous sommes tous des colonisés !

 

Résistance 71

 

16 Mai 2013

 

2ème partie

 

Le problème du colonialisme et de son avatar néo-colonial dans la société “post-coloniale” dans laquelle nous sommes censée vivre, est LE problème vital de notre temps à notre sens car il reflète, recycle et applique sur le terrain toutes les idéologies religieuses, devenues pseudo-scientifiques, de justification de l’oppression du vaste nombre par l’infime minorité.

Il n’y aura pas de changement sociétaire sans une refonte totale de la pensée et de l’attitude occidentales envers le monde en général et de l’occident lui-même en particulier.

Le nœud gordien du problème se situe au cœur même du credo économique de nos sociétés, celui de la propriété privée (à ne pas confondre avec la possession, cf. Proudhon), nous renverrons a ce sujet nos lecteurs aux écrits et démonstrations de Proudhon à ce sujet, car nous nous attacherons ici plus aux phénomènes sociologiques, psychologiques et anthropologiques du problème. Nous nous attacherons ici à montrer que d’un fondement religieux (la chrétienté contre les sauvages et les hérétiques), la raison d’être du colonialisme a glissé vers la pseudo-science une fois la racine religieuse chrétienne tombée en désuétude au XIXème siècle. Quoi qu’il en soit, tout part du même principe, celui d’une suprématie, et du sentiment de supériorité de la civilisation occidentale.

Dans son ouvrage classique et incontournable sur le sujet: “Discours sur le colonialisme” (1955), Aimé Césaire nous dit ceci:

Le grand responsable dans le domaine de la colonisation est le pédantisme chrétien pour avoir posé les équations malhonnêtes:

Christianisme = Civilisation et paganisme = sauvagerie, d’où ne pouvaient que s’ensuivre d’abominables conséquences colonialistes et racistes, dont les victimes devaient être les Indiens, les Jaunes, les Nègres.”

Au nom d’un dieu aussi aléatoire qu’oppresseur, l’occident a fait main basse dès la fin du XVème siècle, sur les terres du nouveau monde et au nom de “l’universalisme” culturel (aujourd’hui devenu “l’humanisme” occidental fondement du “droit d’ingérence” dans les affaires d’autrui…), a massacré, pillé, torturé, mis en esclavage les peuples indigènes aux nouveaux territoires, puis du continent africain et d’une bonne partie de l’Asie. A ce sujet, les écrits à la fois de Christophe Colomb dans son journal et ceux du prêtre, défenseur des indiens, Bartolomé de La Casas, sont formels et sans équivoque: massacres et mise en esclavage furent le lot quotidien au nouveau monde.

Comme l’a fait justement remarquer Nils Andersson, le système colonial est fondé sur six permanences:

  • La primauté du territoire sur les populations
  • L’accaparement des richesses
  • L’évangélisation
  • L’exploitation sociale et humaine des peuples colonisés
  • Le recours à la violence de la guerre et de la répression
  • L’aliénation du colonisé

Si la motivation économique de la colonisation est indéniable, surtout depuis la fin du XVIIIème siècle ; elle ne peut être possible que par une double aliénation.

Celle à la fois du colonisé et du colonisateur. Pour que le concept d’universalisme religieux, revendiqué très tôt par l’Europe, puisse être inculqué, puis lorsque la religion eût faibli, le relais soit pris par le concept d’universalisme culturel, d’humanisme universel de l’occident justifiant le principe d’ingérence toujours de rigueur aujourd’hui, il faut que les esprits de l’opinion soient formatés par une doctrine suprémaciste, que le peuple colonisateur soit convaincu du bien-fondé de la mission à assumer “au nom de l’humanité”. Ainsi la doctrine est simple, elle assume et clâme que l’occident a inventé la science, que de toutes les sociétés, seule l’occident à le pouvoir de penser, que la connaissance est son apanage et le reste du monde n’est qu’une nuit de pensées primitive ne demandant qu’à être éclairée. Nous sommes ici dans l’archétype même de l’ethnocentrisme et de la pensée totale éronnée s’auto- proclamant universelle.

De la même manière, les peuples colonisés doivent-ils être convaincus de la supériorité affirmée de leurs oppresseurs, de leurs bourreaux. Dans un cas comme dans l’autre, ceci relève de la manipulation psychologique totale et n’a aucun fondement scientifique.

Aimé Césaire disait:

Il faudrait d’abord étudier comment la colonisation travaille à déciviliser le colonisateur, à l’abrutir au sens propre du mot, à le dégrader, à le réveiller aux bas instincts enfouis, à la convoitise, à la violence, à la haine raciale, au relativisme moral et montrer qu’à chaque fois qu’il y a au Vietnam une tête coupée et un œil crevé et qu’en France on accepte, une fillette violée et qu’en France on accepte, un Malgache supplicié et qu’en France on accepte, il y a un acquis de la civilisation qui pèse de son poids mort, une régression universelle qui s’opère, une gangrène qui s’installe, un foyer d’infection qui s’étend… et alors, un beau jour, la bourgeoisie est réveillée par un formidable choc en retour: les gestapos s’affairent, les prisons s’emplissent, les tortionnaires inventent, raffinent, discutent autour des chevalets… Avant d’être victime du nazisme on en a été complice, que ce nazisme là on l’a supporté avant de le subir, on l’a absous, on a fermé l’œil dessus, on l’a légitimé, parce que jusque là, il ne s’était appliqué qu’à des peuples non européens…

Le politique primant l’économique (l’État naît de la division de la société en oppresseurs et opprimés indépendamment de l’économique, le clivage est d’abord politique avant d’être économique, comme l’a montré fort à propos l’anthropologue Pierre Clastres dans ses travaux de echerche), colonisés et colonisateurs sont tous deux opprimés par le même schéma d’expression de l’autorité: le tribut. Pour assoir son pouvoir, l’oligarchie a très tôt fait payer le tribut à son peuple, car c’est en faisant payer le tribut que l’oligarchie établie son autorité coercitive et c’est en acceptant de payer le tribut que le peuple se soumet à ses maîtres. Ce tribut s’est ensuite tout naturellement étendu aux territoires colonisés sous la forme de l’exploitation en règle des resssources naturelles et humaines tout autant que du tribut que doivent continuer de payer les colons aux oligarques en place. Le principe de colonisation est en fait un phénomème “à tiroir”, exploitant colons et colonisés (certes à des degrés différents, mais ce n’est qu’une question de degré…) au profit du même tout petit nombre, servi par un lot de fonctionnaires parasites accrochés aux basques du système.

Toute la supercherie réside à faire admettre sur des bases on ne peut plus fragiles, que l’État en première instance est source de loi, sécurité, culture, progrès et égalité (dans sa forme de “démocratie représentative”) et que celui-ci, au nom donc de l’universalisme de la suprématie de la culture occidentale (qui n’est qu’un concept eurocentrique surrané…) représente la lumière qui doit rayonner sur le monde, d’abord à la maison, puis chez les “sauvages” incultes, païens et non-civilisés qui doivent se soumettre.

Ainsi, comme le dit Césaire plus avant: “Entre colonisateur et colonisé, il n’y a de place que pour la corvée, l’intimidation, la pression, la police, l’impôt (note de l’auteur: du tribut…), le vol, le viol, les cultures obligatoires, le mépris, la méfiance, la morgue, la suffisance, la mufflerie, des élites décérébrées et des masses avilies.” Et à ceux qui prétendent et veulent toujours croire que la colonisation c’est: les écoles, les routes, l’éducation, les canaux et les chemins de fer, tous essentiellement bien plus bénéficaires aux colons qu’aux colonisés, Césaire répond:

Moi, je parle de milliers d’hommes sacrifiés au Congo-Océan. Je parle de ceux, qui, à l’heure où j’écris ces lignes (1955), sont en train de creuser à la main le port d’Abidjan. Je parle de millions d’hommes arrachés à leurs dieux, à leur terre, à leurs habitudes, à leur vie, à la vie, à la danse, à la sagesse. Je parle de millions d’Hommes à qui on a inculqué savamment, la peur, le complexe d’infériorité, le tremblement, l’agenouillement, le désespoir et le larbinisme.”

Le dogme colonialiste est fondé sur un eurocentrisme forcené, un délire mythomane déclarant comme l’a souligné Immanuel Wallenstein:

La science sociale européenne était résolument universaliste en affirmant que quoi qu’il se fut passé en Europe du XVIème au XIXème siècles, représentait un schéma qui était applicable partout, soit parce que c’était un résultat progressiste de l’humanité qui était irréversible ou parce que cela représentait l’assouvissement des besoins les plus basiques de l’humanité en enlevant les obstacles artificiels à sa réalisation. Ce que nous voyons en Europe n’est pas seulement bon, mais représente le visage du futur partout […] Quand les colonisateurs français du XIXème siècle parlaient de la ‘mission civilisatrice’, ils voulaient dire que par les moyens de la conquête coloniale, la France, ou plus généralement l’Europe, imposerait aux peuples non-européens les valeurs et les normes qui étaient comprises par ces définitions de la civilisation. ”

Comment colonisé et colonisateur s’accommodent-ils de leur situation ? Comment l’un comme l’autre se satisfont-ils du statu quo imposé ? Ceci relève du domaine psychologique et idéologique. En empruntant beaucoup à la théorie gramscienne de l’hégémonie culturelle et à une vision libertaire, anarchiste de la société, le pédagogue critique brésilien Paolo Freire nous donna en 1970 des éléments de réponse dans son brillantissime ouvrage: “La pédagogie des opprimés”, en analysant de manière critique l’idéologie muselant à la fois colonisé et colonisateur, il devisa une pédagogie de la libération, de l’émancipation culturelle, politique et sociale.

Pour le colonisateur, l’oppresseur, tout lui est dû de par la conviction faite sienne de sa supériorité tant culturelle, que raciale. Citons en exemple Jules Ferry, chantre colonialiste de la IIIème république française, qui disait lors d’une intervention à la chambre des députés en 1885 la chose suivante:

Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! il faut dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures… (il est coupé par d’autres députés indignés, puis reprend) Je répète qu’il y a pour les races supérieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures...” Ceci fut la ligne historique du colonialisme français de la IIIème république qui mena la France dans les méandres de l’ignominie raciste dont elle ne s’est toujours pas défaite aujourd’hui quoi qu’on en dise et veuille le faire croire (cf. le dogme néo-colonial de la Françafrique toujours si vivace…)

Tout devient dès lors objet de sa domination. Freire analyse: “Pour l‘oppresseur, la conscience, l’humanisation de l’autre, n’apparaît pas comme le but d’une humanité totale, mais plutôt comme une subversion.”

Les colonisateurs/oppresseurs ne perçoivent pas leur monopole, leur hégémonie comme un privilège qui déshumanise les autres. Au delà de leur complexe de supériorité raciale, ils affirment avec aplomb qu’avoir toujours plus est un “droit inaliénable”, un droit qu’ils ont acquis par leur “courage à prendre des risques” et que par conséquent si les autres n’ont pas plus, c’est parce qu’ils sont incompétents, paresseux, voire les deux…  Le colon oppresseur va donc se préserver mentalement et physiquement de la “jalousie” du colonisé/oppressé et confronté aux faiblesses évidentes de ce raisonnement, s’enfoncera dans une dissonnance cognitive pathologique.

Ceci implique qu’en retour du complexe de supériorité de l’oppresseur, il y ait un complexe d’infériorité de l’oppressé, du colonisé. Celui-ci existe, ce complexe d’infériorité savamment entretenu du reste à grand renfort de pseudo-science sociale telles que le malthusianisme et le darwinisme social, qui ont débouchés sur des dogmes ethnologiques et sociologiques erronés, depuis démontés par les travaux d’ethnologues modernes tel Pierre Clastres, est une réalité toute aussi pathologique mais pas irréversible.

Les quatre piliers essentiels de l’oppression (dont le colonialisme fait partie…) selon Paolo Freire sont les suivants:

  • La conquête (physique, culturelle)
  • La Division pour mieux régner
  • La manipulation
  • L’invasion culturelle

Notons au passage que ceci peut à la fois se référer au colonisé mais aussi aux membres d’une nation colonisatrice, qui tombent eux-aussi  sous le coup de la domination, celle du consentement et de sa fabrication à grand renfort de propagande et de fausse-science.

Ainsi pour se libérer de la tutelle oppressive, les peuples doivent faire preuve de:

  • Coopération
  • D’unité pour la libération
  • D’organisation
  • De synthèse culturelle

Ainsi Freire et la pédagogie critique nous indiquent que: “L’authentique libération, le processus d’humanisation, n’est pas un autre dépôt fait dans la tête des Hommes. La libération est une praxis, c’est a dire une réflexion et une action des hommes et des femmes sur leur monde avec pour but de le transformer… Ici, personne n’enseigne à personne, personne ne s’auto-instruit. Les gens s’enseignent les uns aux autres, modérés par leur monde, par les objets connus qui dans un système banquier d’éducation, sont détenus par l’enseignant.

A cela vient s’ajouter une chose essentielle, à notre avis, pour garantir le succès de la sortie et de l’éradication du colonialisme sous toutes ses formes et le possible retour à un paradigme de droit égalitaire et de véritable progressisme libre et non dogmatique où tous et toutes y gagneraient et non pas l’habituelle clique de parasites en contrôle ; comme le note très bien Nils Andersson dans son essai “Fondements et permanences du colonialisme”:

Pour sortir du colonialisme au stade d’une ‘mondialisation’ qui est inscrite dans le processus même des conquêtes coloniales, il y a deux démarches obligées:

  • Rompre avec l’aliénation coloniale
  • Créer les conditions pour que les peuples colonisés, ex-colinisés ET les peuples des métropoles mènent des luttes communes.”

Andersson plus loin dit on ne peut plus pertinemment:

Il en est pour le colonisateur comme pour le colonisé. Les peuples victimes du colonialisme doivent se construire, s’émanciper, se libérer de ce passé et du présent néo-colonial, où suppôts des anciens colonisateurs maintiennent leurs peuples sous leur dépendance et celles des anciens maîtres. Mais l’Homme occidental doit lui aussi assumer son histoire, se libérer de sa propre aliénation de colonisateur, il doit lui aussi faire ‘peau neuve’, sans quoi il ne cesse de reproduire son aliénation domintarice et raciste.”

En conclusion de son essai, Andersson rejoint les thèses d’un auteur natif nord-américain (Mohawk de la confédération iroquoise) dont nous présenterons sur ce blog la traduction de larges extraits d’un texte essentiel pour mieux comprendre le colonialisme dont sont victimes toujours aujourd’hui les peuples natifs des Amériques, le professeur de science politique et spécialiste du droit natif Taiaaiake Alfred, lorsqu’il écrit:

Sortir du colonialisme, qui n’est nullement un système archaïque mais est aujourd’hui un constituant du système globalisé c’est, partant de mouvements locaux et nationaux, là où nous sommes, avec nos différences, nos expériences en conjugant nos mouvements, se donner la capacité d’influer sur l’ordre mondial.

Dans quel but ? Celui de nous émanciper, d’échapper au paradigme mortifère induit par une mini-élite dont l’hégémonie culturelle n’a que trop duré. Le salut sociétaire de l’humanité réside dans la libération du dogme suprémaciste parasite et criminel pour enfin vivre égaux, libres et heureux.

Ceci passe immanquablement par le fin du colonialisme, de son avatar néo-colonialiste, du capitalisme et de l’état garde-chiourme, tous instruments d’oppression de la vaste majorité par le petit nombre.

Lorsque l’occident et ses peuples aliénés auront réalisé et transcendé les leurres et les crimes d’un système qui n’a aucun lieu d’être, alors une révolution copernicienne politique et sociale populaire prendra place, la seule qui libèrera le monde à tout jamais.

Nous sommes tous dans le même bateau comme l’a entrevu parfaitement la 6ème déclaration de la jungle de Lacandon en 2005 par l’EZLN zapatiste du chiapas au Mexique:

Les capitalistes essaient de dominer le monde entier, la planète terre, le néolibéralisme est la théorie, le plan, qui fait fonctionner la globalisation, et le néolibéralisme a ses plans économique, politique, militaire, et culturel. L’objectif de chacun de ces plans est de dominer et de commander à tous et ceux qui n’obéissent pas sont réprimés et exclus afin d’éviter qu’ils contaminent les autres avec des idées de rebellion… Des nations très puissantes comme les Etats-Unis veulent tourner le monde en une gigantesqe entreprise, un marché géant pour vendre et acheter tout ce qui est possible et pour cacher l’exploitation faite autour du monde. Voici pourquoi le mouvement zapatiste EZLN dit que la mondialisation néolibérale est une guerre de conquête du monde entier, une guerre mondiale, une guerre déclenchée par le capitalisme pour dominer la Terre entière. Cette conquête est parfois faite par des armées qui envahissent des nations, mais souvent elle est faite avec l’économie, par le système de la dette et en amenant leur culture capitaliste, qui est la culture de la marchandise, du profit et du marché.”

Les oppressés natifs du sud du Mexique ont le dernier mot de la lucidité. Tendons-leur la main, à eux et à tous les colonisés, qui en retour nous aiderons à surmonter notre culpabilité d’avoir réduit le monde à ce triste paradigme mercantile et obscène.

Bibliographie:

  • Aimé Césaire, “Discours sur le colonialisme”, 1955
  • Nils Andersson, “Fondements et permanence du colonialisme, 2011
  • Jules Ferry, “Les fondements de la politique coloniale”, 1885, archives de l’Assemblée Nationale
  • Georges Clémenceau, “La colonisation est-elle un devoir de civilisation?”, 1885
  • Saïd Bouamama, “L’espace mental colonial comme matrice du racisme contemporain”, 2013
  • Immanuel Wallerstein, “Eurocentrism and its Avatars: the Dilemmas of Social Science”, 1997
  • Pierre Clastres, “La société contre l’État”, 1974
  • Paolo Freire, “La pédagogie des oppressés”, 1970
  • Ira Shor & Paolo Freire, “A Pedagogy for Liberation”, 1987
  • Russell Means, “Where White Men fear to Tread”, 1995
  • Taiaiake Alfred, “Peace, Power, Righteousness”, seconde édition, 2009
  • Taiaiake Alfred, “Wasase”, 2005
  • Diane Engelstad & John Bird, “Nation to Nation, Aboriginal Sovereignty and the Future of Canada”, 1992
  • Peter Nabokov, “Native American Testimony”, revised edition 1999
  • Gloria Munoz Ramirez, “Le Feu et le Mot, une histoire du mouvement zapatiste”, 2008

2ème partie

Algérie, le poids de l’héritage colonialiste de la France

Posted in actualité, France et colonialisme, politique et social, résistance politique with tags , , , , , , on 9 novembre 2010 by Résistance 71

Entretien avec Lounis Aggoun (1/2)

Algérie : Les années de sang et les complicités de la France

par Silvia Cattori

Url de l’article original: http://www.voltairenet.org/article167288.html

L’indépendance n’a pas permis à l’Algérie de sortir de la violence. Loin s’en faut. Le pouvoir n’a pas été rendu au peuple, mais a été accaparé par un groupe, initialement choisi par la France pour protéger ses intérêts. Pour se maintenir, ce groupe n’a pas hésité à manipuler des islamistes et à plonger le pays dans un nouveau cycle de violence. Dans un ouvrage documenté, « La colonie française en Algérie. 200 ans d’inavouable », Lounis Aggoun dénonce un système élaboré par des Algériens avec le soutien de la France, puis des Etats-Unis, au détriment de tout un peuple.

14 OCTOBRE 2010

Silvia Cattori : Votre ouvrage « La colonie française en Algérie. 200 ans d’inavouable » [1] est très impressionnant. 600 pages, denses, captivantes, s’appuyant sur une ample documentation, qui parlent avec empathie d’un peuple maltraité, mis à genoux. On comprend que c’est là le récit d’un homme meurtri par la souffrance de son peuple, résolu à se confronter à cette réalité brutale, à la vérité. Est-ce comme cela que vous le vivez ?

Lounis Aggoun [2] : Je ne souhaite pas mêler mes écrits au flot intarissable de contresens et de contrevérités qui font office de littérature sur l’Algérie. Comment ne pas être meurtri lorsqu’on est le témoin permanent du spectacle de son peuple martyrisé ? Comment ne pas être révolté ensuite de voir le tyran se draper de vertu et se présenter comme le garant de la liberté, le meurtrier, le violeur, le voleur, le voyou, en somme tout ce qui fait l’Etat algérien, venir quotidiennement nous asséner ses leçons de morale ? Il n’y a pas de juste milieu dans le drame algérien. Il y a d’un côté le territoire des colons (les nouveaux s’entend) et de l’autre celui des colonisés, qui vivent une réalité affreuse. Une fois que l’on a pris conscience de cela, pouvons-nous simplement vaquer à nos

occupations ? J’ai beau essayer, je n’y arrive pas.

Silvia Cattori : L’histoire récente de l’Algérie, de ses relations avec la France, relève du mensonge permanent, dites-vous dans votre livre. La France, voulant préserver coûte que coûte ses intérêts stratégiques en Algérie, a-t-elle vraiment œuvré de façon à ce que, après 1962, l’Algérie ne puisse pas accéder à la pleine possession de sa souveraineté ? L’Algérie comptait-t-elle davantage pour la France, que d’autres anciennes colonies ?

Lounis Aggoun : Les choses ne se présentent pas de façon aussi manichéenne. Cela dit, l’œuvre faussement libératrice du général de Gaulle en Afrique est connue. Comment croire qu’il ait conçu en Algérie le projet contraire à celui qui était le sien dans le reste du continent ? Cela ne revient pas à dire qu’il souhaitait le malheur des Algériens. Loin s’en faudrait. Mais entre son projet, d’une Algérie indépendante entre les mains d’un pouvoir garant des intérêts français (cela, ce sont ses propres propos qui l’attestent) et la concrétisation (une dictature abominable qui a exacerbé toutes les turpitudes de l’ancien colon), il y a une marge et un fleuve de sang. Les dérives du pouvoir après le cessez-le-feu du 19 mars 1962 sont de la responsabilité des Algériens (quelles que soient les influences extérieures, qui sont réelles). Mais le mensonge originel (et il est colporté par ceux-là mêmes qui prétendent militer pour la vérité et l’histoire) consiste, un demi-siècle après, à nier qu’au départ il y a une volonté du pouvoir français de noyauter l’administration algérienne. Après, c’est une trivialité de dire que l’apprenti- sorcier a perdu le contrôle de sa créature diabolique. C’est tout cela que j’ai souhaité documenter dans cet ouvrage, en m’appuyant non pas sur des racontars mais sur les déclarations des plus hauts responsables concernés au sein de l’Etat français et du pouvoir algérien. La vérité est là, écrite par bribes. J’ai simplement réuni les bribes et la vérité émerge, aveuglante. Il suffit de vouloir la regarder en face, pour tenter de reconstruire le futur sur des assises saines ; ou détourner les yeux et continuer à fonder les relations entre les deux pays sur des sables mouvants. Les faiseurs d’opinion pourront continuer (je ne me fais aucune illusion) à prétendre que la France n’est pour rien dans le désastre algérien après l’indépendance et que ceux qui affirment le contraire ne sont que des excités immatures ; les faits sont accablants et la démonstration restera.

Silvia Cattori : L’affirmation que l’Indépendance a été suivie « d’une première décennie d’élimination des élites et de noyautage » met à mal la vision romantique qui avait cours dans les années 60-70, d’une Algérie socialiste triomphante, admirable, toute engagée dans le soutien des mouvements de libération, dotée de brillants diplomates, forte d’une remarquable politique étrangère ? Etait-ce une vision totalement erronée ? Pouvez-vous expliciter ?

Lounis Aggoun : Entre les envolées lyriques de Houari Boumédiène [3] sur la scène internationale et la réalité qu’il imposait au peuple algérien, il y a la différence entre le jour et la nuit. Et comme dans toute illusion, les déconvenues sont d’autant plus douloureuses que le rêve était beau. Quant aux brillants diplomates (et il n’est pas question de dire qu’il n’y en eut pas), ils n’ont servi que de caution à des politiques qui relèveraient du crime contre l’humanité si une justice internationale pouvait se pencher sur la question. Au demeurant, la réponse à votre question est simple : la qualité de cette administration peut aisément se mesurer au fait que l’un de ses plus éminents membres, Abdelaziz Bouteflika, est devenu président en 1999, près de quarante ans après avoir jeté les jalons de la dictature algérienne ; et qu’il poursuit son œuvre dévastatrice en ce moment même. Il faut toujours se méfier des histoires romantiques. C’est la vocation de l’élite de ne pas y sombrer. Or, des observateurs et les commentateurs de tous ordres continuent de colporter des sornettes qui justifient le maintien d’un pouvoir dont ils se prétendent les opposants.

Silvia Cattori : Vous avez sans doute des raisons qui vous permettent d’associer Ahmed Ben Bella à Boumediene et Bouteflika. Ben Bella, invité à la tribune de grands rassemblements, et fort applaudi, comme je l’ai constaté au Forum social européen (FSE) à Florence en Italie, en novembre 2002, demeure très estimé. Qu’a-t-il en commun avec eux ?

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Algérie : Les années de sang et les complicités de la France [Voltaire] 11/9/10 9:27 PM

Lounis Aggoun : Ben Bella, c’est l’homme qui a confisqué la liberté aux Algériens. À ce titre, il endosse la plus lourde responsabilité dans le malheur de son peuple. Depuis qu’il a été déchu, je ne crois pas avoir entendu dans sa bouche un début d’autocritique. Au contraire, chaque fois qu’il intervient, c’est pour accabler les meilleurs cadres politiques de la Révolution et pour justifier le sort qui leur a été réservé (souvent leur meurtre). Qu’il fasse illusion dans les forums mondiaux est significatif de l’efficacité du travail des historiens et des journalistes. Quant aux organisateurs de ces forums, ils sont souvent ceux-là mêmes qui ont été bercés par l’aventure romantique que vous évoquez ; et ils ne souhaitent pas plus que les autres qu’on détruise leurs idoles. Ils sont nombreux dans la mouvance communiste qui, après s’être trompés en 1938 en soutenant Staline (avant de se ressaisir – une fois n’est pas coutume – dans la Résistance), puis en 1956 en votant les pouvoirs spéciaux à l’armée (ils soutiendront de la même façon une autre sale guerre en 1992, en prétendant vouloir sauver les Algériens d’eux-mêmes, et en relayant une politique proprement génocidaire, baptisée sans complexe « éradication »), ont cru se refaire une virginité en soutenant le pouvoir totalitaire qui s’installait en Algérie. Ils ont fait de ce soutien l’œuvre positive de leur vie. On aura alors beau les mettre aujourd’hui face à l’évidence, ils préféreront détourner les yeux.

Mais votre question mérite d’être élargie. Lorsqu’on découvre les affres du pouvoir actuel, les crimes du précédent paraissent en comparaison véniels (les 200 000 morts de la décennie 1990 sont un crime de masse ineffaçable, mais les menées destructrices à l’œuvre en ce moment auront à long terme des conséquences plus graves encore). Au vu de la décennie 1990, celle de 1980 avec Chadli paraît avec le recul somme toute assez douce. Et si l’on tient compte des affres de la décennie 1980 de Chadli, le règne de Boumediene paraît relever de l’âge d’or de l’indépendance algérienne. Connaissant les abominations du régime de Boumediene, l’ère de Ben Bella (où s’est pourtant fondée la dictature) paraît donc relever d’une époque de rêve. Outre que le temps apaise les malheurs engendrés par les pouvoirs successifs, cela traduit la descente inexorable aux enfers des Algériens. C’est cette réalité que j’ai aussi voulu retracer dans ce livre. Quant aux organisateurs de forums sociaux, il n’est jamais trop tard pour sortir de l’univers onirique où ils se complaisent et l’on peut espérer qu’ils cesseront de mêler leur énergie à celle des extrêmes qu’ils prétendent combattre…

Silvia Cattori : Tous les chapitres de votre livre sont passionnants et méritent débat. J’aimerais m’entretenir avec vous en particulier de ces événements que vous décrivez avec précision et qui, dès 1988, préparent le pire. Je crois que peu de gens savent ce qui s’est réellement passé tout au long de ces « années de sang ». Tout cela est terriblement accablant. Jusqu’à quel point le visage de l’Algérie a-t-il été bouleversé à jamais ? Quand pourra-t-on dire que tout cela appartient au passé ?

Lounis Aggoun : Un peuple en cage ; voilà ce que sont les Algériens aujourd’hui. Pour s’en échapper, des hommes et des femmes liquident tous leurs biens pour s’acheter un hypothétique passage en Europe. Sur des barques délabrées qui coulent sitôt en haute mer, ou sur des bateaux en courant le risque d’être jetés par-dessus bord par des équipages qui ne souhaitent pas avoir des ennuis avec les services d’immigration des pays où ils accostent. Si l’âme du peuple algérien s’échine à échapper à la

furie, le paysage dans lequel évolue la population a été quant à lui totalement abîmé.

Les Algériens souhaitaient la liberté ; on les a plongés dans la dictature. Ils ont voulu imposer la démocratie en 1988 ; on les a plongés dans l’horreur. Aujourd’hui, ils ne connaissent que des ennemis : ceux-ci se bousculent devant chez eux pour s’accaparer les richesses (pétrole, gaz, minerais, …) que recèle leur sous-sol. Il y a aussi ceux qui vendent des armes au régime qui les assassine. Ceux qui voudraient les sauver de leur prétendue propension à la barbarie et qui viennent expérimenter sur eux l’arsenal de la terreur. Ceux qui les accusent de tous les malheurs du monde et qui, au nom de cela, s’arrogent le droit de les piller. N’oublions pas les médias et les élites occidentales qui désinforment à leur sujet quand elles s’expriment sur eux et qui se volatilisent lorsqu’il devient impératif de les défendre. Dans dix ans, on découvrira que les opérations qui se mènent aujourd’hui – par un gouvernement qui est reçu en grande pompe dans les salons occidentaux – relèvent de crimes contre l’humanité. Et l’on assistera alors non pas à la condamnation de ces crimes, mais à l’élaboration de nouveaux crimes plus abominables encore, qui empêcheront l’opinion occidentale de s’appesantir sur ceux d’aujourd’hui. Et aujourd’hui donc, naturellement, pour éviter que soient traités les crimes de la décennie 1990, le pouvoir est en train de tenter de corrompre la population dans ce qu’elle a de plus intime, ses ressorts sociaux. Et ce pays que je vous décris est dépeint dans les colonnes des médias français comme un Eldorado économique, un exemple de démocratie.

Silvia Cattori : Aujourd’hui, il est devenu clair pour vous que le Groupe islamique armé (GIA) était une émanation de la Sécurité militaire algérienne, une « organisation écran ». Cela était-il déjà clair pour vous dans les années 90 ?

Lounis Aggoun : Cela était clair pour les rescapés des massacres à l’instant même où ils enterraient leurs proches. Mais que vaut la parole d’un supplicié quand personne ne consent à l’écouter, et même à l’entendre ? Il suffit de ne pas se départir de ce qui est le propre de l’homme, la faculté à raisonner, pour savoir que si certains attentats étaient bien l’œuvre des islamistes radicaux, les plus emblématiques, ceux qui ont eu le plus grand retentissement en Occident, étaient bien trop bénéfiques pour le régime, et pour lui seul, pour ne pas être suspects : il était essentiel que l’on ne s’interroge pas sur l’identité de leurs véritables commanditaires. Mais que vaut de savoir, que vaut même que tout le monde sache si les seules paroles que l’on entende dans les médias français, aujourd’hui, 10 ou 20 ans après les faits, ressassent la même rengaine falsificatrice. Ceux qui, il y a quinze ans, affirmaient déjà que les émirs les plus sanguinaires, Djamel Zitouni et Ali Touchent par exemple, étaient des agents du DRS (Département du renseignement et de la sécurité) comptent parmi les grands responsables des services de sécurité français. C’est l’un de ces secrets de Polichinelle. Cela n’empêche pas les médias de faire comme si personne ne savait et de débiter des contresens à longueur de journal.

Silvia Cattori : Ceux qui sont au courant de ces pratiques secrètes relevant de la « stratégie de la tension », utilisées par les États à l’insu de leurs citoyens, [4] savent, ou peuvent immédiatement comprendre, que tout ce que vous décrivez et qui paraît appartenir à l’inimaginable est malheureusement bien réel, à savoir qu’une poignée de généraux algériens ont délibérément plongé leur propre pays dans le chaos dans le but d’en accuser le Front Islamique du Salut (FIS), [5], et que la « guerre d’éradication » contre les islamistes avait des mobiles cachés. Mais le grand public, qui est désinformé, qui ignore tout de ces stratégies machiavéliques, comment pourrait-il imaginer que les coupables ne sont pas les islamistes mais les généraux qui les manipulent ? Le peuple algérien sait-il ce qui se trame véritablement ?

Lounis Aggoun : D’abord, pour être viable, un gros mensonge doit se fonder sur une part de vérité. Des islamistes radicaux, il y en a eu en Algérie et il y ena toujours. Des islamistes désireux de plonger le pays dans la terreur, il y en a. Des islamistes qui souhaitent rééditer contre le colon intérieur les « exploits » de la génération de 1954, il y en a. Mais, comme dans toute société, ils sont une ultra-minorité, que les ressorts démocratiques existant auraient pu cantonner dans cette dimension marginale. Le pouvoir, dont les desseins détestables sont avérés, a planifié (il s’agit d’une préméditation et non pas d’une dérive) de se greffer sur cette minorité, qu’il a grossie de ses propres effectifs, pour pousser les islamistes non pas à la modération mais à la radicalisation. À titre d’exemple, le « majliss echoura » du FIS, son instance dirigeante, est passé à un moment sous le contrôle absolu du DRS ; certains de ses dirigeants sont aujourd’hui des ministres de Bouteflika ou des députés et offrent leur pays au pillage international. De tous les leaders de premier rang, seul Ali Benhadj était sans doute un homme sincère.

Comment échapper à la désinformation ? Les Algériens savent et ne sont pas dupes. Je ne parle évidemment pas des Algériens que les journalistes et les entrepreneurs français croisent dans les bars de l’Alleti ou l’Aurassi et pour qui la vie est belle. Je parle de l’Algérie profonde, l’Algérie du troisième collège. Quant aux Français qui souhaitent échapper à l’aveuglement, ils savent qui il faut lire et qui il faut écouter. J’ajouterais que « les Français de la France profonde » subissent aujourd’hui les mêmes coups de boutoirs de la part de l’Etat français et sont victimes au même titre que les Algériens. C’est pour cela que dire la vérité, entière, quand on la connaît, partout où l’occasion se présente, est une opération de salubrité publique, qui dépasse le cadre de l’Algérie. Car le monde entier prend un bien mauvais chemin, et ce qui est devenu le quotidien des Algériens risque fort de se « globaliser ». Et l’on accusera ensuite les Français de ne pas avoir été assez courageux pour parer des offensives contre lesquelles ils seront alors devenus impuissants…

Mais votre question doit être examinée avec plus de recul. Dans une manipulation, il ne faut pas confondre manipulateur et manipulé(s), tout comme il faut distinguer le désinformateur des

personnes qu’il abuse. Il ne faut pas retomber dans ce travers algérien qui consiste à accuser la victime d’être victime. Une société reste complexe. Et si la grande masse consacre le peu d’énergie dont elle dispose pour s’en sortir, se dépêtrer de la glu où on l’a piégée, elle ne peut pas être accusée d’être mal informée, d’être mal avisée. Le tort en revient à ceux dont la vocation est de l’informer et de l’aviser. Je ne crois pas que le peuple aime qu’on lui mente. En tout état de cause, tous ceux que j’ai croisés à la suite de mes interventions m’ont demandé, sitôt leur lecture achevée, de leur en dire davantage et m’ont même parfois sermonné d’avoir atténué l’âpreté d’une information. Aucun parmi eux ne m’a jamais accusé d’en avoir trop dit. En revanche, la plupart des « gardiens des lignes éditoriales » qui m’ont sollicité pour écrire se sont empressés de me poser des garde-fous. M’ont reproché d’en dire trop, de décrire une vérité trop crue. En somme, ils me demandent de maquiller la vérité pour, pensent-ils, ne pas effaroucher le lecteur. Ignorent-ils que la moindre brèche dans une vérité empoisonne cette vérité et la tue ?

Silvia Cattori : Durant ces années de répression sauvage, François Mitterrand était au pouvoir en France. Vous ne semblez pas avoir apprécié les implications de son gouvernement dans ce dossier. Celui-ci a-t-il favorisé la politique de ces généraux algériens qui multipliaient les opérations sanglantes contre leur peuple ? Les a-il réellement considérés comme « le rempart contre l’islamisme radical du FIS » ?

Lounis Aggoun : L’alibi du « rempart contre le terrorisme » est commode. C’est une grosse ficelle pour masquer des rapts à grande échelle. La responsabilité de François Mitterrand est monumentale. Je l’ai démontrée. Mais Mitterrand est un homme et la politique est œuvre collégiale. Il a présidé des gouvernements de gauche, et des gouvernements de droite. De tous les hommes politiques qui l’ont entouré, ils ne sont pas nombreux à pouvoir se targuer d’avoir montré un sens de l’honneur concernant les relations avec l’Algérie. Si la responsabilité est partagée, celle de François Mitterrand crève tous les plafonds en ce sens qu’il avait le pouvoir d’agir dans un sens noble et il a systématiquement agi de façon détestable. Il y aurait des livres entiers à écrire sur la question…

Cela étant, les dangers de l’islamisme radical ne doivent pas être minimisés. Et bien des anciens leaders du FIS (ceux qui aspiraient à redonner au peuple algérien sa dignité, même au prix de contorsions culturelles discutables) endossent une lourde responsabilité pour avoir, par inadvertance, contribué à plonger le pays dans le chaos. Pire, 20 ans après les faits, ils se murent encore dans le silence et refusent d’apporter le témoignage qui pourrait aider les observateurs à comprendre mieux l’histoire récente de leur pays. En d’autres mots, ils refusent délibérément d’aider leur peuple à connaître la vérité qui lui permettrait de s’affranchir des tyrannies qu’il subit. Exemple parmi d’autres, il est plus qu’évident qu’Abassi Madani, leur chef, travaillait main dans la main avec le DRS. Ils sont nombreux à pouvoir apporter leur témoignage. Ils ne le font pas. Cette faute est encore plus mortelle que les conséquences de leur amateurisme d’il y a 20 ans.

Silvia Cattori : L’Elysée ne pouvait pas ignorer que les attentats qui faisaient des milliers de morts étaient contrôlés par les services secrets algériens. Quel intérêt avait la France à mettre un terme au processus de démocratisation en Algérie et à se servir de l’instrumentalisation de la menace islamiste ?

Lounis Aggoun : La réponse à votre question peut tenir en un livre. C’est même celui que je viens de faire publier. L’intérêt de la France et de François Mitterrand n’est pas de ces choses auxquelles on peut répondre ponctuellement par un oui ou un non. C’est affaire de dynamiques, d’engrenages, de realpolitik, de prédations économiques, de chantages, de préjugés, d’esprits de revanche mal consommé, de peur parfois, etc. Il ne faut d’ailleurs pas confondre l’intérêt de la France et celui de ses gouvernants. Chaque jour qui passe montre qu’ils sont mêmes antinomiques.

Silvia Cattori : Pour n’avoir pas accepté la poursuite du processus démocratique en Algérie, et avoir approuvé l’interruption par la force de l’accès au pouvoir du Front Islamique du Salut (FIS), les puissances occidentales ont donc permis aux généraux algériens d’ouvrir les portes de l’enfer ?

Lounis Aggoun : Encore une fois, les dynamiques et les engrenages à l’œuvre s’étalent sur des années, des décennies. Si l’on avait expliqué aux dirigeants français que l’interruption de la démocratie en Algérie en 1991 engendrerait la décennie morbide que l’on a connue, sans nul doute qu’ils auraient réfléchi à deux fois. Mais l’art d’un manipulateur est de faire que les décisions et les actes qu’il demande d’entériner ou de soutenir masquent les conséquences qui en découleraient. Une fois que les conséquences se révèlent, il est trop tard, il faut faire avec le réel, et éviter que les choses empirent, et donc soutenir une dictature qu’il suffit de présenter comme un rempart contre le pire.

Mais avant d’aller plus loin, je voudrais rétablir un fait. On prétend depuis 20 ans que la démocratie en Algérie va porter les islamistes au pouvoir. Il n’y a rien de plus faux. Les islamistes, au plus fort de leur mobilisation, c’est-à-dire à un moment où le régime a neutralisé toutes les forces démocratiques et aidé le FIS à se structurer, n’ont pas joui d’une popularité dépassant 30 %. En juin 1991, des élections législatives auraient dû porter au pouvoir une coalition démocratique. Les généraux algériens ont simulé une guerre civile qui a duré une nuit pour mettre fin au processus démocratique et éliminer le seul gouvernement qui ait œuvré dans l’intérêt du peuple algérien, le gouvernement Hamrouche. Sitôt le processus électoral interrompu (avec les applaudissements du pouvoir français), le DRS a désigné un gouvernement avec pour objectif de lancer un autre processus électoral dont l’objectif était de faire gagner le FIS et de justifier la fin de la démocratie que le peuple ne méritait pas. Six mois d’une gigantesque manipulation après, le général Larbi Belkheir, maître d’œuvre de cette opération, annonce cette victoire soigneusement planifiée des islamistes. On connaît la suite.

Silvia Cattori : Qu’en est-il, depuis la disparition de Larbi Belkheir et Smaïn Lamari, des relations entre le régime de Bouteflika et l’Elysée ? Et des actes que l’on attribue à Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) ? Qui se cache derrière ce nom ?

Lounis Aggoun : La réponse à votre question tient en une phrase : L’AQMI et le DRS sont une même organisation. Le reste est littérature. Les déboires de la France avec le pouvoir algérien viennent de ce que ses plus fidèles agents (Larbi Belkheir et Smaïn Lamari) sont décédés respectivement en 2010 et en 2007. La France se retrouve donc avec un interlocuteur qui n’est pas dans les mêmes dispositions à leur égard. Le maître actuel du régime, Toufik Mediene, préfère jouer d’autres cartes, américaine, chinoise, etc. C’est cette guerre souterraine qui se traduit sur le terrain par des enlèvements, et des humiliations à répétition infligées par l’AQMI (le DRS) à la France. Le pire, c’est que ni les hommes politiques, ni les journalistes, qui ont pratiqué le mensonge permanent, ne peuvent expliquer les vrais dessous. Et ce sont les experts-imposteurs habituels que l’on retrouve sur tous les plateaux de télévision. Des manipulateurs pour qui la vie des otages compte pour quantité négligeable.

Silvia Cattori : Vous revenez à maintes reprises sur le rôle de Jack Lang, Hubert Védrine, Jean-Louis Bianco, Jacques Attali. Pourquoi ces personnages-là, si prisés par nos médias encore aujourd’hui, sont-ils plus particulièrement blâmables ?

Lounis Aggoun : Ces hommes sont quelques-uns des bons conseillers du pouvoir de l’ombre en Algérie, autour de Larbi Belkheir. Ils sont donc, à des degrés divers, les architectes de l’œuvre de cet homme : la destruction de l’Algérie et le renvoi de son peuple dans les affres d’une colonisation pire que la colonisation, et qui n’ose pas dire ce qu’elle est.. A suivre.

Silvia Cattori

Journaliste suisse indépendante, de langue maternelle italienne. Les années qu’elle a passées outre-mer, notamment en Asie du Sud-Est et dans l’Océan indien, en contact étroit avec le milieu de la diplomatie et des agences des Nations Unies, lui ont donné une certaine compréhension du monde, de ses mécanismes de pouvoir et de ses injustices. En 2002, elle fut témoin de l’opération « Bouclier de protection », conduite par Tsahal en Cisjordanie. Elle se consacre depuis à attirer l’attention du monde sur le sort

subi par le peuple palestinien sous occupation israélienne. Auteur de Asie du Sud-Est, l’enjeu thaïlandais (éd L’Harmattan, 1979).

Les articles de cet auteur

[1] L’ouvrage de Lounis Aggoun, La Colonie française en Algérie. 200 ans d’inavouable, éditions Demi Lune, 2010, est disponible en français. Pour vous informer et pour soutenir notre réseau de presse, achetez-le à la librairie du Réseau Voltaire.

[2] Lounis Aggoun, journaliste indépendant, né en Algérie, vit aujourd’hui à Paris. Il a également coécrit avec Jean-Baptiste Rivoire « Françalgérie, Crimes et mensonges d’États », La Découverte, 2004, un livre qui révèle les dessous de la « sale guerre ».

[3] Houari Boumédiène, né en 1932, a exercé la fonction de président de la République algérienne du 19 juin 1965 jusqu’à sa mort le 27 décembre 1978.

[4] Cette stratégie est fort bien illustrée par les recherches de Daniele Ganser établissant que les attentats des années 80 en Italie étaient fomentés par les services secrets de la CIA et des armées secrètes de l’OTAN.