Archive pour 15 avril 2014

Colonialisme chrétien, génocide et réseau pédophile: Les églises et états à genoux…

Posted in actualité, colonialisme, France et colonialisme, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, ingérence et etats-unis, militantisme alternatif, politique et lobbyisme, politique et social, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , on 15 avril 2014 by Résistance 71

“Dieu mort, restent les Hommes, c’est à dire l’Histoire qu’il faut comprende et bâtir.”
~ Albert Camus ~

“Les gens construisent une telle machine de pouvoir, qu’ils permettent à quiconque le peut de la saisir (et les chances sont très grandes qu’elle sera toujours saisie par les plus moralement dépravés), ils se soumettent servilement au pouvoir et sont ensuite surpris que tant de maux en ressortent. Ils ont peur des bombes des anarchistes et n’ont pas peur de cette organisation terrible qui les menace sans cesse des pires calamités… Pour délivrer les Hommes des terribles maux de l’armement et des guerres, qui fluctuent toujours, ce n’est pas d’assemblées parlementaires, de conférences, de traités, ni de tribunaux d’arbitrage, dont nous avons besoin, mais de la destruction de ces instruments de violence que sont ce que nous appelons les gouvernements et desquels résultent les plus grands maux de l’humanité. Pour détruire la violence gouvernementale, une seule chose est nécessaire: Que les gens comprennent que le sentiment de patriotisme, qui supporte à lui seul cet instrument de violence, est un très mauvais sentiment, un sentiment brutal, dangereux, disgrâcieux et par dessus tout, totalement immoral.”
~ Léon Tolstoï ~

La pierre de jet appelée Vérité et ses conséquences: vivre dans un monde post-Goliath

 

Kevin D. Annett


Secrétaire de terrain de l’International Tribunal into Crimes of Church and State (ITCCS)

 

13 Avril 2014

 

url de l’article original:

http://itccs.org/2014/04/13/the-slung-stone-called-the-truth-and-its-consequences-living-in-a-post-goliath-world/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

“Au moins 50 000 enfants aborigènes (du Canada) sont morts dans les pensionnats pour Indiens entre 1896 et 1973, d’après les propres documents du gouvernement sur leur taux de mortalité…” ~ Première déclaration de presse de Kevin Annett annonçant la publication de son livre: Hidden from History: The Canadian Holocaust on February 1, 2000

“Les archives concernant la mortalité de dizaines de milliers d’enfants autochtones, décédés du temps du programme des pensionnats pour Indiens qui sévissait au Canada, ont été remises à la Commission Vérité et Réconciliation. Plusieurs gouvernements provinciaux ont abandonné leurs archives à la commission…”

– West Coast Native News, le 30 Mars 2014 (http://westcoastnativenews.com/tens-of-thousands-first-nation-children-died-in-residential-schools/)

~ Puis David choisît quelques pierres bien lisses et les mît dans son sac et il tint sa fronde prête alors qu’il s’approchait de Goliath… ~ 1 Samuel 17:40

………

La pierre fatale appelée vérité

Je sais définitivement de quoi il retourne maintenant. Mais alors même que le Goliath de Rome et de Londres chancèle du coup reçu et commence à s’effondrer, une partie stupide et lancinante de moi-même pense toujours incroyablement que le miracle se soit produit et la bataille est gagnée. Même dans la victoire, nos esprits demeurent un peu plus dans le passé.

Ainsi, cette étrange partie de moi-même a trouvé bizarre la semaine dernière qu’aucun journaliste ne m’ait appelé pour me demander comment cela se ressentait d’avoir eu raison tout ce temps ; ou que l’église unifiée du Canada ne frappe pas à ma porte en se confondant en excuses: “Nous sommes désolés !” d’avoir détruit votre vie sans nécessité au sujet de quelque chose qui était en fait bien vrai: les assassinats qu’elle avait perpétrée sur de petits enfants bronzés.

Bien sûr qu’ils n’appellent pas, imbécile ! Dis-je à mon for intérieur stupide. Ils se barrent tous en rasant les murs !

Ces Philistins de l’église et de l’état ne sont plus le problème après tout ; spécifiquement maintenant qu’ils sont en déroute après la chute de leur mensonge Goliath, alors qu’ils utilisent les distractions usuelles et nécessaires avec leur réthorique politiquement correcte dont ils ont besoin pour couvrir leur retraite précipitée. Mais dans leur sillage, le reste d’entre vous va devoir maintenant décider comment voulez-vous vivre dans le grand vide et la brillante lumière laissés par leur absence.

J’ai rencontré aujourd’hui même une personne qui a travaillé pendant des décennies à un haut niveau de la Gendarmerie Royale du Canada, GRC (NdT: la police fédérale canadienne, l’équivalent du FBI, connue sous le nom de “police montée”). Il m’a dit que chaque “Mountie” (gendarme) au Canada a été briefé qu’il ne devait “en aucune circonstance” me harceler, m’engager ou même me poser des questions. Pourquoi ? A cause du très récent ordre de mise à pied que notre tribunal international de droit commun a émis à chaque agent, fonctionnaire de la couronne d’Angleterre, après que cette dernière ait été prouvée coupable de génocide lors d’un procès l’an dernier. Les gendarmes ont peur de cet ordre, brièvement, parce que, pour citer cet officiel: “Nous savons tous ce que nous avons fait.

Les nouvelles en provenance de Rome sont même encore plus révélatrices. Apparemment, même la mafia n’utilise plus la Banque du Vatican (NdT: qui est un gros actionnaire de la Banque d’Angleterre et dont les intérêts sont gérés depuis bien longtemps par la famille Rothschild..) pour blanchir leur argent de la drogue car, pour citer un sénateur italien: “Même les aveugles peuvent voir que l’église (catholique) est à genoux et ce n’est pas pour prier…” Apparemment, deux autres cardinaux importants connectés à la Banque sont également en passe de jeter l’éponge.

Tout cela me semble t’il, a tout l’air d’un Titan nommé Goliath, allongé dans la poussière et attendant que quelqu’un de courageux vienne le décapiter avec sa propre épée.

Ce coup de grâce arrive, mais je veux d’abord partager ce qui a vraiment mis à bas la bête.

Je viens d’avoir 58 ans en février dernier et mes hanches ne fonctionnent plus très bien ces jours-ci ; ceci provient du fait que j’ai dû marcher partout avec mes sacs surchargés de documents. Ce n’était pas comme çà il y a quelques 22 ans de celà, quand j’avais encore un permis de conduire et un salaire et lorsque j’ai appris au sujet des champs de la mort de Port Albeni (NdT: sur la côte ouest du Canada en Colombie Britannique) en tant que jeune prêtre de l’église unifiée y officiant.

Le genre d’usure particulière et incurable liée à la guerre qui vient avec le fait d’avoir lutté pendant si longtemps n’avait pas encore sévit sur moi à cette époque. J’étais aussi aveuglé que le reste d’entre vous et de cette façon, relativement heureux. Beaucoup de mes amis Indiens étaient aussi toujours vivant, des types dont vous n’entendrez jamais parler sauf par moi, des gars biens, qui savaient tout des enfants assassinés et qui avaient même aidé à les enterrer. Mais ces amis sont morts aussi maintenant. Tous.

Ricky Lavallée était l’un d’entre eux: lui qui avec sa guitare à deux cordes et son sourire moqueur me tirait toujours les mêmes deux dollars pour manger une pizza avant d’aller avec quelques autres survivants et moi-même, créer quelques nuisances les dimanches dans les églises du centre ville de Vancouver qui détestaient nous voir et ce que nous savions de leur saloperie. Ricky et six autres d’entres nous, arrêtèrent une fois le trafic le long de la Georgia Street avec nos bannières sur lesquelles hurlaient les mots: “Tous les enfants doivent avoir un enterrement correct !” et il souriait tout le temps.

L’année dernière, quelqu’un a très violemment frappé Ricky sur la poitrine, si violemment qu’il en est mort, peu de temps après qu’il ait parlé publiquement d’avoir vu un de nos potes, Bingo Dawson, se faire battre à mort par les flics de Vancouver, lui aussi. Mais comme Bingo était “officiellement” décédé “suite à un coma éthylique”… et bien, Ricky devint très vite un autre témoin occulaire encombrant.

Des photos de Ricky Lavallée et de Bingo Dawson devraient être accrochés aux murs de chaque classe d’école de notre nouvelle et bourgeonnante République du Kanata, car ils furent, ainsi que bien d’autres héros tombés, la force qui propulsa la pierre qui amena les criminels au sol.

… et ses conséquences

Ceux qui me souhaitent souvent de “faire attention” n’ont pas vraiment suivi l’affaire ces jours-ci. Ce sont les sales types qui aiment prétendre qu’ils gèrent, qui doivent faire sérieusement attention collectivement à leurs fesses de nos jours, pas moi, parce que comme le gendarme a dit… Ils savent ce qu’ils ont fait.

Comme un certain brandon sans abri avait l’habitude de dire en Galilée, le royaume des cieux est partout sur terre et pourtant les gens ne le voient pas. Ceci résume la situation actuelle, dans le sillage de la mise à bas légale et bientôt spirituelle du Vatican et de la Couronne d’Angleterre et de tous les pays et toutes les entreprises qui en sont échus ; nous sommes libres de refaire le monde et nous-mêmes dès maintenant, mais seulement si nous arrêtons de voir et de croire les illusions qui nous sont imprimées dans les esprits par des entités totalement fictives, et ce en commençant par les tribunaux, gouvernements et églises qui peuvent paraître réels.

Un de mes nouveaux amis est un Canadien du Midwest, un fermier et un sacré expert en droit coutumier. Il explique les choses de cette façon:

“Il n’y avait auparavant que la Loi Naturelle qui gouvernait les Hommes, le loi “de jure”, de dieu, celle de l’égalité et de la paix ; mais ensuite le pouvoir légal de facto a subverti le pouvoir de la loi et la force de facto devint le pouvoir légal des rois auto-proclamés et des papes qui régnèrent arbitrairement hors de la Loi Naturelle. Mais la Magna Carta est venue pour restaurer la Loi Naturelle sur l’humanité, et une fois de plus, le pouvoir de facto l’a rogné jusqu’à ce que la justice soit effectivement abolie dans tous les soi-disants tribunaux de justice.

Aujourd’hui, il n’y a plus de tribunaux ou gouvernements “de jure” où que ce soit: ce ne sont que des contractants privés des entreprises qui gouvernent notre monde. Ainsi, nous abolissons maintenant ces pouvoirs entrepreneuriaux de facto avec, une nouvelle fois, la Magna Carta, au travers des tribunaux de droit coutumier. Mais cette fois-ci, la bataille des balanciers doit cesser. Le peuple doit finalement se réapproprier la loi et la terre s’il doit avoir un futur.”

D’accord, il y a bien des gens éveillés qui y répondent. Mais COMMENT ?

Notre travail vous montre à tous non seulement le pourquoi mais aussi le comment déplacer les institutions criminelles et ce pas simplement en exposant les crimes. Cette dernière année, nous avons créé des ateliers de formation pour enseigner aux gens la droit coutumier et les déléguer pour être sheriffs et officiers de paix et membres de jury qui remplaceront les tribunaux corrompus entrepreneuriaux d’aujourd’hui. En Mai, des groupes du monde entier vont systématiquement faire appliquer les ordres de mise à pied émis à l’encontre des autorités criminelles existantes, qu’elles soient de police, d’église, de justice, de politique ou du pape.

Pour pousser les choses encore plus loin, durant le week-end pasqual qui vient les 18-20 Avril, nous allons spirituellement converger vers Rome pour annihiler l’autorité et la règle du Vatican et de l’entité qui le contrôle.

L’épée qui tranchera finalement la tête de Goliath est brandie, Ô peuple. Le problème n’est pas le manque de lame, mais la couardise et le conditionnement de la masse des gens. Et c’est pourquoi, seul le reliquat de ce qui fut appelé “les guerriers”, seront capables de créer l’exemple et de faire jaillir l’étincelle d’illumination qui fera se rassembler des millions de personnes qui pourront refaçonner notre monde. La clareté et la volonté de ce reliquat est maintenant à un stade décisif.

Vous allez adorer les conséquences d’une frappe mortelle bien ciblée ! Alors faites la preuve devant dieu et nos descendants, que vous valez la peine de la liberté qui vous a été donnée maintenant par le sang et le sacrifice de quelques uns d’entre nous.

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In Memoriam El Viejo …

Posted in actualité, militantisme alternatif, presse et média, résistance politique with tags , , on 15 avril 2014 by Résistance 71

Comme beaucoup dans les médias alternatifs, nous avons lu, sans le connaître, les traduction d’El Viejo, Résistance 71 s’associe à l’hommage rendu à un traducteur dont l’abnégation fut le seul salaire. Notre équipe de traducteurs salue la mémoire d’un combattant de l’ombre.

Salud compañero

— Résistance 71 —

 

lundi 14 avril 2014, par SWM

 

url de l’article:

http://www.lavoiedujaguar.net/In-Memoriam-El-Viejo

 

L’ami et traducteur qui signait El Viejo nous a quittés en ce mois d’avril 2014. Le site « la voie du jaguar », qui doit tant à sa disponibilité, à son art de traduire et à sa ténacité, salue sa mémoire et se joint à l’hommage que lui rend le compañero SWM.

Honneur au défunt

On ne dira jamais assez l’importance de la traduction dans la tentative de réalisation de l’humanité.

Aujourd’hui encore, on connaît la pensée des Anciens uniquement grâce à des femmes et à des hommes qui ont voulu comprendre et communiquer d’autres pensées, d’autres rivages, d’autres désirs, d’autres volontés…

On a brûlé des livres, on a tué des pensées au nom de la vérité du pouvoir et de l’oppression.

Plus près de nous, des samizdats ont souvent dû être recopiés à la main pour pouvoir être transmis loin des sales pattes des obscurantistes de tous bords.

Pour faire savoir.

De nombreuses personnes, souvent s’improvisant traducteurs et traductrices, ont partout dans le monde œuvré pour contribuer à faire évoluer les mentalités, à faire changer les choses, par simple envie de partager le plaisir ou encore pour soutenir un esprit dans lequel on se reconnaît.

El Viejo était de ceux-là.

Après leur lente organisation dans le secret, la deuxième victoire des zapatistes a été de gagner la bataille de la communication de leur existence et de leur projet : romper el cerco.

Avec d’autres, pas si nombreuses, pas si nombreux, dans le monde, El Viejo a fait résonner la voix des sans-voix. Et il l’a fait avec goût, avec rigueur, avec esprit.

Le pont tendu résiste encore, vingt ans plus tard.

Pas si mal dans ce monde du brouillage permanent.

Je viens lui rendre ce simple hommage, moi qui, comme tant d’autres, ne l’ait connu qu’à travers ses traductions.

Good bye, Old Nick !

Colonialisme, post-colonialisme, recolonialisme…

Posted in actualité, altermondialisme, colonialisme, démocratie participative, France et colonialisme, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, philosophie, politique et social, politique française, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , on 15 avril 2014 by Résistance 71

Nous confirmons… Très bonne lecture.

— Résistance 71 ~

 

L’afrique peut-elle sortir de la grande nuit ? (Achille Mbembe)

 

Khalifa Touré

 

12 Avril 2014

 

url de l’article:

http://www.cameroonvoice.com/news/article-news-14798.html

 

« Un énorme travail de réassemblage est en cours, vaille que vaille, sur le continent africain. Ses coûts humains sont élevés. Il touche jusqu’aux structures de la pensée » Achille Mbembe.


Le soleil de l’Afrique est peut-être en train de poindre ! C’est le sentiment que l’on éprouve au sortir du livre d’Achille Mbembe, « Sortir de la grande nuit : Essai sur l’Afrique décolonisée ». Au moment où l’on commémore dans la polémique, les 20 ans du génocide rwandais, la lecture de ce livre est comme un heureux hasard, une lumière qui vient éclairer les zones d’ombre d’une histoire de la modernité africaine pas suffisamment cernée et documentée. On ne le dit jamais assez, mais certaines grandes tragédies du monde participent de notre modernité. Elles relèvent plutôt d’un phénomène de réassemblage, un douloureux travail de procréation.

« Sortir de la grande nuit » est paradoxalement une volonté et même un désir  de s’extirper de la mort lorsque le monde est entre chien et loup, lorsque la vie et la mort participent de la même substance comme nous l’avons constaté dans les moments les plus hallucinants de la tragédie rwandaise. Ce qui fait dire d’emblée à Norman Ajari la chose suivante dans un article scientifique intitulé, De la montée en humanité. Violence et responsabilité chez Achille Mbembe : «(…) il s’est agi pour Achille Mbembe de faire jouer, contre l’humanisme ranci du sujet libéral, une pensée de la montée en humanité, c’est-à-dire du mouvement interminable d’arrachement à la violence comme fabrication de l’homme. »

Au reste, il existe d’une part une actualité du monde tout court, rapportée quotidiennement  par les media et dont le public est friand et d’autre part une actualité du savoir qui échappe souvent à notre intérêt. Elle nous arrive de façon parcimonieuse à travers des revues scientifiques, des livres « trop sérieux » et enfin des émissions radiophoniques et télévisuelles qui tentent vaille que vaille d’offrir une place aux choses de l’esprit. Cette dernière actualité est tellement noyée dans  la vague déferlante de la religion médiatique, qu’elle nous cache la grande histoire du monde. Des révolutions silencieuses se déroulent de façon insidieuse sous nos yeux rivés ailleurs. L’actualité du monde ne nous montre que les situations de mise à  mort  au moment où se déroule à l’ombre une grande bataille pour la vie. C’est la découverte, l’analyse et le constat de l’historien camerounais Achille Mbembe qui raconte l’histoire moderne de l’Afrique à partir d’un récit quasi-autobiographique.

Tout est partie du crâne d’un mort, celui de Ruben Um Nyobé, ce héros oublié et à qui on refuse une sépulture digne de son œuvre.  Récit autobiographique puisque la région d’origine de l’auteur est le bastion du mouvement nationaliste au Cameroun, sa pensée est particulièrement ouverte à l’idée de résistance. C’est la raison pour laquelle le martyr du résistant anticolonial Camerounais Um Nyobé est particulièrement présent dans ses écrits. Il y a une mystique de la résistance chez Mbembe : « Interprétation de la vie et préparation à la mort, la lutte pour la décolonisation revêtit, en maintes occasion, l’allure d’une procréation poétique. Chez les héros de la lutte, elle exigea le dessaisissement de soi, une étonnante capacité d’ascèse, et dans certains cas, le tressaillement de l’ivresse » P.19.

La tante d’Achille Mbembe fut l’épouse de Pierre Yém Mback qui a été assassiné en même temps qu’Um Nyobé dans le maquis. Les assassinats de tous ces  martyrs de la lutte pour l’indépendance, Osendé Ofana, Ernest Ouandié, Félix Moumié et leur effacement de l’histoire officielle du Cameroun ne cessent de hanter la pensée et l’œuvre d’Achille. Cela explique peut-être la fascination que la mort et le symbolisme de la nuit exerce sur l’auteur. Achille Mbembe est peut-être un romantique. Il invoque Martin Heidegger dont le commentaire du poète romantique allemand Hölderlin dénote une profonde blessure. La mort, la perte  et le gain appartiennent à la thématique romantique. Achille Mbembe a peut-être et certainement à juste raison une conception nécropolitique du pouvoir. Le pouvoir politique en Afrique contemporaine, c’est le désir de donner la mort, le pouvoir de tout posséder : La vie, les biens, l’argent, le corps, les femmes etc. « Le potentat est donc, par définition sexuel. Le potentat sexuel repose sur une praxis de la jouissance. Le pouvoir postcolonial, en particulier, s’imagine littéralement comme une machine à jouir. Ici, être souverain, c’est pouvoir jouir absolument, sans retenue ni entrave. La gamme des plaisirs est étendue » P. 217

A coté de cette image de l’Afrique qui sombre, il y a cette Afrique qui vient ! Rien à voir avec l’incantation ou l’onirisme : « Un énorme travail de réassemblage est en cours, vaille que vaille, sur le continent africain. Ses coûts humains sont élevés. Il touche jusqu’aux structures de la pensée » écrit Achille Mbembe à la page 13. Cette révolution culturelle silencieuse qui n’est pas suffisamment documentée procède par destruction et réassemblage :« A coté du monde des ruines et de ce qu’on a appelé la case sans clés( chap.5) s’esquisse une Afrique qui est en train de faire sa synthèse sur le mode de la disjonction et de la redistribution des différences ». Le monde africain qui vient se forgera à partir de la force de ses différences et sa matière indocile. C’est un mélange, une créolité dont l’épicentre est Johannesburg et que l’on sent aussi dans les grandes métropoles africaines comme Dakar, Abidjan, Nairobi, Abuja, Lagos  etc.

Cette modernité africaine dénommée Afropolitanisme par Achille est déroutante parce qu’elle est une mixture, une matière dont la forme est en cours. Elle a été « miraculeusement » annoncée par des démiurges comme Edouard Glissant et Franz Fanon dont la pensée irradie de façon constante la marche d’Achille Mbembe. A travers l’Afropolitanisme l’historien nous révèle comment on s’arrache de la mort, de qu’elle manière on fabrique la vie en Afrique. Après  la mort, quelles sont les réserves de vie qui fertilisent notre être dans le monde en tant sujet ?

On s’éloigne ici des idées communes sur la jeunesse africaine et les taux de croissances, c’est davantage la grande révolution sociale des rapports humains qui est constatée dans cette  révolution africaine qui est en cours : « (…) De ce commerce émergent des formations culturelles hybrides et en voie de créolisation accélérée. C’est en particulier le cas de l’Afrique musulmane soudano-sahélienne, où les migrations et le commerce à longue distance vont de pair avec le colportage des identités et une utilisation habile des nouvelles technologies » P.208

Cette Afrique-là qui vient, défie paradoxalement la race. Il n’est pas question ici de nier la race en tant que facteur biologique mais « liquider l’impensé de la race ». Achille Mbembe déconstruit toute forme de pensée qui part de la race comme facteur heuristique, qu’elle soit africaine ou européenne. Pour lui, le racisme est une variante de la démence et de la folie. La psychiatrie est ici convoquée pour expliquer les comportements racistes. « Le nègre n’est pas, pas plus que le blanc » a écrit Franz Fanon. Au-delà de l’universalisme décoloré à la française l’Afrique devra regarder ailleurs. « Sortir de la grande nuit » est d’abord une entreprise critique, une refondation de la critique à l’égard de l’Europe et de nous-mêmes, une éthique de la responsabilité.

L’Afrique devra construire son propre temps. Il faut « provincialiser l’Europe » dit Achille Mbembe. «Nos gouvernants continuent d’agir comme si l’Europe est toujours le centre du monde. Ils agissent comme s’ils vivaient au 19ème siècle. L’Afrique devra sortir de l’Europe. Le temps de l’Europe n’est plus » renchérit-il. De longues pages sont consacrées à la critique et la déconstruction à l’universalisme de type français, « un universalisme ignorant la couleur » et la différence. Un universalisme qui produit un républicanisme dogmatique et une conception répressive et policière de la laïcité. « La France est une nation figée » dit-il sans ambages. Un moment important est consacré à la french Theory et à cette tentative parisienne d’arraisonnement de la pensée sous prétexte de lutte contre le totalitarisme oubliant délibérément le colonialisme.

La France ne veut pas décoloniser malgré les indépendances de forme. En témoignent le néo-révisionnisme de droite et même celui de gauche qui tente de légitimer sournoisement le fait colonial par le refus de la repentance. « La tyrannie de la pénitence» de Pascal Bruckner et « Fier d’être français » de Max Gallo en sont les exemples les plus communs. Ce néo-révisionnisme est un loup qui se drape souvent de la peau de l’agneau. Il a gagné même  l’Afrique ou certains historiens et écrivains prêtent le flanc et ouvrent des brèches en défendant des thèses hâtives et extrêmement faibles sur le plan théorique. Ils ne savent pas que les racistes font feu de tout bois. La formule « Sortir de la grande nuit » ne fait pas référence à la vieille thématique de la renaissance mais à la problématique de la décolonisation de l’Afrique, une tâche qui incombe à la fois aux africains « proprement dit » mais qui appelle aussi à une décolonisation des élites françaises. Achille Mbembe a une conception singulière et inédite de la décolonisation. Il écrit : « La décolonisation est un événement dont la signification politique essentielle résida dans la volonté active de communauté, comme d’autres parlaient autrefois de volonté de puissance(…) elle avait pour but la réalisation d’une œuvre partagée : se tenir debout  par soi-moi-même et constituer un héritage » P.10.

On ne le dit pas suffisamment mais la décolonisation qui reste inachevée est un moment important de la modernité africaine  « la  décolonisation a fini par devenir un concept  de juristes et d’historiens. Ce ne fut pas toujours le cas. Aux mains de ses derniers, cette notion s’est appauvrie. Ses multiples généalogies ont été occultées, et le concept a perdu de la teneur incendiaire qui marqua pourtant ses origines. » P.55.

La décolonisation telle qu’elle a été vécue et professée par les anciennes colonies est une tentative de déclosion du monde, une volonté de vivre en commun dans le monde, c’est une forme de transnationalisation des problèmes et de la vie des anciennes colonies. Telle est l’idée essentielle de « Sortir de la grande nuit » qui appelle les africains à observer une grève morale. « La grève morale est une forme d’insurrection. Son objectif est de briser les forces mortes qui limitent les capacités de vie. Réveiller le potentiel de grève exige aussi que nous réfléchissions simultanément sur la question de la violence révolutionnaire(…) car tout sans versé ne produit pas nécessairement la vie, la liberté, la communauté. Si les africains veulent se mettre debout et marcher, il faudra tôt ou tard regarder ailleurs qu’en Europe » conclut Achille Mbembe.