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Recolonisation de l’Afrique: Le partage du Nigéria et du Cameroun par la France et le pays du goulag levant (ex-USA)

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, colonialisme, France et colonialisme, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, ingérence et etats-unis, N.O.M, néo-libéralisme et paupérisation, police politique et totalitarisme, politique et lobbyisme, politique et social, politique française, résistance politique, terrorisme d'état, Union Europeenne et nouvel ordre mondial with tags , , , , , , , , , , , , , , , on 14 mars 2015 by Résistance 71

Nous l’avons dit et le redirons sans cesse: Lutter contre l’empire actuel ou tout autre empire, c’est lutter contre le colonialisme toujours bien vivace même s’il a muté depuis sa forme originelle du XVème siècle. Il faut l’éradiquer à la racine pour sauver l’humanité, la solution réside en l’alliance des peuples occidentaux émancipés de l’idéologie colonialiste qui les oppresse également, avec les peuples et nations des pays colonisés, à commencer avec ceux qui sont toujours DIRECTEMENT sous le joug colonial sur les continents des Amériques et d’Océanie.

La racine du mal est le suprématisme euro-américano-centrique, ancré dans la doctrine chrétienne de la découverte fabriquée et appliquée depuis le XVème siècles sur édits papaux du Vatican.

— Résistance 71 —

 

Le projet franco-américain de partage du Nigéria et du Cameroun se concrétise

 

Ibrahima Séne

 

11 Mars 2015

 

url de l’article:

http://www.michelcollon.info/Le-Projet-franco-americain-de.html?lang=fr

 

Le Nigéria, en Afrique de l’Ouest, et le Cameroun en Afrique centrale, sont ainsi devenus des verrous à faire sauter pour le contrôle total du Golfe de Guinée par les USA, et de la Zone sahélo-sahélienne par la France. En effet, la puissance économique du Nigéria, ainsi que les ressources pétrolières du Golfe de Guinée et la présence effective de la Chine dans la zone, dérangent les grandes puissances du monde.

En Afrique, nous vivons dans un monde d’affrontements économiques entre nations, opposant deux blocs : les nouvelles puissances planétaires que sont désormais la Chine, l’Inde, la Russie regroupés avec d’autres au sein des BRICS, d’une part, et, d’autre part, les Etats-Unis et l’Union Européenne dont la France est le fer de lance. 

Dans le contexte international morose actuel, le choc violent entre les deux blocs est aujourd’hui à l’œuvre tant en Europe de l’Est (crise Ukrainienne), qu’au Moyen Orient (crise Syrienne et Irakienne), et en Afrique, avec la crise dans la Zone Sahélo Sahélienne (Mali et Centrafrique), et la crise dans le Golfe de Guinée (Nigéria et Cameroun). 

Dans ce cadre, le Golfe de Guinée, dont les ressources naturelles sont convoitées de toutes parts, est devenu le champ de bataille où les USA ont déployé une puissante Armée d’intervention, AFRICOM, pour la maîtrise des produits de base nécessaires à leur économie, à l’exclusion des pays des BRICS, la Chine notamment.

Le Nigéria, en Afrique de l’Ouest, et le Cameroun en Afrique centrale, sont ainsi devenus des verrous à faire sauter pour le contrôle total du Golfe de Guinée par les USA, et de la Zone sahélo sahélienne par la France. 

En effet, la puissance économique du Nigéria, ainsi que les ressources pétrolières du Golfe de Guinée et la présence effective de la Chine dans la zone, dérangent les grandes puissances du monde, y compris l’Arabie Saoudite et le Qatar en tant que pays membres de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole). Pour ces deux pays de l’OPEP, l’arme de « destruction massive » contre le Nigéria, est la « spéculation à la baisse du prix du baril du pétrole ». 

De même que le Cameroun, qui a connu une diversification géographique de ses partenaires, avec l’augmentation de la part de l’Asie dans les échanges qui est passée de 9% en 2004 à 16% en 2010, contre 68% à 38% pour l’Union européenne, et qui a enregistré, ces trois dernières années, un renversement spectaculaire dans ses rapports avec les bailleurs de fonds.

C’est ainsi que la Chine est devenue, entre 2009 et 2011, le principal bailleur de fonds du Cameroun avec 34% en moyenne du total, loin devant la France qui vient en seconde position avec 17%. 

Le Nigéria et devenu récemment, la première puissance économique de l’Afrique et le pivot central de l’intégration ouest africaine dans le cadre de la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest). Le Cameroun est la première puissance économique de la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC), et le pivot de l’intégration des Etats du Centre dans le cadre de la CEEAC (Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale). 

En outre, le Cameroun bénéficie d’une position géographique qui lui fait assurer un rôle de jonction entre le Nigeria et l’Afrique centrale, dans le positionnement géostratégique des grandes puissances autour du Golfe de Guinée.

Tous ces deux pays sont la cible directe de BOKO Haram, qui se réclame de l’Etat Islamique, et qui menace leur intégrité territoriale dans le but évident d’entrainer leur effondrement économique, et leur partition en micro Etats. 

En ciblant le Cameroun en plus du Nigéria sans aucune raison politique, Boko Haram s’avère donc être le cheval de Troie de l’offensive franco-américaine pour parachever leur contrôle stratégique dans la zone sahélo sahélienne et dans le Golfe de Guinée. 

Boko haram, ne contrôlant aucune zone pétrolifère, et évoluant dans la partie la plus défavorisée du Nigéria, étonne par sa puissante armée et sa puissance de feu, contre lesquelles l’Etat de la première puissance économique et de la plus puissante armée de la CEDEAO, peine à faire face. 

Ce paradoxe est présenté dans l’opinion internationale comme étant le résultat d’une politique désastreuse de l’Etat dans sa partie Nord, et par la corruption qui le gangrène et rend son armée impotente.

Cependant, l’on peut se demander comment le Nigéria a-t-il pu se hisser à la première place de l’économie du continent, et ses nationaux avoir le contrôle de leur économie, si la corruption y était relativement plus développée que dans les autres pays d’Afrique ? 

Ne nous a-t-on pas toujours dit que la corruption est l’élément explicatif de notre retard économique ? 

De même, l’inefficacité de l’Armée nigériane tient aussi, en grande partie, de l’épée de Damoclès que la Cour pénale Internationale(CPI) tient au-dessus des têtes des autorités gouvernementales et de l’armée, avec la procédure judiciaire qu’elle a entamée pour enquêter sur des allégations de « crimes de guerre » et de « crimes contre l’humanité », qui seraient commis dans la lutte contre Boko Haram.

En outre, l’incapacité du pouvoir et de l’opposition à se retrouver avec l’appui des organisations de la société civile, pour mettre en place un large front de défense de l’intégrité de leur territoire et de la sécurité de leurs citoyens, n’a pas manqué de jouer sur le moral des troupes qui ne sentent pas derrière elles, le soutien de leur peuple dans cette épreuve. 

Au contraire, les préoccupations électoralistes, qui divisent les forces vives de la Nation, l’emportent sur le sursaut national salvateur, même quand les observateurs prévoient une crise postélectorale majeure, de laquelle l’unité du Nigéria risque de pâtir. 

C’est dans ce contexte que les USA viennent de jeter le masque en critiquant, sous prétexte du respect nécessaire du calendrier électoral, le report des élections décidé par la Commission Electorale du Nigéria, que le principal parti de l’opposition a repris à son compte en organisant des manifestations de désapprobation dans les rues.

Cette position de l’opposition nigériane, qui refuse de voir que l’insécurité au Nord du fait de Boko Haram, transforme en vulgaire parodie de la Démocratie, toute tenue des élections avant son éradication totale, rappelle tristement celle de l’opposition du Mali, dont les conséquences désastreuses ont rendu, aujourd’hui, ce peuple et son armée nationale, impuissants devant les tentatives de matérialisation de la partition du pays. Les USA misent ainsi sur l’opposition pour la tenue de ces élections dans ce contexte d’insécurité et de division politique, qui menace d’instabilité ce pays et sa sous-région. 

De même, après avoir pris la pleine mesure des conséquences de cette crise post-électorale, combinée avec les agressions de Boko Haram, qui vont créer les conditions idéales de partition du Nigéria, avec ses répercussions inévitables sur l’intégrité territoriale du Cameroun, la France a anticipé sur cette situation en perspective. 

C’est la raison pour laquelle, elle a actionné le Tchad, son « bras armé dans la Zone sahélo sahélienne, pour prendre les devants, en occupant militairement une partie du Nigéria, sous prétexte de voler secours à ce peuple meurtri, en y entraînant le Niger, au nom de la défense de sa sécurité ! 

Mais le gouvernement du Cameroun, qui a très tôt perçu les menaces que fait peser Boko Haram sur l’intégrité de son territoire, n’a pas hésité à s’adresser à la Russie pour mieux équiper ses forces armées et de défense.

Les pays membres de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC) dont le Cameroun est l’un des principaux pivots économiques et militaires, viennent de décider d’un soutien de 50 milliards de francs CFA à ce pays pour mieux faire face, alors que les membres de la CEDEAO se signalent par leur absence totale de solidarité envers le Nigéria. 

Il est vrai que l’unité des forces vives du Cameroun autour de leur gouvernement et de leurs forces armée et de sécurité, a fait cruellement défaut au Nigéria, et sert de prétexte aux Etats de la CEDEAO, dont les Chefs s’alignent derrière les USA sur la question du respect du « calendrier électoral », comme ils le firent au Mali, sans en avoir tiré les conséquences sur les graves risques de partition de ce pays qu’ils ont ainsi favorisés.

Cependant, la France ne se suffit pas de son « bras armé » pour s’assurer une présence durable sur le sol Nigérian, sans être mise à l’index. C’est la raison de son agitation actuelle pour l’envoi d’une force internationale que l’UA avait refusé lors de son dernier sommet qui a promu le Président Mugabe du Zimbabwe à sa tête, compte tenu de l’expérience de ces types d’intervention en Afrique, et récemment au Mali. L’Union africaine avait préféré une forme africaine qui devra compter 8 700 hommes issus des pays de la ligne de front : Cameroun, Tchad, Nigeria, Niger. 

Ainsi, avec ce projet Franco-américain, c’est tout le rêve, qui est investi par les panafricanistes dans la réalisation de la CEDEAO et de la CEEAC, qui risque de se briser. 

Tous ensemble pour le report des élections au Nigéria, la mise en place d’un Gouvernement de salut national, et pour l’annulation des procédures judiciaires de la CPI, pour libérer ce pays de Boko Haram et sauver la CEDEAO et la CEEAC des peuples !

Résistance au colonialisme: L’armée française rackette pour le gros business…

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L’article de Granvaud cite les troupes de marine dite de la « coloniale », profitons-en pour rappeler ce que déclarait un officier supérieur d’autres troupes coloniales, celles des Etats-Unis, le général du Corps des US Marines (USMC) Smedley Butler, Marines qui sont ce que nous appelons en France les régiments RIMA et RPIMA. Voici ce qu’ils disaient dans les années 1930 dans son livre célèbre « War is a Racket », « La guerre est un racket »:

« J’ai passé 33 ans dans les Marines, la plupart de mon temps comme un garde du corps du gros business de Wall Street et des banquiers. En bref, j’étais un racketteur pour le capitalisme. »

Qu’a fait et que fait toujours l’armée française et sa « coloniale » en République Centre Africaine, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Tchad, au Sénégal, au Burkina Faso, au Niger, en Algérie.

Éclairage…

— Résistance 71 —

 

Le dossier noir de l’armée française en Afrique

 

Raphaël Granvaud

 

3 décembre 2014

 

url de l’article original:

http://www.michelcollon.info/Le-Dossier-noir-de-l-armee.html?lang=fr

 

Que fait l’armée française en Afrique ? (1) , c’est le titre du dernier “ Dossier noir ” de l’association Survie paru aux éditions Agone. Un dossier on ne peut plus actuel. Rencontre avec son auteur, Raphaël Granvaud, qui revient sur certaines questions abordées dans ce dossier.

La troisième partie de votre livre s’intitule “la réhabilitation du colonial”, j’ai ressenti un vrai malaise à sa lecture. Je ne savais pas que l’armée française, du moins les forces spéciales opérant en Afrique, étaient travaillées à ce point par la nostalgie du colonialisme. Je me demande s’il ne faut pas voir dans la forte implication militaire française en Afrique, au-delà des enjeux économiques et géopolitiques, une manifestation de puissance. Comme si la France n’avait toujours pas digéré les indépendances africaines, comme si elle ne pouvait renoncer à être une “plus grande France” (formule qui désignait l’empire français)…

Les hommes politiques le revendiquent très clairement, qu’il s’agisse de Mitterrand, de Chirac ou de Sarkozy, on retrouve toujours dans leurs discours l’idée que “la France doit garder son rang dans le monde”. On sent bien que c’est l’argument qui légitime le maintien de cette présence militaire en Afrique. Bien sûr cette présence offre de nombreux avantages : elle conditionne, dans une large mesure, la possibilité d’entretenir des situations de monopole économique dans certains pays et de surveiller des ressources stratégiques.

D’ailleurs certains régimes africains comme ceux du Tchad ou de la Centrafrique ne tiennent que par la force des armes, que par le soutien de l’armée française.

Depuis les indépendances, le prétexte majeur du maintien de la présence militaire française c’est de défendre les pays africains, avec lesquels on a passé des accords militaires, contre des agressions extérieures. Dans les faits, il n’y a quasiment jamais eu d’agressions extérieures, l’armée française n’a servi qu’à gérer les problèmes internes à des régimes confrontés à des rébellions armées ou à des mouvements populaires.

Le plus souvent, les armées des Etats africains postcoloniaux se comportent vis-à-vis de leurs propres populations comme des armées d’occupation. Leurs forces armées sont conçues avant tout pour répondre au péril de l’ “ennemi intérieur” et non à celui d’une agression extérieure. Vos analyses montrent clairement la responsabilité de la France dans cet état de choses.

Absolument, ça faisait partie du kit théorique doctrinal qui a été inculqué aux officiers africains formés dans les écoles militaires françaises. Il faut rappeler qu’au moment des indépendances, les armées africaines sont créées de toute pièce : elles constituent alors une sorte de prolongement de l’armée coloniale française. Les armées africaines sont des filiales de l’armée française, elles sont structurées sur le même modèle, formées à partir de la même idéologie : la doctrine militaire de la “guerre révolutionnaire”, de la “contre-insurrection” qui veut que le rôle principal de l’armée soit le “contrôle de la population”. Mais pour les armées africaines, il ne s’agit pas du contrôle d’une population étrangère comme dans le cas de l’armée française en Algérie. La mission des militaires africains est de contrôler leurs propres populations, mais avec les mêmes méthodes que l’armée française a employées dans ses guerres coloniales. C’est ce qui s’est passé au Cameroun, au moment de l’indépendance, dans la guerre sanglante menée contre les maquis de l’UPC (Union des Populations du Cameroun). Dans le cas du Rwanda, le chercheur Gabriel Périès a retrouvé des mémoires d’officiers rwandais, formés en France dans les années 80-90, dans lesquels on retrouve cette obsession de lutter contre l’ennemi intérieur, de mettre en œuvre des tactiques contre-insurrectionnelles. Menée à son terme, la logique du “ contrôle de la population ” conduit au génocide…

En dressant la généalogie de la guerre contre-insurrectionnelle, votre livre souligne les continuités et similitudes qui existent entre guerres coloniales d’Indochine et d’Algérie et guerres postcoloniales du Cameroun (une guerre occultée) et du Rwanda.

Je n’ai fait que rapporter des travaux qui existent sur le sujet. Officiellement, depuis la fin de la guerre d’Algérie, ces théories contre-insurrectionnelles sont remisées et des méthodes comme la torture ou la guerre psychologique proscrites. Dans les faits, il y a eu une première vague d’exportation des tactiques anti-subversives françaises à destination des dictatures sud-américaines : des gens comme le général Aussaresse (connu pour ses révélations sur l’usage systématique de la torture en Algérie) ont pu ainsi continuer à transmettre leur “ savoir-faire ”… Puis ce savoir-faire anti-insurrectionnel a été recyclé en Afrique francophone pour gérer les indépendances et la période post-indépendance. Moi, ce que j’ai essayé de montrer, c’est que cette tradition de la “guerre révolutionnaire” se poursuit aujourd’hui, de façon plus subtile. Quand on lit les publications militaires contemporaines, on retrouve des références à des gens comme Trinquier (théoricien principal de la “guerre contre-insurrectionnelle”), mais aussi des références aux techniques de conquête coloniale de Liautey ou de Gallieni (guerres coloniales de “pacification” fin 19ème – début 20ème siècle) ; des stratèges qui reviennent au goût du jour quand il s’agit de penser des situations de conflit comme celles de l’Afghanistan ou de la Côte d’ivoire.

Sur le plan des savoir-faire et des discours, l’armée française entretient donc un rapport intime avec son histoire coloniale. Y a-t-il une spécificité de l’armée française de ce point de vue là ?

Les militaires français considèrent qu’il y a une tradition culturelle française plus forte que celle des anglo-saxons sur le plan du contact avec les populations. L’armée française prétend détenir un vrai savoir-faire lui permettant de mieux se faire accepter en tant qu’armée d’occupation. C’est la question du “contrôle des populations”. Pour les militaires français, il ne faut pas faire comme les Américains qui arrivent, militairement par la force, et qui ensuite se barricadent. L’armée française se flatte d’être capable d’agir de manière psychologique, en menant des opérations “civilo-militaires” pour faire accepter auprès des populations civiles la présence des militaires. Toujours avec cette idée, qui remonte à l’Indochine, qu’on va pouvoir séparer dans la population le bon grain de l’ivraie, et couper les rébellions de leurs bases populaires.

L’armée française a-t-elle recours à des savoirs de type ethnologique dans son approche des populations des pays occupés ?

Quand on gratte un peu, on retombe toujours sur une espèce de prêt à penser, directement issu de la période coloniale. Les forces spéciales françaises sont sensées, en plus d’un savoir-faire proprement militaire, posséder un savoir culturel, ethnologique qui les rendrait plus à même d’opérer dans certaines zones géographiques du monde, en particulier en Afrique. Ces savoirs “culturalistes” reposent sur des conceptions complètement dépassées d’un point de vue universitaire. Quand on lit des interventions d’officiers dans des colloques, on trouve des choses absolument ahurissantes comme : “la présence de l’armée française est nécessaire parce que les Africains ont du mal à se projeter dans l’avenir”. Les mêmes clichés éculés qui émaillaient le discours de Dakar de Sarkozy : ce vieux fond colonial qui prétend être une connaissance permettant une intervention sur des populations.

Revenons sur le cas du Cameroun, le premier pays africain, en 1960, à accéder à l’indépendance (le 1er janvier). Du milieu des années 50 au début des années 70, il s’est produit une véritable guerre dans ce pays : des dizaines de milliers de morts, plus de 100 000 selon certaines sources. Cette guerre menée contre l’UPC par un régime à la solde de la France relève-t-elle, elle aussi, de la guerre “anti-insurrectionnelle” ?

Le chercheur Gabriel Périès a montré récemment comment les dispositifs mis en place en Algérie ont été décalqués au Cameroun à la même époque (2). Le quadrillage des territoires, la torture à grande échelle, la déportation des populations, la politique de la terre brûlée, tout ce qui se faisait en Algérie a été repris tel quel au Cameroun. Il faut signaler sur le sujet l’excellent documentaire “Autopsie d’une indépendance” (3) dans lequel on peut entendre Mesmer déclarer à propos des bombardements des villages au napalm que “ce n’est pas important”. Ce sont des choses qui, ces dernières années, commencent à remonter à la surface.

Cela remet donc complètement en question le mythe d’une “décolonisation douce”…

La “ décolonisation en douceur ” reste la version officielle si l’on se réfère aux programmes scolaires en histoire au collège ou au lycée. Un des enjeux de l’étude de la décolonisation c’est de montrer qu’il y a eu, d’un côté, une décolonisation violente, celle de l’Algérie et, de l’autre, une décolonisation qualifiée de pacifique, de “douce”. Les cas du Cameroun et de Madagascar suffisent à montrer que c’est un mythe complet : le mythe des indépendances en douceur préparées par Deferre et de Gaulle après la conférence de Brazzaville en 46. Dans les faits, tout ce qui a été concédé par la France l’a été contre le gré de la métropole, souvent après des tentatives désespérées de reprise en main violentes. Cela s’est accompagné d’un processus d’élimination des mouvements indépendantistes et de leurs leaders, mais aussi de la promotion d’hommes politiques à la dévotion des intérêts français. Dans l’après-guerre, il y a eu une émergence de mouvements indépendantistes, autonomistes, progressistes, révolutionnaires, un vent d’espoir irrésistible : il y avait des idéologies variées qui mobilisaient les populations, et ces mouvements ont été étouffés, brisés, parfois, comme dans le cas du Cameroun, complètement éradiqués. Il y a donc eu une longue période où les populations africaines ont été orphelines d’un certain nombre de mouvements et de leaders. Ça commence à renaître maintenant avec les mouvements sociaux africains et les contre-sommets où la question de la domination néocoloniale est au centre des préoccupations de la société civile ; qu’il s’agisse de la présence française ou de systèmes plus mondialisés comme la dette et les politiques imposées par le FMI et la Banque Mondiale.

Revenons à l’armée française. Dans votre livre vous mentionnez un “détail” qui fait froid dans le dos : les troupes de marine sont toujours surnommées la “Coloniale”…

Les questions de tradition et d’identité sont des questions extrêmement fortes, en particulier dans les forces spéciales, dans cette composante de l’armée française issue de l’armée coloniale. Les troupes de marine sont extrêmement fières de leur passé colonial, elles en revendiquent l’esprit et les méthodes. Les prises d’armes comme les éditoriaux de leur revue L’Ancre d’or continuent à se clôturer sur ces mots “ Et, au nom de Dieu, vive la Coloniale ! ”

Et j’imagine qu’on retrouve souvent ces troupes de marine dans les opérations françaises menées en terre africaine.

Elles composent en effet la majeure partie des forces spéciales auxquelles on fait appel lors des opérations sensibles : des opérations “coups de poing”, des opérations à forte teneur en renseignement. On les retrouve également dans les opérations européennes (EUFOR). Lors de la première d’entre elles, en République Démocratique du Congo, en 2003, la France s’était flattée d’avoir inculqué un certain nombre de méthodes à des forces militaires européennes, en particulier aux forces spéciales suédoises. Depuis on se demande quelles méthodes puisque parmi ces forces suédoises, certains militaires s’étaient plaints auprès de leur hiérarchie d’avoir eu à subir la vision d’actes de torture pratiqués par des militaires français sur des congolais. Ca a fait beaucoup de bruit en Suède, beaucoup moins en France…

Est-ce qu’il y a un contrôle du Parlement français sur les opérations militaires menées en Afrique ?

Théoriquement, depuis la modification constitutionnelle opérée à l’été 2008, il y a un droit de regard du parlement sur les opérations extérieures, mais un droit extrêmement limité. Les députés ont le droit d’être informé d’une opération extérieure dans les 3 jours après son déclenchement, ils restent donc mis devant le fait accompli. Le parlement ne possède un pouvoir de contrôle que sur les opérations lourdes de plus de 4 mois (qui ne représentent qu’une petite partie des opérations militaires) dont il peut refuser le renouvellement. Il n’y a aucun contrôle par contre sur les opérations secret-défense spéciales et les opérations clandestines de la DGSE.

Le Tchad et la République Centrafricaine (RCA) représentent certainement aujourd’hui l’exemple le plus caricatural de l’ingérence militaire française dans certaines régions d’Afrique. Vous consacrez d’ailleurs une place importante dans votre livre à ces deux terrains d’intervention.

En 2006, en RCA, la France a monté une opération du même type que Kolwezi (sauvetage du régime de Mobutu grâce à l’intervention des parachutistes français) : l’armée française a largué des parachutistes pour reconquérir Birao, dans l’ignorance totale de la population française mais aussi des parlementaires. Cette opération a sauvé le régime du président centrafricain Bozizé. Ce type d’opération reste aujourd’hui tout à fait possible. Plus récemment, lors de la dernière offensive sérieuse des rebelles sur la capitale tchadienne, il y a eu une intervention officielle de l’armée française sous prétexte de sécuriser ses ressortissants. Cette opération a permis de sécuriser l’aéroport d’où ont pu décoller les mercenaires d’Idriss Deby… D’après le journal La Croix, la “sécurisation” de l’aéroport de N’Djamena s’est accompagnée aussi d’une intervention militaire des forces spéciales françaises qui ont pris directement part aux combats contre les rebelles : une opération clandestine qui n’est toujours pas reconnue par les autorités françaises…

Dans son dernier rapport sur la Centrafrique, Human Rights Watch est très critique par rapport aux dernières interventions de l’armée française en RCA.

Dans le rapport qu’elle a publié en 2007, l’ONG a pointé un certain nombre de choses : elle a détaillé la politique de terre brûlée menée par l’armée centrafricaine à l’égard des populations du Nord, des populations accusées de soutenir les mouvements rebelles. Là aussi, on retrouve les techniques coloniales françaises : il s’agit de terroriser les populations afin de priver de leur soutien les mouvements rebelles. Les exactions les plus graves ont été commises dans le sillage direct des interventions militaires françaises. Après la reprise de Birao par l’armée française, cette ville a été ravagée par les forces centrafricaines. A l’époque, dans les journaux, les militaires français ont fait peser la responsabilité des destructions sur les rebelles. On sait depuis qu’il s’agissait d’une tentative de dissimulation qui relève de la complicité de crime de guerre. Il y a également dans le rapport de HRW des photos qui interrogent : on voit des officiers français à proximité directe de l’OCRB (Office Central de Répression du Banditisme), une sorte de milice qui se livre à des exécutions sommaires.

Vu la nature de ses interventions en Afrique, la France est-elle vraiment en mesure de commémorer le cinquantenaire des “indépendances” africaines ?  On sent qu’il y a un gros malaise au niveau de la commémoration de ce cinquantenaire. Ce malaise n’est pas étranger au fait que toutes les interventions orales de Nicolas Sarkozy [ et François Hollande] sur la question de l’Afrique affirment une volonté de rupture avec les pratiques de ses prédécesseurs. Mais en dehors des discours, de rupture on n’en voit pas : c’est toujours le règne des pressions diverses, des émissaires occultes, des accords secrets, des opérations clandestines. On va avoir en guise de célébration des choses assez caricaturales : un défilé du 14 juillet où, sous couvert de rendre hommage aux tirailleurs africains, on va inviter des armées comme celles du Cameroun ou du Congo connues pour leurs exactions envers les populations. La véritable décolonisation et la célébration de cette décolonisation restent à faire…

Source : Survie

Notes

  1. Que fait l’armée française en Afrique ? Editions Agone, oct. 2009.
  2. cf. Une guerre noire, enquête sur les origines du génocide rwandais (1959-1994), Gabriel Périès et David Servenay, Editions La Découverte, 2007.
  3. Cameroun, Autopsie d’une indépendance, réalisation Gaëlle Le Roy et Valérie Osouf, durée 52′, production : France 5 / Program 33, 2007.

Quelques références :

En Centrafrique, stratégie française et enjeux régionaux http://www.monde-diplomatique.fr/20…

État d’anarchie (rapport Human Rights Watch sur la RCA) Rébellions et exactions contre la population civile http://www.hrw.org/fr/reports/2007/…

Cameroun : retour sur une décolonisation sanglante http://www.afriscope.fr/spip.php?ar…

Où est le “centre” de l’Afrique ? http://www.africultures.com/php/ind…

Marchés militaires et économie de la prédation, des pays du lac Tchad et du Soudan occidental au Golfe de Guinée. http://www.africultures.com/php/ind…

Cinquante ans de décolonisation africaine http://www.africultures.com/php/ind…

Ingérence française au Cameroun: Pan dans les dents de la Françafrique arrogante!…

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Lettre ouverte à l’ambassadeur de France au Cameroun, Madame Christine Robichon

 

Armand Roger Biloa Mballe

 

1er Mai 2014

 

url de l’article:

http://www.cameroonvoice.com/news/article-news-14990.html

 

Madame,

L’objet de cette lettre est de vous demander de cesser de vous mêler des affaires intérieures du Cameroun.
Depuis votre arrivée au  Cameroun en Décembre 2013, les Camerounais  vous observent, suivent et scrutent vos faits et gestes et  essaient de les mettre en perspective par  rapport  à la politique de votre pays  au Cameroun. 
Votre activisme, en quelques cinq mois de séjour au Cameroun confirment les analyses que nous avons faites voici trois mois.

Vous êtes chargée d’une mission spécifique et spéciale dans notre pays. Vos multiples déplacements, à travers le territoire national, qui ne sont que de simples opérations  de relations publiques, constituent le dernier fond de commerce d’un  vieux logiciel diplomatique  qu’utilise vos autorités pour masquer le rejet et le sentiment  profondément anti-français que les Africains en général, et les Camerounais en particulier éprouvent vis-à-vis de l’Impérialisme  de votre pays sur le Continent noir.

Mr  Gain  Bruno votre prédécesseur l’a utilisé durant son inutile séjour au Cameroun et cela n’a rien donné. Ce  nouveau mode de coopération, reste la dernière trouvaille  de  la France dans ses relations avec les Etats africains. Et pour cause, elle n’a plus rien à leur offrir (si elle en eut avant). La France, contrairement aux faux airs de suffisance et à son arrogance habituelle, est embourbée dans une interminable crise multidimensionnelle aggravée  il ya quelques mois par l’adoption de l’homosexualité comme nouveau mode de procréation et de renouvellement de sa population plus vieillissante que jamais.

Une  France empêtrée, pataugeant dans  d’inextricables et d’insolubles problèmes sociaux (chômage, pauvreté suicides…etc.), que vous continuez de  miroiter aux Camerounais, comme un horizon incontournable  en matière de développement et de progrès.

Vos sorties médiatiques et vos déclarations tantôt sur « les prisonniers politiques français » qui seraient  détenus au Cameroun(alors qu’ils ne sont que de simples délinquants  économiques et financiers et Camerounais au moment de leurs forfaits), tantôt sur le non respect des homosexuels sous les termes de Droits humains, tantôt sur la gouvernance et la corruption, cinq mois à peine  après votre arrivée au Cameroun, ont fait tomber les masques. Le peuple  camerounais sait  déjà quel type de Diplomate vous êtes.

Madame, sachez que les relations diplomatiques et consulaires sont codifiées, encadrées et régies par les Conventions signées  à Vienne  respectivement en 1961 et en 1963. La France doit retenir une fois pour  toutes  que nous sommes en 2014 et non en février 1944, l’année où le général  de Gaulle et son Ministre des colonies René Pleven, mettaient en place à Brazzaville (la triste et funeste Conférence Africaine Française de Brazzaville), l’architecture et les Instruments de  la domination de la France en Afrique. C’était il ya 70 ans.

Vos déclarations à l’emporte-pièce dans  certains  medias  camerounais, dont vous tentez d’orienter les lignes éditoriales en accordant de petits per diem au cours des stages de quelques jours et d’autres broutilles aux Directeurs de Publication n’aboutiront à rien. Sans prendre le parti du gouvernement camerounais, nous savons néanmoins que les agents de votre gouvernement ont remis de l’argent à certains medias locaux pour peindre négativement notre pays dans l’affaire Edzoa-Atangana.

Le peuple camerounais, en dépit des difficultés et des frustrations  accumulées, n’ignore plus où se trouve  son véritable ennemi. Arrêtez de parcourir les quartiers populaires de Douala  à  la recherche des mécontents comme vous le faites depuis votre arrivée au Cameroun. Vous recherchez une «  étincelle sociale » pour allumer les troubles comme votre  pays  a pris coutume de le faire dans de nombreux pays africains (Côte d’Ivoire, Libye, Niger, Mali, RCA,…). Nos problèmes internes sont les nôtres.

Les  Camerounais savent que  leur « ennemi  Central » c’est la France et ses réseaux. Une «  Diplomatie de bruit », tel est votre créneau. C’est ce comportement inattendu d’un diplomate qui a exaspéré les Autorités  béninoises et poussé le Président  Yayi Boni  en 2013  à expulser du Bénin l’Ambassadeur de France  en lui donnant quelques jours pour quitter son Pays. Ayez l’intelligence ou au moins la décence d’éviter d’invoquer les « Relations  Historiques » entre le Cameroun et la France  car vos propos ravivent la douleur 400.000 morts camerounais, victimes du génocide commis par la France dans l’Ouest du pays et dans la Sanaga-Maritime.

Et même du point de vue des traités notre pays n’a jamais été une colonie française en tant que telle. C’est au travers de la Société des Nations (SDN) en 1919, puis de l’ONU en 1945 que votre pays, affaibli  et ruiné par les guerres, est entré au Cameroun. Il y est donc par effraction, non par humanisme ou philanthropie, pour piller et exploiter ses richesses minières, naturelles et énergétiques. C’est cette politique de pillage  , d’extermination et de massacres de nos Nationalistes que vos « Historiens coloniaux » ont étiqueté de maquisards qui vous rattrape aujourd’hui dans toutes les régions du Continent africain, notamment au Rwanda.

Madame l’Ambassadeur, en parcourant les deux plus grandes villes du Cameroun (Douala et Yaoundé), donc de la sous-région Afrique centrale, quel est  le signe ou le symbole visible de la coopération entre «  votre grande et puissante France » et le  Cameroun ? Il n’y en a pas, faute de moyens. Cessez donc de chanter et  de citer la coopération entre la France et le Cameroun comme un exemple. Déboucher ou curer les caniveaux de certaines rues à Yaoundé ou à Douala, boucher les nids de poules ou replâtrer les  trottoirs  d’une route à Garoua financés par des fonds prélevés sur nos devises déposées autoritairement dans le Compte d’Opération au  Trésor français tient-il lieu de coopération ? Arrêtez  ce cirque; il est de mauvais goût et même  indigeste.

Depuis la destruction et l’occupation de la Côte d’Ivoire et l’assassinat du Président Kadhafi par Sarkozy et ses agents, « les Forces Profondes » à l’œuvre au sein de la Société Civile camerounaise ne  demandent qu’une seule chose : la France et  les Français doivent quitter l’Afrique. « French go home », telle est la lame de fond qui traverse les sociétés africaines. L’histoire moderne de notre pays a enregistré que l’Autoroute reliant les deux plus grandes métropoles  de l’Afrique centrale (Douala et Yaoundé),  sera l’œuvre de la Chine et non celle de la France. Un événement historique qui vient  tourner les sombres pages des relations entre le Cameroun et la France. Le mépris et l’arrogance  sur lesquels vous avez bâti « votre politique de coopération » en Afrique ont montré leurs limites. Dès lors, la confrontation  entre  les peuples africains et  une France plus impériale  que jamais, bien que décadente, paraît inévitable; l’on s’y prépare déjà. C’est la tâche que s’assigne notre génération.

Madame l’Ambassadeur, c’est l’occasion de vous rappeler que le 04 février 2014 vous vous êtes rendue à Douala dans la région du Littoral pour  parler de « la gouvernance, des élections, de la corruption, de la démocratie et des fraudes de toutes sortes au Cameroun. Etes-vous qualifiée pour  débattre de tels sujets dans notre pays ? Quand on sait que toute la classe politique  française (toutes formations politiques confondues) est cernée et rongée par les affaires de corruption, de détournements  de deniers publics et de mafia  à grande échelle. Voilà dont  une France où des Membres du gouvernement aux  anciens Présidents de la République sont quotidiennement interpellés devant les tribunaux  pour népotisme, emplois fictifs et qui prétend donner des leçons aux Africains. C’est le monde à l’envers.

Vous savez que sous d’autres cieux, les Chefs de Mission diplomatique, pour des raisons évidentes, se font très discrets dans leurs déplacements avec des véhicules banalisés. Mais au Cameroun comme en territoire conquis, vous vous  baladez  dans  les quartiers populaires  de Douala : New-Bell, Bali, Quartier Congo comme un Sous-préfet qui rend visite à ses Administrés. Retenez que le Cameroun n’est pas une Préfecture  de la France et Douala non plus une Sous-préfecture. Vous vous permettez de pénétrer dans ces quartiers  populaires, à bord de votre  voiture arborant le fanion du drapeau français comme au bon vieux temps de la Coloniale. Arrêtez  d’irriter et de provoquer  le peuple camerounais.

Après votre rencontre avec les « religieux », puis avec les homosexuels, c’est sans doute le tour des motos taximen et dans un proche avenir vous irez à la rencontre  des « prisonniers  franco-camerounais détenus arbitrairement  dans les geôles camerounaises » et dont la France estime être investie d’une mission universelle pour leur libération. Vous êtes à la recherche des foyers de mécontentement  dans  les quartiers populaires  afin d’allumer et d’alimenter  la contestation sociopolitique et de faire appel  à vos « Humanitaires » qui arriveront avec des armes cachées dans des cartons de riz et de blé génétiquement modifié(OGM), secourir «  les populations en danger ». C’est le scénario et le schéma classiques des foyers de tensions que votre pays  a allumés à travers  l’Afrique.

Si votre objectif ultime est de contrôler la transition au Cameroun pour installer au pouvoir un de vos agents, le peuple camerounais a un message pour votre gouvernement : vous échouerez, contrairement aux relatifs succès que vous avez obtenus dans d’autres pays. Le peuple camerounais est averti et éveillé.

Aux organes de presse locaux, nous disons  qu’il est  regrettable  que les Directeurs de ces publications, jusqu’à ces jours refusent de comprendre le jeu macabre que  la France joue dans notre Pays. En effet, comment comprendre que  Mr Alain Njipou du Journal le Messager ait pu titrer  le 05 février 2014 « Cameroun-Coopération : J.M  Nintcheu montre les vrais visages du Cameroun à la France ». Les journaux   camerounais  devraient plutôt se poser la question suivante : d’où la France prend- t- elle  les milliards qu’elle prétend déverser au  Cameroun  alors qu’elle-même se trouve au bord du gouffre économique et financier ? Pendant ce temps, les bouches du métro de Paris  sont envahies par des Sans Domiciles Fixes (SDF) et qui sont  nourris  aux  soupes populaires. Les Camerounais doivent le savoir.

En 15 avril dernier, vous vous êtes rendue au Siège  social des homosexuels en Afrique centrale à Douala, et qui se fait appeler « Réseau de Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale(REDHAC) », où vous attendait Alice Nkom de sinistre image. Cette Mémé, qui est entrée dans les lugubres annales de notre pays comme une sataniste en rendra des comptes  devant l’impitoyable tribunal de l’histoire.   Quelques jours après, vous  vous êtes retrouvée dans la partie nord du Cameroun. Si vous  n’avez rien à faire dans votre Mission diplomatique, organisez des promenades dans cette immense propriété de plusieurs centaines d’hectares, que l’Administration  coloniale française a arrachée aux  autochtones de Yaoundé, pour  en bâtir un véritable Etat en plein cœur de la Capitale camerounaise que vous appelez abusivement  Ambassade. Le peuple camerounais le sait.

Aux Camerounais qui rêvent ou qui pensent que le salut leur viendra de la France, nous leur demandons de bien regarder  et d’analyser la situation des Etats africains qui, au nom des droits de l’homme ont été déstabilisés par la France. Le sillage de la France en Afrique  c’est  du Sang, des Pillages, la désolation et  la  misère. Visitez la Côte d’Ivoire. Vous  identifierez aisément  des symboles  encore  fumants de «  la coopération française en Afrique ». Même si  les Camerounais, comme dans tous les pays du monde, ont des problèmes  au plan interne, qu’ils évitent de faire appel à  la Communauté dite « Internationale » dont la France s’est autoproclamée le porte-parole. Attention ! Les charognards  et autres mercenaires sont à l’affût  pour leurs intérêts exclusifs. Alors Vigilance.

Veuillez prendre en considération   Madame, l’Expression et le  profond  Sentiment d’une  Société  camerounaise  qui a décidé de se libérer du joug et l’encombrante tutelle d’une France toujours arrogante malgré son irréversible décadence.

Colonialisme, post-colonialisme, recolonialisme…

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Nous confirmons… Très bonne lecture.

— Résistance 71 ~

 

L’afrique peut-elle sortir de la grande nuit ? (Achille Mbembe)

 

Khalifa Touré

 

12 Avril 2014

 

url de l’article:

http://www.cameroonvoice.com/news/article-news-14798.html

 

« Un énorme travail de réassemblage est en cours, vaille que vaille, sur le continent africain. Ses coûts humains sont élevés. Il touche jusqu’aux structures de la pensée » Achille Mbembe.


Le soleil de l’Afrique est peut-être en train de poindre ! C’est le sentiment que l’on éprouve au sortir du livre d’Achille Mbembe, « Sortir de la grande nuit : Essai sur l’Afrique décolonisée ». Au moment où l’on commémore dans la polémique, les 20 ans du génocide rwandais, la lecture de ce livre est comme un heureux hasard, une lumière qui vient éclairer les zones d’ombre d’une histoire de la modernité africaine pas suffisamment cernée et documentée. On ne le dit jamais assez, mais certaines grandes tragédies du monde participent de notre modernité. Elles relèvent plutôt d’un phénomène de réassemblage, un douloureux travail de procréation.

« Sortir de la grande nuit » est paradoxalement une volonté et même un désir  de s’extirper de la mort lorsque le monde est entre chien et loup, lorsque la vie et la mort participent de la même substance comme nous l’avons constaté dans les moments les plus hallucinants de la tragédie rwandaise. Ce qui fait dire d’emblée à Norman Ajari la chose suivante dans un article scientifique intitulé, De la montée en humanité. Violence et responsabilité chez Achille Mbembe : «(…) il s’est agi pour Achille Mbembe de faire jouer, contre l’humanisme ranci du sujet libéral, une pensée de la montée en humanité, c’est-à-dire du mouvement interminable d’arrachement à la violence comme fabrication de l’homme. »

Au reste, il existe d’une part une actualité du monde tout court, rapportée quotidiennement  par les media et dont le public est friand et d’autre part une actualité du savoir qui échappe souvent à notre intérêt. Elle nous arrive de façon parcimonieuse à travers des revues scientifiques, des livres « trop sérieux » et enfin des émissions radiophoniques et télévisuelles qui tentent vaille que vaille d’offrir une place aux choses de l’esprit. Cette dernière actualité est tellement noyée dans  la vague déferlante de la religion médiatique, qu’elle nous cache la grande histoire du monde. Des révolutions silencieuses se déroulent de façon insidieuse sous nos yeux rivés ailleurs. L’actualité du monde ne nous montre que les situations de mise à  mort  au moment où se déroule à l’ombre une grande bataille pour la vie. C’est la découverte, l’analyse et le constat de l’historien camerounais Achille Mbembe qui raconte l’histoire moderne de l’Afrique à partir d’un récit quasi-autobiographique.

Tout est partie du crâne d’un mort, celui de Ruben Um Nyobé, ce héros oublié et à qui on refuse une sépulture digne de son œuvre.  Récit autobiographique puisque la région d’origine de l’auteur est le bastion du mouvement nationaliste au Cameroun, sa pensée est particulièrement ouverte à l’idée de résistance. C’est la raison pour laquelle le martyr du résistant anticolonial Camerounais Um Nyobé est particulièrement présent dans ses écrits. Il y a une mystique de la résistance chez Mbembe : « Interprétation de la vie et préparation à la mort, la lutte pour la décolonisation revêtit, en maintes occasion, l’allure d’une procréation poétique. Chez les héros de la lutte, elle exigea le dessaisissement de soi, une étonnante capacité d’ascèse, et dans certains cas, le tressaillement de l’ivresse » P.19.

La tante d’Achille Mbembe fut l’épouse de Pierre Yém Mback qui a été assassiné en même temps qu’Um Nyobé dans le maquis. Les assassinats de tous ces  martyrs de la lutte pour l’indépendance, Osendé Ofana, Ernest Ouandié, Félix Moumié et leur effacement de l’histoire officielle du Cameroun ne cessent de hanter la pensée et l’œuvre d’Achille. Cela explique peut-être la fascination que la mort et le symbolisme de la nuit exerce sur l’auteur. Achille Mbembe est peut-être un romantique. Il invoque Martin Heidegger dont le commentaire du poète romantique allemand Hölderlin dénote une profonde blessure. La mort, la perte  et le gain appartiennent à la thématique romantique. Achille Mbembe a peut-être et certainement à juste raison une conception nécropolitique du pouvoir. Le pouvoir politique en Afrique contemporaine, c’est le désir de donner la mort, le pouvoir de tout posséder : La vie, les biens, l’argent, le corps, les femmes etc. « Le potentat est donc, par définition sexuel. Le potentat sexuel repose sur une praxis de la jouissance. Le pouvoir postcolonial, en particulier, s’imagine littéralement comme une machine à jouir. Ici, être souverain, c’est pouvoir jouir absolument, sans retenue ni entrave. La gamme des plaisirs est étendue » P. 217

A coté de cette image de l’Afrique qui sombre, il y a cette Afrique qui vient ! Rien à voir avec l’incantation ou l’onirisme : « Un énorme travail de réassemblage est en cours, vaille que vaille, sur le continent africain. Ses coûts humains sont élevés. Il touche jusqu’aux structures de la pensée » écrit Achille Mbembe à la page 13. Cette révolution culturelle silencieuse qui n’est pas suffisamment documentée procède par destruction et réassemblage :« A coté du monde des ruines et de ce qu’on a appelé la case sans clés( chap.5) s’esquisse une Afrique qui est en train de faire sa synthèse sur le mode de la disjonction et de la redistribution des différences ». Le monde africain qui vient se forgera à partir de la force de ses différences et sa matière indocile. C’est un mélange, une créolité dont l’épicentre est Johannesburg et que l’on sent aussi dans les grandes métropoles africaines comme Dakar, Abidjan, Nairobi, Abuja, Lagos  etc.

Cette modernité africaine dénommée Afropolitanisme par Achille est déroutante parce qu’elle est une mixture, une matière dont la forme est en cours. Elle a été « miraculeusement » annoncée par des démiurges comme Edouard Glissant et Franz Fanon dont la pensée irradie de façon constante la marche d’Achille Mbembe. A travers l’Afropolitanisme l’historien nous révèle comment on s’arrache de la mort, de qu’elle manière on fabrique la vie en Afrique. Après  la mort, quelles sont les réserves de vie qui fertilisent notre être dans le monde en tant sujet ?

On s’éloigne ici des idées communes sur la jeunesse africaine et les taux de croissances, c’est davantage la grande révolution sociale des rapports humains qui est constatée dans cette  révolution africaine qui est en cours : « (…) De ce commerce émergent des formations culturelles hybrides et en voie de créolisation accélérée. C’est en particulier le cas de l’Afrique musulmane soudano-sahélienne, où les migrations et le commerce à longue distance vont de pair avec le colportage des identités et une utilisation habile des nouvelles technologies » P.208

Cette Afrique-là qui vient, défie paradoxalement la race. Il n’est pas question ici de nier la race en tant que facteur biologique mais « liquider l’impensé de la race ». Achille Mbembe déconstruit toute forme de pensée qui part de la race comme facteur heuristique, qu’elle soit africaine ou européenne. Pour lui, le racisme est une variante de la démence et de la folie. La psychiatrie est ici convoquée pour expliquer les comportements racistes. « Le nègre n’est pas, pas plus que le blanc » a écrit Franz Fanon. Au-delà de l’universalisme décoloré à la française l’Afrique devra regarder ailleurs. « Sortir de la grande nuit » est d’abord une entreprise critique, une refondation de la critique à l’égard de l’Europe et de nous-mêmes, une éthique de la responsabilité.

L’Afrique devra construire son propre temps. Il faut « provincialiser l’Europe » dit Achille Mbembe. «Nos gouvernants continuent d’agir comme si l’Europe est toujours le centre du monde. Ils agissent comme s’ils vivaient au 19ème siècle. L’Afrique devra sortir de l’Europe. Le temps de l’Europe n’est plus » renchérit-il. De longues pages sont consacrées à la critique et la déconstruction à l’universalisme de type français, « un universalisme ignorant la couleur » et la différence. Un universalisme qui produit un républicanisme dogmatique et une conception répressive et policière de la laïcité. « La France est une nation figée » dit-il sans ambages. Un moment important est consacré à la french Theory et à cette tentative parisienne d’arraisonnement de la pensée sous prétexte de lutte contre le totalitarisme oubliant délibérément le colonialisme.

La France ne veut pas décoloniser malgré les indépendances de forme. En témoignent le néo-révisionnisme de droite et même celui de gauche qui tente de légitimer sournoisement le fait colonial par le refus de la repentance. « La tyrannie de la pénitence» de Pascal Bruckner et « Fier d’être français » de Max Gallo en sont les exemples les plus communs. Ce néo-révisionnisme est un loup qui se drape souvent de la peau de l’agneau. Il a gagné même  l’Afrique ou certains historiens et écrivains prêtent le flanc et ouvrent des brèches en défendant des thèses hâtives et extrêmement faibles sur le plan théorique. Ils ne savent pas que les racistes font feu de tout bois. La formule « Sortir de la grande nuit » ne fait pas référence à la vieille thématique de la renaissance mais à la problématique de la décolonisation de l’Afrique, une tâche qui incombe à la fois aux africains « proprement dit » mais qui appelle aussi à une décolonisation des élites françaises. Achille Mbembe a une conception singulière et inédite de la décolonisation. Il écrit : « La décolonisation est un événement dont la signification politique essentielle résida dans la volonté active de communauté, comme d’autres parlaient autrefois de volonté de puissance(…) elle avait pour but la réalisation d’une œuvre partagée : se tenir debout  par soi-moi-même et constituer un héritage » P.10.

On ne le dit pas suffisamment mais la décolonisation qui reste inachevée est un moment important de la modernité africaine  « la  décolonisation a fini par devenir un concept  de juristes et d’historiens. Ce ne fut pas toujours le cas. Aux mains de ses derniers, cette notion s’est appauvrie. Ses multiples généalogies ont été occultées, et le concept a perdu de la teneur incendiaire qui marqua pourtant ses origines. » P.55.

La décolonisation telle qu’elle a été vécue et professée par les anciennes colonies est une tentative de déclosion du monde, une volonté de vivre en commun dans le monde, c’est une forme de transnationalisation des problèmes et de la vie des anciennes colonies. Telle est l’idée essentielle de « Sortir de la grande nuit » qui appelle les africains à observer une grève morale. « La grève morale est une forme d’insurrection. Son objectif est de briser les forces mortes qui limitent les capacités de vie. Réveiller le potentiel de grève exige aussi que nous réfléchissions simultanément sur la question de la violence révolutionnaire(…) car tout sans versé ne produit pas nécessairement la vie, la liberté, la communauté. Si les africains veulent se mettre debout et marcher, il faudra tôt ou tard regarder ailleurs qu’en Europe » conclut Achille Mbembe.

Le fardeau colonialiste français toujours plus dur à porter…

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Guerre française au Cameroun: La France toujours dans le déni

 

Alain Batchy

 

8 Novembre 2013

 

url de l’article:

http://www.cameroonvoice.com/news/article-news-13170.html

 

Rappelons d’abord que cette guerre, qui a fait selon les rapports militaires français eux-mêmes plusieurs dizaines de milliers de morts, a eu pour fonction d’écraser le mouvement nationaliste camerounais, porté par l’UPC, pour installer un régime « ami » à Yaoundé.

Ce qu’il y a de plus troublant avec nos socialistes de gouvernement, c’est qu’on ne sait jamais exactement s’ils font de l’humour ou s’ils se vautrent simplement dans le cynisme le plus répugnant.

Tel est du moins l’état d’esprit dans lequel on se trouve en lisant la réponse que le gouvernement a apportée, le 23 juillet dernier, à une question écrite posée à l’Assemblée nationale par le député EELV Sergio Coronado.

Ce dernier se demandait si le gouvernement de Jean-Marc Ayrault partageait l’opinion exprimée par François Fillon selon laquelle la guerre féroce que la France a menée au Cameroun dans les années 1950 et 1960 relevait, comme l’affirmait crânement l’ancien Premier ministre en 2009, d’une « pure invention » [1].

Rappelons que cette guerre, qui a fait selon les rapports militaires français eux-mêmes plusieurs dizaines de milliers de morts, a eu pour fonction d’écraser le mouvement nationaliste camerounais, porté par l’Union des Populations du Cameroun (UPC), pour installer un régime « ami » à Yaoundé. Ou, comme l’écrira plus tard Pierre Messmer, Haut-Commissaire de la France à Yaoundé de 1956 à 1958 : «  La France accordera l’indépendance à ceux qui la réclamaient le moins, après avoir éliminé politiquement et militairement ceux qui la réclamaient avec la plus d’intransigeance » [2].

La question de Coronado – qui s’intéressait à un sujet déjà soulevé deux ans plus tôt par Noël Mamère – était d’autant plus légitime que les témoignages et les études s’accumulent ces dernières années, qui prouvent aujourd’hui de façon aussi précise qu’irréfutable que, pour « éliminer » leurs opposants camerounais, «  les gouvernements français de l’époque ont mené de violentes opérations de répression contre [l’UPC] et contre les populations civiles soupçonnées de [la] soutenir ». Parmi ces méthodes, le député relevait, entre autres, les bombardements intensifs auxquels les populations furent soumises, la vaste politique de regroupement forcé de villageois dans des villages militarisés, la mise en place d’une guerre psychologique de grande ampleur et d’un système de torture généralisée, les multiples exécutions extrajudiciaires recensées et les forfaits des sanguinaires milices profrançaises3. Bref, un arsenal analogue à celui qui était déployé, au même moment, en Algérie…

Réponse, donc, du ministère des Affaires Étrangères à Coronado : circulez, il n’y a rien à voir. Après avoir disserté sur les lourdes « responsabilités » de la France à l’époque coloniale et mentionné la « renégociation » des accords de défense franco-camerounais, les petits malins du Quai d’Orsay ne s’intéressent à la question posée par le député Vert que pour le renvoyer « aux historiens à qui il appartient désormais d’exploiter les archives rendues disponibles pour apporter leur éclairage sur la période. »

Plus intéressant encore : la réponse du Quai d’Orsay (version Laurent Fabius) reprend mots pour mots…celle qu’avait formulée deux ans plus tôt le même Quai d’Orsay (version Alain Juppé) à la question de Noël Mamère !

Faut-il expliquer aux services du ministère des Affaires étrangères que des dizaines de chercheurs, journalistes, militants ont déjà publié des quantités d’études et enregistré des centaines de témoignages qui, tous, confirment que la France s’est livrée à des atrocités au Cameroun dans les années qui ont précédé et suivi l’indépendance de ce pays, le 1er janvier 1960 ? Non, il faut simplement comprendre que le pouvoir socialiste, droit dans ses bottes juppéo-sarkozistes, n’a nullement l’intention de suivre le chemin de vérité et de justice auquel a par exemple consenti le Premier ministre britannique David Cameron, pourtant ultra-conservateur, qui reconnaissait en juin dernier, devant la chambre des Communes, les crimes perpétrés par les Britanniques dans les années 1950 au Kenya au cours de la répression des Mau Mau [3].

Imaginons même un instant qu’il faille encore attendre ces mystérieux « historiens » auxquels font appel les gouvernements français successifs cherchant désespérément à nier l’évidence [4].

Les déclarations des officiels français qui, à l’instar des anciens Premiers ministres Michel Debré ou Pierre Messmer ou des militaires Jean Lamberton ou Max Briand, se glorifiaient ouvertement dans leurs Mémoires ou dans leurs rapports d’avoir noyé le nationalisme camerounais dans le sang, ne justifieraient-elles pas à elles seules une enquête interne du côté, par exemple, des archives militaires de Vincennes ?

Malheureusement, et on le sait depuis longtemps, les héritiers de Guy Mollet et de François Mitterrand n’aiment pas plus que leurs homologues pétainistes ou gaullistes ces basses besognes. Outre qu’on risque de se salir les doigts sur de vieilles encres et dans des dossiers poussiéreux, cela imposerait de déroger à la règle d’or du socialisme de gouvernement. Lequel met un point d’honneur à toujours servir les puissants… en évitant soigneusement de rendre justice aux « vaincus de l’Histoire ».

Alain Batchy

www.survie.org
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[1] Conférence de presse, Yaoundé, 21 mai 2009

[2] Question au gouvernement n° 31918 du 9 juillet 2013. Pour une synthèse, voir Thomas Deltombe, Manuel Domergue et Jacob Tatsitsa, Kamerun ! Une guerre cachée aux origines de la Françafrique (19481971), La Découverte, Paris, 2011.

[3] Et débloquait au passage une vingtaine de millions de livres sterling pour tenter de « dédommager » les survivants.

[4] Insultant au passage les travaux réalisés par Mongo Beti, Achille Mbembe, Richard Joseph, Abel Eyinga, Piet Konings, Meredith Terretta, et tant d’autres, parmi lesquels ces dizaines de jeunes historiens camerounais qui recensent depuis des années des témoignages sur les atrocités commises à cette époque par les troupes françaises et leurs supplétifs.