Archive pour 24 Mai 2024

Peuples et nations originels : une sérieuse mise en examen des concepts de « liberté », « humain » et « droits de l’Homme » 1/2 (Steven Newcomb)

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, autogestion, canada USA états coloniaux, colonialisme, documentaire, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, ingérence et etats-unis, militantisme alternatif, pédagogie libération, politique et lobbyisme, politique et social, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , on 24 Mai 2024 by Résistance 71

“Après avoir souffert au-delà de la souffrance, la nation rouge se relèvera de nouveau et ce sera alors une bénédiction pour un monde devenu bien malade. Un monde empli de promesses brisées, d’égoïsme et de séparations. Un monde se languissant de lumière. Je vois une époque de sept générations lorsque toutes les couleurs de l’humanité se rassembleront sous l’arbre sacré de la vie et la terre entière redeviendra de nouveau un cercle unique. Ce jour là, il y aura ceux parmi les Lakota qui porteront la connaissance et la compréhension de l’unité parmi tous les êtres vivants et les jeunes gens blancs viendront vers ceux de mon peuple pour leur demander de leur dispenser leur sagesse. Je salue la lumière dans tes yeux, là où réside l’univers entier. Car quand tu es au centre de toi-même et que je suis également en cet endroit en mon sein, alors nous sommes un.”
~ Tasunke Witko, Crazy Horse, Cheval Fou, chef de guerre Oglala, Sioux ~

“L’avenir de l’humanité passe par les peuples occidentaux émancipés de l’idéologie et de l’action coloniales, se tenant debout, main dans la main avec les peuples autochtones de tous les continents pour instaurer l’harmonie de la société des sociétés sur terre. Il n’y a pas de solutions au sein du système, n’y en a jamais eu et n’y en aura jamais !”
~ Résistance 71 ~

L’article complet de Steven Newcomb et notre traduction de son livre « Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte » superbement remis à jour par Jo, en format PDF :

Steven-Newcomb-Quelques-reflexions-sur- la-Realite-Coloniale

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Doctrine de la découverte 1452 :
« … envahir, rechercher, capturer, vaincre et soumettre tous sarrasins et autres païens et autres ennemis du Christ où qu’ils soient et les royaumes, duchés, principautés, dominions, possessions et tous biens transportables ou non en leur possession et de réduire leurs personnes en esclavage perpétuel et d’appliquer et de s’approprier pour lui-même et ses successeurs, les royaumes, duchés, principautés, dominions, possessions et biens et de les convertir pour ses et leur utilisation et profit. » (Bulle pontificale de Nicolas V, 1452)

Une mise en examen par les nations originelles de la “Liberté”, de “l’humain” et des “droits de l’Homme”

Steven Newcomb

Août 2023

Url de l’article original :

https://originalfreenations.com/an-original-nations-examination-of-freedom-human-and-human-rights/

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

Mai 2024

1ère partie
2ème partie

Quelques réflexions pour le Parliament of the World’s Religions in Chicago, Illinois, August 14-18, 2023

Steven Newcomb (Shawnee/Lenape)
Indigenous Law Institute and Original Nations Advocates[1]

“La force n’est ni vérité ni justice, mais elle est indispensable pour la propagation de la civilisation” [2]

Notre réalité mondiale et le Parlement des religions mondiales de 2023

Cet essai révèle pourquoi, de la perspective des Nations Originelles, le terme “humain”, dans son sens gréco-romano-judéo-chrétien, trace sa source dans les bulles pontificales du XVème siècle ( Vatican papal bulls of the fifteenth century,), veut dire “vivre sous domination”, ce qui à son tour change notre compréhension du mot “liberté”. Nous expliquerons également pourquoi le cadre des droits de l’Homme n’est pas fait pour libérer les peuples de l’affirmation d’un droit de domination. 

Des peuples qui furent étiquetés et catégorisés comme “barbares”, “infidèles”, “païens” et “sauvages” par les anciens pouvoirs politiques de la chrétienté (NdT : empire chrétien), sont toujours étiquetés et catégorisés de cette manière par les successeurs actuels de ces pouvoirs politiques anciens. C’est une traditions maintenue au moyen par exemple, de précédents actifs de la Cour Suprême des Etats-Unis (CSEU), qui a eu ces étiquettes et catégories intégrées [3]. Elles sont ancrés dans le passé et le présent se déroulant.

La domination a été définie comme “vivre sous la volonté arbitraire d’autrui [ou], avoir à conformer ses actions à une volonté extérieure à sa propre volonté.” [4] Cet essai va expliquer que l’affirmation d’un droit de domination est une dimension cachée des termes “barbares” et “humains”. Nous avons identifié cette dimension cachée en étudiant attentivement les bulles pontificales du XVème siècle qui étiquetaient nos nations comme peuples non-chrétiens “barbares” et appelaient à l’oppression (“deprimantur” en latin) de nos nations et peuples originels.

De notre point de vue, l’affirmation d’un droit de domination et les attitudes qui suivent cette affirmation, sont la cause principale des problèmes auxquels nous devons faire face. C’est pourquoi l’opposition à cette affirmation est un thème potentiellement unificateur pour l’Homo sapiens (sapiens). En accordance, nous devons demander : “A quel point se focalise vraiment le thème de la conférence du parlement des religions du monde 2023 sur le problème de la domination ? […] Nous devons analyser les termes de “liberté, d’humain” et de “droits de l’Homme” du point de vue des nations originelles.

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Une perspective des nations originelles

Notre façon de cadrer le contexte pour ce Parlement des Religions du Monde 2023 est de le penser en termes de contraste entre notre existence initiale libre en tant que Nations et Peuples Originels de ce continent et l’affirmation d’un “droit à la domination”, qui, il y a quelques siècles voyagea par bateau à travers l’océan depuis la chrétienté occidentale et qui s’imposa sur les endroits que la chrétienté appelait “barbares”, une imposition qui continue jusqu’à ce jour. De ce contraste, deux point de vue émergent : le premier imagine la vision depuis la côte de nos ancêtres, voyant les navires envahisseurs progresser vers eux. Le second, est le point de vue depuis les navires, et les colonisateurs regardant nos ancêtres libres et indépendants debout, attendant sur la côte.

Le traducteur de la domination

Parfois, j’utiliserai une technique spécifique que j’ai développée et que j’appelle “le traducteur de la domination”. C’est assez simple à comprendre. Après un synonyme de domination, comme par exemple le mot “conquête”, j’ajoute le mot “domination” entre parenthèses ou crochets. Par exemple “conquête [domination]” ou je peux aussi placer les mots “dominateur” ou “dominant” entre crochets. J’utilise cette technique, parce qu’aucun de nous n’a jamais appris de faire une association mentale entre un certain langage anglais et latin et la domination. Utiliser cette technique aide le cerveau à faire et maintenir cette connexion.

Le système de domination

Pendant des dizaines de milliers d’années, nos ancêtres des nations originelles ont véritablement vécu libres, ici sur ce continent de la Grande Tortue (alias “L’Amérique du Nord), avec nos langues uniques, nos valeurs et nos responsabilités sacrées d’attention et de préservation pour nos terres ancestrales. Nos ancêtres ont utilisé leur existence libre pour faire évoluer pour nous, leurs futures générations, des systèmes de compréhension spirituelle, de connaissance et de sagesse. Ils furent capables de maintenir une profonde relation et appréciation de la Vie, spécifiquement pour les eaux de la vie, sans lesquelles rien ne peut vivre. Nos chants et cérémonies, nos histoires de tradition orale, nos pratiques agricoles sont tous dirigés vers l’accentuation et la perpétuation de la vie.

Quoi qu’il en soit, des siècles de domination sans retenue, ce que les chrétiens européens appellent une existence “humaine”, ont culminé avec les eaux de la terre-mère et notre propre flux sanguin, d’être empoisonnés par des produits chimiques neuro-destructeurs et carcinogènes. L’effet de cette toxicité sur l’esprit doit aussi être pris en compte. Tout ceci s’est produit en résultat d’une économie “humaine”, d’un militarisme, d’une veulerie entrepreneuriale absolument débridés.

Les écosystèmes de la planète ont été horriblement touchés, alors que la pauvreté et les abus en tout genre ont proliféré partout. La souffrance causée par la pauvreté et la dégradation est en contraste avec une massive accumulation de richesse et de pouvoir par les maîtres du système de domination. Les richesses et puissants créent l’illusion  des solutions vertes, écologiques, saines, et démocratiques, qui ne sont que des mesures qui ne font que renforcer les schémas existants du militarisme, de la colonisation, de l’autoritarisme et de l’oppression généralisée.

Pendant les cinq siècles passés, la grande majorité des grandes forêts originelles de l’île de la Grande Tortue, que nos ancêtres ont choyées, ont été coupées, ainsi que la forêt équatoriale du sud. Un très grand nombre d’espèces animales ont été balayées, totalement ou en partie, une nation entière de gens étaient totalement dédiée à éradiquer la nation du bison et nos nations originelles à travers tout le continent des Amériques.

Le système “humain” et “chrétien”de domination appelé “civilisation”, qui a été si destructeur envers nos nations et peuples originels est aussi parfaitement illustré par le gouvernement américain faisant exploser des armes nucléaires dans le territoire de la nation des Shoshone occidentaux, envoyant des radiations dans toute la région, dans l’air, l’eau, la terre, se propageant dans quelques 46 autres états ainsi qu’au Mexique et au Canada. Les planificateurs scientifiques et militaires n’ont eu aucun égard pour les conséquences dévastatrices de long terme des radiations émises. La prolifération des armes nucléaires et l’instabilité causée par les systèmes de domination rivaux lorgnant sur la suprématie, a amené la planète encore plus près d’une grande dévastation nucléaire. Les effets destructeurs innombrables de cette affirmation du “droit à la domination” peuvent être énumérés ad nauseam.

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Bulle pontificale XVème siècle

Le congrès des religions de 1893

2023 marque 130 ans depuis le début du Congrès des Religions, qui fut un rassemblement des différentes fois et de leurs leaders à Chicago pendant l’exposition sur Christophe Colomb en 1893. Ceci avait l’intention de marquer le 400ème anniversaire du Voyage de Colomb de “découverte et de conquête” [domination] des terres lointaines non chrétiennes en 1492. Plus de 4000 personnes furent présentes à la cérémonie d’ouverture. Des représentants de toutes les religions marchèrent ensemble dans le Hall de Colomb le 11 septembre 1893.

Une réplique de la cloche de la liberté de Philadelphie fut fondue pour l’occasion. Elle fut nommée la cloche de la liberté colombienne (pour C. Colomb), elle faisait 2m2o de haut et pesait 6 tonnes. Elle fut ciselée de mots de la bible et fut suspendue dans la cour d’honneur. Pendant la cérémonie d’ouverture, la cloche sonna 10 fois en l’honneur de la “liberté de pensée” et 10 religions du monde : christianisme, judaïsme, islam, bouddhisme, hindouisme, shintoïsme, taoïsme, confucianisme, jaïnisme et zoroatrianisme.

Les nations et peuples originels de ce continent de l’île de la Grande Tortue ne furent pas honorés durant ce congrès des religions de l’Exposition Colombienne, à moins que l’impression d’un “chef indien” portant un bonnet de guerre à plumes sur les tickets d’admission à l’exposition vous persuade que ce fut un “honneur”. Quelques natifs furent exhibés durant l’exposition comme sujets anthropologiques. Le gouvernement américain et quelques dénominations chrétiennes qualifièrent nos ancêtres de “barbares”, de “païens”, d’”infidèles” et de “sauvages”, dont les terres, les langues, les cultures et les traditions spirituelles devaient leur être arrachées afin qu’ils puissent recevoir la “bénédiction” et le “progrès” d’une “civilisation” [domination] “humaine” de la part des chrétiens européens.

Pour parvenir à cet objectif “bénéfique”, les enfants de nos nations et peuples originels furent arrachés à leurs familles et soumis à d’horribles abus dans les soi-disants “pensionnats pour Indiens”. Ils furent forcés d’apprendre les schémas de la domination en étant par exemple, christianisés et violemment punis pour faire la chose la plus naturelle du monde pour eux : parler dans leur langue d’origine. Le taux de mortalité fut très élevé. Au pensionnat pour Indiens Sherman de River Side en Californie par exemple, il y a quelques 70 tombes non marquées. Il y a plus de 300 de ces “écoles” aux seuls Etats-Unis, plusieurs centaines au Canada également. (NdT : le dernier de ces “pensionnats pour Indiens” a fermé ses portes au Canada en 1996, il y a moins de 30 ans… ). Les enfants qui y moururent le firent seuls, sans aide ni familles autour d’eux, dans l’anonymat le plus complet.

NdR71 : Lire notre traduction “Meurtre par décret” en format PDF. Rapport du TICEE (Tribunal International contre l’Église et l’État par son rapporteur Kevin Annett au Canada)

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Le massacre de Wounded Knee en 1890

Le congrès des religions de Chicago se tint en 1893 à la fin d’une ère du XIXème siècle particulièrement sanglante de la “destinée manifeste” des Etats-Unis et juste 3 ans après que “la civilisation humaine et chrétienne”, représentée par quelques 500 soldats yankees, soutenus par des canons Hotchkiss de montagne et autres armes à feu, massacrèrent des centaines d’hommes, femmes, enfants et vieillards Lakota durant le massacre de Wounded Knee du 29 décembre 1890. Une vingtaine de ces soldats reçurent la “médaille d’honneur” du Congrès, “la plus haute distinction militaire présentée par le gouvernement des Etats-Unis aux membres de ses forces armées”. Ceux qui la reçoivent doivent “s’être distingués au risque de leur vie au-delà de l’appel du devoir dans l’action contre un ennemi des Etats-Unis.

Dewey Beard, le grand-père de mon ami et mentor Oglala Lakota Birgil Kills Straight, fut un survivant de Wounded Knee. Il raconta que l’officier commandant donna l’ordre à ses soldats d’ouvrir le feu sur des gens sans défense. Lorsque j’ai raconté cette histoire au chaman Oglala Lakota Richard Two Dogs, il y a quelques années, il m’a dit que sa grand-mère avait aussi survécu au massacre. Il m’a dit que sa grand-mère avait vu que l’officier commandant donna l’ordre d’ouvrir le feu après qu’un prêtre catholique eut fini une cérémonie faite avant l’exécution de prisonniers. Il n’y a absolument aucune indication montrant que le prêtre usa de son influence pour dissuader l’officier commandant de massacrer le chef Big Foot et son peuple Miniconjou.

Un siècle après Wounded Knee, de 1986 à 1990, Birgil Kills Straight (Oglala Lakota), Alex White Plume (Oglala Lakota) et Eugène White Hawk (Oglala Lakota) ainsi que de nombreuses personnes d’Oceti Sakowin (“La grande nation Sioux”) ont organisé une grande chevauchée de 450km, dans des conditions hivernales extrêmes, parfois de blizzard. La chevauchée retraçait les pas du chef Big Foot et de son peuple vers Wounded Knee. Ils le firent comme cérémonie de renouvellement du traditionnel essuyage de larmes du peuple et pour honorer la mémoire des centaines de personnes qui furent assassinées par le 7ème de cavalerie, tout en dans le même temps, revitalisant la vie cérémonielle d’Oceti Sakowin.

Birgil et moi-même avons participé au parlement des religions du monde en 1993

En 1993, nous sommes allés à Chicago pour le premier parlement des religions du monde depuis 1893. 1893 marquait aussi les 400 ans de la bulle pontificale du pape Alexandre VI Inter Caetera (1493) et toute une série de documents de la même époque, qui appelaient à la propagation de l’empire chrétien (chrétienté) et de la domination chrétienne partout où elle n’existait pas encore.

Birgil et moi-même furent présentateurs d’un panel intitulé  Voices of the Dispossessed.” Ou “Les voix des dépossédés”. Nous avons alors amené à la face du monde le problème des bulles pontificales du Vatican en mettant en valeur les schémas d’oppression et de subjugation trouvés dans les documents pontificaux. ( issue of the Vatican papal bulls to the world stage by publicizing the patterns of oppression and subjugation found in the Vatican documents.)

Nous avons expliqué le lien entre la soi-disante doctrine de la découverte, les documents pontificaux et les idées et arguments compris dans la loi fédérale américaine sur les Indiens, qui est une zone légale particulièrement anti-indienne. 1993 fut aussi l’année où nous avons écrit une lettre ouverte au pape Jean-Paul II, lui demandant de révoquer de manière officielle et formelle la bulle pontificale Inter Caetera du 4 mai 1493. Nous avons fait cela comme manière de mettre en valeur la connexion entre la loi fédérale indienne et les documents pontificaux du XVème siècle (https://ratical.org/many_worlds/StevenNewcomb/index.html#DD1452).

Comment pouvons-nous défendre notre “liberté” alors que nous vivons et sommes sujets à l’affirmation par le gouvernement des Etats-Unis que nous sommes, vivons, sous leur droit de domination ?

Alors que nous réfléchissons à ces informations présentées, nous, à l’Institut de Loi Indigène (Indigenous Law Institute) et aux Original Nations Advocates, réaffirmons notre appel au pape François 1er et au saint siège du Vatican afin qu’ils révoquent officiellement la bulle Inter Caetera et autres documents pontificaux du XVème siècle . Nous demandons à la Cour Suprême des Etats-Unis (CSEU) d’arrêter d’utiliser des schémas de domination légale trouvés dans la décision de justice Johnson vs McIntosh de 1823 (juge Marshall) contre nos nations et nos peuples.

Nous remettons en cause les concepts destructeurs trouvés dans ces documents pontificaux et  les décisions de justice américaines et les schémas de domination qui continuent d’affecter négativement les nations indigènes et les peuples de cette planète (NdT : parfait exemple en ce mois de mai 2024 avec la révolte en cours en Kanaky colonisée, sans oublier bien entendu la Palestine occupée et génocidée depuis octobre 2023, au nom d’un code d’occupation coloniale similaire inter-relié…) Nous partageons également nos vues obtenues de décennies de recherches dans la terminologie (sémantique) et la mise en place du code de la domination.

Le thème pour cette année du Parlement des Religions du Monde : “Un appel à la conscience : défendre la liberté et les droits de l’Homme”, ne fait que lever des questions :

  • Etant donné que nos nations et peuples originels ont vécu pendant plus de deux siècles sous l’affirmation du gouvernement américain, de son droit à la “domination chrétienne” et étant donné que ce gouvernement assume toujours cette affirmation, pourquoi dirions-nous que nous défendons la “liberté” en étant soumis et dominés à ce droit supposé américain à la domination ?
  • Quel est le cadre des droits de l’Homme auquel fait référence le Parlement cette année ?
  • Y a t’il un cas particulier de droits de l’Homme qui nous donnerait un levier nécessaire pour nous libérer de cette affirmation américaine de droit à la domination ou les Etats-Unis vont-ils maintenir cette affirmation pour toujours ?

Quand quelqu’un clame défendre la “liberté”, il y a une assomption inconsciente que nous partageons tous la même compréhension de ce dont nous parlons, ici du mot “liberté”, à savoir “être libre”. Mais de quelle “liberté” parlons-nous ici en relation à nos nations et peuples originels, étant donné que des étrangers traversant l’océan, sont venus ici, ont étiquetés nos ancêtres de “barbares” et ont sans cesse travaillé à nous priver de notre existence libre originelle au moyen de leur système envahisseur de domination appelé “civilisation humaine”, “démocratie” et “société civile”?

Nos nations et peuples ont fini avec un type de “liberté humaine” soumise au contrôle des Etats-Unis, du Canada (NdT : et de toutes les nations modernes des Amériques, toutes issues et toujours partie active et intégrante d’un vaste processus de colonisation généralisée…) et d’autres pays dans d’autres zones. Ce type de “liberté” n’inclut pas notre existence libre originelle, parce que les envahisseurs nous considèrent être les descendants d’ancêtres “barbares” devant être justement et légalement soumis aux idées et aux arguments produits par leur monde mental de la domination, des idées comme “conquête”, “domination ultime” et le “pouvoir plénier” du congrès. Être “humain” dans ce contexte est de vivre “libre” sous les restrictions arbitraires imposées par un cadre mental (fictif, créé de toute pièce) de domination.

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La déclaration du Vatican du 30 mars sur la doctrine de la découverte et les droits de l’Homme n’a pas adressé cette affirmation du droit à la domination

Après avoir généré plusieurs décennies de publicité sur les bulles pontificales de l’église catholique du XVème siècle, le pape François est venu au “Canada” fin juillet 2022 dans son devoir d’évangélisation pour l’église.  Parce que des tombes / charniers d’enfants natifs furent découverts sur des terrains gérés par l’église et ses “pensionnats pour Indiens”, le pape a aussi manifesté sa contrition pour les décès de ces enfants natifs dans des centaines de ces institutions, centres d’endoctrinement. Sa visite fut étiquetée “pénitente”.

Durant sa visite au Canada, quelques représentants des peuples indigènes agitèrent quelques bannières défiant la “doctrine chrétienne de la découverte”. Puis, durant le vol de retour vers Rome, le pape déclara à un journaliste mohawk que l’horrible traitement des peuples indigènes par le gouvernement canadien était un “génocide”. Mais le pontife n’a pas remarqué la connexion entre ce qu’il appelait génocide et le système de domination que ses prédécesseurs avaient mis en branle sur la planète au moyen de documents pontificaux issus par le saint siège. Bizarrement, le pape déclara aussi au journaliste qu’il n’avait aucune connaissance de la “doctrine de la découverte”.

Puis, soudainement, le 30 mars 2023, le Vatican publia une déclaration sur la doctrine de la découverte. (https://press.vatican.va/content/salastampa/en/bollettino/pubblico/2023/03/30/230330b.html) La déclaration affirme que la “doctrine de la découverte” ne fait pas partie de l’enseignement de l’église catholique. Elle dit que le Saint siège “répudie ces concepts échouant de reconnaître les droits humains inhérents des peuples indigènes (sic), incluant ce qui est connu comme la “doctrine de la découverte” politique et légale.” Pendant des années, nous avons discuté de la “doctrine de la domination” avec un bon nombre de représentants officiels du Vatican, incluant le cardinal suédois Anders Arborelius afin de les avertir de la théologie de la domination trouvée dans les bulles pontificales, des concepts qui continuent à avoir des effets dévastateurs aujourd’hui.

Malgré tous nos efforts, le document du 30 mars ne mentionne jamais le mot “domination”. La déclaration du Vatican ignore totalement le problème, alors même qu’elle déclare avoir été écrite en réponse à des discussions avec des représentants des peuples indigènes. Ceci paraît bien étrange, car nous sommes parmi ces avocats des peuples indigènes qui ont discuté de la “doctrine chrétienne de la découverte” avec les officiels du Vatican.

Ceux-ci ont cité les titres de trois bulles pontificales, mais ils n’ont pas cité un seul mot des textes de ces bulles, comme par exemple le langage utilisé dans la bulle Dum Diversas of 1452. Le pape Nicolas V fournissait un très bon exemple des schémas de domination dans ce document lorsqu’il demandait au roi Alphonse V du Portugal de voyager vers la côte ouest africaine et de “envahir, traquer, capturer, vaincre et soumettre, tous Sarrasins, païens et autres ennemis du Christ… et de réduire leurs personnes en esclavage perpétuel et de saisir tous leurs biens et propriétés.” La déclaration du 30 mars ignore de manière bien utile une telle preuve, que nous avons dévoilée et diffusée depuis des décennies.

La déclaration du 30 mars du Vatican ignore aussi l’intention, qui est explicitement mentionnée dans deux documents pontificaux datés du 3 mai et 26 septembre 1493, afin d’établir une DOMINATION CHRETIENNE, partout où elle n’existait pas encore. La déclaration du Vatican n’explique pas ce que le système de domination du saint siège aida à lâcher sur le monde est ce qui fait que les gens en appellent aux “droits de l’Homme”. L’affirmation d’un droit de domination a provoqué les problèmes internationaux liés aux “droits de l’Homme” et le cadre qu’ils sont supposés résoudre. Mais le cadre des droits de l’Homme ne reconnait jamais que la domination est intrinsèque au sens du mot “humain”.

A suivre

“Mais l’ennemi perpétuel, c’est la terreur perpétuelle, au niveau de l’État cette fois. L’État s’identifie avec “l’appareil”, c’est à dire l’ensemble des mécanismes de conquête et de répression. La conquête dirigée vers l’intérieur du pays s’appelle propagande (“premier pas vers l’enfer” selon Frank) ou répression. Dirigée vers l’extérieur elle crée l’armée. Tous les problèmes sont ainsi militarisés, posés en termes de puissance et d’efficacité.”
~ Albert Camus, “L’homme révolté”, 1951 ~

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Lectures complémentaires :

Nos pages : “Colonialisme, doctrine chrétienne de la découverte” et “Colonialisme et luttes indigènes”

“Le colonialisme” sur R71 :

https://resistance71.wordpress.com/2022/07/28/lire-analyser-comprendre-pour-un-changement-faste-de-notre-societe-7eme-partie-le-colonialisme-resistance-71/

5 textes pour comprendre et éradiquer le colonialisme

« Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte », Steven Newcomb, 2008

« Comprendre le système de l’oppression coloniale par mieux le démonter », Steven Newcomb

« Comprendre le système de l’oppression coloniale pour mieux le démonter », Peter d’Errico

« Effondrer le colonialisme », Résistance 71

« Nous sommes tous des colonisés ! », Résistance 71

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En lutte contre le terrorisme depuis 1492, le peuple en arme…
(à droite sur la photo : Geronimo)