La résistance politique passe par arrêter de « comprendre » les choses par le prisme de la propagande…

–“Du point de vue de la liberté, quel système serait le mieux ? Dans quelle direction devrions-nous désirer que les forces du progrès se meuvent ? Je n’ai aucun doute que le meilleur système serait un système pas très éloigné de celui encouragé par Pierre Kropotkine.”–

-Bertrand Russell (1919) –

 

Nous avions deja publié il y a quelques mois, une traduction de longs extraits d’un ouvrage non réédité en français de Pierre Kropotkine “Evolution and Environment”, que nos lecteurs peuvent consulter sur ces liens:

Evolution et environnement 1ere partie

Evolution et environnement 2eme partie

L’œuvre et les recherches de Kropotkine sont un antidote contre le poison du darwinisme-social qu’on nous sert jusqu’à plus soif, pseudo-science au goût frelaté de malthusianisme, qui est le credo et le dogme de l’oligarchie en place pour continuer à pouvoir semer discorde, division, chaos et misère sociale sous couvert d’”inéluctabilité” socio-biologique renforçant ainsi par la creation d’une fatalité illusoire, leur pouvoir usurpé aux peuples par le biais de la tromperie, et maintenu par l’oppression et l’exploitation.

Nous devons lire et relire Kropotkine comme l’ont fait et le font toujours nombre de scientifiques qui refusent que la science soit detournée au profit du seul petit nombre.

Ici nous avons traduit une partie de la définition de l’anarchisme que Pierre Kropotkine écrivit pour l’Encyclopaedia Britannica en 1910. Pierre Kropotkine était le scientifique des débuts du mouvement anarchiste. Ses séminaires scientifiques et politiques ont été suivis par des milliers de personnes tant lors de ses deux grandes tournées aux Etats-Unis qu’en Europe. Il était un scientifique de renommée mondiale et est considéré aujourd’hui par bon nombre de socio-biologistes comme le “père” de la biologie sociale moderne.

Il est important qu’au XXIème siècle, la majorité de la population commence à comprendre que l’anarchisme n’est en aucun cas ce à quoi se réfère sans cesse l’establishment de “droite comme de gauche” pour qui la seule priorité est la pérennité du système ad vitam aeternam, pour des raisons oligarchiques plus qu’évidentes.

L’anarchisme c’est de fait l’ordre sans l’état. Antonin Artaud disait des anarchistes “qu’ils (les anarchistes) sont tellement épris de l’ordre qu’ils n’en supportent aucune caricature.” L’anarchisme n’est en rien le chaos politique et social, que la “bienpensance” et “bienséance” nous inculquent, bien au contraire. L’anarchisme n’est pas le nihilisme cher aux héros déracinés des grand romans de Dostoïevsky; l’anarchisme est un ordre social et moral fondé sur l’égalitarisme et la justice sociale réels, non coercitifs, fondé sur la solidarité et la coopération, qui sont des parties intégrantes primordiales de la nature humaine, muselées et réprimées depuis des siècles, d’abord par la morale judéo-chrétienne, puis par le matracage des pseudo-sciences sociales fondées sur le malthusianisme et le darwinisme-social, qui ont enchaînés la conscience sociale et politique humaine aux boulets de l’ingénierie sociale, grande machine à broyer la démocratie et fabriquer le consentement oligarchique.

Pierre Kropotkine a ancré l’anarchisme dans la science et l’universalité de la pensée. Il est un des patrimoines de l’humanité à (re)découvrir de toute urgence.

–“Kropotkine ne fut pas seulement la première personne qui démontra que la coopération était très importante dans le règne animal, il fut la première personne qui argumenta fortement dans le sens où la compréhension de la coopération au sein du monde animal éclairera la compréhension de la coopération humaine et de fait, aiderait la science à faire la promotion de la coopération humaine, ainsi permettant peut-être de sauver notre espèce de l’extinction par auto-destruction. Aujourd’hui, les anthropologues, les scientifiques de la politique, les économistes et les psychologues publient des centaines d’études chaque année sur la coopération humaine et les chercheurs dans ce domaine commencent seulement à réaliser que tant de sujets qu’ils étudient furent en première instance suggérés et étudiés par Pierre Kropotkine.”–

(Dr. Lee Alan Dugatkin, professeur de biologie à l’université de Louisville, KY, USA. Maître ès Histoire et Docteur (Ph.D) en Biologie évolutive, auteur de neuf livres sur l’évolution, “The prince of evolution”, 2011)

 

– Resistance 71 –

 

Anarchisme

 

The Encyclopaedia Britannica, 1910.

par Pierre Kropotkine

 

– Extraits –

 

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

ANARCHISME, nom donné à un principe ou une théorie de la vie et de conduite sociale sous lequel la société est conçue sans gouvernement; l’harmonie dans une telle société étant obtenue non pas par soumission à la loi, ou par l’obéissance à une autorité, mais par l’adhésion libre conclue par les membres des différents groupes territoriaux ou professionnels, librement constitués pour le fonctionnement de la production et de la consommation, ainsi que la satisfaction des besoins variés et infinis, des aspirations des êtres civilisés. Dans une société développée selon cette ligne de conduite, les associations volontaires, qui commencent déjà à représenter maintenant tous les secteurs de l’activité humaine, prendraient encore plus d’importance jusqu’à se substituer aux fonctions de l’état. Elles représenteraient un réseau inter-connecté, composées d’un nombre infinis de groupes et de fédérations de toutes tailles, locales, régionales, nationales, internationales, temporaires ou plus ou moins permanentes, à des fins multiples telles que: production, consommation, échange, communications, arrangements sanitaires, éducation, protection mutuelle, défense du territoire, etc et d’un autre côté pour la satisfaction d’une demande toujours plus grande pour les arts, les sciences, la technologie, la littérature et les besoins sociaux. De plus cette société ne serait en rien immuable. En effet, comme dans la vie organique en général, l’harmonie résulterait du changement permanent et des ajustements faits afin de maintenir l’équilibre entre la multitude des forces et des influences; cet ajustement serait plus facile à faire dans la mesure où aucune des forces ne jouirait de la protection spéciale de l’état.

Il est envisagé que si la société était organisée selon ces principes, l’Homme ne serait pas limité à l’exercice de sa force dans la production de travail au sein d’un monopole capitaliste, maintenu par l’état; il ne serait pas non plus limité à exercer sa volonté par peur d’une punition ou par une obéissance aveugle envers des entités individuelles ou métaphysiques, qui toutes deux mènent à la diminution de l’initiative et à la servilité de l’esprit. Il serait guidé dans ses actions par sa propre compréhension, ce qui serait nécessairement porteur d’une impression d’action libre et d’une réaction entre lui-même et les conceptions éthiques de son environnement. L’Homme serait alors en mesure de développer pleinement ses capacités et facultés intellectuelles, artistiques et morales, sans être surmené par le travail pour les monopolistes ou par la servilité ou l’inertie d’esprit du plus grand nombre. Il serait alors capable d’atteindre la plénitude de lui-même, ce qui n’est pas possible dans le contexte actuel d’individualisme ou sous aucun système de socialisme d’état dans le soi-disant Volkstaat (état populaire) […]

[…] Concernant leurs conceptions économiques, les anarchistes, de manière commune avec tous les socialistes, desquels ils constituent l’aile gauche, maintiennent que le système actuel dominant de la propriété privée de la terre et de la production capitaliste pour le seul profit, représentent un monopole qui est en contradiction directe avec les principes de justice et d’utilité. Ils sont les obstacles principaux qui empêchent le succès de la technologie moderne et son avènement pour le bien de tous afin de produire le bien-être de toutes et tous. Les anarchistes considèrent le système du salariat et de la production capitaliste comme un obstacle au progrès. Mais ils insistent pour dire que l’état était et continue d’être l’instrument clef par lequel le petit nombre peut monopoliser la terre, et les capitalistes s’approprier annuellement une part disproportionnée du surplus de production accumulé. En conséquence, tout en combattant le monopole actuel de la terre, et le capitalisme dans son ensemble, les anarchistes combattent avec la même vigueur l’état qui est le soutien principal de ce système. Pas une forme particulière d’état, mais l’état en général, qu’il soit monarchique ou même une république gouvernée par le moyen du référendum […]

[…] L’organisation de l’état ayant toujours été, à la fois dans l’histoire ancienne et plus récente (empire macédonien, empire romain, les états modernes européens bâtis sur les ruines des cités médiévales autonomes), l’instrument de l’établissement des monopoles en faveur des minorités dirigeantes; cette organisation ne peut pas être amenée à travailler pour la destruction de ces monopoles. Les anarchistes considèrent ainsi, que donner à l’état toutes les sources majeures de la vie économique, le sol, les mines, les chemins de fer, les banques, les assurances, etc, ainsi que la gestion des branches principales de l’industrie, en plus de toutes les fonctions déjà entre ses mains telles l’éducation, les religions d’état, la défense du territoire etc, ne ferait que créer de fait un nouvel élément de tyrannie. Le capitalisme d’état ne fera que renforcer les pouvoirs de la bureaucratie et du capitalisme. Le véritable progrès réside dans la décentralisation à la fois territoriale et fonctionnelle, dans le développement d’un esprit d’initiative personnel et local et de la fédération du plus simple vers le plus compliqué au lieu de la présente hiérarchie allant du centre vers la périphérie.

Communément avec la plupart des socialistes, les anarchistes reconnaissent que comme toute évolution dans la nature, la lente évolution de la société est suivie de temps à autre par des périodes d’accélération de l’évolution que l’on appelle des révolutions et ils pensent que l’ère des révolutions n’est pas encore finie. Des périodes de changement rapides suivront des périodes d’évolution lente, et nous devons tirer avantage de ces périodes non pas pour augmenter la puissance et le pouvoir de l’état, mais pour les réduire, par l’organisation dans chaque ville, chaque commune de groupes locaux de producteurs et de consommateurs et les fédérations de ces groupes à l’échelon régional, national et international.

En vertu de ces principes pré-cités, les anarchistes refusent de faire partie de l’organisation étatique actuelle et de la soutenir en y infusant du sang neuf. Ils ne cherchent pas à en faire partie et invitent les travailleurs à ne pas y participer et à ne pas créer de partis politiques dans les parlements. De ce fait, depuis la fondation de l’Association International des Travailleurs en 1864-66, ils ont décidé de promouvoir leurs idées directement au sein des organisations de travailleurs et d’impliquer ces syndicats dans une lutte directe contre le capital, sans placer leur foi dans une législation parlementaire […]

4 Réponses to “La résistance politique passe par arrêter de « comprendre » les choses par le prisme de la propagande…”

  1. […] l’anarchie et sa définition dans l’Encyclopedia Britannica (extraits traduits par nos soins ici), Kropotkine définit l’anarchisme comme une société “sans gouvernement, l’harmonie dans […]

  2. […] l’anarchie et sa définition dans l’Encyclopedia Britannica (extraits traduits par nos soins ici), Kropotkine définit l’anarchisme comme une société “sans gouvernement, l’harmonie dans […]

  3. […] Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~ Partager :Facebooke-mailImprimer Publié dans […]

  4. Bonjour auriez vous accomplis la traduction complète de l’article de l’encyclopédie britannica, je ne trouve ici et la que des traduction partielle malheureusement :/

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