Résistance au colonialisme: En finir avec la sémantique colonialiste… (Steven Newcomb)

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Notre dossier: La sémantique colonialiste (Steven Newcomb)

« Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte » (Steven Newcomb, version pdf)

 

Les constructions imposées et intrusives de l’esprit européen

 

Steven Newcomb

 

22 juillet 2017

 

url de l’article original:

https://indiancountrymedianetwork.com/news/opinions/invasive-imposed-constructs-european-mind/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

La théorie du “titre aborigène” est un ensemble d’idées produit par l’esprit euro-américain, par des métaphores et autres constructions mentales, qui, au moyen d’une vague d’actes génocidaires, fut imposé par la force sur nos peuples et nations originels, ainsi que bien d’autres idées de provenance étrangère. La “théorie du titre indigène” est focalisée sur le livre “Indian Pueblo Water Rights,” co-écrit par Charles T. DuMars, Marilyn O’Leary et Albert E. Utton. Le premier développement du chapitre 3, “The Pueblo Water Right as Aboriginal,” , parle du développement historique de la “théorie du titre aborigène”.

Au moment de l’exploration et de la colonisation européenne de l’Amérique du Nord, les seuls habitants du sous-continent étaient les Indiens.” nous disent les auteurs. Avant que les chrétiens européens n’amènent de manière invasive les mots d’”Indien” ou d’Indiens” sur cette terre maintenant usuellement appelée “l’Amérique du Nord”, il n’y avait personne vivant ici, qui était identifié par ce nom. Pas une seule nation originelle dans cette partie de la planète s’identifiant du nom “d’indien” ou “Indiens”. Pour le dire autrement, avant que les envahisseurs christo-européens n’envahissent notre partie de la planète, absolument personne ici ne vivait sous ce nom “d’Indien”, absolument personne.

De tels termes sont des métaphores, mentalement et linguistiquement inventées par les Européens et, soutenues par des formes et moyens variés de force, projetés par les Européens sur ces peuples et nations vivant dans une vaste zone géographique que les Européens d’il y a longtemps connaissaient sous le non des “Indes”. Nos peuples et nations n’étaient pas, si ce n’est dans l’imaginaire et le langage des chrétiens ainsi que leurs activités mentales, connus sour le vocable “d’Indiens”.  Nos ancêtres ne furent connus sous ce nom qu’en direct résultat de l’imposition de leur langage et idées par les christo-européens sur nos ancêtres. Les chrétiens européens ont mentalement projeté des mots et des idées tels qu’Indiens” et “occupation indienne”, ils affirmèrent ensuite “voir” ces apports exogènes alors qu’ils n’étaient que leurs propres projections mentales et linguistiques.

Le livre “Indian Pueblo Water Rights” parle de “l’occupation indienne des terres” sans jamais mentionner que “l’occupation indienne” est une idée totalement inventée par les Européens, puis imposée sur  nos peuples et nations et leurs territoires. Les auteurs disent: “L’occupation originale des sols indienne est appelée possession aborigène et porte avec elle le titre aborigène d’occupation des sols.” Leur utilisation du mot “originale” pose la question “originale de quoi ?” L’expression utilisée “l’occupation originale indienne” suggère que le concept ou idée “d’occupation des sols indienne” a un point de départ ou un endroit d’origine. A la réflexion, cet “endroit” d’origine est trouvé dans les opérations imaginaires de l’esprit intrusif et envahisseur européen. Pour insister plus avant sur leur vision, les auteurs ajoutèrent une note de bas de page où ils écrivent: “Il n’y a aucun doute que les Indiens Pueblo étaient les occupants aborigènes originels.” Cette mention du “aucun doute” rend pour sûr la terminologie imposée “d’occupants aborigènes” comme factuelle, vraie, et correcte basée sur une “observation” objective.

De plus, en utilisant le mot “étaient”, les auteurs commentent sur le “fait d’être” des Indiens Pueblo, suggérant par là, comme si c’était un fait physique, que les “Indiens” Pueblo étaient des “occupants aborigènes”, indépendants de l’esprit des Européens chrétiens, plutôt que le résultat des idées politiquement et subjectivement motivées de l’esprit des dhrétiens européens.

Ces concepts sont le résultat direct de la façon de penser européenne en matière de colonisation au sujet de peuples et de nations existant sur ce continent bien avant que ces colons n’eurent envahi l’endroit. Considérant ces faits importants, nous sommes alors capables de comprendre que des idées qui furent estimées être “vraies” par les chrétiens européens, n’étaient en fait “vraies” que dans le contexte des assomptions de domination de ces Européens sur nos peuples et nations existant sur place bien avant que la colonisation européenne ne commence.

Bref, le concept “d’occupation des sols Indienne” n’a rien à voir avec avec le comment les peuples originels du continent se percevaient et se comprenaient eux-mêmes et leurs relations avec la terre et territoires sur lesquels ils vivaient. Les concepts européens dérivaient de l’esprit européen (ethno/euro-centrisme) et non pas de l’esprit des peuples natifs de l’endroit. (NdT: aucune universalité là-dedans, ce ne sont même pas des “concepts” puisqu’un concept est juste et universel par définition, ce ne sont que des impositions résultant donc de la projection mentale eurocentrique des colonisateurs, imposées par la force, la ruse et le mensonge..).

Au lieu de se concentrer sur le développement “historique” du “titre aborigène”, les auteurs de l’ouvrage nous auraient rendu un fier service s’ils avaient focalisé sur le développement mental des colonisateurs et de leurs idées sur le “titre aborigène” et “l’occupation des sols aborigène”. Une vision des plus utiles aurait vu le jour en dénonçant les mots et les idées comme “indiens”, “occupation”, “occupants aborigènes”, “possession aborigène” et “titre aborigène” et étant des mots et des constructions mentales imposés par les Européens chrétiens, imposés sur nous sans le libre consentement de nos nations originelles. Ceci est vrai en regard de tout le répertoire de langue anglaise (ou espagnol, pour ceux qui ont été colonisés par L’Espagne, ou portugais pour la colonisation portugaise…)

Il aurait aussi été utile de voir que les auteurs de Pueblo Indian Water Rights avaient mentionné que ces mots et idées européens n’étaient pas et ne sont toujours pas des caractéristiques physiques du monde naturel. Aucun de ces mots ou idées ne sont provenus de la pensée indépendante européenne ou indépendamment de quelque système linguistique que ce soit. Pour être plus précis, les co-écrivains du livre auraient dû écrire: “Il n’y a aucun doute que les Espagnols et autres chrétiens européens, ont mentalement conceptualisé et nommé unilatéralement les Indiens Pueblo comme ‘aborigènes’ et ‘occupants aborigènes’, ayant une ‘possession aborigène’ “.

Cette ligne d’analyse mène en fait à ceci: Nos peuples et nations originels n’ont pas développé mentalement ou linguistiquement ces mots et idées qui sont toujours maintenant utilisés dans les états variés de domination pour opprimer nos vies et nos territoires. Comment donc est venue cette assertion que nous sommes de droit les sujets des “colonisateurs”, de leurs mots et de leurs idées sans notre libre consentement ? Ceci s’est produit et a été maintenu avec succès parce que nous ne passons pas assez de temps à questionner et à défier les mots et les idées des colons comme “le titre aborigène”, le “titre d’occupation des sols aborigène” le tout fondé sur la vision et la présence chrétienne (“découverte”) sur des terres non-chrétiennes.

15 Réponses to “Résistance au colonialisme: En finir avec la sémantique colonialiste… (Steven Newcomb)”

  1. Sans mauvais jeux de mots, les mots me manquent à la lecture de ce texte. D’autant, qu’à n’en pas douter, Newcomb n’a pas donner son dernier mot sur le sujet, non ?

    Newcomb complète, à mon sens, plus encore que celle d’hier, son analyse sur l’esprit de l’homme blanc à l’origine de la Loi Fédérale Indienne ► https://jbl1960blog.wordpress.com/2017/07/13/lesprit-de-lhomme-blanc-a-lorigine-de-la-loi-federale-indienne-par-steven-newcomb/

    D’ailleurs, je pense qu’il nous appelle à ne plus utiliser nous-même le mot Indien, Indigène, Aborigène encore moins païen.
    En revenant à utiliser les termes comme Natifs, Nations premières ou Peuples originels nous pourrions ainsi entrainer la césure à partir de laquelle le temps de la colonisation s’arrêterait.
    Et à ce point de rupture, s’enclencherait le nouveau paradigme, cette nouvelle réalité. Ce Tep Zepi ou Zep Tepi c’est à dire le Point Zéro, ou Temps nouveau (en Maya ou en Égyptien) ou nouveau point de départ…
    Qu’en pensez-vous ?
    Ce qui est sûr, c’est que Newcomb nous oblige à l’excellence, il nous oblige à aller chercher, profond en nous les meilleures conditions à ce nouveau départ que nous nourrissons avec les textes politiques fondateurs existant, en en extrayant le meilleur, le sublime de chacun d’entre eux.
    Vous aviez parfaitement raison de percevoir le sublime de ce Newcomb là, qui vraiment n’a pas fini de nous éclairer.

  2. Tenez, le 26 juillet 2016 Newcomb avait rédigé ce billet (que vous aviez traduit bien évidemment) intitulé en français : Temps de reconnaître l’indépendance originelle de nos nations

    Les Peuples Originels

    Voyez comme le mot « Temps » à de l’importance et avec Zénon, dernièrement en parlant de la beauté, de la profondeur des textes de Newcomb, nous avons eu ensemble cette image que je vais essayer de décrire.
    Avec SN, on est en capacité, soit d’être comme le saumon qui remonte la rivière pour retrouver l’endroit de sa propre naissance.
    Soit, d’être à la naissance de la rivière, dans la montagne, là où on a la vision la plus panoramique des choses, et côte côte, de descendre la rivière jusqu’à accoster sans heurts sur la rive pour démarrer notre marche, d’un pas assuré sur le chemin de Terre-mère…
    Dans un sens où dans l’autre, Newcomb nous donne les clés pour ouvrir les portes afin que rien de gêne notre ascension mentale comme physique.

    Mais pour autant, oui les mots ont un sens.
    Jo

    • belles métaphores oui, on aime bien celle du saumon remontant jusqu’à son lieu de naissance. c’est ce que l’humanité doit faire, sachant que rien ne sera jamais plus comme « à la naissance », mais en dégager les principes et les adapter pour renaître UN et indivisible… indivisé…

  3. Voilà pourquoi ce texte m’a fait penser au Tep Zepi ;
    Voici ce que vous, R71, avez écrit : La mission de chacun est de démonter la pyramide du pouvoir pierre par pierre, c’est en changeant notre relation à la société que nous changerons de paradigme, que chacun voit l’intérêt commun et la machine du changement réel se mettra en place. C’est ça la révolution, elle est organique dans un changement de relation à la société des individus collectivement unis. C’est ainsi que tombera l’État, la grande partie de l’humanité ira de l’avant autrement, il tombera en désuétude. Nous vivons à notre sens les premiers moments de l’agonie du système étatique. C’est la fin, c’est un moment historique, même s’il n’est pas encore perçu comme tel. Ce que les « zélites » appellent le N.O.M correspond aux derniers soubresauts de l’ignominie étatico-capitaliste. Sa fin est proche, mais cela prendra un certain temps pour que la relation à la société change. L’humain est fondamentalement bon, il y parviendra… Les générations du futur apprendront notre histoire avec effarement… Elles seront incrédules de tant de veulerie et de stupidité induite combinées.

    Point de départ, de mon Tep Zepi, à moi, Jo que j’explique par ce billet de blog ► https://jbl1960blog.wordpress.com/2015/12/22/tep-zepi-le-temps-zero/

    Et vous m’avez fait l’amitié de le traduire en anglais en apportant votre patte ► https://jbl1960blog.wordpress.com/2016/11/08/tep-zepi-beginning-of-a-new-era/

    Pour que tout s’ajoute et que nous ne laissions plus personne nous diminuer, nous amoindrir, nous « retrancher ».
    Jo

    • merci de le rappeler et nous ne retirons aucun mot de ce que nous avions écrit. Ton texte est en union avec l’Idée, il y a un dénominateur commun à toutes ces pensées formulées au delà du temps et de l’espace… Remonter à la nature originelle de l’humain, c’est toucher l’universalité de la Nature dont nous faisons partie. Les dominants sont arrogants et ne pense qu’à dominer tout, Nature comprise… Ils se fourvoient et nous entraînent au marasme déjà bien amorcé. L’humanité sortira de sa torpeur et vaincra l’inertie étatico-capitaliste, ce n’est qu’une question de temps. Patience est mère de toutes les vertus dit le vieil adage et le bon sens populaires. Le temps joue pour nous, plus pour les oligarques qui sont cernés,

      • C’est cela qui est, je trouve, troublant et merveilleux à la fois, cette interconnexion, cette unicité, que me rappelait d’ailleurs Thahoketoteh par son message l’autre jour.
        Sans nous connaitre, et peut-être jamais, de ressentir la même chose, en même temps.
        Vous n’imaginez pas parfois, comment cette synchronicité est un poil flippante. Cela nous arrive tout le temps avec Zénon et on s’éclate à le relever. Comme on ressent cette unicité avec vous, R71 (je dis vous, non pas par snobisme, pour les teigneux, mais parce que je sais que vous êtes plusieurs) avec MNN, Newcomb, d’Errico, Alfred, Ezzat, Annett aussi, Zénon et moi. Alors j’ai la chance d’avoir pu mettre une voix sur cet auteur magnifique qu’est Zénon, mais je ne connais pas son visage, ni les vôtres, mais ça n’a absolument aucune importance. Ce qui compte c’est de remonter la rivière par delà le temps et l’espace ; à la nature originelle de l’humain.
        Le texte de Bakounine « Système du Monde » a agi, comme un accélérateur de particule, je trouve.
        Je termine le reblog de ce magnifique texte de Newcomb qui fera date, à n’en pas douter, il déterminera cette césure indispensable pour rompre le cycle mortifère du colonialisme.
        Un humoriste que m’a fait découvrir mon fils, d’origine asiatique, nous appelle le peuple des hiboux, puisque nous avons les yeux ronds et que beaucoup d’européens ont des préjugés raciaux (tu m’étonnes) pas seulement envers les « peaux rouges » les Africains, mais aussi envers les « yeux bridés ». J’ai trouvé que c’était bien trouvé, non ?
        Jo

      • Grâce au magicien des mots, Steven Newcomb ► https://jbl1960blog.wordpress.com/2017/07/26/la-cesure-du-temps-zero/

        Nous pouvons ne tenir debout aux côtés des Natifs, nous les descendants des colons/envahisseurs/exterminateurs.
        Non parce que nous serions coupables de quoique ce soit, mais parce que nous aurions décidés, ensemble, de construire une nouvelle réalité complètement à l’opposé de l’esprit de l’homme blanc…
        Soyons la césure, abandonnons le monde colonialiste qui prévaut toujours aujourd’hui pour un temps nouveau des peuples unis.
        Jo

  4. C’est en lisant le dernier Wayne Madsen que l’on comprend que y’a du boulot côté Zunien pour provoquer cette césure en lien avec les Natifs et peuples originels ; http://lesakerfrancophone.fr/usa-la-devolution-a-marche-forcee

    Alors je suis un poil surprise que Madsen utilise (surement à dessein) le mot « dévolution » qui est propre aux Créationnistes mais bon.

    L’analyse de Madsen donne raison, à mon sens, à Newcomb qui nous propose d’en finir avec la sémantique colonialiste et on voit bien pourquoi !

  5. […] Traduit de l’anglais par Résistance 71 ► URL de l’article ► https://resistance71.wordpress.com/2017/07/26/resistance-au-colonialisme-en-finir-avec-la-semantique… La théorie du “titre aborigène” est un ensemble d’idées produit par l’esprit […]

  6. […] Traduit de l’anglais par Résistance 71 ► URL de l’article ► https://resistance71.wordpress.com/2017/07/26/resistance-au-colonialisme-en-finir-avec-la-semantique… […]

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