« Meurtre par décret » le contre-rapport de la Commission Vérité & Réconciliation sur le génocide au Canada ~ 2ème partie ~

Meurtre par décret: Le crime de génocide au Canada

 

Un contre-rapport de la “Commission Vérité et Réconciliation”

 

Publié par le Tribunal International pour les Disparus du Canada

En conjonction avec des Commissions Citoyennes d’Enquête préalables

 

Le 1er Mars 2016

Toronto & Bruxelles

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

 Introduction

Préambule et Critique de la Commission Vérité et Réconciliation

1ère partie A & B

2ème partie

3ème partie

 

Première partie: Le crime

[A]

 

“… pour envahir, traquer, capturer, vaincre et subjuguer tous les sarrazins, païens et autres ennemis du Christ où qu’ils soient et de réduire leurs personnes en esclavage perpétuel…” ~ Bulle pontificale Romanus Pontifex, autorisant la conquête et le génocide du monde non-chrétien (1455) ~

“Le génocide ne veut pas nécessairement dire la destruction immédiate d’une nation entière… c’est plutôt un plan coordonné de différentes actions visant à la destruction des fondations essentielles à la vie des groupes nationaux ayant pour but l’annihiliation de ces groupes eux-mêmes.” ~ Michael Lemkin, 1944 ~

“Je crois que les conditions sont délibérément créées dans nos pensionnats pour Indiens pour que se propagent les maladies infectieuses. Le taux de mortalité est souvent au-delà de 50%. Ceci est un crime national.” ~ Dr Peter Bryce d’adressant au Superintendant des Affaires Indiennes canadiennes Duncan Campbell Scott le 12 Avril 1907, avant d’être renvoyé par Scott~

“Si je devais choisir de tuer la moitié des enfants indiens sous notre responsabilité, il n’y a pas de meilleur instrument à utiliser à cet effet que le typique pensionnat.” ~ Neil Parker, Superintendant aux Affaires Indiennes 1949 ~

Le fait que les puissances européennes aient délibérément exterminé des millions de personnes de peuples indigènes non-chrétiens sur le Nouveau Monde est historiquement indéniable, constituant de fait le plus grand génocide de l’histoire de l’humanité. La participation de l’état et de l’église canadiens à ce même crime a été et continue à être nié, spécifiquement par les Canadiens eux-mêmes et ce malgré les preuves accablantes fournies.

Pour parler plus largement, cela aurait été un étrange paradoxe en fait pour les euro-Canadiens de n’avoir pas conquis, dépeuplé, légalement restreint et erradiqué les nations indiennes rencontrées après 1497, opérant comme ils le faisaient précisément de la même manière et avec la même mentalité et pratique de “domination supérieure chrétienne”, animant toutes les autres nations autorisées de la sorte par le Vatican. Ceux qui voudraient clâmer un “exceptionalisme canadien” hors de la norme du génocide européen doivent toujours fournir les preuves que les nations indigènes furent quelque part à meilleure enseigne sous la règle canadienne.

Au contraire, le grattage de la couche superficielle du grand mythe canadien de la bénévolence des colons envers les Indiens révèle une sale histoire bien rance de crimes de guerre, de meurtres de masse en toute équivalence avec quelque régime criminel au monde que ce soit. Le résultat pour les nations indigènes a été la même chose, que ce soit au Canada, aux Etats-Unis ou au Brésil ; et pourtant le processus d’extermination s’est joué de manière différente au Canada.

L’immense étendue du pays d’une part et le processus de colonisation qui fut somme toute plus lent et plus graduel, veulent dire que la séquence habituelle génocidaire de la conquête, de la détention/restriction et de l’annihilation de long terme se sont déroulés sur plus de quatre siècles, rendant sa réalité moins évidente pour chaque génération.

De la première arrivée de Cabot au Labrador et son massacre du peuple Beothuk aux alentours de 1500 aux guerres finales bactériologiques de la variole qui décimèrent les nations de l’ouest canadien dans les années 1920, l’impérialisme britannique et français a employé une mixture de stratégies sur le comment éliminer les nations indigènes. L’importance politico-économique des nations forestières orientales du continent que furent les nations huronne et iroquoises au commerce de la fourrure et leur utilité en tant qu’alliés militaires ont empêché une solution directe d’élimination à l’espagnole. Mais une fois que leur utilité put être contournée, l’éradication se produisit tout aussi minutieusement.

Le simple fait que les Européens colonisateurs aient dû être plus circonspects et stratégiques dans leur traitement des cibles bronzées a rendu le rôle de la religion encore plus crucial pour le sucès du génocide canadien, qui peut-être véritablement décrit comme étant une entreprise religieuse du début à la fin. En fait, la prédominance des églises dans la formation et la gestion de la politique coloniale envers les Indiens ainsi que l’établissement et la maintenance, contre une opposition périodique du gouvernement, du système assassin des pensionnats pour Indiens pendant plus d’un siècle, est un fait unique lorsque comparé à la plupart des archives des autres nations génocidaires.

Le fait que l’holocauste canadien se soit produit en longues vagues prolongées sous la houlette des églises catholique et anglicane, ainsi que de leurs “pousses” locales (comme l’église unifiée du Canada) et que ceci fut fait sous le déguisement bienveillant de l’éducation et du prosélytisme missionnaire, a beaucoup contribué à l’enfumage et au camouflage de la réalité du génocide se déroulant au Canada et ce de manière non-accidentelle. L’impérialisme britannique s’est toujours présenté sous un jour “civilisateur” à chaque fois qu’il exterminait des populations locales, l’approche de la “main de fer dans un gant de velours” symbolisée par le général George Maitland qui, en 1843, décrivit le traitement britannique des nations africaines comme “une bonne branlée suivie d’une grande gentillesse”.

[…] Néanmoins, les premiers pensionnats pour Indiens mis en place par les missionnaires jésuites comme “solution finale” au problème indien surtout dans l’ouest, échoua pemdant bien des années faute d’attirer et de garder un nombre suffisant de jeunes Indiens.

La solution à cette impasse était assez simple: les missionnaires des églises devaient être armés des pleins pouvoirs de l’État et de la loi et devaient recevoir carte blanche absolue dans leur tâche de subvertir, de contenir et de dépeupler les nations indomesticables de l’Ouest du pays: un boulot qu’ils enrobèrent d’un halo de légitimité religieuse qui fit passer le génocide pour une véritable mission de charité.

Donnez-nous un enfant pour 7 ans et il sera notre pour la vie.” Avait dit le père fondateur de l’ordre des Jésuites au XVIème siècle Ignatius Loyola. On pourrait ajouter dans le contexte canadien “du moins, le peu qui survivra…

Comprendre la machine à tuer

[…] L’idée derrière tout cela n’est pas récente, remontant à l’empire romain et sa contre-partie byzantine, il convenait simplement de conquérir un ennemi en kidnappant et en rééduquant leurs propres enfants afin qu’ils détruisent leur ancienne nation, comme les mercenaires programmés de la puissance conquérante. En pratique, les jeunes estimés “récupérables” parmi l’ennemi seraient sauvés et assimlés dans l’empire et utilisés pour infiltrer et annihiler le reste dans une forme de “rédemption sélective”.

Le système fonctionne toujours car il touche de manière impromptue au talon d’Achille et au centre vital et vulnérable de toute culture: sa prochaine génération.

Note de Résistance 71: Ceci fut parfaitement montré dans une des Bandes Dessinées phare de l’école belge, celle des aventures d’Alix créée par le dessinateur Jacques Martin, ce jeune “noble” gaulois, “adopté” par un riche et puissant Romain, qui devient Romain et agit pour l’empire au fil de ses aventures… L’anti-Astérix par excellence ! Dans la pratique, il suffit de voir la subjugation de la jeunesse de “l’élite” politico-économique des anciennes colonies françaises ou britanniques d’Afrique vers les universités européennes pour comprendre comment fonctionne ce que l’on appelle le “néo-colonialisme”, plutôt colonialisme 2.0 par le formatage de sa jeunesse et de “l’élite” triée sur le volet.

 Avec l’incorporation de l’empire romain dans l’église catholique apostolique et romaine, cette pratique de la rédemption sélective devint un dogme religieux et une partie institutionnalisée de la politique étrangère du Vatican et de toutes les nations européennes.

Comme tous les non-chrétiens partout dans le monde étaient décrétés sans âmes et sans aucuns droits, ils devaient être conquis et détruits pour leur salut. Mais ces non-personnes pouvaient éviter le massacre et acquérir un statut limité d’esclave en se faisant baptiser. De cette façon la conquête du monde par l’empire chrétien/catholique pouvait avancer de manière efficace et sur une base de “légitimité morale”, ce spécifiquement depuis la doctrine pontificale de l’Indulgence déclarant que les guerriers saints massacrant au nom de Rome étaient spirituellement lavés et placés dans un état de grâce originelle. (NdT: Pape Urbain II, concile de Clermont en 1095 avant la 1ère croisade).

Bref, le génocide était une bonne chose à la fois pour le conquérant et le conquis: une idée qui est devenue à terme profondément ancrée dans la psyschée du monde occidental.

En réponse à la réforme protestante de l’église (Martin Luther), l’ordre des Jésuites fut créé en 1543 en tant qu’ordre militaire secret afin d’écraser toute opposition au pape. L’ordre rafina ce système de conquête par la salvation en créant un modèle de sabotage d’une culture ennemie de l’intérieur. Les Jésuites le firent par la classique méthode du “diviser pour mieux régner” en gagnant de leur côté quelques leaders et en provoquant des guerres tribales intestines, comme ils le firent au Canada chez les Hurons en armant les chefs catholiques de mousquets et de couvertures infestées de la variole pour décimer leurs frêres “païens”.

Une des clefs pour le succès de cette stratégie était la rééducation des enfants de ceux des chefs qui se convertissaient dans des écoles spéciales gérées par les Jésuites, écoles d’où proviendrait la prochaine génération des guerriers saints du pape complètement conditionnés pour parfaire la destruction de leur ancienne nation. Des analogies avec ce qu’il se passe de nos jours viennent immanquablement à l’esprit.

Cet arme jésuite a souvent été utilisée avec succès contre tout monarque ou gouvernement qui s’opposait ou faisait dissidence à la règle pontificale. Mais pour voir et juger de son efficacité particulière dans le Nouveau Monde nous devons faire un bon en avant jusqu’au XIXème siècle sir la côte Ouest du Canada, toujours largement non occupée par les Européens mis à part les missionnaires catholiques, le plus souvent formés par les Jésuites, comme ce prêtre nommé Paul Durieu.

Au cours de ses années de travail chez les Indiens Salish de la côte Ouest, Durieu a inventé le prototype de ce qui deviendrait le système des pensionnats pour Indiens du Canada. Durieu ciblait les jeunes et les relocalisait dans des camps gérés par l’église où comme “surveillants” ils s’espionneraient les uns les autres et punissaient tout retour au “paganisme” dans leurs rangs, comme toute inquisition qui se respecte.

“Il est absolument remarquable de constater que nos jeunes acolytes ont appris à déraciner leur hérésie et leur impiété au sein de leurs propres familles et de discipliner les récalcitrants”, écrivit Durieu à ses supérieurs à Montréal en 1868.

Ce n’est pas par hasard si la même année a vu une importante épidémie de variole parmi les Indiens traditionnels dans la région de la basse-rivière Fraser, là où Durieu travaillait: une guerre bactériologique assistée par le missionnaire anglican John Sheepshanks en 1864 lorsqu’il infecta les Indiens Chilcotin avec la variole par inoculation, dépeuplant cette nation de près de 90%.

Le travail de Durieu impressionna ses patrons. Bientôt ils adoptèrent son travail comme base des premiers pensionnats catholiques pour Indiens, ce qui institutionnalisa la méthode Durieu de monter les enfants les uns contre les autres afin de détruire ou d’écrémer les “païens”. Ce système essaima chez les missionnaires protestants en 1889 et ensuite chez le gouvernement du Canada qui endorsa les camps de “surveillants” de Durieu, qui finiront pas être nommés les “Pensionnats pour Indiens” (ou “Indian Residential Schools” en anglais).

De manière tout à fait significative, plus de la moitié des enfants incarcérés dans ces pensionnats commencèrent à mourir dès la première année de l’ouverture, spécifiquement dans la région des grandes plaines, les “Prairies” où l’identité traditionnelle des Indiens demeurait très forte.

[…] Ceci suggère, qu’en maintenant le cap de l’idéologie pontificale, celui de tuer les non-chrétiens, Indiens non assimilables, était accepté comme partie intégrante du projet de ces pensionnats pour Indiens.

Le très haut taux de mortalité atteint dès la création du système de pensionnats pour Indiens dans les zones ciblées pour le nettoyage ethnique est un fait qui n’est jamais mentionné dans les décomptes officiels comme le rapport gouvernemental de la CVR, car ce simple fait à lui seul va bien loin pour prouver l’intention génocidaire derrière ces soi-disantes “écoles” et saperait ainsi la position courante de dire que le système était en fait un effort bienfaiteur qui serait parti en vrille. De la même manière, le fait que le taux de mortalité soit resté constant pendant plus d’un demi-siècle, entre au moins 1889 et 1949, sans qu’aucune action pour le réduire n’ait été entreprise ni par l’État ni par les églises, montre irrémédiablement en conclusion que les pensionnats pour Indiens étaient une machine à tuer tout à fait délibérée dès le départ. Leur objectif primaire et non-dit fut de dépeupler les nations indigènes “non-domestiquées” d’au moins la moitié: un objectif prouvé dans le résultat établi.

En 1909, près de la moitié des enfants des pensionnats pour Indiens étaient en train de mourir de maladies délibérément introduites pour les infecter, comme la tuberculose, d’après le médecin inspecteur du Département des Affaires Indiennes, le Dr Peter Bryce qui a conduit une étude exhaustive sur les conditions de santé dans les pensionnats. Ce taux de mortalité demeura au même niveau pendant les décennies suivantes à cause de la pratique de routine des personnels qui infectaient les enfants sains au travers de contacts forcés avec des enfants mourant de tuberculose, puis en leur refusant les soins adéquats. Cette pratique fut mise en place par totes les églises gérant les écoles d’après Bryce.

[…] Bryce ne mâcha pas ses mots dans son rapport: “Je pense que les conditions pour répandre des maladies infectieuses mortelles sont délibérément introduites dans les pensionnats pour Indiens. Le taux de mortalité y est souvent supérieur à 50%… Ceci constitue un crime à l’échelle nationale.

Bryce ne fut pas la seule personne à identifier cet environnement mortel maintenu dans les pensionnats. L’agent aux Affaires Indiennes A.W. Neill de l’agence de la côte Ouest, écrivit aux Affaires Indiennes moins d’un an après que le rapport final de Bryce décrivant les conditions des pensionnats pour Indiens sur l’île de Vancouver…

Bryce et Neill furent totalement ignorés par le gouvernement, le bon médecin Bryce se retrouvant relevé de ses fonctions et placé sur une liste noire pour son rapport, qui demandait entre autre chose que les églises ne soient plus les gestionnaires de ces écoles à cause du meurtre de ces enfants.

En fait, après avoir viré le Dr. Bryce et enterré son rapport, les Affaires Indiennes répondirent à son exposé en institutionnalisant le contrôle des églises sur les enfants indiens, rendant obligatoire pour tout enfant indien d’être incarcéré dans les écoles mortelles et l’administration prit alors d’autres mesures pour augmenter le taux de mortalité, celles-ceci inclurent:

  • Novembre 1910: Le gouvernement signe un contrat formel avec les églises catholique, anglicane, méthodiste, et presbytérienne leur donnant le contrôle total des opérations dans les pensionnats.
  • Janvier 1911: Le gouvernement arrête de publier tout rapport de suivi et de compte-rendu sur la santé et le taux de mortalité des enfants après avoir quitté l’école, mettant en application une recommandation datant de 1903.
  • 1914-1918: Les pouvoirs extraordinaires du temps de guerre donnent aux directeurs/proviseurs des pensionnats le pouvoir d’imposer à tout enfant indien quelque soit son âge, sa participation dans des “bataillons de travail” et d’être envoyé n’importe où au Canada pour travailler sans salaire dans des travaux très pénibles.
  • 11 mars 1919: malgré l’augmentation dramatique du taux de mortalité dans les pensionnats, un ordre du conseil abolit toute inspection médicale.
  • Avril 1920: Une loi votée au parlement canadien rend obligatoire que tout enfant indien de plus de 7 ans soit incarcéré dans un pensionnat sous peine d’amendes et de prison pour les parents.
  • Printemps 1926: Les gouvernements des provinces d’Alberta et de Colombie Britannique, là où près de la moitié des pensionnats étaient concentrés, passent des lois refusant aux Indiens de se pourvoir en justice et même de pénétrer dans un tribunal, de faire circuler des pétitions ou de s’alouer les services d’un avocat.
  • Décembre 1929: Le gouvernement fédéral laisse tomber son rôle traditionnel et nomme les églises et les directeurs/proviseurs des pensionnats comme gardiens légaux de tous les enfants incarcérés dans les pensionnats.
  • 1929-1933: Les gouvernements des provinces d’Alberta et de Colombie Britannique font passer des lois sur la stérilisation sexuelle permettant à tout élève des pensionnats d’être stérilisé contre sa volonté à la discrétion absolue du directeur du pensionnat.

[…] Les pensionnats pour Indiens ne ciblaient pas seulement les enfants incarcérés avec leur guerre bactériologique de dépopulation, mais aussi les communautés natives alentours, utilisant les pensionnats et les hôpitaux spéciaux pour Indiens comme bouillon de culture pour l’infection par maladies contagieuses. Ce fut aussi une pratique standard que de renvoyer les enfants très malades de la tuberculose ou de la variole dans leurs familles afin qu’ils infectent le plus de personnes possibles.

[…] Cette sorte de génocide systémique est une machine à tuer qui ne peut pas être éteinte tandis que le système qui l’a engendré perdure, en cela qu’il reflète les valeurs et les intérêts de ce système.

Combien d’enfants y sont-ils décédés ?

Il est tout à fait conservateur de dire que cinquante pourcent des enfants qui sont passés par ces pensionnats n’ont pas vécu pour tirer un quelconque bénéfice de cette éducation.” D.C. Scott, assistant superintendant du Département des Affaires Indiennes, juillet 1913 (publié sur CBC News le 3 juin 2015)

On ne pourrait pas ouvrir une enquête sur les décès dans les pensionnats pour Indiens. Ce serait une enquête trop énorme.” Gendarme Gerry Peters de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC, Police Montée), division “E”, Vancouver, le 9 juillet 1997.

Les chances pour un pensionnaire des écoles indiennes de mourir dans les prenières années du programme étaient de 1 sur 2,” Murray Sinclair, président de la Commission Vérité & Réconciliation le 3 mars 2011.

Bien avant que le gouvernement canadien ne soit forcé de commencer à fermer les pensionnats pour Indiens au début des années 1970, il a commissionné des “équipes spéciales de destruction de documents”, celles-ci devant rassembler et passer à la machine à confettis tous les dossiers en relation avec les morts, accidents et enregistrements des élèves dans les pensionnats, d’après le journaliste canadien et membre du parlement Gary Merasty. Ainsi de manière fort convéniente, le gouvernement canadien et ses portes-parole de la CVR qu’il a choisi, peuvent maintenant clâmer leur ignorance du nombre total de décès dans les pensionnats depuis plus d’un siècle.

[…] Notre équipe de recherche a calculé un chiffre total de morts du système de pensionnats pour Indiens basé sur les archives, les statistiques gouvernementales, les conditions des écoles et des témoignages extensifs. Nous avions initialement atteint un chiffre assez bas de 32 000 enfants décédés et un chiffre haut de 73 000, des 150 000 pensionnaires de ces écoles en 107 d’existence (1889-1996), notre taux de mortalité est de l’ordre de 30% ; mais comme ces estimations sont basées sur des chiffres plus que conservateurs du gouvernement de 150 000 enfants incarcérés dans ces pensionnats, plutôt que sur le chiffre vraisemblablement plus réaliste de 250 000 enfants, le nombre de morts fut probablement bien supérieur.

Notre calcul final est fondé sur l’examen des facteurs suivants:

  • Facteur 1: le nombre total d’enfants dans les pensionnats
  • Facteur 2: le nombre moyen d’élèves dans chaque pensionnat et la durée de leur séjour et
  • Facteur 3: le taux moyen de mortalité dans chaque pensionnat par décennie en commençant avec la décennie 1890-1900 et continuant avec la décennie 1990-2000 puisque le dernier pensionnat fut fermé en 1996.

[…]

Le problème de l’intentionalité et le cas exceptionnel de crime de groupe

Le gouvernement canadien et les églises, comme toutes les parties prenantes prises au piège de leur propre crime, ont fait confiance au vide juridique inserré dans la section 2 de la convention sur le génocide de l’ONU qui stipule que le génocide est l’intention de commettre le crime, pas le crime lui-même. Ce vide a permis à des régimes coupables de génocide, d’échapper aux poursuites en justice, ceci inclut le Canada, car il est presque impossible de découvrir une intention spécifique derrière tout un barrage d’actions historiques commises par un état.

[…] Ainsi, la définition originale de Michael Lemkin du génocide ne faisait aucune mention de “l’intentionalité” en regard du crime. Pour lui, l’intention n’était pas le facteur, le génocide était simplement une action, “la destruction d’un groupe” et cet acte de destruction en lui-même démontrait et impliquait l’intention de commettre un crime simplement parce que bien des personnes y participaient de manière consistance avec un résultat meurtrier évident.

[…] A la fois les gouvernements canadien et américain travaillèrent d’arrache-pied pour faire réviser la définition originale de Lemkin afin de se protéger eux-mêmes de toute inculpation quant à leurs propre crimes de guerre domestiques. Ils accomplirent cela principlalement en inserrant la phrase suivante dans la version écrite de la définition du génocide:

Le génocide veut dire l’intention de détruire en totalité ou en partie, tout groupe national, ethnique, racial ou religieux…

Bref, le génocide fut retranscrit comme étant non pas une action, mais une intention une position absurde tout autant que légalement insupportable , que d’affirmer que lorsqu’un homme tue quelqu’un puis le vole, le crime n’a pas été le meurtre en lui-même mais l’intention de l’homme de tuer . Cette redéfinition auto-gratifiante fut adoptée dans la mouture finale de la Convention sur le Crime de Génocide de l’ONU en 1948. Depuis ce temps, les gouvernements et les églises impliqués dans l’acte de génocide se sont lourdement reposés sur cette “pirouette légale intentionnelle” comme barrière de sécurité contre leur propre mise en accusation, spécifiquement en Amérique du Nord (Canada, Etats-Unis, Mexique).

[…] Faisant écho du précédent établi au procès de Nüremberg, il n’est pas aujourd’hui nécessaire de prouver l’intentionalité derrière le génocide canadien, car de par sa nature même, un tel crime a pour intention d’éliminer un peuple indigène non-assimilable. Ce crime n’a pas émergé d’actes isolés perpétrés par des individus esseulés (NdT: des “moutons noirs” du système), mais bien plutôt de programmes bien planifiés et de leurs idéologies sous-jacentes qui sont basiques au Canada chrétien. De fait, quelque crime de groupes que ce soit prouve sa propre intentionalité et peut, doit être poursuivi en justice sur cette base.

A suivre…

Une Réponse to “« Meurtre par décret » le contre-rapport de la Commission Vérité & Réconciliation sur le génocide au Canada ~ 2ème partie ~”

  1. Mise en lien de cette 2ème partie en dessous de la première partie de ce même billet de blog intitulé « Toi d’abord » https://jbl1960blog.wordpress.com/2015/12/25/toi-dabord/

    Merci pour cette traduction car à sa lecture plus personne ne pourra dire qu’il ignorait les véritables intentions des « Colons » originels dont l’idéologie est toujours honorée de nos jours notamment le jour de Thanksgiving, de l’Australia Day ou du Día de la Race en Amérique Latine, en Espagne et dans les îles du Pacifique… Et c’est pourquoi nous militons également pour l’abolition de ces commémorations qui ramène toujours à la supériorité induite par Dieu lui-même de l’homme blanc sur tous Natifs et Indigènes ; https://jbl1960blog.wordpress.com/2016/01/28/ni-australia-day-ni-thanksgiving/ JBL1960

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