Résistance au colonialisme: la face cachée du mot « indigène »… (Steven Newcomb)

Que veut dire “indigéniser” ?

 

Steven Newcomb

 

10 avril 2017

 

url de l’article original:

https://indiancountrymedianetwork.com/news/opinions/what-does-it-mean-to-indigenize/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

A lire: « Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte » (Steven Newcomb, 2008, traduction Résistance 71, mise en page PDF, Jo de JBL1960)

 

Comme je suis fasciné par les mots, j’ai été très intrigué par l’utilisation du mot “indigène” en tant que verbe, comme dans le mot d’action “indigéniser”, Mon Webster’s Third New International Dictionary dit que le verbe “indigéniser” (NdT: indigenize en anglais) veut dire: “causer des caractéristiques indigènes ; adapter à des conditions ou des pratiques indigènes” et “causer une personnalité principalement indigène”.

Analyser le mot “indigène” fournit des résultats variés: “natif” et “originaire, produit ou se développant dans une région ou une terre particulières ou un environnemnt particulier.” Nous trouvons aussi “en rapport, fait, créé par pour des natifs”, “inné, inhérent”. Et pourtant, il manque quelques chose du désir exprimé de la part de certains d’”indigéniser” plus de choses dans le monde, comme les programmes pédagogiques universitaires par exemple.
Le contexte manquant de l’utilisation typique du mot “indigéniser » est trouvé dans l’avant-propos du rapport de l’ Independent Commission on International Humanitarian Issues de 1987: “Indigenous Peoples A Global Quest for Justice,” Après avoir discuté la notion stéréotype du mot “indigène”, que les auteurs du rapport disent “évoquer” une image de “peuple primitif”, les auteurs disent plus loin:

Cachée derrière les stéréotypes, se trouve la sombre réalité qui appelle à l’empathie et défie notre humanité. Celle-ci est à la fois triste et rayonnante: d’un côté la colonisation, le génocide et une lutte constante pour la survie physique et culturelle ; de l’autre côté, un glorieux passé et un futur qui doucement mais sûrement, commence à apparaître plus rayonnant et vibrant.

Les auteurs du rapport sont imprécis en disant que le terme “indigène” a deux aspects. Le point le plus important est que le contexte incessant et actuel de la catégorie peuples “indigènes” est, comme ils le disent, “colonisation, génocide… et une lutte constante pour la survie physique et culturelle.” Les auteurs du rapport essaient d’éviter le point en mentionnant “un glorieux passé” et un “futur” qui “commence à rayonner”. Mais rayonnant en comparaison de quoi ? En comparaison des ténèbres de la colonisation et du génocide (extermination) ce qui rend nécessaire la “lutte constante pour la survie physique et culturelle” ? Et étant donné le fait que toutes nations et peuples étiquetés “indigènes” sont toujours bloqués dans un schéma institutionnalisé de domination et de déshumanisation, on peut se demander sur quelle base le futur apparaît-il plus rayonnant et vibrant ?

Placer une insistance étriquée sur des mots comme “natif”, “inné”, ou inhérent” ne va pas nous donner une claire image mentale du concept d’”indigène”. Ceci parce que la signification du terme “indigène” est très inclusive d’un contexte sombre et mortifère de l’invasion par des étrangers et inclusive des efforts de destruction des nations et peuples originels (nos ancêtres), qui, avant l’invasion, vivaient toujours de manière “non civilisée” parce qu’is vivaient libres et indépendants d’une telle invasion. La trajectoire de la “civilisation” chrétienne européenne est une trajectoire d’invasion et de domination chrétienne et européenne. (NdT: ici Newcomb implique que pour autrui, civilisation = invasion et domination)

Lorsque les auteurs du rapport de cette commission indépendante mentionnèrent un “passé glorieux” pour les peuples “indigènes”, ils avaient sans aucun doute ce mode de vie pré-invasion en tête. Mais l’imagerie pertinente ne s’arrête pas en si bon chemin. Le contexte complet pour le terme d’”indigène” inclut de sinistres forces gouvernementales et entrepreneuriales qui ont causé et continuent de causer la domination et la déshumnanisation des nations originelles, ainsi ce contexte pour le terme “indigène” est inclusif des forces de domination qui menacent la base même de l’existence culturelle, physique et politique de tout peuple ou nation originel, ce que les auteurs du rapport reconnaissent implicitement en parlant de la “lutte constante pour la survie physique et culturelle.”

Comment alors l’appel pour notre existence, des programmes pédagogiques universitaires, ou quoi que ce soit d’autre, puissent être “indigénisés”, puisse avoir un sens comme terme de libération lorsque le contexte même du terme “indigène”veut dire des nations et des peuples qui sont forcés à être dominés, ce qui va à l’encontre de toute forme de libération ? Comment cela peut-il avoir un sens quand une part centrale du contexte “indigène” veut dire avoir été soumis à des forces gouvernementales et entrepreneuriales de domination et de déshumanisation au point que la survie physique et culturelle de nos nations ait été et est toujours en question ? Pourquoi ne pas juste appeler à notre libération de ces formes et schémas de domination ? L’appel pour notre existence doit-il être “indigénisé” plus avant ? Ceci doit-il être une tentative de séparer notre existence pré-invasion et utiliser cette imagerie de pré-domination comme un modèle positif de nos vies contemporaines ?

Est-ce que l’utilisation du terme “indigéniser”, ou de tout autre mot savant ayant pour but de faire mousser comme celui d’”indigénéité”, est un effort de revitaliser et d’émuler des images d’un “passé glorieux” mentionnées dans le rapport indépendant sus-nommé ? l’appel pour “indigéniser” nos vie ou pour “célébrer” notre “indigénéité” pourrait avoir un sens si cela avait pour intention d’exclure l’ère de post-invasion, ère remplie de mort, de destruction et de désintégration.

Pourtant, comment pouvons-nous séparer et exclure cette ère post-invasion de la signification du terme “indigène” lorsque notre existence “indigène” contemporaine est, par définition et par expérience, inclusive des schémas de domination imposés par l’État (colonial) et les entreprises (coloniales), schémas de colonisation, de déshumanisation masqués derrière la phrase “loi et politique” ? Si vous ne me croyez pas, nommez une nation ou un peuple appelé “indigène”, où que ce soit dans le monde aujourd’hui et qui vit libre et indépendant de tout contexte de domination et de déshumanisation créé par les états et les corporations / entreprises.

14 Réponses to “Résistance au colonialisme: la face cachée du mot « indigène »… (Steven Newcomb)”

  1. Newcomb arrive encore à aller plus loin dans l’explication de texte… Faut dire qu’avec les dernières déclarations de Trump, pour justifier les représailles, il y a de quoi avoir envie de mordre, non ? Et Newcomb patiemment explose le mythe de la « colonisation nécessaire » ou « nécessaire colonisation » sur laquelle s’appuie l’Amérique messianique d’aujourd’hui…

    Ce n’est nullement un combat vain, il faut savoir qu’en France, beaucoup (et notamment des cathos) affirment, sans rire, que seuls les Français de France peuvent et doivent gouverner la France (arguant que l’espagnol Valls n’a rien à faire au gouvernement par ex) et rappelant même les couplets de La Marseillaise ; Le couplet 3 de Notre Marseillaise est là pour nous enseigner.
    « Quoi ! Des cohortes étrangères Feraient la loi dans nos foyers !
    Quoi ! Des phalanges mercenaires Terrasseraient nos fiers guerriers ! (Bis)
    Dieu ! Nos mains seraient enchaînées ! Nos fronts sous le joug se ploieraient !
    De vils despotes deviendraient Les maîtres de nos destinées ! »

    C’est un troll, catho qui plus est, mais qui prouve combien ce n’est pas gagné, hein ?

    Poème de Martin Niemöller

    « Lorsque les nazis sont venus chercher les communistes,
    je n’ai rien dit,
    je n’étais pas communiste.

    Lorsqu’ils ont enfermé les sociaux-démocrates,
    je n’ai rien dit,
    je n’étais pas social-démocrate.

    Lorsqu’ils sont venus chercher les syndicalistes,
    je n’ai rien dit,
    je n’étais pas syndicaliste.

    Lorsqu’ils sont venus chercher les juifs,
    je n’ai rien dit,
    je n’étais pas juif.

    Lorsqu’ils sont venus me chercher,
    il ne restait plus personne
    pour protester. »

    Ce poème a été écrit en 1942.
    Malheureusement, il n’a pas pris une ride.
    On peut remplacer certains mots par d’autres ; Ça marche quand même et c’est bien là le problème, non ?
    https://jbl1960blog.wordpress.com/faire-tomber-lempire/

    • oui et le plus extraordinaire encore est le vers qui commence par « dieu! »… çà jette pour une soi-disante chanson révolutionnaire-« républicaine »… mais qui continue àse réclamer du barbu dans les nuages !
      On nous a pris pour des cons (a juste titre semble t’il…) dès 1789… et tous les messieurs Jourdain de France sont devenus les nouveaux aristos accapareurs et spoliateurs des biens communaux… Marat reviens !!… 😉

      • Voilà ! Et ce personnage sévit partout et depuis longtemps… Et y nous ressort le même couplet à chaque fois. Je n’ai pu résister il y a peu, et lui ai claqué au museau le PDF du Dr. Ezzat. Et ça n’a pas loupé, m’a dit que j’irais brûler en enfer… Comme il nous serine avec son Dieu vengeur qui doit arriver sous peu avec sa verge de fer (si si) je lui ai refilé aussi le lien vers le Pr Demoule, mais je pense qu’il n’a pas tout compris… Ah y’a du level chez les trolls cathos hein ?

  2. Voilà pourquoi à mon sens, on peut parfaitement faire un parallèle avec Fillon et la doctrine chétienne de la découverte, après Copé qui affirme qu’il mérite un ministère si Fion est élu voilà-t-y pas que le Fion affirme que Sens Commun, pourrait rentrer au gouvernement ; https://www.challenges.fr/election-presidentielle-2017/sens-commun-au-gouvernement-fillon-englue-dans-la-polemique-apres-ses-declarations_467320
    Les déclarations de François Fillon de samedi sur Sens commun passent mal à gauche comme à droite. Hier, l’ex-Premier ministre a expliqué qu’il pourrait intégrer à son gouvernement des membres de Sens commun, mouvement lié à la « manif pour tous », s’il était élu président de la République, lors de l’émission Forum Radio J. Interrogé sur une participation de Sens commun à un gouvernement, le candidat de la droite à la présidentielle a répondu: « pourquoi pas », lors de cette émission devant être diffusée dimanche.

    « Sens commun fait partie des hommes et des femmes qui sont fiers de leur pays, attachés à leurs traditions, pour lesquels j’ai beaucoup de respect, c’est des composantes », a-t-il dit. « Cette façon qu’ont une partie des commentateurs et des élites politiques de classer les Français et de jeter une forme de discrédit sur certains d’entre eux est insupportable », a-t-il exprimé.

    Voilà à quoi sert de boycotter le bouzin ! Voter 1 jour c’est démissionner 5 ans et si voter Fillon pouvait changer quelque chose, il y a longtemps que ce serait interdit ► https://jbl1960blog.wordpress.com/2016/11/21/si-voter-fillon-pouvait-changer-quelque-chose/
    Et en prime, vous aurez Pénélope en 1er Dame…
    Bénévolat = Travailler sans être payé (sauf dans le Haut-Rhin où tout nouveau RSA doit bénévoler 7H/semaine, voir mon billet Ubu est Strasbourgeois).
    Pénélopat = C’est être payé sans travailler !
    Et alors ?

    Pendant ce temps, ceux qui ont voté en Trumpette, y zont l’air malin maintenant, hein ? Le gars, contre la guerre et anti-système est juste entrain de faire mieux que Killary qui était pourtant dans les starting-block ! Et le gars y se trompe même de guerre ! On a bombardé l’Irak, euh la Syrie… T’inquiètes depuis un bail on a compris que la cible c’était la Syrak et nous…

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