La mystification par le malthusianisme et le darwinisme-social: Pour une compréhension progressiste de la nature humaine… 1ère partie

Nous avons traduit ici de larges extraits d’un ouvrage tout à fait remarquable du professeur de biologie Lee Alan Dugatkin, de l’université de Louisville dans le Kennetucky, Dr en biologie de l’évolution et qui retrace la vie et l’œuvre de Pierre Kropotkine suivant l’angle de sa science et surtout comment Kropotkine analysait les racines biologiques naturelles de l’anarchisme, caractérisées par l’anti-autoritarisme et l’entr’aide mutuelle, condition sine qua non de l’évolution des espèces.

Kropotkine s’est opposé dès les années 1880 aux dogmes du darwinisme-social et du malthusianisme, qu’il consédérait erronés et réducteurs pour être scientifiquement valides ; Dugatkin retrace pour nous le cheminement du raisonnement de Kropotkine, véritable anti-dote au poison dogmatique de l’ingénierie sociale ancrée dans la pseudo-science malthusienne et social-darwiniste. Ces deux fléaux de la pensée, qui pourrissent tous les débats environnementaux et sociaux depuis des générations sont des outils du contrôle oligarchique sur nos vies, une (pseudo) justification scientifiques des politiques oppressives et rétrogrades utilisée au travers des états pour mieux nous asservir et nous contrôler. Il est évident à la lumière de l’histoire que les dogmes sans fondement de la « surpopulation » et de la « survie du plus apte » sont devenus des instruments de contrôle des populations au seul profit de l’oligarchie en place. Kropotkine l’avait bien compris dès le départ…

Nous avions déjà éclairci ce chemin il y a plusieurs mois avec ces articles (1 et 2) traduits. Il s’avère que Pierre Kropotkine est considéré comme le « père fondateur » de la biologie sociale et que les implications des questions et des études levées par Kropotkine durant sa carrière scientifique, sont l’objet de centaines d’articles scientifiques revus et publiés chaque année dans le monde. Pierre Kropotkine est à l’origine de l’étude de l’altruisme et de l’entr’aide mutuelle tant dans le règne animal qu’humain.

Il serait grand temps que la science renaisse, se débarrasse des oripeaux qui l’affublent des atours de la tromperie et de l’escroquerie pures et simples et se remette enfin au service des peuples et du progressisme. Nous en sommes loin, mais Kropotkine a toujours indiqué le chemin. Retrouvons-le !

Nous publierons cette traduction de larges extraits du livre de Dugatkin « Le prince de l’évolution » en 3 parties:

1ère partie

2ème partie

3ème partie

Pierre Kropotkine sur Résistance 71

 

— Résistance 71 —

*  *  *

1 ère partie

“Dans la société primitive, il n’y a pas d’organe séparé du pouvoir parce que le pouvoir n’est pas séparé de la société, par ce que c’est elle qui le détient, comme totalité une, en me de maintenir son être indivisé, en vue de conjurer l’apparition en son sein de l’inégalité entre maîtres et sujets, entre le chef et la tribu. Détenir le pouvoir, c’est l’exercer ; l’exercer, c’est dominer ceux sur qui il s’exerce: voilà très précisément ce dont ne veulent pas (ne voulurent pas) les sociétés primitives, voilà pourquoi les chefs y sont sans pouvoir, pourquoi le pouvoir ne se détache pas du corps de la société. Refus de l’inégalité, refus du pouvoir séparé : même et constant souci des sociétés primitives.”

Pierre Clastres

 

“Du point de vue de la liberté, quel système serait le mieux ? Dans quelle direction doivent bouger les forces du progrès ? Je n’ai pas de doute que le meilleur système serait un système pas très éloigné de ce que propose Kropotkine.”

Bertrand Russel

 

(Citations ajoutées par nos soins )

 

*  *  *

 

Le prince de l’évolution (larges extraits)

 

Par Lee Alan Dugatkin

Préface du livre

Kropotkine fut une des toutes premières célébrités internationales au monde ; il était connu essentiellement comme un brillant scientifique, mais sa renommée en Europe continentale fut plus centrée sur son rôle et sa guidance pour l’anarchisme. Aux Etats-Unis, il poursuivit ces deux passions. Des dizaines de milliers de personnes suivirent les deux conférences de celui qu’on qualifiait “d’ex-prince Pierre”. Le chemin de la gloire de Kropotkine emprunta les sentiers parfois tortueux de l’exil et de la prison, qui lui firent parcourir plus de 75 000 km à travers les espaces vides de la Sibérie et des contrées de son exil, tout à la fois lui faisant visiter les pays les plus modernes de son époque. Dans sa patrie russe, Pierre passa de l’étape de page préféré du tzar Alexandre II à celle d’un jeune homme épris des théories de l’évolution, en passant par celle de condamné, de prisonnier, d’évadé et d’agitateur politique, se retrouvant poursuivi par la police secrète du tzar dans ses pérégrinations mondiales pour ses idées politiques radicales, mais pour beaucoup éclairées. Qu’il soit emprisonné ou voyageant intensivement, Kropotkine prît toujours le soin d’écrire de manière prolifique sur des sujets aussi variés que l’évolution et l’attitude, la morale, la géographie de l’Asie, l’anarchisme, le socialisme, le communisme, les systèmes pénaux, la révolution industrielle à venir dans l’Est de l’Europe, la révolution française et l’état de la littérature russe.

Bien qu’en apparence des sujets n’ayant aucun rapport les uns avec les autres ou si peu, un fil conducteur commun existait: celui de la loi scientifique de l’entr’aide mutuelle, qui guide l’évolution de toute vie sur Terre ; l’entr’aide était le lien entre tous ces travaux.

La théorie de Kropotkine sur l’entr’aide mutuelle lui vint dans le plus improbable des endroits. En suivant les traces de son héros, Alexandre Von Humboldt, lorsqu’il avait ving ans, il commença une série d’expéditions en Sibérie. A ce stade, il était déjà un biologiste évolutioniste, un des rares en Russie et un grand admirateur de Darwin et de sa théorie de la sélection naturelle.

50 000 km plus tard, plus expérimenté, Kropotkine quitta la Sibérie toujours comme un darwinien ; mais il était devenu un biologiste évolutioniste différent: une nouvelle sorte de biologiste, car Kropotkine ne trouva pas en Sibérie ce qu’il s’attendait à y trouver.

Lorsque Kropotkine commença son long voyage à travers la Sibérie, la thérorie de l’évolution du moment avançait que le monde naturel était un endroit très brutal et que la compétition, la concurrence était la force dominante de l’évolution. Ainsi, dans les étendues glacées sibériennes, Pierre s’attendît à y trouver une nature toutes griffes dehors. Il la rechercha. Il étudia les oiseaux migrateurs, les mammifères, les bans de poissons et les sociétés d’insectes. Ce qu’il trouva est que la compétion était quasiment inexistante. Au lieu de cela, dans tous les recoins du monde animal, il rencontraît une entr’aide mutuelle. Des individus se pressaient pour échanger la chaleur, se nourrissaient les uns les autres, et gardaient leurs groupes des dangers potentiels, le tout semblant ête étroitement imbriqué dans une plus vaste société coopératrice. “De toutes les scènes de la vie animale qui passèrent devant mes yeux”, écrivit Kropotkine, “J’ai vu l’entr’aide mutuelle, le soutien mutuel, et ce de manière si importante que cela me fît suspecter que cela était une caractéristique de la plus grande importance pour le maintien de la vie, la préservation de chaque espèce et de son évolution future.”

Kropotkine ne limita pas ses études au monde animal seul. Il chérissait le temps passé dans les petits villages de paysans sibériens, avec leur sens profond de la communauté et de la coopération: dans ces petits villages sibériens, Kropotkine commença à comprendre “les ressorts intérieurs de la vie des sociétés humaines”. Là, en observant “le travail constructif des masses inconnues”, le jeune scientifique fut le témoin de la coopération humaine et de l’altruisme dans sa plus pure forme.

Le conflit survînt pour lui d’essayer d’aligner ses observations avec la théorie darwinienne. Alors qu’il aurait pu facilement abandonner la pensée évolutioniste dans son ensemble, comme le firent de nombreux scientifiques russes en réfutant les idées de Darwin comme n’étant rien d’autre que le reflet du miroir de la société victorienne, Kropotkine comprît que la pensée évolutioniste pouvait expliquer la diversité de la vie qu’il voyait autour de lui. Ainsi il tendît la corde raide sur laquelle il serait en équilibre permanent pour le restant de sa vie.

Il se fit l’avocat de la sélection naturelle comme la force directrice de la formation de la vie, mais reconnüt que les idées de Darwin avaient été mal interprêtées et mal représentées par les scientifiques britanniques. La sélection naturelle, argumenta Kropotkine, mène à l’entr’aide mutuelle et non pas à la compétition parmi les individus. La sélection naturelle a favorisé et favorise les sociétés dans lesquelles l’entr’aide mutuelle s’est développée et les individus de ces sociétés avaient une prédisposition naturelle et innée à l’entr’aide parce que la sélection naturelle avait favorisée de telles actions. Kropotkine créa même un terme nouveau illustrant ce phénomène: “l’évolution progressive”, pour montrer que l’entr’aide mutuelle était une condition sine qua non de la vie en société, animale et humaine. Des années plus tard, avec l’aide d’autres personnes, Kropotkine formalisera l’idée que l’entr’aide mutuelle était une loi biologique, ceci ayant bon nombre d’implications, mais les graines de ces idées furent semées en Sibérie.

De la toundra sibérienne, la pensée de Kropotkine se tourna vers les implications politiques de l’idée d’entr’aide mutuelle. Les fourmis et les termites, les oiseaux, les poissons et les mammifères coopéraient en l’absence de toute structure organisationnelle, de fait sans aucune forme de “gouvernement”. Ceci était également vrai dans les villages  où l’entr’aide mutuelle abondait, mais où il n’y avait absolument aucune structure de gouvernement centralisé. Kropotkine y voyait beaucoup de similarités avec les écrits anarchistes qu’il avait lu en cachette dans son adolescence. Laissez les gens totalement libres et autonomes, comme Pierre l’avait lu dans la littérature anarchiste et ils coopéreront tout naturellement. En Sibérie, Kropotkine avait découvert que ceci était non seulement vrai pour les humains, mais pour toutes les sociétés qui vivaient en groupes. Ce qui était une marque important de la nature ne pourrait assurément qu’aider en politique et en société.

“Kropotkine écrivît: “J’ai perdu en Sibérie quelque foi que je puisse encore posséder en la discipline de l’État que je chérissais auparavant: j’étais prêt à devenir un anarchiste.”

Pierre devint si convaincu que ses trouvailles scientifiques sur l’entr’aide mutuelle expliquaient les rouages biologiques sous-jacents de l’anarchie politique, que des années après son long voyage en Sibérie, il écrivît dans son oraison funèbre pour Charles Darwin, que les théories de Darwin “étaient un excellent argument pour dire que les sociétés animales sont le mieux organisées de façon anarcho-communiste”. Le temps passant, les idées de Kropotkine sur la science et l’entr’aide mutuelle firent de lui un des penseurs les plus connus de l’anarchisme jusqu’à ce jour. Pendant plus de 80 ans, jusqu’aux années 1960, les idées de Kropotkine sur l’entr’aide mutuelle ont joué un rôle déterminant et critique dans l’étude du comportement et de l’évolution […]

Chapitre 1

L’ex-prince Pierre

Note des traducteurs: Le premier chapitre est consacré à son enfance. Né d’une famille noble, il fit une courte carrière militaire, devint un des favoris du tzar Alexandre II qu’il respectait énormément. C’est  en qualité d’officier de l’armée russe qu’il commença son long périple sibérien en Juillet 1862.

Chapitre 2

En Sibérie

[…] Il vît là que le gouvernement était enclin à “des paroxysmes déments” et bien que le gouvernement de Sibérie ait eu de bonnes intentions, il était toujours une administration centralisée inefficace et corrompue, parce que, pensait Pierre Kropotkine, un bureaucrate sera toujours principalement concerné à faire plaisir à ses supérieurs et non pas à servir le peuple. Le gouvernement, commençait à être convaincu Pierre, était une partie et non pas la solution aux problèmes auxquels faisaient face la Sibérie et même sûrement la Russie de manière générale. Cette conviction devint de plus en plus grande, surtout après avoir rencontré le poète radical en exil M.L. Mikhaïlov, un avocat de la première heure des droits de la femme, Mikhaïlov dont le procès causa une polémique en Russie, lui donna une copie du pamphlet anarchiste de Pierre Joseph Proudhon “Système de contradictioms économiques” (NdT: en français dans le texte original) […]

[…] Lorsque que Pierre s’en fût en Sibérie, il s’attendit à y trouver la nature toutes griffes et dents dehors, le monde dont lui et Sasha parlaient dans leurs discussions à propos de l’évolution.

“J’ai échoué à trouver, pourtant sans faute d’avoir essayé, la lutte âpre pour les moyens de l’existence, parmi les animaux d’une même espèce, ce qui était considéré par les darwiniens (bien que pas toujours par Darwin lui-même…), comme la caractéristique dominante de la lutte pour la vie ainsi que le facteur principal de l’évolution.” Au lieu de cela, Pierre vit que la véritable lutte n’était pas au sein des individus de la même espèce, mais celle de “la lutte pour l’existence que chaque espèce animale devait assumer contre la nature peu clémente”. La dureté de la Sibérie elle-même était le moteur du processus évolutif. De cette lutte millénaire contre des conditions difficiles, l’entr’aide mutuelle avait évolué. Les animaux coopéraient pour lutter contre les conditions de vie difficiles de la Sibérie. L’entr’aide aux yeux de Kropotkine, était fondamentale à la vie animale. “Où que je vis la vie animale en abondance”, nota Pierre “… sur les lacs où une multitude d’espèces et des millions d’individus se rassemblaient pour émanciper leur progéniture, dans les colonies de rongeurs, d’oiseaux migrateurs, ceci prit des proportions très américaines le long du lac Usuri et spécifiquement dans la migration de daims à laquelle j’ai assisté sur l’Amúr et durant laquelle d’inombrables individus de ces animaux intelligents se rassemblaient sur cette immense territoire… Dans toutes ces scènes de la vie animale qui se sont déroulées devant mes yeux, j’ai vu l’entr’aide et le soutien mutuel se perpétrer.” […]

[…] Bien que la vie dans toutes les villes et les colonies était difficile à travers la Sibérie, l’entr’aide mutuelle florissait dans ces localités. Pierre trouva que l’entr’aide mutuelle y interférait aussi avec le gouvernement. Dans les villes et localités près des villes, qui étaient gérées par des bureaucrates, l’entr’aide avait disparu, elle avait été supprimé par le gouvernement et son ingérence dans les affaires locales. Kropotkine écrivit par la suite: “Toutes ces années passées en Sibérie m’ont appris l’impossibilité absolue de faire quoi que ce soit d’utile pour la masse des gens au moyen de la machine administrative. Je me suis défait de cette illusion pour toujours.”

Mais l’entr’aide mutuelle humaine florissait dans certaines parties de la Sibérie, dans les villes et les villages le plus loin des centres de vie administratifs, là la coopération était à son apogée. Là, libérés de toutes contraintes administratives, les paysans sibériens faisaient étale de l’entr’aide la plus débridée. Pierre écrivit: “Le travail constructif des masses inconnues, qui ne trouve que peu de droit de cité dans les livres… L’importance de leur travail constructif dans les formes de croissance sociétaires, se sont révélées devant mes yeux… Voir les avantages immenses que leurs communautés tiraient d’une organisation fraternelle semi-communiste et de voir quel succès était leur mode de colonisation de ces contrées en comparaison avec l’échec de la colonisation étatique, était apprendre quelque chose qui ne peut pas être apprise dans les livres.” […]

[…] De fait, ses observations à la fois sur les animaux et les humains l’ont amené à tirer une conclusion stupéfiante et dramatique: l’entr’aide mutuelle n’était pas seulement commune, mais aussi “de la plus haute importance pour le maintien de la vie, la préservation de chaque espèce et son évolution future. Il parlerait bientôt de l’entr’aide mutuelle comme une loi biologique. […]

[…] Cinq ans en Sibérie formèrent Kropotkine non seulement comme un biologiste évolutioniste et un géographe, mais aussi comme un activiste politique émergent. Il écrivit plus tard: “J’ai perdu en Sibérie toute forme de foi en la discipline étatique que j’eusse pu avoir. J’étais prêt à devenir un anarchiste.” …

La philosophie politique de l’anarchisme pose pour base qu’aucun gouvernement centralisé n’est nécessaire pour que les gens vivent heureux, de manière juste et équitable. Laissez les gens livrés à eux-mêmes, argumentent les anarchistes, et ils se traiteront les uns les autres avec respects et avec décence, Tout comme Kropotkine le fit par lui-même, les anarchistes arrivent à la conclusion que le but ultime de la société est la réduction des fonctions du gouvernement à zéro, et ainsi de développer une société sans gouvernement, sans état, an-archique.

Ce fut l’entr’aide mutuele que Kropotkine vit et nota dans le règne animal qui fit de lui un véritable anarchiste. Le fait que les animaux soient capables d’entr’aide mutuelle et ce de manière naturelle sans l’intervention d’un quelconque “gouvernement”, suggérait des racines biologiques profondes. Kropotkine sentit que le processus d’évolution avait favorisé l’entr’aide mutuelle dans les populations animales et que s’il devait mettre une étiquette politique sur ce fait de comportement animal, ce serait celle “d’anarchie”.

Le lien entre l’anarchie et l’entr’aide mutuelle chez les animaux avaient des conséquences à la fois politiques et scientifiques pour le jeune Pierre. Si les animaux coopéraient en l’absence totale de gouvernement, alors il semblait incompréhensible à Kropotkine que les humains ne puissent pas trouver un moyen de briser les chaînes du gouvernement. Il y avait sûrement un moyen de vivre “libre des entraves du gouvernement”. Kropotkine écrivit: “L’évolution favorise les aggrégations d’organismes essayant de trouver le meilleur moyen de combiner les désirs des individus avec ceux de la coopération pour le bien-être de l’espèce.”

Les anarchistes politiques, écrivit-il, ont la biologie de leur côté, ils ne faisaient en fait qu’adopter “la voie tracée par la philosophie moderne de l’évolution”. L’anarchie, nota t’il,  n’était qu’ “un résumé de la prochaine phase de l’évolution”. Le lien entre la science et la politique se cimenta lorsque Kropotkine commença à penser que “l’anarchisme représente bien plus qu’un mode d’action et une simple conception d’une société libre ; il est une partie intégrante d’une philosophie naturelle et sociale et qu’il doit être traité avec les mêmes méthodes que les sciences naturelles.” […]

Chapitre 3

Pas de perturbations organiques chez Pierre

[…] La répression de l’état inclut une reprise en main du système éducatif dont Kropotkine pensait qu’il devait inclure un composant technique, qui permettrait aux gens de pouvoir être plus autonomes. “Toute la Russie désirait une éducation technique, mais le ministère n’ouvrît que des lycées classiques. Tous les garçons qui promettaient de devenir quelque chose et qui montraient une certaine indépendance d’idées et de réflexion étaient soigneusement écartés ; une éducation technologique dans ce pays qui avait tant besoin d’ingénieurs et de techniciens, d’agriculteurs éduqués et de géologues, était traitée ni plus ni moins que comme l’équivalent de révolutionisme.”

Cette censure anima d’autant plus la haine de Pierre pour l’état. Comme jeune étudiant, il n’avait que peu d’amis à l’université, mais trouva des âmes sœurs au sein du “Cercle Tchaykovsky”, qu’il finit par considérer comme sa famille. Le cercle était un groupe dynamique secret de jeunes radicaux, la plupart anarchistes ou nihilistes, qui tentaient d’éduquer les paysans sur le mal que représentait l’état […]

[…] Le temps passant, le cercle commença à évoluer de distributeur de livres et de pamphlets à l’interaction directe avec les paysans. “De jeunes gens allèrent dans les villages comme médecins, infirmiers, assistants, enseignants, scribes de village, et même comme ouvriers agricoles, maréchaux-ferrants, forgerons, charpentiers, coupeurs de bois etc, et essayaient de vivre en relation étroite avec les paysans”, nota Pierre ; “ces gens y allèrent sans aucune vision révolutionnaire. Ils désiraient simplement enseigner à lire et à écrire à la masse de paysans, à les instruire à d’autres choses, aider leur santé, et participer à les sortir de leur misère noire par tous les moyens.”

L’état ne resta pas les bras croisés devant ces “agitateurs” et se mît à rechercher activement les membres du cercle Tchaykovsky. Nikolaï Tchaykovsky lui-même, un chimiste de formation, fut arrêté à plusieurs reprises et alla en prison […]

[…] Comme pour toutes ses autres passions, Kropotkine s’immergea dans le cercle de Tchaykovsky, rencontrant des paysans, leur apprenant au sujet des mouvements ouvriers émergents en Europe de l’Ouest et implorant son audience de continer à s’éduquer pour eux-mêmes. Kropotkine s’habillait souvent comme eux et diffusait la parole anarchiste sur la malfaisance de tout gouvernement et que les individus coopéraient naturellement et résolvaient les problèmes entr’eux le plus souvent bien mieux que l’état ne puisse le faire […]

Note des traducteurs:

Ici le chapitre continue sur l’arrestation de Kropotkine et son incarcération à la “bastille russe”: l’infâme prison Pierre et Paul, où il resta incarcéré deux ans en isolement complet, gardant sanité et santé grâce à un régime personnel de culture physique et la lecture qui lui était autorisée. Une requête de l’académie des sciences russe faite au tzar, força celui-ci à donner le droit à Kropotkine d’écrire dans sa cellule. Néanmoins atteint de scorbut, il fut transféré à l’hôpital carcéral de St Pétersbourg, d’où il s’échappa durant sa convalescence avec l’aide extérieure d’amis anarchistes. Il s’enfuit avec un faux-passeport en Finlande, puis en Suède d’où il s’embarqua pour l’Angleterre.

A suivre…

12 Réponses to “La mystification par le malthusianisme et le darwinisme-social: Pour une compréhension progressiste de la nature humaine… 1ère partie”

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  3. Population mondiale :
    1804… 1 milliard
    1927… 2 milliards .(+123 ans)
    1960… 3 milliards….(+33 ans)
    1974… 4 milliards….(+14 ans)
    1987… 5 milliards….(+13 ans)
    1999… 6 milliards….(+12 ans)
    2011… 7 milliards….(+12 ans)

    Etat de la planète :
    Réchauffement climatique
    Gaspillage des énergies fossiles, pénurie prévue pour le courant de ce siècle
    Idem pour les métaux
    Idem pour l’eau douce dans de nombreuses régions du globe
    6ème extinction de la biodiversité, dont celle de la méga-faune (97% des tigres éliminés depuis le début du XXème siècle)
    Déforestation massive, bétonnage, et j’en passe…

    Mais bien entendu : Haro sur le malthusianisme…
    Étonnant, pour ne pas dire bien triste de la part de personnes se réclamant de l’anarchisme…

    • Waouh!…
      Réchauffement climatique anthropique = escroquerie
      Energie « fossile » = escroquerie, le pétrole et le gaz ne sont pas fossiles mais abiotiques… Ce qui n’enlèvent rien au problème de pollution, nous sommes d’accord (pas le CO2 … qui n’est pas une pollution !!)
      Le reste est réel, et ne sont que des conséquences directes du capitalisme et de l’imbécilité de ceux qui « suivent » les « marchés »… Bref un problème de gestion.. pas de ressources…

      Kropotkine (peut pas faire plus anarchiste que lui…) a été le premier à dénoncer la pseudo-science du malthusianisme et du darwinisme-social.
      On pourrait doubler la population mondiale que nous aurions toujours les ressources pour nourrir tout le monde sans problème.. L’oligarchie ne le désire pas et spécule, çà c’est une autre histoire !
      Une autre d’idée: si on mettait tous les habitants de la planète au coude à coude. l’ensemble de l’humanité tiendrait sue l’île de Vancouver au Canada… Le reste du monde étant totalement vide.
      La Terre se porte bien en comparaison de ce qu’elle a subi pendant plus de 4 milliards d’années, les gens sont nazes, surtout les criminels en charge… çà c’est une autre histoire !

      Il semblerait que vous mélangiez un peu tout… Vous a t’on confié la mission de venir voler au secours des dogmes ?… Sur certains points, va falloir replancher sérieusement !

  4. […] Nous avons également abondamment écrit et traduit sur Pierre Kropotkine, le scientifique anarchiste qui a développé le véritable antidote contre le poison des pseudo-sciences du darwinisme-social et du malthusianisme merci de voir les articles ici: 1, 2, 3 […]

  5. […] il y a belle lurette par Pierre Kropotkine, et d’aures par la suite, le mythe de la surpopulation malthusien revient à la charge pour […]

  6. […] Murray Bookchin, Emma Goldman, Gaston Leval, Howard Zinn, Barbara Tuchman, Annie Lacroix-Riz, Alan Lee Dugatkin, Michael Albert, Paulo Freire, Ira Shor, Gilad Atzmon, Marshall Sahlins, Pierre Clastres, Louis […]

  7. […] et universelle, fondée de la loi naturelle et l’essence même de la nature humaine : l’entr’aide. — Résistance 71 […]

  8. […] Nous devons nous tenir debout, émancipés, côte à côte avec nos frères (et sœurs) des nations des cinq continents pour enfin lier les liens de solidarité, d’entraide mutuelle, de compassion et de coopération qui nous mèneront ensemble à la création d’une société des sociétés d’associations volontaires, juste, égalitaire, non-coercitive et universelle, fondée de la loi naturelle et l’essence même de la nature humaine : l’entraide. […]

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