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Colonialisme historique et récurrent : La doctrine de la domination chrétienne en terre apache, l’affaire d’Oak Flat remet tout le système politico-légal yankee une énième fois sur la sellette (Steven Newcomb)

Posted in actualité, altermondialisme, canada USA états coloniaux, colonialisme, documentaire, France et colonialisme, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, ingérence et etats-unis, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, politique et lobbyisme, politique et social, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , on 18 avril 2021 by Résistance 71

Cette traduction suite à notre publication récente d’une écrit de Léon Tolstoï “L’église et l’état”… Une fois de plus, tout se tient.

Dans l’esprit de Cheval Fou et de Géronimo

~ Résistance 71 ~

La doctrine de domination chrétienne et le peuple apache (l’affaire Oak Flat)

Steven Newcomb

Avril 2021

url de l’article original:
https://originalfreenations.com/the-doctrine-of-christian-domination-the-apache-people-and-oak-flat/

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

L’affaire de la résistance apache sur leur site sacré de Chi’ Chil Bildagoteel, appelé en anglais “Oak Flat”, est maintenant devant le cour d’appel du 9ème circuit judiciaire. Cette affaire a créé une publicité mondiale et un bon nombre de groupes chrétiens ont enregistré des lettres de soutien amicus curiae (ami de la cour). Ces lettres soutiennent le droit et la liberté des Apaches de s’engager dans leurs traditions et cérémonies ancestrales sur un endroit de leur terre traditionnelle qui leur est particulièrement sacré et qui va être détruit par des compagnies minières. Le peuple et la nation apaches seront irrévocablement blessés si leur terre sacrée est détruite dans un effort entrepreneurial d’accumuler toujours plus de profits avec ce projet d’extraction de minerai de cuivre.

Oak Flat est maintenant menacé par un projet minier d’extraction de cuivre qui va oblitérer en le rayant de la surface de la planète, la totale existence de cette endroit sacré en défonçant sols et sous-sols. Si le projet minier est autorisé, celui-ci laissera à cet endroit un trou béant de quelques 300m de profondeur et de 4 km de diamètre, exactement là où le site sacré apache se situe.

Je trouve positif mais quelque peu ironique que des groupes d’églises chrétiennes se joignent aux Apaches sur le projet de défense de la zone sacrée. Ironique parce que la 9ème cour d’appel va utiliser un processus classique de raisonnement chrétien de domination qui est déshumanisant et raciste, fondé sur les catégories artificiellement et mentalement crées de “païens” et “d’infidèles”. Ce processus de raisonnement qui est vieux de plusieurs siècles, voient les non-chrétiens comme des ennemis du monde de la chrétienté (de l’empire chrétien).

Commençons par examiner le fondement de ce processus bigot de raisonnement que la cour d’appel du 9ème district va appliquer à l’affaire d’Oak Flat. Cela commence avec la croyance que les pouvoirs politiques (alias “les souverains”) du monde chrétien et les successeurs de ces pouvoirs politiques (comme les Etats-Unis entre autres…), ont un droit fondamental de s’engager dans une relation de domination contre ces peuples que les chrétiens ont historiquement appelés “païens” ou “infidèles”.

En conséquence, si ces pouvoirs politiques croient qu’il est nécessaire de détruire la tradition et les zones de cérémonie de ces soi-disants païens et infidèles parce qu’une telle destruction bénéficierait “la civilisation (domination) humaine et chrétienne”, alors ainsi soit-il. Leur sacrifice et leur souffrance sont jugés nécessaires pour le plus grand bien de “la société humaine”. Après tout, c’est une longue tradition de la chrétienté que de regarder les “païens” et les “infidèles” et tous non-chrétiens comme des barbares et donc ne faisant pas partie de la “race humaine” ( forcément chrétienne).

La vérité est que le système politique et légal des Etats-Unis est fondé sur le droit de la domination chrétienne contre les peuples et nations natifs, comme les Apaches. Ceci est basé en partie sur une assertion faite dans le rendu de la Cour Suprême des Etats-Unis (CSEU) dans l’affaire Johnson vs M’Intosh, 1823, à savoir que le “peuple chrétien” (des mots mêmes du juge de la Cour Suprême John Marshall) possède “un génie supérieur” et que le “peuple chrétien” est en droit de s’imposer mentalement sur les peuples natifs “qui étaient païens”, ce des mots mêmes du juge Marshall

Utilisant le “caractère et la religion” des habitants natifs du continent comme d’une justification, le “génie supérieur de l’Europe” put exercer et affirma un “droit d’ascendence”, c’est à dire un droit de domination sur les peuples autochtones. L’affirmation d’un droit de domination par “le peuple chrétien” sur des “païens” non-chrétiens est toujours regardé aujourd’hui comme “la loi suprême de la terre” aux Etats-Unis. Ceci parce que le raisonnement de domination qui est contenu dans le rendu du jugement de l’affaire Johnson vs McIntosh de 1823 est toujours activement utilisé par les tribunaux américains, ce incluant la CSEU.

Cette forme de raisonnement sera celle adoptée par la cour d’appel du 9ème district dans l’affaire d’Oak Flat pour la simple et bonne raison que ces concepts fondamentaux de domination chrétienne sont à la base de tout le système légal américain et de son système de loi et de politique indien, système qui est aussi retracé jusqu’aux mots latins et aux idées de domination exprimés dans les bulles pontificales du Vatican du XVème siècle et des chartes royales émanant d’Angleterre.

Aussi difficile que ce soit de le croire, c’est un fait inéluctable que la cour d’appel du 9ème district va déployer ces catégories et ce type de raisonnement de la domination envers les Apaches de Oak Flat, même si aucun de ces mots en particulier n’est utilisé. Cette façon de raisonner et peu importe à quel point cela peut paraître mal de notre point de vue actuel, sera contenue dans le raisonnement des précédents judiciaires (la jurisprudence) que la cour citera et appliquera à son processus de raisonnement actuel.

Alors que la cour d’appel délibère sur l’affaire d’Oak Flat , elle continuera d’empêcher nos nations originales libres et indépendantes de vivre une existence libre en se reposant sur l’affirmation américaine d’un droit à la domination chrétienne au sein de la loi américaine. Quelque soit la façon dont ceci est caché et maintenu caché, ceci constitue le cadre psychologique au sein duquel l’affaire d’Oak Flat est prise en charge par le système judiciaire des Etats-Unis.

Cette cour d’appel a déjà démontré sa volonté d’appliquer le processus de raisonnement de la domination envers la nation Kumeyaay. Elle l’a fait en 2014 dans l’affaire de vestiges et de restes ancestraux, White v. University of California. Dans la note de bas de page #2 de son compte-rendu écrit, la cour d’appel a cité à la fois Tee-Hit-Ton Indians v. United States (1955) and Johnson v. McIntosh (1823). Le contenu de cette note de bas de page ainsi que la citation par la cour de la décision de justice dans l’affaire Johnson a rendu évident que cette cour utilisait le processus de raisonnement évoqué fondé sur un soi-disant droit de domination chrétien. La note 2 de White v. University of California explique :

L’intérêt aborigène sur la terre est généralement décrit comme un droit tribal d’occupation des sols. Ce n’est pas un droit de propriété, mais revient à un droit d’occupation des sols que le souverain accorde et protège contre l’intrusion de tierces parties ; Tee–Hit–Ton Indians v. United States, 348 U.S. 272, 279 (1955).

L’expression “le souverain” se traduit en “le dominant” (dominor en latin). D’après la règle psychologique et mentale générale du système de domination, Le Dominateur (“le souverain”) “accorde” aux Indiens un simple “droit d’occupation des sols”, qui n’implique aucun pouvoir de domination. Ce langage veut dire que ce sont les Etats-Unis, en tant que “dominateur” ou “souverain” (NdT: en héritage historique des autres souverains… comme la Couronne d’Angleterre ou celle d’Espagne…), qui décident de quel droit il s’agit, s’il y en a un. Ce “souverain” est volontaire pour concéder aux Indiens mais toujours au sein du “monde, de la construction mentale des Etats-Unis”.

Le gouvernement des Etats-Unis a décidé que les “Indiens” comme les Apaches, doivent être catégorisés comme des “tribus” qui n’ont, du point de vue mental des USA, aucun droit de propriété à la terre avec laquelle ils ont traditionnellement et ancestralement exercé une relation spirituelle et culturelle durant des milliers et des milliers d’années.

Le “souverain, dominateur” qu’est le gouvernement des Etats-Unis, refuse d’accepter l’idée que toute nation indienne ou “tribu”, puisse contredire le droit de domination du “dominateur, souverain”, autrement connu sous le vocable de “propriété”. Le dominateur refuse de reconnaître le “droit indien” d’occupation des sols qu’il a mentalement imposé aux nations et peuples natifs comme incluant un droit de propriété.

Pour le dire différemment, le gouvernement américain dominateur refuse de reconnaître les successeurs actuels des “païens et infidèles”, comme les Apaches, comme ayant un droit de domination sur leurs terres traditionnelles et ancestrales. Le gouvernement américain ne veut en rien concéder aux “natifs qui étaient (et sont peut-être toujours) des païens”, le pouvoir immense contenu dans le simple concept de la propriété qui est définie comme “pas l’objet matériel en lui-même, mais le droit.. de domination obtenu de droit sur un tel objet.” (dictionnaire du droit Ballentine, 1969)

En tant que dominateur, les Etats-Unis ont mentalement inventé la doctrine (et la croyance bien acceptée) que les Etats-Unis ne reconnaîtront jamais une nation indienne ou “tribu” comme possédant un droit de domination (“propriété”) sur ses propres terres natives. Le but du gouvernement des Etats-Unis est d’empêcher tout peuple ou nation natifs de ne jamais être capable de déployer un processus de pensée qui puisse contredire avec succès l’affirmation du gouvernement des Etats-Unis d’un droit de domination chrétienne sur ces terres. Dans la décision de l’affaire Johnson, Marshall appelle ce droit de domination affirmée la “domination ultime et définitive” du souverain.

Qui et qu’est-ce qui est “souverain” ? La cour du 9ème circuit nous fournit une réponse à cette question avec sa référence à “la théorie légale disant que la découverte et la conquête ont donné aux conquérants, le droit de posséder la terre mais n’ont pas perturbé le droit des tribus à l’occuper. Voir Johnson v. M’Intosh, 21 U.S. 8 Wheat 543, 588–91 (1823).” “Le souverain” est un des “conquérants” (dominateurs) et “la conquête” est, une fois de plus, la domination.

Une fois traduit cela donne donc “cette conquête et domination ont donné aux dominateurs le droit de dominer la terre mais n’a pas perturbé le droit des tribus de l’occuper.” Ce raisonnement fut aussi la base du CR du gouvernement des EU en date du 5 février 2021, en réponse à une requête de l’Apache Stronghold pour une injonction temporaire sur la proposition minière d’Oak Flat. Nous le savons car dans leur CR, les avocats du gouvernement ont cité le même phrasé de Tee Hit Ton Indians v. United States, citant Johnson v. McIntosh.

Le juge Stanley Reed a écrit la majorité du CR de Tee Hit Ton Indians v. United States. Dans une opinion légale différente qu’il écrivit huit ans plus tard, Reed révéla le fait que la décision dans l’affaire Johnson déploie un processus de raisonnement au sujet du droit de domination (“souveraineté”) assumé être détenu par les “nations chrétiennes” dès qu’elles localisaient et envahissaient des terres non-chrétiennes.

Dans le CR de l’affaire Alcea Band of Tillamooks v. United States (1946), le juge Reed a exprimé son désaccord avec ce que dit le CR de l’affaire Johnson à savoir que “la théorie que la découverte par les nations chrétiennes leur a donné la souveraineté [domination] sur les terres découvertes et donc le titre de propriété.Quand les représentants d’un dominateur chrétien (dominorum christianorum en latin) localise des terres qui ne sont pas encore sous domination chrétienne (dominio en latin), le monde et la perspective mentale du dominateur chrétien est d’immédiatement assumer le contrôle du processus de construction de la réalité dans cette nouvelle zone géographique fraîchement découverte.

La théorie veut que les nations chrétiennes, en tant que “souveraines” chrétiennes auto-proclamées aient affirmé un droit de domination , une souveraineté sur les terres des nations natives. Pour mettre une belle touche finale sur le sujet, nous pouvons citer Jonathan Havercroft dans son “Captives of Sovereignty” (2014), où il définit la souveraineté comme voulant dire “une forme injuste de domination politique qui limite la liberté humaine.

Pour retourner maintenant à la note de bas de page 2 dans White v. University of California,, la cour d’appel du 9ème circuit cite les Indiens Tee Hit Ton comme sa source de “théorie légale” pour dire que “la découverte et la conquête [domination] ont donné aux conquérants [dominateurs] le droit de posséder la terre.” Le mot “posséder” nous rapporte à celui de “propriétaire”, qui est défini dans le dictionnaire de droit Ballantine (1969) comme “Quelqu’un qui a la domination complète sur une propriété particulière”.

Cela nous mène à “propriété” pour Ballantine : “Les droits d’un propriétaire. Titre de propriété. Domination sur la pauvreté.” La propriété nous mène à la définition fournit par l’éminent juriste anglais William Blackstone : la “domination despotique”, ce qui est de manière définitive la domination. Imaginez si les groupes chrétiens qui soutiennent les Apaches avaient défié dans leur amicus briefs l’affirmation extraordinaire et péremptoire imbriquée dans le système légal américain, à savoir que les dominateurs chrétiens ont un droit fondamental de domination chrétienne sur les terres de peuples et nations “païennes et infidèles”.

La question demeure, où sont le sens et le ressenti de scandale au sujet de ce processus de raisonnement bigot, religieux et raciste au plus profond de lui-même de cette domination chrétienne, fondée sur la Bible et qui est la fondation même de tout le système légal et politique du dominateur que sont les Etats-Unis d’Amérique en regard de nos peuples et nations natifs ?

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Le livre de Steven Newcomb « Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte » que nous avons traduit pour son essentiel est le 7ème PDF le plus téléchargé de l’histoire de notre bibliothèque PDF à diffuser sans aucune modération.

Lecture complémentaire : « Affaire Johnson vs M’Intosh », CSEU, 1823

5 textes pour comprendre et éradiquer le colonialisme

« Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte », Steven Newcomb, 2008

« Comprendre le système de l’oppression coloniale par mieux le démonter », Steven Newcomb

« Comprendre le système de l’oppression coloniale pour mieux le démonter », Peter d’Errico

« Effondrer le colonialisme », Résistance 71

« Nous sommes tous des colonisés ! », Résistance 71

Reprise 10 : L’argument « légal » yankee de la domination chrétienne sur les peuples et nations originels (Steven Newcomb)

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American Indian Movement

 

L’argument des nations chrétiennes du gouvernement des Etats-Unis dans l’affaire judiciaire des Indiens Tee-Hit-Ton vs Etats-Unis (1955)

 

Steven Newcomb

 

27 août 2020

 

url de l’article original:

http://originalfreenations.com/the-u-s-governments-christian-nations-argument-in-tee-hit-ton-indians-v-united-states-1955/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Il y a soixante-six ans, en novembre 1954, le ministère de la justice américain a soumis une argumentation des plus bizarres au cours de l’affaire opposant les Indiens Tee-Hit-Ton et les Etats-Unis. Ceux-ci argumentèrent que les Indiens de la bande Tee-Hit-Ton de la nation Tlingit d’Alaska ne devrait pas recevoir de compensation financière pour la prise de bois de leur territoire. Pourquoi ? Parce que “les nations chrétiennes d’Europe” avaient affirmé leur “souveraineté” et “acquis la juridiction” sur les terres des païens et des infidèles durant l’époque dite de la “découverte”.

Les métaphores religieuses contenues dans le résumé légal du ministère de la justice, qui incluent des citations de la “Genèse” de la bible ainsi que des psaumes de l’ancien testament, nous disent que le ministère et le gouvernement des Etats-Unis contestaient sur la base de la religion chrétienne que les Indiens Tinglit devaient être payés pour la prise de bois sur leurs terres. Les Etats-Unis gagnèrent l’affaire à la majorité du vote de la Cour Suprême et un compte rendu fut écrit par le juge Stanley Reed et rendu public par la CS en février 1955. Je suis né deux mois après cette décision de justice. En tant que peuples et nations qui furent décimés par l’invasion des nations de la chrétienté occidentale, nous, peuples natifs, tentons constamment de comprendre cette décision et cette version de la “réalité” passée et présente. Pourtant, pour une raison qui nous échappe, les érudits de la loi sur les Indiens n’ont fait aucun effort pour comprendre le fait qu’en 1954, la même année où la CSEU renversa la décision dans l’affaire Plessy vs Ferguson et la doctrine différente mais égale, le gouvernement des EU a utilisé la bible et la religion chrétienne, avec des documents (bulles) pontificaux datant du XVème siècle comme base de ses arguments dans une plaidoirie judiciaire.

Malheureusement, avant 1955, la CSEU n’enregistrait pas les plaidoiries orales, sauf pour les cas très importants. Une recherche approfondie par un bibliothécaire de l’université du Massachussetts, Amherst, a révélé qu’aucune transcription écrite ne fut conservée de la plaidoirie du gouvernement des EU dans l’affaire Tee-Hit-Ton vs USA. Ce que nous avons en revanche, c’est l’original résumé légal de cette affaire. Et, comme je l’ai dit ci-dessus, je n’ai pas trouvé un seul exemple de praticien de la loi sur les Indiens ayant mentionné dans un livre ou un article, les métaphores religieuses utilisées par le gouvernement des Etats-Unis dans son argument à la CSEU dans l’affaire Tee-Hit-Ton vs USA.


Bible, Croix et Épée… La sainte trinité de la domination

Mais, quelques universitaires natifs ont réuni quelques métaphores qu’ils ont l’habitude d’utiliser et ce qu’ils ont pu discerner  des archives écrites ou des interprétations des archives par d’autres universitaires. Les avocats de la loi fédérale sur les Indiens n’ont pas mentionné la dimension religieuse chrétienne dans cette loi dans leurs comptes-rendus passés. Le juge de la CS Stanley Reed, qui a écrit la vaste majorité de la décision de justice dans l’affaire Tee-Hit-Ton contre les USA, a exprimé son interprétation de la décision de Johnson contre M’Intosh (1823) dans une opinion dissidente en 1946 dans l’affaire de la bande Alcea de Tillamooks. Reed y a dit que la décision de Johnson était basée sur la théorie voulant que “la découverte par les nations chrétiennes leur avaient donné la souveraineté sur ces terres découvertes ainsi que le titre de propriété.” Il cita tacitement ce même point de vue dans la décision majoritaire de l’affaire Tee-Hit-Ton en citant le chapitre “Propriété” (chapitre 5) dans les Elements of International Law, de Henry Wheaton, qui exprimait un contraste entre la domination des nations chrétiennes d’Europe et la mise au pas, subordination des Indiens non-chrétiens.

Les citations archivales du “passé” concernant le rapport chrétien / infidèle et païen sont filtrées et laissées hors des catégories de la loi fédérale indienne. Ceci devient certainement un facteur quand on en vient à la capacité de défier les schémas idéologiques que j’appelle typiquement maintenant “de la doctrine chrétienne de la découverte et de la domination. Nous n’avons pas accès à une vérité non “filtrée” des anciennes archives historiques, spécifiquement depuis notre distant point d’observation dans cette seconde décennie du XXIème siècle. Ce que nous avons en revanche est une litanie d’interprétations largement contestées, qui demandent toutes une reconnaissance de vérité.

Pourtant ces silences, ce dont on ne discute pas, sont souvent plus importants que ce dont on discute. Prenez par exemple le professeur de science politique David Wilkins, dans un article sur la doctrine de la découverte il y a un an, il y dit que la décision majoritaire de Stanley Reed dans l’affaire des Indiens Tee-Hit-Ton “se classe parmi les plus évidentes et racistes mauvaises représentations de faits jamais émises par la Cour Suprême des Etats-Unis.Wilkins n’a apparemment aucun problème à exprimer ce scandale en regard du racisme dans la loi américaine ; mais il n’est pas scandalisé de la même manière par l’utilisation par les Etats-Unis de la religion chrétienne et des termes catégoriels “païens” et “infidèles” contre nos nations et nos peuples dans la plaidoirie judiciaire de l’affaire des Indiens Tee-Hit-Ton ni par la reconnaissance par la CSEU de ce langage citant un langage religieux dans les Elements of International Law de Henry Wheaton ?

J’ai envoyé le langage pertinent du compte-rendu légal de l’affaire à un autre érudit de la loi fédérale indienne il y a quelques années. Quand je lui ai posé plus tard la question, il a répondu : “Je ne vais pas lire ça”. Aucune explication du pourquoi. Juste un refus direct à simplement lire ce langage religieux traitant de “païens” et “d’infidèles” dans ce compte-rendu légal, ainsi que les références à l’ancien testament biblique..

Je m’attendais à une réponse plus nuancée de Wilkins, mais il dit que “les archives historiques, à la fois écrites et orales, , montrent que le titre de propriété légal demeurait avec les nations tribales.” Pourtant, il négligea de reconnaître un présumé droit de domination de la part du gouvernement des Etats-Unis en regard des nations natives. Quant à ce que Wilkins veut dire par “droit de propriété légal” en application aux nations natives, il donne un indice lorsqu’il dit que la doctrine de la découverte “a affirmé que les nations tribales étaient ‘les occupants de droit de la terre’ et avaient ‘un droit légal et juste de garder la possession de la terre et de l’utiliser comme bon leur semble’”.

Pourtant, en 2014, le 9ème circuit de la cour d’appel a dit dans l’affaire White vs University of California que le “droit d’occupation des sols” n’est pas un “droit de propriété”, tout en citant Johnson vs M’Intosh et Tee-Hit-Ton vs USA en documentation. Nous pourrions demander au professeur Wilkins “Quel droit de “propriété des sols” demeure t’il avec les nations natives, prenant en compte qu’en 2014, le 9ème circuit de cour d’appel a déclaré que le titre indien “d’occupation aborigène’ est un ‘intérêt aborigène’ mais pas un “droit de propriété’” ?

Vous pouvez vraiment vous poser la question de savoir si les praticiens de la loi fédérale indienne vont un jour vraiment défier la base religieuse de la doctrine de la découverte dans l’affirmation par les Etats-Unis que l’occupation des terres indiennes n’est pas un “droit de propriété”, le tout fondé sur la distinction entre les nations chrétiennes d’Europe et leurs successeurs, et les nations “païennes” et “infidèles” ? Où est le scandale en Territoire Indien sur cette utilisation de la chrétienté par les tribunaux de justice américains pour affirmer leur droit de domination contre nos peuples et nations natives ?…

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Notre page « Colonialisme et Doctrine Chrétienne de la Découverte »

Notre page « Colonialisme et luttes indigènes »

5 textes pour comprendre et éradiquer le colonialisme

« Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte », Steven Newcomb, 2008

« Comprendre le système de l’oppression coloniale par mieux le démonter », Steven Newcomb

« Comprendre le système de l’oppression coloniale pour mieux le démonter », Peter d’Errico

« Effondrer le colonialisme », Résistance 71

« Nous sommes tous des colonisés ! », Résistance 71

 


La Grande Loi de la Paix


Wampum Deux Rangées

Reprise 7 : Résistance au colonialisme et l’affirmation du « don de dieu » d’un droit à la domination (Steven Newcomb)

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Le “don de dieu” d’un droit à la domination

 

Steven Newcomb

 

21 août 2020

 

url de l’article original:

http://originalfreenations.com/gods-gift-of-a-right-of-domination/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Dans l’ancien testament de la bible, on trouve l’histoire d’un dieu qui a choisi un peuple particulier avec lequel il voulait avoir une relation spéciale. Parce qu’il l’a choisi, ce peuple est connu comme “le peuple élu”. La déité lui a promis une grande terre, mais malheureusement sur cette terre y vivaient d’autres peuples et nations.

D’après l’histoire, le “dieu” de la bible donna à “Son” “peuple élu” le droit d’établir un système de domination sur le nombre de nations vivant sur les terres qu’il lui avait promises.

Dans mon livre “Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte” (Fulcrum, 2008) [dont R71 a traduit de larges extraits à lire sur le lien précédent du titre en français), j’ai écrit : “L’affirmation par les monarques chrétiens d’un ‘droit à la découverte et à la possession’ était aussi une affirmation du droit de tuer et de piller les non-chrétiens. Ce droit au pillage se trouve également dans la tradition d’alliance trouvé dans l’ancien testament. Par exemple dans le livre du Deutéronome, nous y trouvons que “dieu” dit à son peuple élu comment il devait se comporter lorsqu’ “IL” les amènera sur la terre dont ils avaient reçu pour instruction de posséder. Ainsi :

“Quand ton seigneur dieu vous amènera sur la terre, vous devrez la posséder et ce que vous aurez devant vous, délivrées par votre seigneur dieu, les7 nations plus grandes et plus puissantes que vous, vous devrez les écraser et les détruire…

Si le “peuple élu” acceptait de suivre ces mandats “divins”, Yaveh promit de leur donner de “grandes et belles villes”, qu’ils n’avaient pas construites, avec “des maisons remplies de bonnes choses”, qu’ils n’avaient pas remplies, qu’ils n’avaient ni creusées ni construites, et des vignes et des oliveraies, qu’ils n’avaient pas plantées. Après tout, “Il” avait découvert ces terres et les avait promises à “Son” “peuple élu” et parce qu’”Il” est dépeint comme se considérant lui-même comme “dieu”, il fut capable de le passer en héritage à “Son” “peuple élu” “Son”, “droit à la découverte et à la domination”.

Les “grandes et bonnes villes”, “bonnes choses”, “puits”, “vignes”, oliveraies”, tout cela faisait partie du butin pris à l’ennemi que Yaveh commanda aux Hébreux “de manger”. La phrase “manger le butin pris à ton ennemi” correspond, bien entendu avec la métaphore LA COLONISATION EST MANGER.

Ceci constitue le schéma de pensée et de comportement de l’ancien testament que les Etats-Unis ont imposé sur nos nations et peuples originels au nom de la loi et de la politique fédérale indienne. Ezra Stiles, président de l’université de Yale, invoqua ce schéma en 1783 lorsqu’il déclara que dans le futur, “dieu ferait son Israël américain, bien au-dessus de toutes les nations”. Comment cela s’accomplirait-il ? Par les moyens des schémas de domination impériaux et coloniaux. En d’autres termes, par la certaine “colonisation” du continent.


Résistance !

La racine du mot colonisation est “colon”, qui est partie du système digestif du “corps politique colonial” prédateur, qui vient supplanter et envahir nos peuples et nations originels, avec ce désir de les dévorer en tant que proies et butin. La racine de “colon” est “colo” qui veut dire “filtrer les impuretés dans le processus d’extraction minière”. Celle-ci est la toile de fond du processus de colonisation, suffit de regarder toutes les extractions minières qui se sont produites et continuent de se produire sur les terres natives (partout dans le monde).

Tous ces schémas sont le résultat d’un désir de localiser (de “découvrir”) et de “saisir” toute nouvelle zone géographique qui peut être convertie en richesses et en pouvoir. Convertir a aussi une autre signification valide, “prendre illégalement ce qui appartient à quelqu’un d’autre”, comme par exemple à nos nations originelles.

Ce que le juge de la Cour Suprême des Etats-Unis John Marshall a appelé le “droit de découverte” dans sa décision de 1823 dans l’affaire Johnson vs McIntosh est une excroissance d’un droit que le “dieu” de la bible avait dit avoir donné à son “peuple élu”. Le peuple élu de la chrétienté devait mettre les voiles à la recherche des terres distantes non-chrétiennes qui dans ce narratif lui furent promises par “dieu”. Ce schéma de “peuple élu” et de “terre promise”, ainsi que celui du “commandement de dieu” “d’éradiquer” les nations vivant déjà en cet endroit “promis” en les “conquérant” etc, fut éventuellement généralisé et utilisé contre toutes les nations originelles du monde entier.

Ce narratif du “droit divin” à la découverte et à la domination fut imbriqué dans la décision de la Cour Suprême de Justice des Etats-Unis dans l’affaire Johnson & Graham’s Lessee v. McIntosh (1823), où il demeure toujours, avec son affirmation que les monarques de la chrétienté ont assumé que “la domination ultime”, ou le droit de domination, existait “en eux-mêmes”. Quand vous retirez la dernière lettre du mot “dominion” vous obtenez “dominio”, qui veut dire de manière variée “dominer”, “subjuguer” et “subordonner”. Aujourd’hui, bien malheureusement, des schémas de domination et de déshumanisation affligent les gens et les peuples à travers la planète entière.

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Note de Résistance 71 : Comme nous l’avons expliqué dans notre analyse “Nous sommes tous des colonisés !” (voir ci-dessous)

Lectures complémentaires :

5 textes pour comprendre et éradiquer le colonialisme

« Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte », Steven Newcomb, 2008

« Comprendre le système de l’oppression coloniale par mieux le démonter », Steven Newcomb

« Comprendre le système de l’oppression coloniale pour mieux le démonter », Peter d’Errico

« Effondrer le colonialisme », Résistance 71

« Nous sommes tous des colonisés ! », Résistance 71

Il n’y a pas de solution au sein du système, n’y en a jamais eu et ne saurait y en avoir !

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

+

4 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie

 


Face à face… N.O.M vs Société des Sociétés


Gaulois penseur… donc réfractaire

Résistance au colonialisme: Suprématie blanche et domination par la loi fédérale sur les Indiens (Steven Newcomb)

Posted in actualité, altermondialisme, canada USA états coloniaux, colonialisme, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, ingérence et etats-unis, pédagogie libération, politique et social, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , on 12 septembre 2017 by Résistance 71

La suprématie blanche (concept “d’ascendance”) est la base même de la loi fédérale indienne

 

Steven Newcomb

 

4 septembre 2017

 

url de l’article original:

https://indiancountrymedianetwork.com/news/opinions/white-supremacy-ascendancy-basis-us-federal-indian-law/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

L’ère Trump a donné naissance à une nouvelle vague de suprématisme blanc aux Etats-Unis. En réponse, un certain nombre de statues dédiées à des figures de la Confédération sudiste et propriétaires d’esclaves (NdT: il y avait des propriétaires d’esclaves au nord également et la guerre de sécession ne fut en aucun cas une guerre de l’anti-esclavagisme (le nord) contre l’esclavagisme (le sud)…) ont été  récemment retirées de leurs piedestaux à cause de la levée de boucliers contre ce qui est perçu comme l’histoire du racisme aux Etats-Unis et l’atmosphère raciste de suprématisme blanc et de nationalisme qui s’est levée dans la société américaine depuis le début de la présidence de Trump. Par exemple, une statue du général sudiste Robert E. Lee a été enlevée, en partie parce que Lee commandait l’armée confédérée pendant la guerre civile de sécession.

Et pourtant, ceux qui ont critiqué les statues d’un bon nombre de racistes de l’histoire des Etats-Unis ont été malgré tout très sélectifs dans leur indignation envers d’autres blancs, propriétaires d’esclaves et qui croyaient en la suprématie blanche. Ironiquement, le président Trump l’a fait remarquer lorsqu’il a réthoriquement demandé aux opposants des statues, s’ils pensaient que les statues de deux autres propriétaires d’esclaves, George Washington et Thomas Jefferson, devaient aussi être descendues de leur piedestal. Ma réponse serait sans hésiter: “définitivement”…

Un exemple d’attitude suprématiste est évident quand une classe dirigeante se considère être meilleure que les autres classes et qu’elle détient le pouvoir. Un suprématiste blanc a été défini comme “une personne qui croit que la race blanche est de manière inhérente supérieure aux autres races et que les blancs devraient avoir le contrôle sur les personnes d’autres couleurs et d’autres races.” L’”affirmation d’ascendance” est une autre manière de clamer la suprématie. Affirmer l’”ascendance blanche” est assumer que les blancs sont suprêmes et doivent se situer dans les plus hautes positions de la société américaine , au-dessus des autres. Dans la décision de la Cour Suprême des Etats-Unis (CSEU) de l’affaire Johnson contre M’Intosh en 1823, le juge de la CSEU John Marshall, un autre propriétaire d’esclaves, a dit que le caractère et la religion des habitants autochtones de l’Amérique du Nord fournissait “une excuse pour les considérer être un peuple sur lequel ‘le génie supérieur européen pourrait affirmer une ascendance’”. Le dictionnaire Webster définit l’ascendance comme “pouvoir de contrôle et gouvernant: domination”. Ainsi donc l’expression de “suprématie blanche” n’est qu’un euphémisme pour “domination blanche”.

Une statue du juge John Marshall trône en ce moment dans le bâtiment de la CSEU à Washington DC. Même si cette statue était retirée, la mentalité raciste (cadre de pensée) que Marshall a laissé transparaître au travers de ses écrits dans le rendu de l’affaire Johnson demeurera dans le bâtiment sous la forme de cette décision de Johnson contre M’Intosh et toutes les autres décisions bigotes et religieusement motivées de la CSEU.

Statue ou pas, la CSEU continuera d’utiliser les schémas de domination racistes que cette institution a utilisé contre nos peuples et nations depuis bientôt maintenant deux siècles (l’année 2023 marquera le bicentenaire de la décision de l’affaire Johnson c. M’Intosh, affaire et rendu qui déterminent aujourd’hui encore la loi et la politique fédérales indiennes des USA)

Après avoir visionné notre documentaire au sujet de la décision de la CSEU dans l’affaire Johnson contre M’Intosh The Doctrine of Discovery: Unmasking the Domination Code, les gens demandent souvent “Que pouvons-nous faire ?” ou bien “Alors quelle est la solution ?” Réfléchissons un peu à ces questions un moment. Les hommes et les femmes siégeant à la CSEU ont totalement l’intention de continuer à utiliser comme “précédent légal” cette décision raciste et bigote édicté dans le verdict de l’affaire Johnson et de son résultat direct de la domination blanche (suprématie, ascendance). Aucune législation n’empêchera la CSEU à utiliser cette décision. De plus, le congrès n’a aucune raison de passer une loi contredisant la décision émise dans Johnson. Étant donné la nature dominante et le tempérament de l’administration Trump, le chambardement actuel de la branche exécutive du gouvernement des Etats-Unis ne va sûrement pas essayer de mettre fin aux schémas de suprématie et de domination blanches qu’on trouve dans la décision de l’affaire Johnson contre M’Intosh et sa résultante directe que fut la loi et politique fédérale indienne de manière générale. Nous pouvons être tout à fait certains que les Etats-Unis ne veulent en rien écarter les idées inhérentes à la décision et qui servent de pierre angulaire au système légal de la propriété foncière aux Etats-Unis.

Le juge de la CSEU John Marshall a écrit le rendu du verdict de Johnson de façon à assurer que nos nations autochtones ne soient pas reconnues comme nos propres “pays” dans le monde incluant l’Angleterre, la France, l’Espagne, le Portugal etc. Le verdict fut écrit de façon à ce que les frontières nationales des nations autochtones ne soient vues que comme des fictions poreuses que les Etats-Unis pourraient transgresser et violer en toute impunité, ne laissant aucun tracé solide capable de maintenir les Etats-Unis et autres pays hors de nos terres.

Une caractéristique unique des nations dites “indigènes” est que leurs oppresseurs comme les Etats-Unis (NdT: et le Canada, le Mexique et tous les états d’Amérique du sud de fait…) sont capables de les définir unilatéralement de manière subordonnée. Les nations indigènes n’ont aucun moyen effectif d’empêcher leurs oppresseurs de leurs imposer leurs unilatéralement ces définitions. Il me semble que tant que nous continuons à appeler une idée de système de domination “la loi”, nous continuerons à être contrôlés et dominés par le système de la suprématie blanche chrétienne qui est parfaitement exemplifiée dans le verdict de l’affaire Johnson contre M’Intosh.

Résistance au colonialisme: Ferraillage sémantique… de la « conquête » à la « domination » (Steven Newcomb)

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A lire en complément: PDF

Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte

 

Pourquoi le mot de “conquête” est-il considéré comme acceptable et pas celui de “domination”

 

Steven Newcomb

 

31 août 2017

 

url de l’article original:

https://indiancountrymedianetwork.com/news/opinions/conquest-considered-acceptable-domination-not/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

La vaste majorité des leaders natifs et des avocats spécialistes de la loi fédérale indienne sont enclins à considérer le mot “domination” comme étant trop vocal et “imposant” pour être utilisé dans leurs analyses des problèmes actuels de nos nations et de nos peuples et aussi trop impoli pour être utilisé dans leurs interactions avec les fonctionnaires du gouvernement des Etats-Unis ou des états les composant. Et pourtant pour une raison inconnue, le mot “conquête” ou l’expression “la conquête” sont traités comme étant typiques et tout à fait normaux.

Je trouve “curieux” que le mot de “conquête” soit jugé acceptable dans les discussions au sujet de la loi fédérale indienne et de sa politique inhérente et que le mot de “domination” ne le soit pas. J’ai une théorie qui implique le fait que le mot “conquête” est subrepticement interprété comme voulant dire que les Etats-Unis sont collectivement parvenus à une victoire sur les nations autochtones à cet endroit et que les Etats-Unis sont donc, un conquérant “victorieux”. Ce sentiment est illustré dans bon nombre d’affaires judiciaires. Le mot “conquête” est un mot qui est traité comme courant, acceptable et sain. Aussi parce que le gouvernement des Etats-Unis ne voient pas le mot “conquête” comme étant une menace, et n’a aucun problème pour l’utiliser. Utiliser ce mot évite de manière utile de cadrer la loi fédérale indienne et sa politique en termes de “domination” des nations natives. (“ce n’est pas une domination, c’est la loi”…)

La présomption ici est que par le moyen d’une “conquête légitime”, les Etats-Unis ont atteint une position valide se positionnant au-dessus et par delà les nations autochtones. Le mot “conquête” est un mot qui assume de manière silencieuse le fait que les Etats-Unis et leur gouvernement existent dans une position supérieure en rapport avec la position “inférieure” des nations et peuples autochtones. Bien malencontreusement, la plupart d’entre nous ne fait rien pour contredire et défier cette vision des choses.

Ceci est également vrai concernant la manière dont certains écrivains ont décrit la colonisation des Amériques à ses débuts. Prenez par exemple le livre d’Anthony Angie “The Fall of the Natural Man” (1977). Padgen dit que “tout le débat sur la légalité des conquêtes” se situent sur le jugement chrétien au sujet de “la nature des Indiens”. Si Padgen avait écrit au sujet de “la légalité de la domination sur les peuples natifs”, son phrasé aurait incontestablement levé des questions comme “Est-ce que la domination d’une personne par une autre ou d’une nation par une autre peut-être “juste” en quelque circonstance ?” Comment parvient-on à la réponse “correcte” à une telle question ?

Recadrer notre discussion au sujet de notre histoire et des circonstances actuelles en termes de “domination” plutôt que de “conquête”, nous permet de questionner: Est-ce “juste” pour une nation ou un peuple d’en envahir un autre ? et ensuite de forcer la nation envahie de vivre sur des générations selon un système imposé de domination ? Bien qu’il soit correct d’utiliser les mots d’”invasion” et de “domination” pour classifier la manière dont les Etats-Unis ont traité nos peuples et nos nations (pensez aux massacres de Washita, de Sand Creek et de Wounded Knee etc…), ceci n’est pas le type de vocabulaire que nous avons l’habitude d’entendre utilisé par les leaders autochtones et les praticiens de la loi fédérale indienne en pays indien, ni du reste dans leurs discussions avec les représentants du gouvernement des Etats-Unis.

Pourquoi donc nos leaders natifs et nos avocats spécialistes ne discutent pas de ce qui a été fait à nos peuples et nations en termes d’invasion et de domination malgré le fait que la loi fédérale indienne US et sa politique sont fondées sur l’affirmation initiale de la chrétienté d’un droit d’invasion et de domination nos nations ? Dans un langage quelque peu masqué ou codé (par exemple avec les mot “d’ascendance” et de “dominion [domination] ultime”) le droit affirmé des Etats-Unis de dominer nos peuples et nations est le plus clairement exprimé dans la décision de la cour suprême dans l’affaire Johnson contre M’Intosh de 1823.

En assumant qu’il est injuste pour une nation ou un peuple d’en envahir un autre et de le dominer, est-ce qu’une invasion injuste et une domination continuelle deviennent éventuellement “justes” après que le temps se soit écoulé ? qui doit décider de la réponse correcte à cette question ? Est-ce qu’un rendu de justice de la cour suprême fondé sur le droit proclamé pour une nation ou un empire de dominer beaucoup d’autres nations et de les tenir sous la prétention de la “conquête” et donc de la domination est une décision valide ? Qui peut le dire ? Dans “The Fall of Natural Man”, Padgen dit que les intellectuels européens des XVème et XVIème siècles avaient leur propre vision de la “structure du monde”. Ces intellectuels concevaient parfaitement que s’ils devaient introduire un “nouvel élément” pauvrement conçu dans cette structure, ceci pourrait bien compromettre la structure du monde entier. En 2017, alors que nous arrivons gentiment au bicentenaire de cette décision dans l’affaire Johnson contre M’Intosh, identifier la loi fédérale indienne et sa politique comme un système de domination est le “nouvel élément” qui crée la renverse potentielle de la structure légale et politique de notre monde et peut l’éloigner des schémas mentaux et comportementaux de domination imposés par les colonisateurs.

Il y a une raison sur le pourquoi les monarchies de la chrétienté occidentale ont assumé un “droit de conquête” sur nos nations autochtones. C’est parce que le mot de “conquête” masque avec succès une affirmation de droit de domination. Les monarchies de la chrétienté avaient pour but de priver nos nations et nos peuples de notre existence libre pré-colombienne, pré-américaine. Affirmer un droit “d’acquérir” (de dominer) les terres et les ressources de nos nations, tout en appelant le résultat final une “conquête”, a fonctionné pour faire paraître la domination résultante comme légale, acceptable et légitime.

Le film “La Mission” (1986) de Roland Joffé (NdT: avec Robert de Niro et Jeremy Irons), illustre parfaitement comment les Indiens furent traités comme la propriété des colons chrétiens. Parce que les penseurs européens qui débattirent du traitement à allouer aux nations autochtones pendant le XVIème siècle cadrèrent leur discussion sur le mot de “conquête”, il y a une question que le film n’adresse pas parce que ceux engagés dans le débat ne l’adressèrent pas non plus. Est-il OK pour une nation d’envahir et de doniner une autre nation puis de déclarer que la domination qui s’en suit est une “conquête” légale ?…

Focaliser sur les prérogatives et les privilèges de la domination que les monarques d’Espagne donnèrent à Colomb, puis ajoutant le mandat (l’ordre) de domination que la pape Alexandre VI accordait aux monarques d’Espagne dans certains décrets pontificaux (NdT: les deux versions de la bulle Inter Caetera de 1493), crée une possibilité unique. Cela crée la possibilité de discuter le désir de la chrétienté et son intention de localiser et de dominer chaque région non-chrétienne de la planète, incluant la notre alors que nos ancêtres vivaient libres de toute domination de la part de la chrétienté.

Les soutiens de l’empire chrétien utilisèrent la religion chrétienne comme justification de leur effort de triompher sur les “païens” (non chrétiens) afin de subjuguer, profiter et engraisser leurs économies des milliards d’acres des terres et ressources “paiennes”. La décision légale dans l’affaire Johnson contre M’Intosh a émergé de cette idéologie chrétienne et de ce comportement de domination.

Le juge de la CS John Marshall a exprimé cette idée lorsqu’il écrivit au sujet de “L’extravagante prétention de convertir la découverte d’un pays habité [par des païens] en conquête.” (c’est à dire en domination). Voici un point bizarre à cause de la manière dont fonctionne les précédents légaux, à ce jour nos peuples et nations sont toujours définis dans la loi états-unienne comme des “païens”, des “infidèles” et des “sauvages barbares” légalement et justement dominés.

Le chef de la nation Yakama Joe de Goudy est le seul leader élu (NdT: par le truchement de la loi fédérale indienne instituant les “conseils de tribus” élus, système asservi à l’état colonial n’ayant aucune valeur ni reconnaissance légales aux yeux des conseils traditionnels natifs… Il en va de même au Canada) que je connaisse qui a soulevé le problème de la domination des nations autochtones avec des hauts-fonctionnaires du gouvernement fédéral, ainsi que de son inévitable corollaire: la déshumanisation. Jusqu’ici, aucun autre responsable élu des nations natives n’identifie explicitement le système de la loi fédérale indienne comme un système de domination malgré que nous soyons capables de retracer ses origines jusqu’au Vatican, ses bulles pontificales et les chartes royales d’Angleterre.

Par le moyen de Johnson contre M’Intosh et de ses progénitures, les Etats-Unis ont utilisé de tels documents contre nos peuples et nations pendant des générations. D’autres leaders des conseils élus se doivent de rejoindre le chef Goudy pour pointer du doigt l’illégitimité des Etats-Unis dans son affirmation de très longue durée d’un droit de domination sur nos peuples et nos nations autochtones.