Archive pour reflexions sur le peuple en armes

Black Bloc : mythologie et réalité (Rébellion)

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, autogestion, crise mondiale, documentaire, gilets jaunes, guerres imperialistes, militantisme alternatif, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, politique et social, politique française, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , on 1 avril 2023 by Résistance 71

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Question intéressante : pourrait-on considérer le principe du Black Bloc comme les prémisses d’un retour du peuple en arme, de sections populaires armées et organisées au niveau local pour parer à toute intrusion et despotisme contre les communes émancipées ? Le peuple en arme est-il la solution ou du moins une partie de la solution contre la tyrannie étatico-marchande ? Considérant le peuple comme en état de légitime défense permanent devant le pouvoir despotique étatique et marchand et son monopole de la violence « légale », comment pouvons-nous organiser résistance et protection ? Il est devenu totalement évident à la vue de tous que l’État n’est pas là et n’a jamais été là pour nous protéger, bien au contraire. Il est l’ultime nuisance à l’épanouissement du peuple hors système coercitif. Nous devons nous poser les questions fondamentales ou nous n’en sortirons jamais, à savoir  : qu’est-ce que le pouvoir ? Qu’est-ce que le société ? Mais aussi nous devons nous demander pourquoi est-on passé d’un pouvoir non coercitif à un pouvoir coercitif ? c’est à dire qu’est-ce que finalement l’histoire ? Les sociétés humaines sont passées de l’un à l’autre et réciproquement durant des millénaires. L’État est le verrou qui empêche le retour du pouvoir non coercitif émancipateur. Faisons donc péter ce verrou nous maintenant sous le joug. Pas de solution au sein du système ! Ceci devient une pure évidence, un joyau scintillant de révélation de la réalité sociale. Qu’attendons-nous ?
~ Résistance 71 ~

ITsavvy

Y a t’il une tête pensante sous les capuches du Black Bloc ?

David L’Épée

24 mars 2023

Source de l’article original:

https://rebellion-sre.fr/y-a-t-il-une-tete-pensante-sous-les-capuches-du-black-bloc/

On parle beaucoup ces dernières années en France de ces mystérieux blacks blocs qui sèmeraient la terreur dans les manifestations populaires, spécialement dans les manifestations initiées par la gauche. D’un regard extérieur, on ne sait pas bien s’il faut les considérer comme une expression radicalisée des revendications sociales portées durant ces événements ou s’ils en sont au contraire le dévoiement. Pourtant, au-delà des théories du complot et des violences sous faux drapeau, la réalité est peut-être bien plus simple… ( Article paru dans le numéro 89 de Rébellion)

On a beaucoup parlé d’eux durant la crise des Gilets jaunes mais également au cours d’autres mobilisations de rue survenues durant la dernière décennie. Associés, parfois un peu hâtivement, au mouvement anarchiste, on leur attribue souvent les mêmes traits distinctifs, tels que le refus de tout légalisme et de toute négociation sociale et un goût marqué pour la violence et l’émeute. Toutefois, au-delà de cette référence à un activisme anarchiste un peu daté, c’est aussi l’assimilation au mouvement dit « antifa » qui revient souvent, avec ce qu’il charrie de sectarisme et de tentation épuratrice. Derrière la vitrine libertaire (glorification du désordre et esthétique du chaos) on trouverait alors une sensibilité beaucoup plus « stalinienne », la violence des blacks blocs ne se tournant plus en priorité contre l’ennemi politique (l’État, la bourgeoisie, le capitalisme, la police, etc.) mais contre les moutons noirs, les dissidents, les déviationnistes, les « confusionnistes », dont il faudrait purger les manifestations de masse. C’est en tout cas l’analyse de François Bousquet, qui écrit : « Dans les manifestations de Gilets jaunes, ce sont indiscutablement des intrus, des corps étrangers. […] On ne peut même pas dire qu’ils sont à la traîne du mouvement, ils sont en dehors. Comment pourrait-il en être autrement ? Ce sont deux visions du monde antagonistes qui s’affrontent. […] Il ne faut pas beaucoup creuser pour s’assurer que les “antifas” vomissent tout ce que représente la France des Gilets jaunes. […] Jamais le sort de la France des invisibles ne leur a arraché la moindre compassion, seulement l’éternel procès en moisissure, en maréchalisme, en “crispations” identitaires, en “poison” populiste. »1

Les blocs noirs : de nouvelles brigades rouges ?

Jean-Claude Michéa y voit non seulement une menace pour le mouvement social mais même une éventuelle stratégie d’affaiblissement encouragée par le gouvernement 1 « Si le mouvement des Gilets jaunes gagnait encore de l’ampleur (ou s’il conservait, comme c’est toujours le cas, le soutien de la grande majorité de la population), l’État benallo-macronien n’hésitera pas un seul instant à envoyer partout son Black Bloc et ses “antifas” (telle la fameuse “brigade rouge” de la grande époque) pour le discréditer par tous les moyens ou l’orienter vers des impasses politiques suicidaires. 2 Il n’est en effet pas difficile de voir quels bénéfices Macron pouvait retirer de ce phénomène : cliver l’opinion, diaboliser les Gilets jaunes en les présentant comme des vandales, justifier la répression policière, dissuader les Français ordinaires de s’associer au mouvement, tenir à distance les femmes, les personnes âgées et tous ceux effrayés par le risque de l’affrontement physique, entretenir la division des forces mobilisées…

Vincent Lapierre et sa web-TV Le Média pour tous en ont fait plusieurs fois l’expérience, chahutés (pour ne pas dire plus) par ces nervis encapuchonnés lorsqu’ils défilaient aux côtés des Gilets jaunes. Lapierre, qui les dénonce comme étant des idiots utiles du gouvernement macronien, remarquait d’ailleurs « une convergence totale de vues entre ceux que les Gilets Jaunes combattent et les milices antifascistes ultraviolentes »3 Et il leur posait une question essentielle (dont il n’a toujours pas reçu la réponse) : s’ils prétendent réellement soutenir le peuple français en lutte, pourquoi ne commencent-ils pas tout simplement, lorsqu’ils défilent à ses côtés, par… revêtir le gilet jaune ? Cette distanciation, cette démarcation volontaire (alors qu’il aurait été si simple de s’assimiler complètement au mouvement) interroge. Peut-être traduit-elle, dans la perception des blocs noirs (parlons français), un mépris pour les gens ordinaires, leur habitus de classe, leur patriotisme, leur humeur populiste. Le fameux mépris « anti-beauf » d’une grande partie de la gauche et de l’extrême gauche. Peut-être aussi expriment-ils, par leur refus de s’incorporer complètement au mouvement, la revendication, très léniniste au fond, d’une identité d’avant-garde : ils ne prétendraient pas être le peuple mais ses défenseurs, ses cadres, ses hommes de première ligne ; ils ne seraient pas de simples manifestants mais des « professionnels de la révolution ». Le dramaturge et poète Armand Gatti4 communiste libertaire, figure de la Résistance française et compagnon de route de diverses luttes de libération nationale, écrivait ceci au sujet du terrorisme dans une de ses pièces : « C’est une sorte d’aristocratique non-confiance dans l’émancipation des autres. Il se substitue à leur initiative, convaincu d’être plus lucide (ou plus à l’avant-garde), comme le bureaucrate. Alors qu’ils se croient aux antipodes l’un de l’autre, ce sont deux faces d’une même pièce de monnaie. »5. Si la France semble découvrir le phénomène des blocs noirs depuis une petite décennie, il n’en est pas de même dans la partie germanique de l’Europe, où cela fait une bonne trentaine d’années, voire plus, que ce mode d’action existe et est connu. On peut lire ceci au sujet des blocs noirs dans un ouvrage paru il y a deux ans et consacré au mouvement antifasciste allemand : « Ce mode d’apparition remonte à l’histoire et aux pratiques des autonomes allemands, en particulier dans les manifestations antifascistes, mais également auparavant dans les manifestations organisées pour défendre les squats dans de nombreuses villes allemandes telles que Berlin, Hambourg ou encore Francfort dans les années 1980. »6 Si le phénomène s’est ensuite internationalisé à la fin des années 1990 et au début des années 2000 à l’occasion de quelques manifestations anti-capitalistes de grande envergure (contre l’OMC à Seattle en 1999, contre le G8 à Gênes en 2001, etc.) et a été repris par l’extrême gauche américaine qui a fait connaître cette nouvelle forme d’activisme au reste du monde, c’est d’abord en Allemagne et en Autriche que s’est développé le Schwarzer Block. La Suisse, très influencée culturellement et politiquement par ces pays-là du fait de sa majorité germanophone, a connu ce phénomène-là bien avant la France. Et c’est en tant que Suisse, justement, que je voudrais amener ici quelques éléments de compréhension pour mieux saisir le phénomène.

Un souvenir de jeunesse

Comme journaliste indépendant, j’ai été le premier, en Suisse romande (partie francophone du pays) à donner la parole au représentant d’un bloc noir dans un grand média. C’était le 31 juillet 2003, dans les pages de L’Hebdo, l’hebdomadaire le plus diffusé de Suisse romande, et ça se passait peu après une grande manifestation émaillée de violences et organisée, à Genève et en France voisine, contre le G8 qui se tenait alors à Évian. Parler de représentant ici pour qualifier Stepan, mon interlocuteur, est bien sûr ironique puisque la doctrine anarchiste réfute précisément la notion de représentation, mais j’emploie néanmoins ce terme car le militant à qui j’ai donné la parole, même s’il ne représentait à proprement parler que lui-même, a su délivrer à cette occasion une justification doctrinalement cohérente des agissements du bloc noir. Ses références à Bakounine et à la théorie de l’action directe et de la « propagande par le fait » en attestent, ainsi que son pseudonyme, référence à peine voilée à un personnage des Justes, la pièce d’Albert Camus consacré au terrorisme des socialistes-révolutionnaires russes.

Cet entretien de fond, qui avait provoqué pas mal de réactions (il était paru au moment même où la police genevoise lançait un vaste appel à la délation pour identifier et arrêter les responsables des émeutes), m’avait, comme je m’y attendais, attiré quelques ennuis. Non seulement la police était venue me voir pour tenter d’obtenir des renseignements (que je m’étais bien gardé de leur donner) mais j’avais été également suspecté par certains d’être un agent double. Étant à cette époque un jeune militant communiste, j’avais été pris en grippe par une partie du milieu anarchiste (qui n’attendait sans doute que ce prétexte-là pour me tomber dessus) : on voulait voir en moi un reporter infiltré dans les milieux radicaux pour le compte des médias bourgeois. C’était évidemment complètement faux. Je travaillais en indépendant, je m’occupais alors d’une petite feuille marxiste-léniniste qui s’appelait Affirmation dionysiaque (je ne sais plus trop ce que cette référence pagano-nietzschéenne venait faire là-dedans), que je photocopiais et que je vendais à la criée durant les manifs. En parallèle j’évoluais dans les milieux du syndicalisme étudiant, du trotskisme et de l’« antifascisme ». Si j’avais accepté de livrer le fruit de cet entretien à L’Hebdo, c’était avec l’accord explicite de Stepan (dont j’ai su par la suite qu’il m’avait défendu contre certains de ses camarades) et dans l’objectif avoué de faire connaître les motivations du bloc noir au grand public.

Tout cela m’est revenu en tête il y a quelques jours, alors que je faisais du rangement chez moi. En fouinant dans ma cave, je suis retombé sur un sac militaire poussiéreux qui contenait quelques souvenirs d’une autre époque : un sweat-shirt noir à capuche, une cagoule, des lunettes de plongée, un protège-dents de hockeyeur, des coudières et des genouillères prélevées dans un attirail de skater, des rangers à lacets rouges… Car oui, maintenant qu’il y a pour ainsi dire prescription, je suis en mesure de l’écrire : je n’étais pas infiltré dans un bloc noir, j’en étais membre à part entière et en toute conviction.

En relisant aujourd’hui l’entretien de Stepan il m’est évidemment impossible de m’y retrouver. Trop de naïveté, trop d’erreurs d’interprétation, trop d’aveuglement, trop d’étroitesse doctrinale… Impossible, passé l’âge de 25 ans, de ne pas sourire devant ces déclamations qui ressemblent à des slogans, cette pensée réduite à l’état de manifeste, cet épouvantail lexical du « bourgeois » qui revient à tous moments et souvent hors de propos, ces parallèles historiques et géopolitiques bancals (les références à la guerre d’Irak étaient un lieu commun obligatoire durant ces années-là), ces certitudes de plomb allergiques à toute nuance et à toute remise en question… Et pourtant Stepan et ses camarades, même s’ils avaient bien des défauts, n’étaient pas des salopards, leur violence n’était pas si gratuite que le disaient les médias, et leurs motivations n’étaient pas à chercher ailleurs que dans leurs convictions politiques. De cela au moins je suis certain. Il m’arrive parfois de me demander ce que tous ces gens sont devenus…

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Ce que la police n’a pas compris

Si je suis bien sûr revenu de tout cela, cette aventure m’aura au moins permis de voir, sur le terrain, que le bloc noir n’était ni ce qu’en pensaient ses détracteurs ni ce qu’en disaient les journalistes. Quant à la police… elle a toujours eu beaucoup de peine à définir ce qu’était exactement le bloc noir, d’où ses fréquents insuccès lorsqu’elle cherche à le combattre. En Suisse, année après année, le sempiternel rapport de la police fédérale sur la sécurité intérieure, envoyé régulièrement aux journalistes et mis à la disposition de tous les citoyens souhaitant en prendre connaissance, nous apprend que le bloc noir une organisation hautement structurée, fortement hiérarchisée et constituée de plusieurs cercles dont le premier, le noyau dur, recèlerait quelques vieilles figures de la gauche radicale connues des services. C’est de ces quelques vieux routards de la contestation, zurichois pour la plupart, qu’émaneraient toutes les directives, exécutées consciencieusement par les membres des deuxièmes et troisièmes cercles, ce dernier comptant en majorité des jeunes et très jeunes militants, manipulés par leurs aînés et ne connaissant aucune limite dans leur capacité de nuisance.

La lecture de ce rapport officiel, que nous considérions chaque année comme une rétrospective très honorifique de nos faits d’armes, nous faisait toujours beaucoup rire lorsque nous arrivions à ce chapitre. Ceux qui nous surveillaient, tout comme ceux que nous affrontions dans la rue, n’avaient absolument rien compris à ce qu’était le bloc noir. On aurait pu craindre, bien sûr, que la police fédérale revoie sa copie sur la base de cet entretien avec Stepan et en vienne tout à coup à comprendre qui nous étions vraiment, mais la lecture du rapport qui suivit quelques mois plus tard nous rassura : rien n’avait changé, toujours la théorie des cercles, la hiérarchie secrète, la centralisation des ordres et toutes ces balivernes. La grande erreur du Département fédéral de l’intérieur aura été au fond de croire que nous fonctionnions à la façon de leurs subordonnés, comme une brigade de police !

S’il me fallait expliquer ce qu’est un bloc noir en quelques mots, que pourrais-je en dire ? Un bloc noir, ce n’est personne, mais potentiellement c’est tout le monde. Il n’y a pas de fichier central, pas de cartes d’adhésion, pas de chefs, pas de directives, pas de comptes à rendre, pas même de réelle unité. Joignez-vous à la prochaine grande manifestation de rue, habillez-vous de noir, masquez-vous, rapprochez-vous de ceux qui sont vêtus comme vous et qui auront commencé à se regrouper : voilà, vous faites partie du bloc noir, c’est aussi simple que ça. Vous prendrez ensuite certaines initiatives pour intervenir de façon plus musclée dans ou hors du défilé, ou alors vous suivrez, librement, les initiatives proposées par d’autres dans la mesure où elles vous conviennent. Vous pourrez agir seul mais de préférence vous formerez, spontanément, ce qu’on appelle un groupe afinitaire, c’est-à-dire que vous sévirez avec des gens de votre connaissance. Votre proximité avec eux, votre intimité de pensée, favoriseront entre vous votre capacité à improviser et assurera l’esprit de groupe et la solidarité nécessaires à une action efficace. C’est cela un bloc noir, rien d’autre. Voilà sans doute ce que j’aurais dit il y a une quinzaine d’années si on m’avait posé la question, et je n’ai aucune raison de penser que cette définition du bloc noir ait pu changer depuis.

Au-delà des théories du complot

J’ai été surpris, en fin d’année passée, de lire dans les pages du Monde une tribune de l’historien Sylvain Boulouque, spécialiste de l’anarchisme, qui traitait le phénomène avec une lucidité qui contrastait avec les fantasmes habituels des médias sur le sujet. Je reproduis ici un passage de son texte :

« L’apparition récurrente d’un black bloc alimente une fantasmagorie, parfois renforcée par les discours politiques qui y voient des “professionnels du désordre” ou des “militants massivement venus de l’étranger”. La réalité est différente. Depuis le début du millénaire, le nombre des manifestants vêtus de noir et prêts à défier la police ne cesse d’augmenter. En 2016, le black bloc s’est formé à chaque manifestation sans que les interdictions administratives de manifester empêchent son existence. […] Il faut le rappeler, le black bloc est une pratique manifestante à laquelle toute personne peut se joindre. Il peut se former et se dissoudre tout aussi vite. Il ne comporte pas de carte d’adhérent. Derrière les coupe-vent, les sweat-shirts noirs et les lunettes de piscine, n’importe quel manifestant – femme ou homme, jeune ou moins jeune, de toutes catégories socioprofessionnelles – pas forcément violent, peut, en adoptant cette tenue, se montrer solidaire sans participer à l’affrontement. Il existe une partie importante de la population prête à remettre en cause l’ordre imposé, soit en donnant un autre cours à une manifestation officielle, soit dans des affrontements directs avec les forces de l’ordre. Il suffit de suivre certains concerts de rap ou de rock, de se pencher sur les statistiques de consultation des sites pro-insurrection ou d’observer les comportements des manifestants, pour constater qu’il existe en France actuellement une certaine sympathie pour ces pratiques. »7

LINO VENTURA ACTOR (1965)

ou mise au poing ?….

Je n’ai pas grand-chose à ajouter à ça : cela correspond dans les grandes lignes à ce qu’ont pu observer tous ceux qui ont vécu le mouvement de l’intérieur. Cela ne dispense en rien de toutes les critiques et reproches qu’on peut faire au bloc noir, mais avant d’attaquer il faut pouvoir connaître et ne pas se laisser abuser par des idées fausses. Quels fantasmes n’ai-je pas entendus, dans les milieux patriotes, sur les blocs noirs : des mercenaires stipendiés par le pouvoir, des agents provocateurs recrutés à l’étranger, des flics déguisés, des milices d’extrême droite… Je ne me moque pas de ces fantasmes car ils ne sont, certes, pas dénués de tout fondement. Ils n’ont rien d’un complotisme farfelu, ce sont là au contraire des pratiques politiques qui ont traversé les rapports entre pouvoir et opposition pendant des siècles. Peu avant la Révolution française, Jean-Paul Marat, dans son livre Les Chaînes de l’esclavage, mettait en garde ses lecteurs : « C’est un art connu des cabinets d’introduire dans les assemblées populaires d’audacieux intrigants qui déclament des discours insensés, et commettant des réactions répréhensibles, pour les imputer aux bons citoyens, calomnier les intentions des patriotes, et présenter le peuple comme une troupe de séditieux et de brigands. » Remplacer les « discours insensés » par des actes de violence (destruction de biens matériels, atteintes à la propriété, incendies volontaires, etc.) et vous obtenez une hypothèse explicative sur ce que pourrait être le bloc noir.

Il a d’ailleurs été démontré, dans certaines occurrences, que des policiers s’étaient bel et bien travestis en activistes du bloc noir pour semer la terreur, discréditer la contestation sociale et justifier la répression. Ça a été le cas par exemple avec la police italienne lors des émeutes de Gênes en 2001, sous la présidence de Berlusconi9. Certains éléments laissent à penser qu’il en a été de même, à plusieurs reprises, lors de la crise des Gilets jaunes (des photos semblent même le prouver avec une grande certitude). Il ne s’agit donc pas de nier l’existence de ces infiltrations et de ces manipulations, mais simplement de rappeler que le bloc noir n’est pas pour autant une pure création policière, qu’il existe indépendamment de ces manœuvres sous faux drapeau, et que la grande majorité des gens qui le rallient ponctuellement, quels que soient les reproches qu’on peut leur faire par ailleurs, ne sont pas des agents doubles.

Idiots utiles ou électrons libres ?

Ce décalage entre une réalité assez simple et une perception extérieure qui échafaude pour l’expliquer des interprétations complexes et parfois paranoïaques est riche d’enseignement. Il nous rappelle que nous avons trop souvent tendance, surtout lorsqu’existe un antagonisme politique, à imaginer chez l’autre, a fortiori s’il est un adversaire, des motifs, des agissements et des doubles discours qui en réalité ne sont pas les siens et dont on n’a aucune preuve tangible. Si on est prêt à reconnaître la simplicité et la clarté du fonctionnement des organismes que l’on connaît, qu’on approuve et dont on fait partie, on n’accorde jamais ce crédit-là aux organismes qu’on connait moins et dont on se méfie, préférant imaginer des explications beaucoup plus tortueuses. Pourtant, quel que soit notre bord idéologique, nous sommes nombreux à avoir été l’objet de ces fantasmes, notamment dans le discours des médias. Pour ma part je ne compte plus les fois où on m’a soupçonné de jouer double jeu, d’écrire le contraire de ce que je pensais (dans quel but ?), de toucher de l’argent de la Chine, de la Russie, de l’Iran, de la Corée du nord… Étant bien placé pour savoir qu’il n’y avait pas un mot de vrai dans ces accusations (sans quoi je serais riche à l’heure qu’il est !), je ne manque jamais de me demander, lorsque j’entends des soupçons semblables à propos de mouvements que je connais peu, si, là aussi, on ne nagerait pas en plein délire conspirationniste…

Quant à ceux qui me rétorqueront que les casseurs ne font que marquer des auto-goals contre le camp qu’ils prétendent défendre et que leurs agissements légitiment la violence d’État et font refluer le soutien populaire aux manifestations dans lesquelles ils sont présents, je leur répondrai qu’ils ont raison mais qu’il n’est nul besoin de manipulation policière pour obtenir ce résultat : il suffit de compter sur la bêtise des gens… La bêtise des gens a ceci de commun avec l’incompétence de nos gouvernants qu’on a trop tendance à les sous-estimer l’une comme l’autre, nous laissant trop facilement aller à attribuer à de sombres complots ce qui ne relève, au final, que de la simple absence d’intelligence et de stratégie. Ce qui pose une question brûlante : y a-t-il vraiment besoin d’être instrumentalisé par une puissance occulte pour être un idiot utile ? Certainement pas : les idiots utiles font leur boulot tout seul, les services de l’État n’ont la plupart du temps pas besoin de lever le petit doigt n’y même d’y songer. C’est peut-être là, en dépit d’un certain idéalisme et d’une colère souvent légitime, l’impasse dans laquelle est tombée le bloc noir.

Pour sa défense – et tout en rappelant qu’expliquer ne revient ni à excuser ni à justifier – nous citerons en conclusion Jean Baudrillard qui écrivait : « Le terrorisme tente de piéger le pouvoir par un acte immédiat, sans attendre. Il se met dans la position extatique de la fin de l’Histoire, espérant introduire les conditions du Jugement Dernier. Il n’en est rien bien sûr, mais ce défi est admirable. »10

David L’Épée

1 François Bousquet, entretien, Boulevard Voltaire, 10 février 2019

2 Jean-Claude Michéa, Lettre à propos du mouvement des Gilets jaunes, in. blog Les Amis de Bartleby, 21 novembre 2018

3 Vincent Lapierre, entretien, Breizh Info, 5 février 2019

4 J’invite les lecteurs désireux d’en savoir plus sur Armand Gatti à visionner les vidéos des divers entretiens qu’il m’a accordés (disponibles sur YouTube) et à lire le portrait que j’ai fait de lui, peu avant, sa mort dans le n°166 de la revue Éléments (juin-juillet 2017)

5 Armand Gatti, Le Cheval qui se suicide par le feu, in. Œuvres théâtrales, tome III, Verdier, 1991, p.23

6 Bernd Langer, Antifa : histoire du mouvement antifasciste allemand, trad. Sarah Berg, Libertalia, 2018, p.279

7 Sylvain Boulouque, Loin des visions complotistes, les blacks blocs ne sont pas une création de la police, in. Le Monde, 5 décembre 2019

8 Jean-Paul Marat, Les Chaînes de l’esclavage, Éditions Complexe, 1999

9 Voir à ce propos le film-choc Diaz : un crime d’État (Daniele Vicari, Italie, 2012)

10 Jean Baudrillard, Cool Memories, 1987

= = =

Il n’y a pas de solution au sein du système, n’y en a jamais eu et ne saurait y en avoir ! (Résistance 71)

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

+

5 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie

Société des sociétés organique avec Gustav Landauer

et aussi…

« Recherche esprit communard désespérément » (Résistance 71, 2021)

« Insurrection et utopie » (Dr Bones)

« Que faire ? » (Résistance 71, 2010)

3-textes-de-reflexions-sur-le-peuple-en-armes-la-resistance-et-la-rebellion

Stoppourriture

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TLPARP

Réflexions pertinentes et nécessaires sur le peuple en arme et l’autodéfense armée libératrice avec Scott Crow

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milicespopulaires36

Extraits de la Constitution française du 24 juin 1793 (6 messidor de l’an I):
Article 9. – La loi doit protéger la liberté publique et individuelle contre l’oppression de ceux qui gouvernent.
[…]
Article 31. – Les délits des mandataires du peuple et de ses agents ne doivent jamais être impunis. Nul n’a le droit de se prétendre plus inviolable que les autres citoyens.
Article 33. – La résistance à l’oppression est la conséquence des autres Droits de l’homme.
Article 34. – Il y a oppression contre le corps social lorsqu’un seul de ses membres est opprimé. Il y a oppression contre chaque membre lorsque le corps social est opprimé.
Article 35. – Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.

Le_Reveil

Imaginons les Gilets Jaunes en armes réorganisant la France des sections non pas dans des défilés stériles sous contrôle à Paris ou ailleurs, mais dans toutes les villages et villes de France sur la base du pouvoir redilué dans le peuple et l’égalité décisionnaire. Tout le pouvoir aux Ronds-Points qui auraient alors la capacité de se défendre physiquement de toute agression extérieure… On ne parle plus de la même chose là, le peuple ne subit plus, n’est plus dépendant ni à la merci de la déshumanisation exploiteuse institutionnalisée… Il est en charge finalement de sa destinée et du renouveau politique dans une société des sociétés organique et humaine.
Ce n’est pas un rêve, cela peut être une réalité, celle de la transformation finale par l’émancipation définitive. Ceci peut et doit devenir notre nouvelle réalité. Elle n’attend que nous et notre pouvoir de dire NON ! au système délétère et mortifère en place pour le remplacer par le NOUS un et organique de nos complémentarités bien comprises.
~ Résistance 71 ~

La communauté de libération, autodéfense armée

Une approche théorique

Scott Crow (American Indian Movement, AIM)

2017

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

Février 2023

Notions de défense

Le monde est dans le tumulte depuis des décennies avec toujours plus de crises à venir, de l’écologie à l’économique en passant par l’oppression politique et les guerres. Ces lents désastres vont demander de nouvelles approches et de nouvelles possibilités. Je pense qu’il est temps pour chacun d’entre nous au sein de la société civile de penser sérieusement à la manière dont nous voulons répondre, de manière autonome et collective, sans attendre d’être “sauvés” par ces mêmes gouvernements tous plus réactionnaires les uns que les autres et les entreprises, corporations qui ont produit ces crises [avec l’aide des états] en premier lieu.

Dans cet essai, je vais essayer de faire le portrait de quelques pratiques potentielles, de praxis, de pensées, centrées sur l’utilisation de ce que j’appelle “l’autodéfense armée de libération de communauté”. Ce concept très différent s’inspire des historiques d’autodéfense de communautés comme pratiquée par des groupes variés de gens dans le monde et aussi des principes libérateurs dérivés des traditions anarchiste et anti-autoritaire.

Le concept d’autodéfense armée de communauté est un développement bien distinct de modèles d’organisation populaire politique et sociale et des notions de défense de communauté, qui en leur cœur affirment le droit des peuples opprimés à protéger leurs intérêts “par tous moyens nécessaires”. “[NdT : ce que nous voyons ici à R71 comme le fait évident que tous les peuples sous joug étatico-marchand, sont en état de légitime défense permanent et se doivent d’agir en conséquence…] Ceci inclurait la signature de pétitions et voter d’un côté du spectre d’action à des moyens extra-légaux d’action, d’insurrection ou de rébellion d’un autre côté. Le parti des Black Panther par exemple, s’engageait dans la défense de communautés non seulement via leurs patrouilles armées, mais aussi au moyen de programmes de survie, qui fournissaient des stages de santé et de premiers secours et des écoles gratuites pour les quartiers noirs pauvres qui n’avaient pas ce genre de services. Cet essai est une tentative de réévaluation critique d’autodéfense armée libératrice de communauté : pour réviser les histoires et l’analyse, pour examiner la praxis et amener des leçons vers de futurs engagements ainsi que d’élargir tout en renforçant nos tactiques et nos réponses aux crises.

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Une bonne définition

L’autodéfense armée libératrice de communauté est la pratique collective de groupe de prendre temporairement les armes à des fins d’autodéfense en tant que partie de plus larges engagements d’autonomie collective pour maintenir une éthique libératrice.

Je propose cela comme une idée distincte émergente d’une réévaluation sur des décennies, de l’expérience historique de la lutte armée et des plus larges théories du droit à l’autodéfense.

L’autodéfense, habituellement, décrit des contre-mesures employées par un individu pour protéger la sécurité de sa personne et parfois de sa propriété. Aux Etats-Unis, l’autodéfense n’est pratiquement toujours discutée qu’en termes légaux ayant trait aux “droits” reconnus par les gouvernements ou constitutions et seulement occasionnellement comme droits de l’Homme. En limitant la discussion aux droits attachés aux individus, ce cadre ne considère jamais les intérêts de la communauté, la violence structurelle et l’oppression et les actions collectives. Le discours néglige donc en tant que telle la défense des communautés et spécifiquement laisse en dehors de toute discussion les demandes politiques des peuples de couleur, des femmes, des immigrants et des pauvres.

L’autodéfense des communautés sous quelque forme que ce soit n’est pas définie par des lois mais par une morale fondée sur le besoin de protection et les principes de l’anarchie (que les gens l’appellent comme cela ou non) par lesquels des groupes de gens exercent collectivement leur pouvoir, leur capacité de décider de leur futur et de déterminer comment répondre à des menaces sans dépendre des gouvernements quels qu’ils soient.

En tant que concept, l’autodéfense armée libératrice de communauté tente de prendre en compte des types non reconnus de violence et les limites auxquelles des groupes marginalisés doivent faire face dans leur capacité à déterminer leur propre futur ou de se protéger collectivement. Par exemple en 1973, lorsque l’AIM a pris les armes pour défendre “son peuple” par le moyen de l’occupation des terres de Wounded Knee, ses membres le firent pour attirer l’attention sur les horribles conditions de vie dans les réserves indiennes et la violence à laquelle les communautés devaient faire face à la fois par manque de services de base mais aussi de la part d’escadrons de vigilantes armés. La ville de Wounded Knee ne fut pas elle-même attaquée, mais elle représentait ce que les Nations premières subissaient un peu partout. Le défi politique de l’AIM fut un exemple clair et limpide d’une autodéfense armée de communauté, mais elle ne correspond pas vraiment aux typologies existantes d’autodéfense.

Quelques différences importantes

L’autodéfense armée libératrice de communauté est différente des autres formes armées d’action pour deux raisons majeures. La première est que c’est temporaire mais organisé. Les gens peuvent s’entrainer aux tactiques et à la sécurité avec armes à feu individuellement ou en groupe, mais seront appelés sur un modèle se rapprochant de celui des brigades de pompiers volontaires, seulement quand on en a besoin et en réponse à des circonstances bien spécifiques. La seconde et sûrement la plus importante, le partage du pouvoir et des principes égalitaires sont incorporés dans l’éthique et la culture de groupe bien avant qu’un conflit ne soit même engagé. Ces deux grandes idées la séparent de la plupart des conflits armés.

Par exemple, les milices d’extrême-droite, comme les patrouilles anti-immigrants de la milice Minutemen le long de la frontière américano-mexicaine ou la raciste milice d’Algiers Point qui a opéré dans l’après ouragan Katrina, n’ont rien à voir avec le type d’autodéfense armée de communauté enracinée dans des principes collectifs libérateurs. Ces milices sont construites sur des peurs abstraites et des croyances racistes et une culture machiste dans laquelle le plus fort et la plus grande gueule est leader. Ils sont typiquement organisés sous une hiérarchie militaire sans rendre vraiment compte aux gens de la société civile et des communautés desquelles ils émanent. Ce genre de milices sont par trop similaires aux types de groupes armés contre lesquels les groupes des mouvements de libération ont du se défendre encore et encore.

Ceci dit, l’adoption de tactiques armées dans tout conflit ou situation de péril a toujours le potentiel de transformer des mesures défensives temporaires en hiérarchies militaires permanentes à moins que des efforts conscients pour contrer cette tendance et partager le pouvoir soient maintenus. Une approche libératrice, émancipatrice est nécessaire pour minimiser ou a moins grandement amoindrir ce danger.

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Le peuple en armes : l’exemple zapatiste

Principes proposés

Le composant armé ne doit jamais devenir le centre de l’affaire, autrement nous risquons de devenir une armée sur pieds. Pour éviter cela et pour équilibrer le pouvoir du mieux possible, une analyse libératrice est nécessaire pour façonner ceux qui apprennent à exercer leur pouvoir et ceux qui doivent être responsables de leurs groupes ou communautés. Le cadre libérateur, émancipateur est fondé sur des principes anarchistes d’entraide (coopération), d’action directe (être capable d’agir sans attendre l’approbation ou les ordres des autorités), de solidarité (reconnaître que le bien-être de groupes disparates est inter-relié) et l’autonomie collective autodétermination de la communauté.

Les armes de défense ne doivent être utilisées qu’en ayant pour buts la libération collective et non pas pour saisir le pouvoir de manière permanente, même si leur utilisation peut potentiellement et de manière possible nécessairement, faire escalader les conflits. Dans tous les cas, les armes ne sont pas la première ligne de défense et ne sont prises qu’après que toute autre résolution de conflit ait été épuisée. (NdT : on reconnaît là un grand principe amérindien de gestion de crise et de conflit…)

L’utilisation des armes n’est efficace sur le long terme que si cela fait partie d’un cadre de double pouvoir, c’est à dire la résistance à l’oppression et l’exploitation tout en développant d’autres initiatives vers l’autonomie et la libération comme partie intégrante d’autres efforts d’auto-suffisance et d’autodétermination.

Ceux engagés avec les armes devront avoir le même pouvoir que ceux impliqués dans d’autres formes de défense de la communauté ou dans l’auto-suffisance. Porter les armes doit être vu comme une tache privilégiée, ayant la même importance que l’attention portée aux enfants, produire la nourriture ou collecter les ordures ménagères, rien de plus. Pour maintenir un équilibre du pouvoir, faire une rotation des taches armées et des entrainements parmi ceux qui désirent y participer. Tout entraînement aux armes se doit d’inclure une éthique et des pratiques libératrices dynamiques et évolutives en plus du savoir-faire et de la sécurité. Au sein de toute opération d’entrainement, il devra y avoir une insistance particulière sur la défiance des assomptions au sujet des rapports de classe, de genre, de race afin d’interrompre l’archétype de la culture des armes.

Réflexions et questions pour une théorie

Ces notes ne sont qu’un début. Il y a toujours beaucoup de questions, incluant celles concernant l’organisation, les considérations tactiques, le pouvoir coercitif inhérent aux armes à feu, rendre compte à la communauté qui est défendue et l’élargissement du mouvement social et finalement, espère t’on, le processus de démilitarisation. Par exemple : Est-ce que des engagements défensifs doivent demeurer isolés géographiquement ? Est-ce que les groupes d’affinité sont les meilleures formations de partage de pouvoir et de mobilisation élargie ?

Comment peut-on créer des cultures de soutien à ceux qui s’engagent dans un conflit défensif, spécifiquement en ce qui concerne le droit des peuples opprimés historiquement à se défendre ? A quoi ressemblent ces engagements de soutien ? De plus, il y a un bon nombre de considérations et de questions tactiques  à discuter et à d´´battre pour éviter la réplique de la culture dominante des armes. Comment empêche t’on les armes et l’entrainement aux armes de devenir la préoccupation principale, que ce soit par habitude, culture ou romantisme ?

Il peut y avoir une fin à cette violence insensée pour la domination ou les ressources. Mais si nous voulons transcender la violence sur le long terme, nous aurons peut-être à l’utiliser sur le court terme. Nous devons donc nous posons quelques dures questions au sujet de nos approches et de nos méthodes. Quand l’engagement armé est-il approprié ? Quel aspect voudrions-nous qu’il prenne ? Comment créons-nous des cultures de soutien tacite ou directe et incluons-nous les personnes qui ne s’engageraient jamais d’elles-mêmes dans une autodéfense armée ?

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Unités de protection populaire au Rojava

Comment allons-nous empêcher que le pouvoir une fois de plus se centralise ? Quand les conséquences deviennent-elles plus néfastes que les bénéfices ? Il n’y a pas de modèles parfaits ; nous allons devoir créer cela ensemble, pas à pas. Nous devons nous surpasser et dépasser nos limites auto-imposées et devons lâcher prise de nos pré-conceptions de ce que la résistance et l’émancipation sont. Lorsque nous le ferons, nous gagnerons la confiance en l’utilisation d’outils potentiellement létaux avec une conscience libératrice, émancipatrice. Cela veut dire que nous devons comprendre que les valeurs du partage du pouvoir et de l’ouverture (NdT : ce que nous appelons la compréhension de notre complémentarité annihilant de fait les antagonismes factices socialement construits pour nous maintenir divisés…) sont toutes aussi importantes que le pouvoir de porter une arme chargée.

Les armes n’offriront jamais la seule réponse à l’exercice et l’équilibre du pouvoir. Nous seuls pouvons le faire, mais les armes peuvent être une dissuasion contre de véritables menaces et peuvent grandement étendre notre boîte à outils pour l’émancipation. L’autodéfense armée de communauté ouvre la possibilité de changer les règles du jeu et de l’engagement. Cela ne rend pas toujours les situations moins violentes, mais cela peut aider à équilibrer l’inégalité de pouvoir parmi les individus et les diverses communautés. Je n’appelle pas à un soulèvement armé général, mais à repenser comment nous défendre. Nous pouvons rêver, nous pouvons construire de nouveaux mondes (NdT : une société des sociétés), mais pour ce faire, nous ne devons pas oublier de résister en nos propres termes.

= = =

Voir nos pages :

“La fin de l’État”

“Paulo Freire, la pédagogie des opprimés”

“Réseau de résistance et de rébellion international”

“Textes fondateurs pour un changement politique”

“Gustav Landauer et la société organique”

Notre dossier sur « Le peuple en armes »

resistance_palestinienne_jenine
Palestine : peuple opprimé en résistance active…

Il n’y a pas de solution au sein du système ! (Résistance 71)

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

+

5 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie

Société des sociétés organique avec Gustav Landauer

chiapas_autodefense2

EZLN_autodefense1
Depuis 1994 : ¡Ya Basta!

Réflexion supplémentaire sur le peuple en armes (Dr Bones)

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, autogestion, crise mondiale, démocratie participative, gilets jaunes, guerres hégémoniques, militantisme alternatif, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, philosophie, politique et social, politique française, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , on 16 juin 2022 by Résistance 71

peuple_en_arme

“Une milice bien régulée étant nécessaire à la sécurité de l’état libre, le droit du peuple de posséder et de porter les armes, ne doit pas être enfreint.”
~ Second amendement de la Bill of Rights de la constitution des Etats-Unis d’Amérique, James Madison, 1781 ~

“Qui est la milice ? Le peuple entier !” (George Mason)

“Pour préserver la liberté, il est de la plus haute importance que tout le corps du peuple possède des armes.”
~ Richard Henry Lee ~

“Le mal est dans la chose même et le remède est violent. Il faut faire connaître au peuple ses droits et l’encourager à les revendiquer. Il faut lui mettre les armes à la main…”
~ Jean-Paul Marat, 1774 ~

rebellion

Il est grand temps pour les anarchistes de prendre une arme

Dr Bones

2017

Traduit de l’anglais par Résistance 71

Juin 2022

Imagine un moment que tu es dans un bar et qu’il y a un immigrant devant vous.

Il est peu bavard mais pas antisocial, habillé simplement mais pas mal habillé. Il ressemble à n’importe qui sauf qu’il ne l’est pas. Ce que vous ne savez pas, c’est qu’il a travaillé comme ingénieur dans l’aéronautique et a même aidé à concevoir des télécommandes d’avions, par lesquelles les contrôles manuels de l’appareil sont complètement remplacés par des ordinateurs et des logiciels. Mec intelligent, bourré de talent, å “haute énergie” comme le dirait Il Duce ; une histoire du succès de l’Inde et directement de la mythologie américaine.

Maintenant derrière lui, un son nouveau, vieux et angoissant, vous entendez un cri infernal *FOUS LE CAMP DE MON PAYS !”

Qu’est-ce que c’est que ce truc ? On dirait qu’il y a comme une bousculade vers l’arrière, un mec insultant l’immigrant que vous étudiez, mais le gérant du bar semble être sur le coup. L’homme, qui semble être un vieux con blanc est énervé. Il a quelque chose ce type, mais vous ne savez pas exactement quoi. L’homme part, mais quelques minutes plus tard, revient par la porte. Peut-être a t’il oublié quelque chose ?

Il bute trois personnes dont deux d’entre elles sont des Indiens pris par erreur pour des musulmans.

Peut-être es-tu à une manif’ cette fois-ci, tenant ta pancarte et ressentant le courant électrique de centaines d’autres corps joints en solidarité. Un homme émerge de la foule, te défiant de le frapper. Il éructe vers toi comme un raton laveur malade et profère des injures comme un marin en goguette. Il est peut être bourré penses-tu, ou en tout cas trop parti pour vraiment savoir de quoi il retourne. Quelqu’un d’autre le pousse

Il sort un pistolet et tire. Il ne sera accusé que d’agression.

Et ceci n’est que la partie émergée de l’iceberg. Nous ne sommes pas encore un an dans le règne d’un nouvel empereur que déjà le climat politique est hautement toxique, un nuage nauséabond non seulement étouffe ceux les plus à risque dans nos communautés, mais aussi les gens qui cherchent à les défendre. Des gens ont demandé à ce que les antifas soient déclarés terroristes, des gouvernements d’état écrivent des lois pour permettre aux manifestants d’être écrasés et de voir leurs propriétés confisquées, volées.

C’est une situation qui n’est pas sans rappeler celle des “illégalistes” français du début du siècle :

Contre nous, toutes les armes sont bonnes ; nous sommes en territoire ennemi, encerclés, harcelés. Les patrons, les juges, les soldats, les flics, s’unissent pour nous briser.

Être une personne qui pense dans ce pays de barbares, c’est être un criminel et c’est avec une ferveur toujours plus accrue que les tribus loyales au nouvel empereur planifient de nous faire la guerre. Il y a des millions de personnes assises devant la télé alors que je tape ces mots et qui ne verraient rien de mal à ce que quelques centaines de vies par an soient sacrifiées pour “garder les gens dans les clous” et vous pouvez être sûrs que des gens comme toi et moi seront parmi les sacrifiés. Les flics ne les arrêtent pas, ils échangent des textes racistes ; ils consolent ceux qui ont tué des enfants noirs désarmés et leur disent que ce qu’ils ont fait était pour la juste cause.

Être un anarchiste, communiste, anti-capitaliste ou insurgé inter-sectionnel, c’est être potentiellement marqué pour la mort. Ceci n’est pas une métaphore, ceci est la vie réelle.

Si  vous patrouillez les rues de Syrie avec une batte de baseball, on vous prendra pour suicidaires ; si votre “guerre contre l’État” n’a consisté en rien d’autre que mettre le feu, toutes les casernes de pompier du pays seront largement assez équipées pour s’occuper même de vos raids les plus audacieux.

Les gens qui soutiennent en masse les politiques et les politiciens qui veulent vous voir dans un cercueil, ont la gâchette facile depuis quelque temps. Je pose ici une simple question : Avez-vous les outils pour non seulement vous protéger mais aussi protéger ceux auxquels vous êtes attachés ?

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Le grand malheur

Ne nous masquons pas la face : les “radicaux” sont aussi loin des “révolutionnaires” que le poulet du T-rex. A un moment donné, la “gauche” a arrêté d’être dangereuse pour le système et a presque disparu. Après le bis du syndicat de l’IWW (Industrial Workers of the World) dans les années 30 et que le pouvoir travailliste fut écrasé, après que l’ALF-CIO eut dénoncé les communistes, le seul endroit où vous pouviez trouver le même type de mouvement qui terrorisa les empereurs et présidents devint les dortoirs enfumés des universités ou les marches momentanées dans les rues à moitié vide. Ainsi, les idées de la gauche sur la libération de l’humanité des chaînes du capital furent si lourdement chassées dans le monde physique, qu’elles rentrèrent dans nos têtes.

Mais les temps ne sont plus ce qu’ils furent.

Enragé par les actions de Trump et trahi par les démocrates, le spectre du radicalisme est revenu comme un fantôme en colère déterminé à se venger. Les enfants du millénaire sont fatigués du capitalisme et pourtant la “révolution politique” de Bernie (Sanders) n’a rien donné de tangible. La non-violence n’a montré qu’elle est en fait un super moyen de se faire arrêter.

Oui, la gauche militante semble émerger de la terre comme les cigales de Floride en été, faisant monter un brouhaha en un chœur imperturbable. Quelques signes de la génération militante précédente demeure sur les ailes encore mouillées de ces nouveaux militants. Le Black Bloc est de retour, mais nous nous battons toujours contre les manifestations, les gens formant une chaîne humaine autour de bâtiments n’étant généralement qu’une nuisance et non pas un blocage.

Les anarchistes et militants de toutes sortes sont des castrés, nous mettant dans une zone de danger que les autres pays n’ont pas à connaître. Les républicains ont deux fois plus de chances d’être membres de foyers propriétaires d’armes que les démocrates et environ 6/10 (64%) des propriétaires d’armes à feu se disent “fiers d’être Américains”, environ la moitié des armes de ce pays sont possédés par quelques 3% de la population adulte et bien des armes bon marché à produire (celles avec une culasse mobile manuelle), sont spécifiquement bannies sous l’amendement de la NFA et Hughes, ce qui retire l’auto-protection et les armes d’auto-défense des mains de la classe travailleuse.

Ce n’est pas l’Europe, ce sont les Etats-Unis de cette putain d’Amérique, un fief morose où les gens peuvent rentrer dans une merde de Starbucks avec un flingue et 30 munitions perce-blindages…

Ceci en revient à un imbroglio de sombres implications auxquelles il nous faut penser, une menace cachée de patriotes socialement aisés, armés jusqu’aux dents et bien capables de détruire tous gains qu’un mouvement révolutionnaire pourrait faire en quelques jours. Ils peuvent se permettre de se moquer des émeutes parce qu’ils savent que quand arrive le pire, les moyens d’auto-défense les plus efficaces sont fermement entre les mains d’une classe et d’une idéologie.

Il n’y a pas de spectre qui hante quelque continent que ce soit si ce n’est la FAI et encore seulement dans de petits camps créés spontanément. Les flics et les nazis, de la même manière (mais je me répète) ont pris d’assaut les manifestations et mis en pratique le passage à tabac de qui ils veulent, surtout ceux qui ne posent aucun danger pour les cogneurs. En fin de journée, les flics veulent toujours retourner à la maison et à la minute où ils font face à quelqu’un bien plus capable de leur infliger plus de mal qu’ils n’en font aux autres, ils deviennent alors soudainement des négociateurs et des faiseurs de paix. Rappelons-nous les dégénérés de Malheur Wildlife qui furent traités en ennemis honorables simplement parce qu’ils avaient des armes automatiques qui auraient pu couper un cochon en deux en quelques secondes.

Rappelez-vous aussi qu’ils furent tous acquittés par les jury et qu’ils ne firent quasiment pas de prison.

Comparez cela avec le mouvement de Standing Rock (NdT : l’occupation des sols en territoires indiens contre le passage d’un oléoduc…) où des forces de l’état ont littéralement arraché des bras et des mains (NdT : avec des grenades de “désencerclement”, comme dans les manifs et la répression sanglante des Gilets Jaunes en France) et ce sans répercussion notoire mis à part le fait d’être ciblés sur le moment. Le camp maintenant en ruine, est terminé. L’oléoduc de DAPL sera construit, les gens du commun ont échoué et tout ce qu’ils ont en souvenir ne sont qu’hématomes et blessures.

Mais que se serait-il passé si les flics n’avaient pas été si avides d’estropier de manière permanente les manifestants ou de se ruer sur les camps ? S’ils avaient eu peur ? Et si l’anarchisme et l’anti-capitalisme redevenaient quelque chose dont il faut avoir peur, dont le système doit avoir peur ?

Et si la résistance était armée ?

Le dieu qui a menti

La contestation moderne, émanation survivante du libéralisme, assume que :

  • Les gens au pouvoir se préoccupent de ce que leurs ouailles pensent et ont à dire…
  • Il y a une sorte de champ imaginaire qui nous entoure appelé “droits de l’Homme” que les gens au pouvoir sont moralement obligés de respecter.
  • L’ennemi peut être persuadé ou négativement responsabilisé pour qu’il abandonne tout pouvoir afin de pouvoir former une grande assemblée à l’échelle mondiale et ce sans violence aucune.

Ces idées sont ridicules, elles ne sont qu’un fantasme religieux mort-né des années 60 et traînées à chaque manif’ comme si elles étaient une sorte d’enfant-Christ parfumé au patchouli, envoyées pour nous sauver. Tout ça c’est est du pipeau, un mensonge. Demandez à n’importe quel Afro-américain…

Ces concepts ne sont rien d’autres que des fictions implantées, qui nous sont données par l’État pour nous garder dociles et obéissants ; ceci fut reconnu comme tel il y a un siècle. Les patrons se préoccupent-ils de la nourriture ou du logement des ouvriers qu’ils virent ?  Est-ce que la police se préoccupe de savoir si les “droits” de quelqu’un ont été violés lorsqu’elle matraque les gens ou tire à vue ? Ils vous rabâchent sans arrêt au sujet de la violence tandis qu’ils vous volent presque jusqu’au dernier dollar que vous générez (par votre travail) tout en ayant toujours la menace permanente au-dessus de vous de la force, du chômage et de la famine.

Les droits sont une fiction, un fantôme et le plus tôt vous réalisez que les seuls “droits” que vous ayez sont ceux que vous avez la volonté de défendre et au plus tôt vous pourrez rejoindre le reste de la planète dans ce que nous appelons : la vie.

NdR71 : le grand humoriste et satiriste social américain George Carlin disait ceci à plus que juste titre, sa lucidité et réalisme acerbe manquent à cette époque que nous vivons : “Vous n’avez pas de droits, les “droits” n’existent pas, c’est une fiction, une invention, comme celle du croquemitaine, un beau rêve certes, mais un rêve quoi qu’il en soit… tout ce que vous avez ce sont des “privilèges”, des “privilièges temporaires”, qui peuvent être révoqués à tout moment, suffit de voir la peau de chagrin des libertés qu’il nous reste au fil du temps…”

Enzo Martucci a écrit:

La liberté d’un individu s’arrête là ou s’arrête son pouvoir. Si je le veux et que mon pouvoir me le permet, je peux commander aux autres. Mais dans ce cas, le pouvoir exercé sur eux n’est pas autorité parce qu’ils ne sont en rien obligés de le reconnaître et de le respecter. En fait, s’ils se rebellaient et utilisaient leur pouvoir pour barrer ma tentative de domination, alors tout demeurerait libre sans que personne ne menace plus de régner sur eux.

Nous pouvons mettre des batons dans les roues du pouvoir de plein de façons possibles et les radicaux en ont appris un vaste assortiment, pourtant nous ne semblons jamais tenter de rendre cette idée de tentative de domination, dangereuse. Nous marchons dans les rues chaque jour, nus en quelque sorte et espérons sincèrement que notre faiblesse soit respectée, comme si notre fragilité était une vertu.

Nous protestons des lois qui permettent à des gens de nous écraser et de pulvériser notre crâne sous une demie tonne d’acier ; nous mendions aux mêmes personnes qui nous défoncent avec des matraques, d’éventuellement nous respecter. Nous ne demandons aucune dignité, nous couinons pour avoir la permission d’être traités comme si nous en avions une.

Est-ce cela l’anarchisme que nous voulons ? La vaste majorité de ce qui passe pour de “l’action directe” de nos jours n’est rien de plus qu’appeler l’Ennemi à être un meilleur seigneur au lieu de nous rendre de fait ingouvernables.

Cette tactique n’a jamais marché et l’idée que des gens, encerclés par des hommes et des femmes violents défendant des lignes imaginaires faites par les corps de millions, les croiraient tient en fait plus d’un phénomène hallucinatoire de masse que de quelque fait politique que ce soit.

Alors que j’écris ces lignes, un flic vient d’arrêter une voiture là dehors, devant ma fenêtre, le faisceau de sa torche le rugissement silencieux du fait qu’il a attrapé sa proie. S’il ne met pas la personne interpellée en détention de force, il va au moins la voler pour le paiement de l’utilisation de sa protection, véritable racket de voie publique. Nous continuerons notre chemin, même s’il tabasse cette jeune blonde, parce que nous sommes trop faibles pour vivre sans lui.

S’il la tuait maintenant, que se passerait-il ? Pourquoi ne le ferait-il pas ? Qu’a t’il a perdre ? Que risque t’il s’il lui pétait la boîte crânienne et éclaboussait les vitres de sa matière cervicale dans une orgie de neurones en ébullition et d’adrénaline ? Rien de sa part à elle, rien de la communauté l’environnant. Les cases de tous les Oncle Tom resteront tranquilles et après quelques protestations et pétitions d’usage, le flic retournera faire son racket de voie publique.

Parce que lui et tout son département de flicaille savent parfaitement qu’ils n’ont rien à craindre. Que nous dépendons d’eux.

Prenez VOS armes et déclarez VOTRE guerre

Je vais le dire directement : une personne armée en en contrôle. Une communauté armée n’est pas seulement capable de se défendre elle-même et donc de se libérer de la “protection” de la police, mais mieux encore, elle peut faire respecter ses propres valeurs sur le monde qui l’entoure. Quand un flic vous dit par exemple de retirer un t-shirt jugé provocateur comme par exemple un t-shirt de BLM, vous obéissez parce que la simple peur de la violence ou de la mort vous fait obéir. Vous n’évaluez pas les conditions et le flic, pour savoir si vous pourriez le battre ou le mettre au sol, parce que vous savez que rien n’arrêtera un munition creuse de 9mm de pénétrer dans votre visage comme dans du beurre.

Il n’y a aucune raison pour les anarchistes de ne pas faire la même chose.

Les membres du Ku Klux Klan sont terrifiés à la vue d’une arme chargée. Les nazis sont moins enclins à rouler des mécaniques quand ils savent qu’un 357 magnum va détruire en moins d’une seconde ce qu’ils ont mis des années à construire. Sortir une arme face à un flic est une condamnation à mort, pourtant la simple idée qu’un flingage pourrait avoir lieu est souvent suffisant pour qu’ils gardent de bonnes manières.

Robert F. Williams fut un exemple classique de cette tactique en action.

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Robert F. Williams allait devenir le leader de Mabel, la branche de Caroline du Nord du NAACP et il organisa une milice noire pour combattre le Ku Klux Klan, au grand désarroi des plus modérés du mouvement des droits civiques. Williams était un ancien combattant de la seconde guerre mondiale et partagea son savoir et ses techniques accumulés avec ses compagnons de lutte afin de riposter à la violence du KKK et des Conseils Citoyens Blancs. Ceci prouva être particulièrement efficace ; par le simple fait d’être armées, les milices noires parvinrent à effrayer et dissuader les hommes du Klan.

Mais où donc est passée cette putain de politique ? Quand avons-nous commencé à demander quelque chose au lieu de le prendre ? Pourquoi avons-nous laissé l’ennemi dicter ce qui est acceptable pour nous ou pas ? Pourquoi nous sommes-nous couchées de peur et de faiblesse ensemble plutôt que de nous dresser fièrement sous notre propre autorité ?

Révolution et insurrection ne doivent pas être regardées en tant que synonymes… La Révolution vise à de nouveaux arrangements ; l’insurrection nous mène à ne plus nous laisser dominer, mais à arranger nous-même notre société et à ne pas garder d’espoir fumeux sur les ‘institutions’.

Quand nous commençons à nous libérer nous faisons le chemin de la liberté des autres.

Les armes peuvent être le grand niveleur : il n’y a pas besoin qu’elles soient chères, pas besoins qu’elles soient particulièrement sophistiquées et elles peuvent être portées et utilisées par les malades comme les sains, jeunes ou vieux, hommes ou femmes. Tout le monde peut les utiliser pour arranger le monde alentour.

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Les armes à feu sont l’anarchie en action, un outil qui vous libère instantanément de la dépendance à une hiérarchie autoritaire. VOUS pouvez soudainement arrêter un cambriolage. VOUS pouvez arrêter un viol. VOUS pouvez même empêcher les ordures racistes de montrer leurs sales gueules dans le voisinage, que ce soit individuellement ou collectivement (NdT : milices, rappelons-nous de la France des sections de 1790-93, qui ont fait trembler la bourgeoisie au point qu’elle les supprima par la bande et la transforma en une “garde nationale”, entité paramilitaire sous contrôle étatique, tandis que les sections étaient le peuple en armes et organisés régissant sa propre autorité. Quelle différence y a t’il entre un sans-culotte et un gilet jaune ?… Le Sans-culotte était armé et la France des sections fut une réalité politico-sociale efficace !…), aucune autorité n’est impliquée, pas de 17 à composer ou d’infrastructure à maintenir, rendant de facto l’État obsolète sans avoir à dépendre de ces fantômes de “droits” et de “lois” ou de quelque croyance religieuse disant que “au fond, tout le monde est bon.”

Lorsqu’il devient clair que faire une action de voiture bélier et menacer la vie d’anarchistes lors d’une manifestation ou sortir une arme contre des manifestants, devient potentiellement mortelle, alors l’escalade arrêtera. Lorsque la police saura qu’ils risquent plus qu’une mise à pied de deux semaines de congés payés de plus lorsqu’ils viennent terroriser un voisinage, alors le harcèlement cessera et fissa… Lorsqu’il est certain qu’un violeur ne vivra pas assez longtemps pour mendier la pitié d’un juge complaisant, le patriarcat battra en retraite.

Tout anarchiste avec une arme est l’anarchisme rendu réel, une force efficace capable de tenir le monde pour responsable et de demander l’autonomie, le même monde qui est actuellement retranché derrière des murs, des grillages, des badges et des uniformes que des gens comme vous et moi ont construit, génération après génération, de nos mains nues seulement pour nous le voir voler par des diktats de soi-disants “marchés” et les propriétaires qui nous traitent comme du bétail !

Et bien camarades, allez-vous continuer à les laisser vous voler ? Allez-vous continuer de vivre comme un pacifiste dans un troupeau bien domestiqué ? Allez-vous continuer à laisser l’État et la bourgeoisie voler votre valeur, votre temps, vos corps et vos vies tout en rançonnant votre sécurité afin que vous continuiez à obéir ?

Ou allez-vous commencer à les voler en retour, une par une…

… sous la menace d’une arme ?

Si vous ne pouvez pas voler de propriété de l’État…

… au moins, volez-vous en retour pour votre existence.

= = =

Lecture complémentaire : “Espagne 36 : le peuple en armes”

PDF du Dr Bones sur Résistance 71 :

Le-capitalisme-est-un-culte-de-la-mort-la-science-une-pute

DrBones_Insurrection et Utopie

DrBones

Il n’y a pas de solution au sein du système ! (Résistance 71)

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

+

4 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie

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« Je ne ramperai pas » (Robert F. Williams)

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