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Aux source de l’empire : Les Etats-Unis furent-ils créés comme une démocratie ? Analyse critique avec Steven Newcomb

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, canada USA états coloniaux, colonialisme, gilets jaunes, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, ingérence et etats-unis, média et propagande, militantisme alternatif, pédagogie libération, politique et social, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , on 24 juin 2020 by Résistance 71

 

“Les Etats-Unis… créés par une bande d’esclavagistes qui voulurent être libres…”
~ George Carlin ~

“Vers 1776, quelques personnes importantes dans les colonies anglaises firent une découverte qui améliorerait énormément les deux cents années suivantes. Ils découvrirent qu’en créant une nation, un symbole, une unité légale appelée États-Unis d’Amérique, ils pourraient contrôler la terre, les profits et le pouvoir politique des favoris de l’empire britannique. Dans le processus, ils pourraient aussi contrer un nombre potentiel de rébellions et créer un consensus de soutien populaire pour la règle d’un nouveau leadership privilégié. Ainsi les pères fondateurs ont-ils créé le système le plus efficace de contrôle national inventé dans l’ère moderne et ont montré aux générations futures de leaders les avantages de combiner le paternalisme avec le commandement.
[…] Nous avons ici une prévision de la longue histoire de la politique américaine, la mobilisation de l’énergie de la basse classe de la société par les politiciens membres de la haute classe, ce pour leurs propres intérêts.”
~ Howard Zinn, 1980 ~

 


S. Newcomb

 

Les Etats-Unis furent-ils fondés comme une démocratie ?

 

Steven Newcomb

 

17 mai 2020

 

url de l’article original:

https://originalfreenations.com/was-the-united-states-founded-as-a-democracy/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Dans son splendide livre The Lawless Law of Nations (1925), Sterling E. Edmunds dit que les gouvernements peuvent bien être définis comme des “groupes d’hommes possédant le pouvoir arbitraire sur d’autres hommes.” (p.426) Si Edmunds a raison, l’idée “d’auto-gouvernement” n’est pas un remède ayant tant de mérite pour les Amérindiens, car un tel système impliquerait qu’un relativement petit groupe d’hommes et de femmes de la communauté native  exerce un pouvoir arbitraire sur le reste des gens. Pour un grand nombre de nations natives, ceci est exactement ce que “l’auto-gouvernement” natif est devenu. (NdT : Avec la grande exception des nations iroquoises et Kaianerekowa, la Grande Loi de la Paix, certes diminuée par les “conseils de bandes et de tribus” instaurés sous les lois fédérales coloniales indiennes, mais toujours en application ce depuis le XIIème siècle, dans le mode de gouvernance traditionnel…)

Depuis maintenant des générations, le gouvernement fédéral des Etats-Unis a exercé un pouvoir arbitraire et abusif, souvent référé en tant que “pouvoir plénier”, sur les nations et peuples natifs. Aujourd’hui, ce même gouvernement fédéral, dans un esprit de bonne volonté, a décidé que les communautés natives devraient évoluer vers une “auto-gouvernance”. De quoi cela a t’il l’air ? Dans un livret intitulé “Auto-gouvernement, une initiative tribale”, on y trouve cette déclaration : “L’auto-gouvernement est au sujet du transfert du financement des programmes disponibles, des services, des fonctions et des activités, vers un contrôle tribal de ceux-ci. Les tribus sont responsables devant leur propre peuple pour la gestion des ressources, des services et du développement.

Le livret explique également que l’auto-gouvernance native consiste à fournir aux gouvernements tribaux “plus d’autorité de contrôle et de prise de décisions sur les ressources financières fédérales mises à la disposition du peuple indien pour son avantage.” C’est au sujet d’un “nouveau partenariat entre les tribus indiennes et les Etats-Unis dans leurs relations de gouvernement à gouvernement”. Le but est de minimiser l’intrusion et l’implication fédérales. (NdT: en clair, mettre des gestionnaires inféodés au système en place pour gérer la merdasse du capital…)

Mais historiquement, nous devons regarder en arrière et comprendre qu’une idée d’auto-gouvernement natif fondé sur la gestion “des ressources financières fédérales” ne fut jamais partie intégrante de notre existence avant l’invasion de nos territoires et de nos nations. De fait, ce livret distribué par le “Projet de Démonstration de Gouvernance Tribale” reconnaît clairement ce point crucial. Une lettre d’introduction publié avec le pamphlet dit ceci : “Toutes nos sociétés tribales ont eu des existences libres et autonomes durant des milliers d’années avant l’exploration et la colonisation de ce continent par les Européens occidentaux.

Plus encore, nos nations et nos peuples eurent un mode de vie libre et indépendant avant que les envahisseurs européens n’ait assumé un droit de domination sur nos nations et nos ancêtres. Les auteurs du pamphlet reconnaissent qu’un système de domination fut imposé sur nos nations puis écrivent :

“L’auto-suffisance fut remplacée alors que les Etats-Unis par leur congrès, leurs tribunaux et particulièrement la bureaucratie fédérale (NdT: qui n’agit que sur ordre) transformèrent, parfois brutalement,  le statut tribal indépendant par une dépendance tribale envers l’état fédéral. Après des générations de domination et de contrôle fédéraux, il y eut même quelques Indiens pour croire à cette dépendance imposée [domination].”

Après avoir reconnu que les Etats-Unis imposaient un système de domination sur nos nations, les personnes qui ont écrit ce livret bizarrement ont déclaré, “Nos cultures ont fourni les philosophies de base incarnées dans la constitution des Etats-Unis.” Si des philosophies démocratiques étaient incarnées dans la constitution des Etats-Unis alors ceux-ci opéraient-ils hors de leur constitution pour imposer un système de domination sur nos peuples et nations ?…

Ou est-il possible que les auteurs du livret se soient trompés parce que la constitution des Etats-Unis est un instrument de l’empire et de domination et non pas une démocratie ? Dans son livre The Rising American Empire (1962), l’historien Richard Van Alstyne a clairement documenté le fait que les Etats-Unis furent fondés comme un empire. Et d’après R.H.S Crossman, la constitution des Etats-Unis fut écrite comme “l’organe central d’une autorité coercitive, tout en préservant une relative indépendance aux autorités locales, aux législatures des états” (R. H. S. Crossman, Government and the Governed, 1969, p. 96). Cette “autorité coercitive” incarnée dans la constitution ne fut pas basée sur le règle populaire, car des hommes comme James Madison furent très clairs sur leur dénonciation de la démocratie.

Madison était préoccupé parce que:

Il y aura des créditeurs et des endettés, fermiers, marchands et industriels. Il y aura particulièrement cette distinction entre riche et pauvre… Nous ne pouvons pas quoi qu’il en soit, être regardé en ce moment comme une masse homogène dans laquelle tout ce qui affecte une partie va affecter de la même manière l’ensemble. En cadrant un système que nous voulons durable pendant bien longtemps, nous ne devons pas perdre de vue le changement produit par l’âge. Une augmentation de la population va nécessairement augmenter la proportion de ceux qui travaillent (sic) sous toutes les duretés de la vie et qui vont secrètement soupirer pour une plus grande égalité de distribution de ses mannes. Ceux-ci seront dans le temps plus nombreux que ceux placés au dessus des sentiments d’indigence (de pauvreté). D’après les lois du suffrage (par le vote), le pouvoir va glisser dans les mains des masses. Aucune tentative agraire n’a été faite dans ce pays, mais les symptômes d’un esprit d’effervescence comme nous le comprenons, s’est suffisamment développé dans certains endroits pour nous notifier le danger futur en provenance des masses. Comment peut-on se préserver de ce danger sur des principes républicains ?” (Crossman, p.96-7)

Madison posa aussi une autre question. Comment la classe de propriétaires pourrait-elle se préserver contre les dangers se posant aux riches comme les “coalitions” de la majorité, trimant dans leur vie quotidienne ? (Crossman, p.97). Madison, que beaucoup regardent comme le plus important des “pères fondateurs”, envisiona toutes les communautés comme divisées entre le petit nombre et la masse. “Les premiers sont les riches et les biens nés et l’autre les masses de gens qui rarement jugent ou déterminent le droit.” (Ibid)

Comme le fait remarquer Crossman, les hommes d’affaire qui ont écrit la constitution réussirent à sortir d’un système, sous la couronne britannique, fondé sur l’idée de la soumission du peuple vivant en obéissance traditionnelle à une plus haute autorité royale et d’un parlement, vers un “système de contrôle si intriqué, que pratiquement pas une vague populaire ne pourrait se propager. (Ibid) Le fédéralisme, dit Crossman, fut créé comme barrière, garde-fou, contre la turbulence de la démocratie.” (Ibid.) De telles idées furent-elles empruntées aux cultures natives de ce continent ? Manifestement pas.

Et pourtant, pour une raison indéterminée, bien des natifs ont souscrit à une mythologie faisant le portait des Etats-Unis comme étant une société “démocratique”, fondé sur un “système de gouvernance du peuple, par le peuple et pour le peuple”. Le problème avec ce slogan simpliste est que le “peuple” auquel il se réfère n’y est jamais identifié. En fait, le “peuple” est un terme suffisamment vague pour faire diversion du fait que ce terme se réfère aux “riches et biens nés” pour lesquels Madison étaient si préoccupés. Comme l’observe Fernand Braudel dans sa “Grammaire des civilisations” (1987) :

La déclaration d’indépendance des Etats-Unis proclama le droit de se rebeller et d’être égaux devant la loi. Mais la grande idée qui préoccupa et motiva les propriétaires terriens, les hommes d’affaire, les avocats, les patrons de plantations, les spéculateurs et les banquiers, ces “aristocrates”, était de sauvegarder et préserver la propriété, la richesse et le privilège social. L’Amérique était nouvellement née, mais elle avait déjà des gens riches dont la richesse les prédisposait à mener les autres. Nous en avons pour preuve ce que disaient les pères fondateurs assemblés à la Convention de Philadelphie, ou de lire leur correspondance avec leurs pairs. Leurs assomptions de base sont très claires. Charles Pickney, un jeune planteur, proposa que seuls ceux possédant au moins 100 000 US$ pouvaient devenir président. Alexander Hamilton appela à l’étouffement de “l’impudente démocratie”. Tous, comme Peggy Hutchinson, fille de gouverneur, regardaient les masses comme la “foule crasseuse”.

“Un jeune diplomate et homme d’état, le gouverneur Morris, déclara : “La foule commence à penser et à raisonner. Pauvres reptiles ! Ils se réchauffent au soleil et bientôt, ils vont mordre… Les gentilshommes commencent à les craindre.” L’avocat et politicien James Murray Mason reconnut : “Nous avons été trop démocrates… faisons attention à ne pas aller trop loin dans l’autre extrême.” Personne finalement fut plus imbu des sacro-saints principes de démocratie que Jeremy Belknap, un prêtre de la Nouvelle-Angleterre ; pourtant il écrivit à un de ses amis : “Nous devrions soutenir en tant que principe que le gouvernement dérive du peuple, mais obliger le peuple à comprendre qu’il n’est pas capable de gouverner par lui-même.

Braudel conclut qu’il y “avait un ordre à imposer au nom de la liberté et de l’égalité et que c’était un ordre capitaliste”, dans lequel “le pouvoir et la responsabilité appartiennent aux riches.” Qu’en est-il donc de ces gens du bas de la pyramide sociale ? Comme le fait remarquer Braudel “Les autres reçurent la grande concession d’être protégés des riches alors que les riches étaient contre eux.” Ainsi, lorsque nous parlons de la constitution des Etats-Unis, nous parlons d’un système de gouvernement, créé par des propriétaires terriens, des hommes d’affaire, des avocats, des planteurs, des propriétaires d’esclaves, des banquiers et des spéculateurs, que les riches mirent en place comme moyen d’organiser l’utilisation du pouvoir coercitif pour les protéger, eux, leurs propriétés et leur privilège de blancs contre la masse du commun. Pour nous aujourd’hui, en tant que peuples et nations natifs de ce continent, dire que nos cultures natives “ont fourni les principes démocratiques de base incarnée fans la constitution des Etats-Unis”, n’est rien d’autre que de perpétuer une erreur et un mensonge tout en déformant le narratif historique dans une proportion incroyable.

= = =

Lectures complémentaires :

« Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte », Steven Newcomb, 2008

« Comprendre le système de l’oppression coloniale par mieux le démonter », Steven Newcomb

« Comprendre le système de l’oppression coloniale pour mieux le démonter », Peter d’Errico

« Effondrer le colonialisme », Résistance 71

« Nous sommes tous des colonisés ! », Résistance 71

 


« Livre », croix et épée, piliers coloniaux


Combattant le terrorisme depuis… 1492 !

Résistance au colonialisme: Ferraillage sémantique… de la « conquête » à la « domination » (Steven Newcomb)

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A lire en complément: PDF

Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte

 

Pourquoi le mot de “conquête” est-il considéré comme acceptable et pas celui de “domination”

 

Steven Newcomb

 

31 août 2017

 

url de l’article original:

https://indiancountrymedianetwork.com/news/opinions/conquest-considered-acceptable-domination-not/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

La vaste majorité des leaders natifs et des avocats spécialistes de la loi fédérale indienne sont enclins à considérer le mot “domination” comme étant trop vocal et “imposant” pour être utilisé dans leurs analyses des problèmes actuels de nos nations et de nos peuples et aussi trop impoli pour être utilisé dans leurs interactions avec les fonctionnaires du gouvernement des Etats-Unis ou des états les composant. Et pourtant pour une raison inconnue, le mot “conquête” ou l’expression “la conquête” sont traités comme étant typiques et tout à fait normaux.

Je trouve “curieux” que le mot de “conquête” soit jugé acceptable dans les discussions au sujet de la loi fédérale indienne et de sa politique inhérente et que le mot de “domination” ne le soit pas. J’ai une théorie qui implique le fait que le mot “conquête” est subrepticement interprété comme voulant dire que les Etats-Unis sont collectivement parvenus à une victoire sur les nations autochtones à cet endroit et que les Etats-Unis sont donc, un conquérant “victorieux”. Ce sentiment est illustré dans bon nombre d’affaires judiciaires. Le mot “conquête” est un mot qui est traité comme courant, acceptable et sain. Aussi parce que le gouvernement des Etats-Unis ne voient pas le mot “conquête” comme étant une menace, et n’a aucun problème pour l’utiliser. Utiliser ce mot évite de manière utile de cadrer la loi fédérale indienne et sa politique en termes de “domination” des nations natives. (“ce n’est pas une domination, c’est la loi”…)

La présomption ici est que par le moyen d’une “conquête légitime”, les Etats-Unis ont atteint une position valide se positionnant au-dessus et par delà les nations autochtones. Le mot “conquête” est un mot qui assume de manière silencieuse le fait que les Etats-Unis et leur gouvernement existent dans une position supérieure en rapport avec la position “inférieure” des nations et peuples autochtones. Bien malencontreusement, la plupart d’entre nous ne fait rien pour contredire et défier cette vision des choses.

Ceci est également vrai concernant la manière dont certains écrivains ont décrit la colonisation des Amériques à ses débuts. Prenez par exemple le livre d’Anthony Angie “The Fall of the Natural Man” (1977). Padgen dit que “tout le débat sur la légalité des conquêtes” se situent sur le jugement chrétien au sujet de “la nature des Indiens”. Si Padgen avait écrit au sujet de “la légalité de la domination sur les peuples natifs”, son phrasé aurait incontestablement levé des questions comme “Est-ce que la domination d’une personne par une autre ou d’une nation par une autre peut-être “juste” en quelque circonstance ?” Comment parvient-on à la réponse “correcte” à une telle question ?

Recadrer notre discussion au sujet de notre histoire et des circonstances actuelles en termes de “domination” plutôt que de “conquête”, nous permet de questionner: Est-ce “juste” pour une nation ou un peuple d’en envahir un autre ? et ensuite de forcer la nation envahie de vivre sur des générations selon un système imposé de domination ? Bien qu’il soit correct d’utiliser les mots d’”invasion” et de “domination” pour classifier la manière dont les Etats-Unis ont traité nos peuples et nos nations (pensez aux massacres de Washita, de Sand Creek et de Wounded Knee etc…), ceci n’est pas le type de vocabulaire que nous avons l’habitude d’entendre utilisé par les leaders autochtones et les praticiens de la loi fédérale indienne en pays indien, ni du reste dans leurs discussions avec les représentants du gouvernement des Etats-Unis.

Pourquoi donc nos leaders natifs et nos avocats spécialistes ne discutent pas de ce qui a été fait à nos peuples et nations en termes d’invasion et de domination malgré le fait que la loi fédérale indienne US et sa politique sont fondées sur l’affirmation initiale de la chrétienté d’un droit d’invasion et de domination nos nations ? Dans un langage quelque peu masqué ou codé (par exemple avec les mot “d’ascendance” et de “dominion [domination] ultime”) le droit affirmé des Etats-Unis de dominer nos peuples et nations est le plus clairement exprimé dans la décision de la cour suprême dans l’affaire Johnson contre M’Intosh de 1823.

En assumant qu’il est injuste pour une nation ou un peuple d’en envahir un autre et de le dominer, est-ce qu’une invasion injuste et une domination continuelle deviennent éventuellement “justes” après que le temps se soit écoulé ? qui doit décider de la réponse correcte à cette question ? Est-ce qu’un rendu de justice de la cour suprême fondé sur le droit proclamé pour une nation ou un empire de dominer beaucoup d’autres nations et de les tenir sous la prétention de la “conquête” et donc de la domination est une décision valide ? Qui peut le dire ? Dans “The Fall of Natural Man”, Padgen dit que les intellectuels européens des XVème et XVIème siècles avaient leur propre vision de la “structure du monde”. Ces intellectuels concevaient parfaitement que s’ils devaient introduire un “nouvel élément” pauvrement conçu dans cette structure, ceci pourrait bien compromettre la structure du monde entier. En 2017, alors que nous arrivons gentiment au bicentenaire de cette décision dans l’affaire Johnson contre M’Intosh, identifier la loi fédérale indienne et sa politique comme un système de domination est le “nouvel élément” qui crée la renverse potentielle de la structure légale et politique de notre monde et peut l’éloigner des schémas mentaux et comportementaux de domination imposés par les colonisateurs.

Il y a une raison sur le pourquoi les monarchies de la chrétienté occidentale ont assumé un “droit de conquête” sur nos nations autochtones. C’est parce que le mot de “conquête” masque avec succès une affirmation de droit de domination. Les monarchies de la chrétienté avaient pour but de priver nos nations et nos peuples de notre existence libre pré-colombienne, pré-américaine. Affirmer un droit “d’acquérir” (de dominer) les terres et les ressources de nos nations, tout en appelant le résultat final une “conquête”, a fonctionné pour faire paraître la domination résultante comme légale, acceptable et légitime.

Le film “La Mission” (1986) de Roland Joffé (NdT: avec Robert de Niro et Jeremy Irons), illustre parfaitement comment les Indiens furent traités comme la propriété des colons chrétiens. Parce que les penseurs européens qui débattirent du traitement à allouer aux nations autochtones pendant le XVIème siècle cadrèrent leur discussion sur le mot de “conquête”, il y a une question que le film n’adresse pas parce que ceux engagés dans le débat ne l’adressèrent pas non plus. Est-il OK pour une nation d’envahir et de doniner une autre nation puis de déclarer que la domination qui s’en suit est une “conquête” légale ?…

Focaliser sur les prérogatives et les privilèges de la domination que les monarques d’Espagne donnèrent à Colomb, puis ajoutant le mandat (l’ordre) de domination que la pape Alexandre VI accordait aux monarques d’Espagne dans certains décrets pontificaux (NdT: les deux versions de la bulle Inter Caetera de 1493), crée une possibilité unique. Cela crée la possibilité de discuter le désir de la chrétienté et son intention de localiser et de dominer chaque région non-chrétienne de la planète, incluant la notre alors que nos ancêtres vivaient libres de toute domination de la part de la chrétienté.

Les soutiens de l’empire chrétien utilisèrent la religion chrétienne comme justification de leur effort de triompher sur les “païens” (non chrétiens) afin de subjuguer, profiter et engraisser leurs économies des milliards d’acres des terres et ressources “paiennes”. La décision légale dans l’affaire Johnson contre M’Intosh a émergé de cette idéologie chrétienne et de ce comportement de domination.

Le juge de la CS John Marshall a exprimé cette idée lorsqu’il écrivit au sujet de “L’extravagante prétention de convertir la découverte d’un pays habité [par des païens] en conquête.” (c’est à dire en domination). Voici un point bizarre à cause de la manière dont fonctionne les précédents légaux, à ce jour nos peuples et nations sont toujours définis dans la loi états-unienne comme des “païens”, des “infidèles” et des “sauvages barbares” légalement et justement dominés.

Le chef de la nation Yakama Joe de Goudy est le seul leader élu (NdT: par le truchement de la loi fédérale indienne instituant les “conseils de tribus” élus, système asservi à l’état colonial n’ayant aucune valeur ni reconnaissance légales aux yeux des conseils traditionnels natifs… Il en va de même au Canada) que je connaisse qui a soulevé le problème de la domination des nations autochtones avec des hauts-fonctionnaires du gouvernement fédéral, ainsi que de son inévitable corollaire: la déshumanisation. Jusqu’ici, aucun autre responsable élu des nations natives n’identifie explicitement le système de la loi fédérale indienne comme un système de domination malgré que nous soyons capables de retracer ses origines jusqu’au Vatican, ses bulles pontificales et les chartes royales d’Angleterre.

Par le moyen de Johnson contre M’Intosh et de ses progénitures, les Etats-Unis ont utilisé de tels documents contre nos peuples et nations pendant des générations. D’autres leaders des conseils élus se doivent de rejoindre le chef Goudy pour pointer du doigt l’illégitimité des Etats-Unis dans son affirmation de très longue durée d’un droit de domination sur nos peuples et nos nations autochtones.

Résistance au colonialisme: La dictature de la pensée occidentale à l’origine des lois coloniales toujours en vigueur (Steven Newcomb)

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A lire, la version PDF de « Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte »
(Steven Newcomb, 2009, traduction de larges extraits par Résistance 71)

Pour mieux comprendre la notion de pouvoir et de justice dans le paradigme autochtone: « Un manifeste indigène » (Taiaiake Alfred)

 

L’esprit de l’homme blanc est à l’origine de la soi-disante loi fédérale indienne

 

Steven Newcomb

 

28 juin 2017

 

url de l’article original:

https://indiancountrymedianetwork.com/news/opinions/mind-white-man-origin-us-federal-indian-law/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

“Remonter à l’origine de la loi fédérale indienne est une tâche difficile.” – Felix S. Cohen

La loi est un pur produit de l’esprit humain.” – Steven L. Winter

Les concepts et les idées qui constituent la loi fédérale indienne américaine sont issus de là où toutes les idées ont leur origine, dans l’esprit humain. Mais pas n’importe quels humains ont créé ces concepts. Nos ancêtres indigènes n’ont pas créé les idées appelées aujourd’hui la “loi fédérale indienne”. Les descendants des colons européens créèrent les idées que vous lirez si vous prenez par exemple The Handbook of Federal Indian Law, de Felix Cohen. Je ne vois pas très bien pourquoi Cohen a eu des difficultés a comprendre un point clef: l’origine de la loi fédérale indienne est l’esprit de l’homme blanc.

L’esprit occidental, celui de l’homme blanc, a créé les idées qui ont été utilisées et continuent de l’être pour opprimer nos nations originelles. Lorsque les colonisateurs ont envahi nos territoires traditionnels, ils avaient avec eux des penseurs dont le boulot était de planifier et de comploter. Il y a eu de tels penseurs au cours des siècles. Ces esprits brillants étaient formés dès leur plus jeune âge à penser aux meilleurs moyens et pratiques pour phagocyter nos terres et territoires et pour imposer sur nos peuples et nations un vocabulaire limité et des idées qui créeraient un système de réalité dominatrice qui serait utilisé pour dominer et contraindre nos nations. Nous vivons aujourd’hui avec le résultat de cet héritage destructeur.

Nos ancêtres n’avaient pas le bénéfice de connaître en détail  la mentalité des colonisateurs. La plupart de nos ancêtres n’ont pas eu le bénéfice de pouvoir aller lire les archives des colons et, basés sur cette étude, de formuler des arguments en anglais, en français ou en espagnol/portugais, qui pourraient être utilisés pour identifier et fondamentalement défier les grands silences des colonisateurs et leurs assomptions les plus profondément cachées.

Lorsque les membres de nos familles furent forcés, enfants, dans les pensionnats blancs de la domination, la pédagogie du contrôle était faite “pour tuer l’Indien et sauver l’humain en lui”. On leur a appris à imiter et à embrasser le schéma mental du “dieu bénit l’Amérique” du colonisateur plutôt que de défier ces schémas dominateurs. “L’Indien” qui était désigné pour mourir était celui qui avait le plus de chance de défier ces schémas de l’agenda colonisateur de l’homme blanc. Ainsi, le système impérialiste américain de domination voulait dévorer nos ancêtres pendant leur enfance en les forçant dans les entrailles de l’empire (les rendant ainsi colon-isé), de façon à ce qu’ils puissent être “assimilés” (digérés) dans le corps politique de l’empire et finir par vivre tranquillement dans le corps de l’empire, captifs, si on peut dire, du “ventre” de la bête.

Enfants, nos ancêtres furent forcés à incorporer les pensionnats pour Indiens dans un effort de retirer tout ce qui pourrait maintenir nos nations ensemble. Nos nations devaient être et furent démantelées en suivant les coutures. Pour la plupart, nos nations n’étaient même pas référées comme étant des nations ; au lieu de cela, on apprît à nos ancêtres de se référer à la notion de “tribu” au lieu de nation  ou à un bas-ordre de “nations tribales”. Après quelques générations, ce vocabulaire dénaturant est devenu une partie imbriquée de la fabrique même de notre existence colonisée. Nos langues, que nos ancêtres firent évoluer au cours des millénaires devaient être étouffées, suffoquées. Ceci devait se faire en ne laissant pas nos ancêtres “respirer un mot” de leur langue maternelle durant leur enfance. Un système de punition vicieux et psychologiquement endommageant tout autant que ridicule fut mis en place et appliqué à tous ces enfants qui voulaient continuer à parler leur langue maternelle, ce qui était de fait la chose la plus naturelle du monde à faire. Le plan tordu des colonisateurs était de s’assurer que nous ne serions plus capables de parler les mots, de penser ou de connaître les enseignements de nos ancêtres. Dans la plus grande des mesures, ce programme fut un succès, il n’a échoué qu’en quelques circonstances.

A cause de l’héritage de ces pensionnats de la domination, le cliché de “devoir obtenir une éducation” ne veut jamais dire d’avoir besoin d’apprendre le langage et le système de connaissance traditionnel de nos propres nations pré-américaines. Cela veut dire “vous devez obtenir une éducation d’homme blanc” en apprenant à penser de la même manière que dans le système occidental des colonisateurs, en adhérant au système de la domination fédérale sur les Indiens (érigée en “loi”). Personne n’a encore expliqué comment maîtriser et maintenir le système de domination des idées utilisé contre nos nations, est supposé les libérer.

Aujourd’hui, malgré tout ce qui s’est passé, nous avons le bénéfice de la connaissance interne [du système de domination]. Nous avons l’avantage de pouvoir lire et analyser les archives historiques de la structure de l’argumentaire de l’homme blanc ainsi que de ses processus mentaux. Nous avons la capacité d’utiliser la théorie cognitive, qui explique les opérations de l’esprit humain, d’examiner les concepts et les idées qui font et constituent le système de domination de la loi fédérale indienne américaine qui a été et continue d’être utilisé contre nos peuples et nations originels.

Le système fédéral indien de la domination des Etats-Unis assume que nos nations et nos peuples sont sujets, doivent obéir à l’esprit de l’homme blanc ; mais si nous demandons “sur quelle base assumez-vous que nos nations doivent être sujettes à l’esprit de l’homme blanc ?” La réponse qui revient en boucle est : “sur la base de l’esprit de l’homme blanc.Comment nous sommes-nous donc retrouvés dans cet imbroglio dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui ? Simple. L’esprit de l’homme blanc a été capable de construire des idées et des arguments qui ont été utilisés pour donner l’impression [l’illusion] que nos nations sont de droit, sujettes à l’esprit (NdT: et donc à la domination) de l’homme blanc. Si nous ne faisons aucun effort pour défier ce raisonnement, alors nous nous sommes simplement résignés à notre propre destinée de dominés.

Si nous nous laissons mentalement conditionner à vivre nos vies selon le schéma conceptuel de l’homme blanc, nous continuerons à être mentalement emprisonné dans ce système conceptuel, qui continuera à être appelé “la loi”. Notre rechignement à défier les activités mentales de l’homme blanc a eu pour résultat que nous traitions les idées prévalantes de l’homme blanc comme “loi”. C’est “leur loi”. Alors que nos peuples et nations commencèrent à utiliser l’anglais comme langue principale de communication avec dans le même temps nos propres langues qui étaient réprimées et effacées au sein des pensionnats pour Indiens, nous internalisions dans nos esprits les assomptions très dominatrices qui sont toujours utilisées aujourd’hui pour dénaturer et retirer leur pouvoir à nos nations.

Nous avons besoin d’une approche différente et d’un genre différent de conversation au sujet du système de la loi fédérale indienne de domination, une approche qui questionne et défie la plus basique des assomptions qui dit que nos peuples et nations sont sujets à l’esprit de l’homme blanc par le simple fait que celui-ci a pensé de telle façon et parce qu’il l’a affirmé sur la base de la doctrine chrétienne de la découverte et de la domination.

« Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte » (Version pdf gratuite) Steven Newcomb

Posted in actualité, altermondialisme, canada USA états coloniaux, colonialisme, documentaire, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, ingérence et etats-unis, militantisme alternatif, pédagogie libération, politique et lobbyisme, politique et social, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , on 8 janvier 2017 by Résistance 71

 

Résistance 71

 

8 janvier 2017

 

Nous avions traduit et publié il y a quelque temps, de larges extraits du livre de Steven Newcomb, Shawnee, co-fondateur de l’Indigenous Law Institute / Institut Légal Indigène: « Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte » (Fulcrum, 2008) en 4 parties sur ce blog.
Jo de JBL1960 nous en a fait une très belle version .pdf unifiée que nous vous livrons ici en primeur.

Pour comprendre les véritables dessous du colonialisme chrétien occidental dont les racines profondes se situent au XVème siècle avec des décrets pontificaux qui ont été depuis insérés en filigrane dans les décisions de justice de la Cour Suprême des Etats-Unis et du Canada ; et par-là même pour bien analyser pourquoi nous ne vivons en aucun cas dans un monde dit « post-colonial » et finalement comprendre pour mieux agir contre l’empire actuel anglo-américain, géré par la corporation tentaculaire de la City de Londres et sa succursale de Wall Street.
L’empire américain est un empire sans terre pour la première fois dans l’histoire et pour le faire s’écrouler, il suffit de lui retirer le tapis de la propriété et de sa « loi de la terre » factice et inventée de toute pièce, de dessous les pieds.
Un empire sans terre est un empire à terre !… Les nations indigènes du contient le savent bien et agissent en conséquence pour retrouver leur souveraineté et liberté originelles bafouées et usurpées par la cupidité coloniale européo-chrétienne.

A lire et diffuser sans modération…

Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte 

(Version française en PDF)

Résistance au colonialisme: Steven Newcomb rencontre le pape François à Rome dans le cadre de la remise de la déclaration de la Longue Marche sur Rome…

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Face à face avec le pape François 1er pour la révocation de la bulle pontificale Inter Caetera

Steven Newcomb

6 Mai 2016

url de l’article original:

http://indiancountrytodaymedianetwork.com/2016/05/06/face-face-pope-francis-get-inter-caetera-papal-bull-revoked-164399?page=0%2C0

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

Le 4 Mai 1493, le pape Alexandre VI (NdT: Rodrigo Borgia, père de Cesare et Lucrèce Borgia…) a émis la bulle pontificale Inter Caetera qui appela les nations non-chrétiennes à être réduites et subjuguées (“barbare nationes deprimantur”). Le 4 Mai 2013, 200 ans après que notre grand leader Shawnee Tecumseh fusse tué sur le champ de bataille le 5 Octobre 1813, la Dr Debra Harry (nation Paiute), Sharon Venne (nation Cree, traité 6) et moi-même, avons vu deux parchemins originaux de la bulle pontificale aux archives générales des Indes occidentales de Séville en Espagne.

Le 4 Mai 2016, j’ai eu la très rare opportunité de demander en personne, sur la place St Pierre de Rome, au pape de révoquer formellement ce document. Nos plus de 20 ans d’effort pour faire révoquer ce décret pontifical en tant que document représentatif d’une série de documents, n’est pas du tout un pas vers ce qui a été appelé à tort une “réconciliation”, mais vers une décolonisation et une rectification. C’est une action visant à mettre fin au système de domination linguistique que le pape Alexandre VI a dirigé contre nos ancêtres non-chrétiens, nos nations originelles libres et qui fut un langage et un héritage de dévastation et d’oppression qui perdurent à ce jour.

D’après l’utilisation du concept de la “Terre-Mère” par le pape François dans sa déclaration encyclique “Laudato Si”, dans sa déclaration de contrition en Bolivie sur le traitement terrible enduré par les nations originelles et infligé par l’église catholique et d’autres forces coloniales, ainsi que dans ses appels variés pour la réforme, le pape François est le parfait candidat pour une révocation de la série de bulles pontificales de domination. L’archevêque Silvano Tomasi du Conseil Pontifical pour la Justice et la Paix a rencontré notre groupe durant deux heures, une délégation très variée de nations originelles qui se sont réuni pour l’évènement de la Longue Marche sur Rome afin d’y discuter de l’appel toujours en cours pour la révocation des bulles pontificales, démarche qui commença avec l’Institut Légal Indigène et ses efforts en ce sens dès 1992. La Longue Marche sur Rome s’est terminée à Florence et à Rome du 30 Avril au 4 Mai 2016.

Après avoir dit une brève prière dans notre langue Lenape, j’ai dit au pape: “Pape François voici un livre que j’ai écrit au sujet de la bulle pontificale Inter Caetera du 4 Mai 1493 (NdT: “Païens en Terre Promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte”, dont nous avons traduit de très larges extraits que l’on peut lire ici...). Aujourd’hui il y a 523 ans depuis que ce document a été publié, appelant pour la domination de nos nations originelles et des peuples de l’Île de la Grande Tortue ainsi que toutes les autres nations non-chrétiennes sur la planète. Ce document pontifical a été très destructeur pour nos nations et nos peuples depuis plus de cinq siècles. Nous vous appelons à révoquer formellement ce document afin que vous puissiez libérer l’esprit de cette énergie négative que le Vatican a placé sur nous.” Le pape François a répondu: “Je vais le lire.” J’ai poursuivi: “Merci. Voici une déclaration que nous avons compilée. Je vous remercie grandement d’avoir accepté de nous rencontrer.”

Cela fait 24 ans que Birgil Kill Straight, un chef traditionnel de la nation Oglala Lakota et moi-même avons commencé notre effort de voir la bulle pontificale révoquée. Birgil avait arrangé pour que nous voyagions avec des alliés italiens dans une tournée conférencière dans les villes du nord de l’Italie. Maintenant nous avons formellement délivré cet appel à la révocation directement au cœur et à l’esprit du pape François, qui a choisi son nom de pape en honneur de St François d’Assise, quelqu’un qui s’identifiait avec révérence à la nature et aux animaux.

Birgil et moi sommes allés à Assisi en Italie vers le milieu des années 1990, lorsque Birgil fut approché pour faire partie d’une équipe de rédaction du préambule de la Charte de la Terre. Il fut invité par le père polonais Perzywozny à s’assoir avec d’éminents universitaires de cette équipe de rédaction. Birgil amena avec lui un essai qu’il avait écrit au sujet des cérémonies traditionnelles Oglala ainsi que leur spiritualité. Il expliqua par implication que l’église catholique n’avait pas réussi dans sa tentative de détruire la langue et les traditions cérémonielles du peuple Oglala Lakota et que par le moyen de ces deux aspects de leur existence, ils communiquaient toujours avec les animaux tout comme il est dit que St François d’Assise le faisait. Le père Perzywozny fut très peu réceptif à ce message, mais les scientifiques eux ne le furent pas, tant ils comprenaient la condition délabrée dans laquelle se trouvait et se trouve toujours notre Terre-Mère et Ô combien important sont devenus les enseignements centrés sur le respect de la Terre. De là Birgil s’en fut au Vatican où il y rencontra le pape Jean-Paul II.

Dans son encyclique Laudato Si (lettre encyclique sur la maintenance de notre maison commune), le pape François a déclaré: “Bien qu’il soit vrai que nous, chrétiens, avons certaines fois mal interprêté les écritures, nous devons de nos jours rejeter la notion que notre être créé à l’image de dieu et à qui fut donné la domination sur terre justifie une domination absolue sur toutes les autres créatures.Il n’y a pas de meilleur exemple de l’affirnation par l’église que la chrétienté possède le droit absolu de domination sur les non-chrétiens que le phrasé trouvé dans les bulles du pape Nicolas V. Il y exhortait le roi Alphonse du Portugal “d’envahir, de capturer, de vaincre, de subjuguer tous les sarazins, païens et ennemis du christ et de réduire leurs personnes en perpétuel esclavage ainsi que de saisir tous leurs biens et propriétés.” Les bulles pontificales de 1493 contiennent le même type de langage et de système de domination et de déshumanisation. Elles utilisent les mots d’empire, de domination, de subjugation, de réduction et nous vivons toujours aujourd’hui sous les effets et circonstances drastiques de cet horrible système sémantique.

Nous avons proposé à l’archevêque Tomasi qu’une conférence internationale se tienne ayant pour trait un dialogue continu spécialement focalisé sur les thèmes de la domination et de la déshumanisation, ainsi que l’examen détaillé du langage de domination employé dans les bulles pontificales en question. Je lui ai dit “sauf votre respect, il y a beaucoup de votre histoire que vous ne connaissez pas.Je lui ai demandé s’il avait déjà lu les bulles pontificales auxquelles nous faisons référence. Il a dit que non . Je l’ai alors informé en grand détail de la nature de ces documents.

J’ai dit à l’archevêque Tomasi qu’une fois que ces idées et comportements ont été institutionnalisés en lois et politiques, l’Église ne peut simplement plus évoquer le concile de Vatican II par exemple et ne pas regarder en arrière et prendre responsabilité pour les ruines laissées dans le sillage de ces bulles pontificales de la domination. Aussi que l’Institut de Droit Indigène est concerné, ce travail n’est pas au sujet de la “réconciliation”, un euphémisme du système sémantique de domination pour parfaire et continuer le but des colons de nous assimiler et de nous incorporer dans leur corps politique de l’État. Les bulles pontificales et la domination des pensionnats pour Indiens (NdT: à la fois aux Etats-Unis et au Canada), ont eu pour intention de nous incorporer et de nous absorber dans leur système colonial. Les bulles démontrent un mensonge de base trouvé dans le concept de “vérité et réconciliation”: Les archives historiques ne montrent aucune “bonne relation” ou “amitié préalable” avec les oppresseurs devant être restaurées. Ainsi, sous la surface, réside la signification cachée de la “vérité et du mensonge”.

Ce travail et cette démarche sont à propos de la libération de nos nations et de nos peuples des schémas comportementaux et d’un système sémantique de domination. C’est au sujet de la restauration et de la cicatrisation de nos nations et de nos peuples fondées sur notre amour et la connexion spirituelle à la terre, nos langues, nos endroits sacrés et cérémonieux et notre existence originale libre et indépendante en tant que nations remontant bien avant la notion même du temps occidental.

Résistance au colonialisme: Quand une petite trahison sémantique a de grandes conséquences coloniales (Steven Newcomb)

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Les nations amérindiennes luttent contre le terrorisme depuis 1492…

~ Résistance 71 ~

 

L’héritage: Les pensionnats américains de la domination et le vote des autochtones

Steven Newcomb

25 Avril 2016

url de l’article original:

http://indiancountrytodaymedianetwork.com/2016/04/25/legacy-us-boarding-schools-domination-native-vote

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Dans son “Doubts About Voting? Just Think Montana, »
le journaliste Mark Trahant, Shoshone-Bannock, dit: “Les électeurs amérindiens sont enregistrés pour voter dans l’état du Montana à un ratio plus important que tout autre groupe ethnique.” Ainsi, il échoue totalement à nous classifier comme appartenant à des nations autochtones distinctes des Etats-Unis d’Amérique ; il nous définit en revanche comme un “groupe ethnique” parmi la multitude de groupes de la sorte existant aux Etats-Unis.

L’article de Trahant nous rappelle une phrase du président Obama invoquée lors d’une réunion des leaders des nations natives indiennes à la Maison Blanche: “E Pluribus Unum”, qui en latin veut dire “Unité dans la multitude”. Parce que les Etats-Unis furent fondés comme l’empire américain (Richard Van Alstyne, The Rising American Empire, 1962), la phrase est en fait plus précisément: “E Pluribus Unum Imperium”, c’est à dire “de la multitude à l’unicité d’un empire”. Un “imperium” légal note René Maunier dans son livre “La sociologie coloniale”, volume 1, 1942, est “une domination ou une subjection au sens propre”. Maunier observe plus loin: “Lorsque nous parlons du pouvoir qu’un État exerce, nous pourrions impliquer une réelle domination” (Ibid).

L’Imperium, ou empire américain, comme l’ont conçu George Washington, James Madison, John Marshall et bien d’autres, a travaillé sans relâche pour diminuer et éventuellement mettre un terme à l’existence de nos nations et peuples originels sur ce continent. Lorsque des écrivains/journalistes autochtones décident d’écrire au sujet de notre appartenance à quelque “groupe ethnique” des Etats-Unis (de l’empire américain), ils jouent directement la main de l’agenda anti-nation native qui remonte à la fondation même des Etats-Unis. Cela a été un objectif de longue durée pour cette entité de mettre un terme à toute velléité de conscience nationale de nos nations autochtones et de la remplacer par la conscience nationale des Etats-Unis.

Les preuves de la guerre états-unienne contre nos nations originelles afin de nous garder sous le joug et de nous détruire, abondent. Une telle preuve est par exemple trouvée dans le rapport annuel d’Ely Parker, haut-commissaire aux affaires indiennes, qui fut publié le 23 décembre 1869. Une partie de ce rapport s’adresse à l’élaboration de traités entre les Etats-Unis et les nations indiennes, une chose que Parker tend à ridiculiser.

Parker était un Seneca (NdT: membre de la Confédération des 6 Nations Iroquoises, Haudenosaunee) qui est devenu plus dévoué apparemment aux Etats-Unis qu’aux nations autochtones. Il devint un général de l’armée nordiste lors de la guerre de sécession et un avocat dans le système légal de l’homme blanc. Il a servi de haut-commissaire en chef aux Affaires Indiennes de 1869 à 1871. Parker écrivit ce qui suit comme négation de toute idée de nationalité/nation indienne:

“Les tribus indiennes des Etats-Unis ne sont pas des nations souveraines capables de faire des traités car aucune d’elles n’a un gouvernement organisé ayant un pouvoir et une force inhérente tels, que cela sécuriserait une fidèle observation des composants de ce caractère. Elles sont tenues pour être pupilles du gouvernement des Etats-Unis et le seul titre que la loi leur concède envers la terre qu’ils occupent est à peine celui de la possession.”

Parker épousait bien évidemment la vision que les nations indiennes ne sont pas des nations souveraines parce qu’elles ne possèdent ni la force politique, ni la force militaire pour forcer les Etats-Unis à se plier aux accords de traité que les Etats-Unis avaient juré de suivre. Le commissaire Parker dit plus loin:

“Mais, parce que ces traités ont été faits avec elles, généralement en vue de l’extinction de leur supposé titre absolu de propriété de la terre qu’ils habitent, ou sur laquelle ils èrent, elles ont reçu la fausse impression de la notion d’indépendance nationale.”

Aujourd’hui, l’idée d’indépendance nationale pour les nations indiennes, c’est à dire “un désir d’exister indépendamment de la domination politique des Etats-Unis”, semble être la chose la plus éloignée dans l’esprit de bien des autochtones.

En 1882, une décennie après la déclaration de Parker sur les traités avec les Indiens, un autre haut-commissaire aux Affaires Indiennes, Hiram Price, se fit l’avocat “d’utiliser des sociétés religieuses à des fins régulières et missionnaires parmi les Indiens”. Il proposa d’utiliser ces sociétés religieuses:

Pour le plus haut et noble but d’aider ces gens sans tuteurs et non-civilisés vers une plus haute et meilleure place dans l’existence. Il n’y a pas d’autre façon ni d’autre moyen, à mon avis, pour que notre population indienne soit rapidement et de manière permanente récupérée et sauvée de la barbarie, de l’idolâtrie et de la vie sauvage, que par les opérations éducatives et missionnaires du peuple chrétien de notre pays (Prucha, p.157).

En 1889, un an avant le massacre du chef Big Foot et de son peuple Hunkpapa à Wounded Knee, Thomas J. Morgan, commissaire aux Affaires Indiennes, introduisit une nouvelle politique indienne. Morgan lança ce que je nommerais une forme de guerre psychologique faite pour assimiler les enfants indiens dans la mentalité de la société (coloniale) dominante. Il appela cela “l’inculcation du patriotisme dans les écoles pour Indiens”. Le mot “inculquer” remonte au sombre mot “calcare” ou “marcher sur, piétiner”. Cela veut généralement dire “enseigner ou imprégner par de fréquentes répétitions”. Par un tel processus, a dit Morgan “les Indiens sont destinés à être absorbés dans la vie nationale, non pas comme Indiens, mais comme Américains.” Morgan annonça que:

Sur le campus de toutes les écoles les plus importantes devra être érigé un poteau pour les couleurs sur lequel flottera, lorsque la météo est bonne, le drapeau américain. Dans toutes les écoles quelques soient leur taille et leur caractère, soutenues totalement ou partiellement par le gouvernement, la “bannière étoilée” devrait être un objet familier et les élèves seront enseignés de respecter le drapeau comme symbole de la puissance et de la protection de leur nation.

La grande poussée pour “le vote autochtone” dans les élections américaines m’a frappé quant au succès sur le long terme, du plan américain de laver le cerveau des enfants indiens avec ce moyen du patriotisme envers les Etats-Unis et afin de retirer de nos nations autochtones originelles toute conscience nationale en relation de ce que nous sommes. Aujourd’hui, le vote autochtone en “pays indien” est une conséquence directe de la guerre psychologique qui a été engagée contre nos ancêtres lorsqu’ils étaient enfants dans les pensionnats américains de la domination coloniale. L’indépendance originelle et l’existence politique de nos nations indigènes sont ignorées de manière routinière en faveur du vocable péjoratif de “tribus” et de “tribal” ; nos propres frères nous caractérisent d’une manière subordonnée en nous qualifiant de n’être qu’un “groupe ethnique” des Etats-Unis, ceci en parfaite adéquation et continuité de la politique de Parker ; de fait le drapeau américain est souvent traité comme s’il était le drapeau de toutes nos nations natives de cette terre.

Les Amérindiens votant dans les élections américaines en tant “qu’Américains” avait été prédit par le commissaire Morgan lorsqu’il écrivit: “Les Indiens sont destinés à être absorbés dans la vie nationale, non pas en tant qu’Indiens mais en tant qu’Américains.” Le “vote autochtone” crée la fausse impression que nous avons donné notre consentement libre à l’adhésion au système américain de domination qui nous a été et nous est toujours imposé, à nous, nos peuples et nos nations.

Lutte anti-coloniale: Décoloniser la loi fédérale indienne (Steven Newcomb)

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Que devons-nous faire ? Décoloniser la loi fédérale indienne

 

Steven Newcomb

 

8 Mars 2016

 

url de l’article original:

http://indiancountrytodaymedianetwork.com/2016/03/08/what-shall-we-do-decolonize-us-federal-indian-law

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Le documentaire “The Doctrine of Discovery: Unmasking the Domination Code,” réalisé par Sheldon Wolfchild (Dakota), nous raconte une puissante histoire. Sheldon et moi-même avons créé ce documentaire sur la base de mon livre Païens en terre promise: décoder le doctrine de la découverte”, Fulcrum, 2008 et sur d’autres recherches que j’ai commencées à lire avec les livres de Vine Deloria Jr durant mes années adolescentes au début des années 1970.

Après que les audiences aient visionné le documentaire, elles ont tendance à demander “que pouvons-nous faire ?” A chaque fois qu’on me demande cela ou une autre question similaire, je pense toujours à combien il sera difficile de changer les attitudes, les valeurs et les croyances de la société dominante états-unienne en relation avec nos nations autochtones. Cela est bien plus vite dit que fait. Ce n’est pas comme si le respect pour nos nations puisse être légiférer en existence par exemple.

Toutes les audiences qui regardent “La doctrine de la découverte” sont introduites à un schéma de reconnaissance auquel j’ai travaillé depuis le début de mes recherches. En résultat, le film permet aux gens de voir, de constater les schémas mentaux et comportementaux de la domination chrétienne que l’on peut tracer jusqu’aux documents pontificaux du Vatican datant du XVème siècle et que ceux-ci sont toujours utilisés contre nos peuples et nations originels. Apprendre à reconnaître de tels schémas est très important parce que, comme le dit le dicton, savoir c’est pouvoir. Les personnes qui veulent que les Etats-Unis arrêtent d’utiliser la doctrine de domination ancrée dans la chrétienté contre nos nations ont besoin de savoir pourquoi il est important pour tout le monde sur notre Terre-Mère de défier le “droit” assumé de dominer les autres.

The Doctrine of Discovery: Unmasking the Domination Code,” montre pourquoi lorsque les hauts-fonctionnaires du gouvernement américain clâment que nos ancêtres “avaient besoin de la civilisation humaine et chrétienne”, ils appelaient en fait pour la domination de nos nations et nos peuples. Les spectateurs du documentaire sont informés que le terme “civilisation” dans ce contexte implique “le passage en force d’un schéma culturel particulier sur une population étrangère” Le mot “passage en force” démontre ici que ce processus implique une certaine forme de coercition et de domination. Comme contre-mesure, je m’assure que le docmentaire parle de nos nations comme celles “originelles et toujours libres de droit de ce continent” de l’Île de la Grande Tortue (Amérique du Nord). En d’autres termes et ce malgré les dires des Etats-Unis et d’autres pays (NdT comme le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et tous les pays d’Amérique Latine…), nos nations continuent d’être libres de droit de toute doctrine de domination imposée par la doctrine chrétienne de la découverte.

Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles nos audiences sont particulièrement choquées au visionnage de ce documentaire La Doctrine de la Découverte. Le film leur enseigne à “voir” les assomptions déshumanisantes qui furent et sont toujours acceptées, comme la vision du pape et autres monarques chrétiens d’avoir “un droit divin” de donner aux monarques chrétiens un “droit” à la domination sur nos nations originelles et sur nos territoires. Le film montre à quel point de telles attitudes ont souvent résulté en des massacres indiscriminés de nos ancêtres, hommes, femmes, enfants, vieillards et même les nourrissons et eurent pour effet direct l’enrichissement éhonté des sociétés chrétiennes qui écrasaient, volaient et pillaient nos territoires nationaux.

Le droit assumé se fondant sur la Génèse de la Bible 1:28, qui dit de subjuguer et de dominer, tout en essayant dans l’ensemble d’éliminer nos peuples et nations par le moyen d’actes génocidaires, fut basé sur certaines comparaisons métaphoriques faites par le monde chrétien. Les chrétiens virent nos nations comme “paiënnes” et “infidèles” ainsi que “barbares”, ainsi donc “sous-humaines”. Ils comparèrent même nos ancêtres à des “bêtes” (bestias en espagnol). Le monde chrétien pensa les territoires de nos nations comme étant dénués du christianisme et donc en cela, en grand besoin de la “civilisation” chrétienne et de sa domination.

De tels schémas de pensée et d’attitude résultèrent des suppositions sur ce que les empires chrétiens puis américain, alors qu’ils procédaient à leurs expansions coloniales hors d’eux-mêmes et au travers du continent des Amériques, avaient parfaitement le droit d’exercer une domination de base chrétienne sur nos peuples et nos nations. Les autochtones qui se considèrent aujourd’hui comme chrétiens pourraient bien vouloir me questionner métaphoriquement alors que je caractérise nos nations comme “païennes”. Prenez la nation Cherokee par exemple, elle pourrait bien dire qu’une fois le christianisme embrassé et adopté, on ne peut plus être considéré comme “païens” correct ? Faux.

Le documentaire “The Doctrine of Discovery” montre que pour que la doctrine de la découverte et sa domination ne s’appliquent pas à nos nations, il aurait fallu qu’elles soient des nations chrétiennes AVANT l’arrivée invasive des chrétiens européens. Les terres qui n’étaient pas déjà habitées par des chrétiens lorsque les chrétiens arrivèrent comme force coloniale étaient bien sujettes à l’affirmation par le monde chrétien d’un droit biblique de subjuguer la terre et de dominer tous les êtres vivant dessus. D’après la doctrine de la domination chrétienne, vous ne pouvez pas devenir chrétien après l’arrivée des chrétiens et utiliser cela pour que votre nation échappe au droit de domination chrétien. Votre adhésion à la chrétienté n’aura pas d’effet rétroactif, parce qu’en tant que non-chrétien, vous étiez considéré par le monde chrétien comme “nullus”, “nul et non avenu”. Le documentaire “The Doctrine of Discovery: Unmasking the Domination Code” fait reconnaître ces schémas de fonctionnement.

Réflexion faite, quoi de plus clair que le fait que chacune de nos nations autochtones puisse tracer son existence à un temps bien antérieur à celui où les chrétiens ont envahi ce continent ? Qui a t’il de plus clair que le fait que les hommes blancs qui ont siégé dans la Cour Suprême de l’état initialement, aient mentalement créé et imposé certaines idées métaphoriques sur nos nations, des idées qui font que le gouvernement fédéral des Etats-Unis (NdT; et du Canada) assume maintenant que nos nations libres de droit sont obligées d’accepter et d’obéir à la domination qu’on leur inflige ? Le documentaire argumente sur le fait que nous ayions besoin de rejeter de telles affirmations de domination qui sont toujours imposées contre nos nations sur la base de la “supériorité” et de “l’ascendance” chrétienne sur notre culture.

Lorsque le juge de la CS des Etats-Unis John Marshall a dit que ceux-ci avaient adopté le principe du “peuple chrétien” en appliquant le “droit à la découverte” de terres qui étaient habitées par des “païens”, lui en tant que juge, la CS unanime dans sa décision en tant que corps constitué et le gouvernement fédéral des Etats-Unis ont alors mis en application un contexte biblique et une forme de raisonnement contre nos peuples et nos nations originels. Ce schéma biblique de raisonnement au sujet des nations “païennes” non-chrétiennes n’ayant seulement qu’un “droit d’occupation des sols” et une indépendance “dimininuée”, est devenu un précédent établi de la Cour Suprême des Etats-Unis en résultat du verdict de l’affaire Johnson contre M’Intosh en 1823, que le gouvernement des Etats-Unis commença à imposer sur nos nations il y a cent quatre-treize ans.

The Doctrine of Discovery: Unmasking the Domination Code” est un documentaire qui démontre que nous avons grandement besoin de rejeter l’imposition des Etats-Unis de pensée biblique sur nos nations originelles. Maintenant que feu le juge Antonin Scalia se doit d’être remplacé à la CS, il sera nécessaire au président Obama ou son successeur de nommer un nouveau juge sur le banc. Lorsque confirmé(e), il ou elle sera attendu(e) de prendre des décisions au sujet de nos nations autochtones, utilisant la tradition américaine telle que celle de la “subjugation”, de “l’occupation simple des sols”, de la “conquête”, “conquérir”, “pouvoir plénier” et bien plus encore et ce toujours sur se fera sur cette base de la doctrine chrétienne de la découverte et de la domination.

Résistance politique: La forfaiture de la propriété comme droit de domination despotique…

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, militantisme alternatif, pédagogie libération, philosophie, politique et social, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , on 17 janvier 2016 by Résistance 71

« La propriété c’est le vol »

« La propriété est impossible car elle est la négation de l’égalité. »

~ Pierre Joseph Proudhon ~

 

La propriété comme droit de domination despotique

 

Steven Newcomb

 

12 Janvier 2016

 

url de l’article original:

http://indiancountrytodaymedianetwork.com/2016/01/12/property-right-despotic-dominion

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

En 1776, un propriétaire d’esclaves blanc aristocrate de Virginie nommé Thomas Jefferson, écrivit la déclaration d’Indépendance des Etats-Unis. Il le fit pour les treize colonies britanniques de la côte atlantique de l’Amérique du Nord qui désiraient se rebeller et se séparer de l’empire britannique qui les avait créé. Jefferson ouvrit la Déclaration d’Indépendance avec la célèbre phrase “Nous tenons ces vérités pour être évidentes…” et il exprima la première de ces vérités comme étant “tous les hommes sont créés égaux.

Parce qu’il possédait des esclaves lorsqu’il écrivit que tous les hommes sont égaux, certains pourraient concevoir Jefferson comme étant un hypocrite. Mais, d’après le “système légal” en place en Virginie à cette époque, les esclaves de Jefferson étaient sa propriété de droit. Il devait même payer des impôts sur la propriété de ses esclaves. Les esclaves étaient une forme de propriété qui en fait “ressemblaient” aux humains. Ainsi, dans l’esprit de Jefferson, les esclaves, incluant les siens, ne tombaient pas dans la catégorie des “hommes”. L’existence d’esclaves dans une société esclavagiste n’interférait aucunement avec “tous les hommes (blancs et propriétaires)” étant égaux entre eux, du moins en principe.

Faire remarquer que des esclaves comme ceux de Jefferson étaient sa propriété, mène à une question sensible: “Qu’est-ce que la propriété ?” J’ai récemment posé la question au sujet de l’idée, du concept de propriété au professeur Lance Liebman qui enseigne à la faculté de droit de l’université de Colombia (il est l’auteur du livre d’étude, “Property and Law” et a enseigné le droit pendant 45 ans). Liebman m’a donné une citation des “Commentaires” de William Blackstone. D’après lui, “la propriété est… cette seule domination despotique qu’un homme affirme et exerce sur les choses externes du monde…” Ainsi par exemple, un propriétaire d’esclaves comme Thomas Jefferson, possédait une domination despotique (un droit de domination) sur sa propriété-esclave. Pour cette raison, nous pourrions dire que l’esclavage est le modèle central ou le cas de référence de l’idée même de domination. Il fournit un prototype (meilleur exemple) de domination.

La propriété (domination despotique) a été caractérisée comme la fondation même de la “civilisation”. (NdT: la “propriété” est sanctifiée dans la plupart de tous les modèles de constitution des états dits “démocratiques”, Etats-Unis en tête…) Ceci est parfaitement sensé lorsque nous considérons que le “processus de civilisation” est un processus par lequel des “hommes” en premier lieu clâment une “domination absolue” sur une étendue géographique toujours plus grande, puis utilisent la violence et la force pour rendre la domination despotique sur cette zone géographique une expérience de la réalité.
Quelle est la raison ou le but pour l’expansion de la domination despotique ? C’est pour augmenter la richesse qui résulte de la domination (dominium, propriété). Une domination en expansion est le cadre de référence de fond pour les métaphores alors employées comme “progrès”, “avancée” et “destinée manifeste” (où la domination “divinemement destinée” fait son apparition).

La colonisation (colonialisme) est un des principaux moyens par laquelle la domination despotique est poussée de l’avant ou “avancée” sur les terres pas encore colonisées, c’est à dire “pas encore dominées”. Lorsque la société dominante caractérise les nations libres et indépendantes ainsi que leurs peuples comme étant “non civilisés, donc barbares”, elle les déclare en fait comme “n’étant pas encore dominés”, ou pas encore sous le joug de la domination despotique des colonisateurs. La colonisation et la civilisation vont la main dans la main quand nous nous rappelons que “civilisation” est définie comme “le passage en force d’un schéma culturel particulier sur une population pour laquelle ce schéma culturel est totalement étranger.” (définition du Webster’s Third New International Dictionary)

La colonisation est un des moyens de forcer un tel schéma culturel sur une population étrangère. L’historien Samuel Morison dans son The Oxford History of the American People (1965), a rendu cette image très claire. Il a défini la “colonisation” comme “une forme de conquête par laquelle une nation prend le contrôle d’un territoire lointain, y pousse ses propres gens et contrôle ou élimine les habitants natifs de l’endroit.” (p-34). Ceci décrit quelques activités impliquées dans le premier jet de l’établissement de la “domination despotique” sur des nations et des peuples vivant dans une zone qui n’a pas auparavant été soumise à une telle domination.

Ce que Morison nomme la “nation” qui s’engage dans ces types d’activités, est typiquement caractérisé comme un empire, ou un souverain (que Jonathan Havercroft appelle “un système injuste de domination qui limite la liberté humaine”). Le but de la colonisation est l’expansion de l’imperium, que Richard Van Alstyne définissait comme “un dominion, état ou souveraineté qui étendrait sa population et son territoire et augmenterait sa force et son pouvoir” (The Rising American Empire, 1960, p. 1).

Max Weber a caractérisé l’état comme “les relations d’hommes dominant d’autres hommes”. Ce qui en vient à ceci: L’histoire des Etats-Unis d’Amérique est celle du secteur de l’élite de la société US utilisant l’affirmation d’un droit de domination pour étendre la sphère d’influence de domination de l’empire américain et pour augmenter la population et le territoire devant être sous contrôle de cet empire, tout en étendant simultanément la richesse (fondée sur la domination despotique) du secteur élitiste de la société dominante des Etats-Unis.

Claus Meuller, dans son excellent ouvrage The Politics of Communication (1977), définit la domination comme “le contrôle” par “un nombre limité d’individus sur les ressources matérielles de la société” et “sur l’accès à des positions de pouvoir politique (prise de décision)” (p-129). Il fait ensuite remarquer que la légitimité “confère une autorité sur un système de domination”. La légitimité, dit Mueller, rend “justes” les décisions faites par ceux en contrôle du système de domination. Ceci ne veut pas nécessairement dire que ces décisions sont effectivement justes ; cela veut juste dire que ceux qui ont internalisé le système de domination et sa vision de légitimité verront à la fois le système de domination et ses décisions comme étant justes et bons.

Il y a ceux d’entre nous en tant que peuples indigènes natifs qui n’ont pas internalisé la logique de justification du système de domination. Parce que nous n’avons pas été socialisé de manière efficace dans le système de domination, nous sommes toujours capables de fournir ce que la société japonaise a nommé et caractérisé comme kikenshiso, ou “pensées dangereuses”, au sujet de la fondation conceptuelle du système de domination. Nous pouvons demander: “Existe t’il réellement quelque chose comme un droit valide de domination (despotisme, dominium, etc) sur nos nations et peuples originels de l’Île de la Grande Tortue (Amérique du Nord) ? Voici ma réponse: Du point de vue de l’existence préalablement libre et indépendante de nos nations natives, il n’y a en aucun cas de droit valide (légitime) à la domination, ou à la domination despotique, sur notre existence.

Resistance politique: Comprendre la domination impérialiste occidentale…

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Le modèle de domination impérialiste

 

Steven Newcomb, Shawnee/Lenape
 Executive Director, Indigenous Law Institute

 

~ Traduit de l’anglais Résistance 71 ~

 

Décembre 2015

 

Le 4 Mai 1493, le pape Alexandre VI (NdT: Rodrigo Borgia, de la dynastie Borgia et père de Cesar et Lucrèce) a émis un document pontifical connu sous le nom de bulle Inter Caetera. Le document fut émis à la demande du roi Ferdinand d’Aragon et de la reine Isabelle de Castille et dont le but était de “donner” aux deux monarques catholiques toutes les terres que Cristobal Colón (Chistophe Colomb ou “le colonisateur porteur de la croix”) avait découvertes ainsi que toutes autres terres qui seraient “découvertes” dans le futur. La seule limite du pape sur ce don fut que Ferdinand et Isabelle ne pouvaient pas tenter de s’emparer de terres qui avaient déjà été prises par un autre prince chrétien. Entre autres, le pape déclarait que cela était son désir que des nations non-chrétiennes soient subjuguées (dominées militairement) et forcée à devenir chrétiennes. Le pape voyait les monarques catholiques comme travaillant à l’expansion de “l’empire chrétien”. “Nous croyons en Lui (le dieu catholique)”, a dit le pape, “et de lui provient tous les empires, dominations et toutes bonnes choses.”

Le modèle de domination impérialiste présume qu’il est justifiable pour un souverain immigrant (disons l’Angleterre, la France, l’Espagne ou le Portugal) d’arriver dans un pays déjà habité par des nations libres et indépendantes et de simplement présumer “le droit” de prendre possession militairement de ce pays par la force et de mettre les habitants originels sous la réglementation et la loi des constructeurs d’empire. La bulle pontificale reflète un système de langage qui présume qu’il est permis pour une personne d’assumer un droit divin impérialiste et de domination sur un autre peuple.

George Washington a dit en 1786: “Il viendra sûrement un jour où ce pays aura un poids sur l’échelle des empires… et en tant que membre d’un empire juvénile… je ne peux pas détrourner mon attention de ce sujet…” clairement, lorsqu’on parle des nations et des peuples amérindiens, les Etats-Unis opèrent strictement sur la base du modèle de domination impérialiste. Le prérequis de ce modèle est la loi fédérale sur les Indiens que l’on trouve dans la décision de la Cour Suprème des Etats-Unis dans l’affaire Johnson v. McIntosh (8 Wheat., 543, 1823),, que la cour à prise en se basant sur la bulle papale Inter Caetre de 1493. Dans ce cas précis, le juge John Marshall a dit que la “découverte” des “païens” par le “peuple chrétien” a donné aux chrétiens une “domination ultime” (droit d’empire et de domination) sur les Indiens de la sorte “découverts”.

Après la “découverte” chrétienne, a dit Marshall, les droits des peuples Indiens à la “souveraineté complète en tant que nations indépendantes” ont été “diminués”. De manière supposée, les Indiens ne retinrent qu’un simple “droit d’occupation des sols”, de leurs terres ancestrales tout en étant soumis à la domination des Etats-Unis. Après avoir correctement identifié la loi fédérale indienne comme un système de langage de domination, l’Institut a commencé à travailler vers le développement d’une nouvelle base totalement inovative et radicalement différente pour penser la relation entre les Etats-Unis et les nations et peuples indiens. Nous n’acceptons pas l’idée qu’un préjugé judiciaire fondé sur un préjudice religieux (Johnson contre M’Intosh) puisse légitimement nier, refuser le droit inhérent que les nations indiennes ont de vivre librement et indépendamment sur leurs terres ancestrales. Dans un effort de gérer le fondement du modèle de domination impérialiste, nous en avons formellement appelé au pape Jean-Paul II pour qu’il révoque la bulle pontificale Inter Caetera de 1493. Nous l’avons aussi invité à nous rejoindre sur le chemin sacré en honorant le premier principe de la loi traditionnelle autochtone, celui de “respecter notre Terre-Mère et de regarder toute vie comme sacrée.” (NdT: ceci fut rédigé en 1995)

La loi traditionnelle autochtone

Au temps de la soi-disante “découverte” chrétienne, européenne des terres indiennes sur le continent des Amériques, nos nations et peuples autochtones respectifs vivaient une vie complètement libre et indépendante, de manière spirituelle, fondé sur l’intégrité de la famille, de la communauté et de la terre. Le style de vie basé sur la spiritualité de nos ancêtres ne comportaient aucun poison mortel, pas de pesticides, pas d’herbicides, pas d’organo-chlorines synthétiques et autres substances chimiques toxiques industrielles, comme aussi le plomb dans l’eau que boivent nos enfants ou des particules radiocatives qui maintenant s’éparpillent dans l’air des déserts du sud-ouest.

Tandis que certains diraient que nos ancêtres manquaient des soi-disantes “avancées technologiques” pour créer de telles choses, nous assumons que ces réalités, qui menacent directement la vie sur la planète Terre, ne sont pas du tout des “avancées” ou un “progrès”. Nous envisionnons une époque où notre façon de vivre sera une fois de plus guidée par la loi traditionnelle autochtone, de telle façon que ces poisons ne viennent plus contaminer la terre, les eaux et les systèmes immunitaires des gens.

Les modes de vie fondés sur la Terre, le spirituel de nos ancêtres, étaient de conserver les instructions originelles qui leur furent données, qu’ils reçurent il y a des milliers d’années par la tradition orale. La sagesse du monde naturel et la compréhension de nos ancêtres existent toujours dans nos langues, nos cérémonies et les endroits sacrés de nos peuple et nations respectifs. La loi traditionnelle autochtone peut-être trouvé dans la Kanaka Maoli Law des Hawaiiens natifs, dans les Sept Lois des Lakota, les 12 lois des Shawnee, les lois du Kogi etc… Mais par le mot “loi” nous parlons en fait d’une alternative conceptuelle et culturelle à la technologie et à la culture impérialiste polluée par le chimique et par le désir de domination (NdT: à commencer par celui de domination de la Nature. Pour les occidentaux, ce qui ne peut pas être contrôlé doit être détruit. La Nature doit plier aux désirs des capitalistes privés ou d’état ou être brisée et détruite. Il en va de même pour les peuples et nations libres et indépendants…). L’Institut Légal Indigène affirme que la loi traditionnelle autochtone est une source essentielle de sagesse environnementale et de compréhension de la planète aujourd’hui. Nous œuvrons pour que la pensée traditionnelle autochtone des Amériques soit reconnue comme une base, un fondement nécessaire de notre existence collective sur la planète Terre.

Résistance au colonialisme occidental: Discours de Steven Newcomb (Shawnee) à l’Assemblée Mondiale des Religions (Octobre 2015)

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« Nos nations et peuples originels n’ont pas besoin de réconciliation mais de décolonisation !… »
~ Steven Newcomb ~

 

Discours devant l’Assemblée Mondiale des Religions

 

Steven Newcomb

 

3 Novembre 2015

 

url de l’article original:

http://indiancountrytodaymedianetwork.com/2015/11/03/speech-parliament-worlds-religions

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Salt Lake City, Utah, le 19 Octobre 2015:

 

Bonjour à toutes et à tous,

Je désire rendre hommage aux nations originelles sur la terre desquelles ce bâtiment se dresse aujourd’hui. Je désire honorer les ancêtres qui ont aimé cette terre et l’ont chéri au moyen de cérémonies et de prières traditionnelles, fondées sur leur vision d’un besoin de relations sacrées avec notre terre-mère, avec ses eaux pures et limpides et avec la Vie sous toutes ses formes et manifestations. Je désire honorer l’existence originelle et libre de nos nations et de nos peuples remontant dans la nuit des temps au travers de nos traditions et histoires orales.

Hier j’écoutais avec grand intérêt la session plénière sur le changement climatique. Cela me frappa de réaliser que vouloir travailler sur le changement climatique sans travailler à un changement de paradigme serait une grave erreur. Nous avons besoin d’un changement, d’un glissement de notre attitude et de notre mentalité pour nous écarter enfin du paradigme de domination prévalent, de la déshumanisation, de la veulerie, dont les symptomes sont partout observables sur la planète terre, notre mère à toutes et à tous.

Il y a plus de cinq siècles, plusieurs papes de Rome, au nom de la chrétienté, ont lâché sur le monde ce paradigme auquel je faisais référence. Cela pourra peut-être vous surprendre d’apprendre que le modèle de domination impérialiste chrétien a été imbriqué dans les lois et les politiques des Etats-Unis d’Amérique ainsi que dans les lois et les politiques de bien des pays comme par exemple le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Ce code caché de l’empire chrétien (NdT: héritier de l’empire romain) a œuvré pendant plus de cinq siècles vers la dissolution de nos nations originelles sur l’Île de la Grande Tortue (Amérique du Nord) et Abya Yala au Sud.

Les schémas d’idée de domination et la soi-disante découverte chrétienne ont été écrits par des juristes dans la loi fédérale indienne elle-même, où ils demeurent jusqu’à ce jour. Ces idées remontent à des documents pontificaux datant du XVème siècle et aux chartes royales d’Angleterre qui affirmèrent le droit à la domination contre des terres non-chrétiennes, “qui furent inconnues de tous les peuples chrétiens avant cette période”. En 1823, la Cour Suprême des Etats-Unis sanctifia le schéma de la doctrine chrétienne de la découverte et de la domination avec sa décision dans l’affaire Johnson & Graham’s Lessee contre McIntosh.

Nous pouvons remonter ce schéma d’idées à l’année 1452 lorsque le pape Nicolas V dans son édit/bulle Dum Diversas, dirigea le roi du Portugal à se rendre sur la côte ouest africaine et partout en terres non-chrétiennes afin “d’envahir, de capturer, de vaincre et de subjuguer”… “tous les sarrasins, païens et autres ennemis du Christ”, “de réduire leurs personnes en esclavage perpétuel” et de “s’emparer de tous leurs biens, propriétés et possessions”. Plusieurs décrets pontificaux ou bulles furent émis en 1493 par le pape Alexandre VI (NdT: Rodrigo Borgia), qui appellèrent à la propagation et l’expansion de l’empire chrétien, imperii Christiani en latin, et appelaient à ce que les “nations barbares” soient subjuguées à la foi et religion chrétiennes. En marge de ceci mais connecté, le 4 Mai 2013, 520 ans après la publication de la bulle papale de Mai 1493, je me suis rendu avec deux de mes amis: Dr Debra Harry de la nation Paiute et l’avocate Sharon Venne de la nation Cri, munis d’une autorisation spéciale aux archives espagnoles des Indes Occidentales se tenant dans la ville de Séville en Espagne pour y consulter deux documents papaux parchemins velum. Le secrétaire royal de l’époque avait fait une annotation particulière au dos d’un des parchemins, stipulant que le document était une concession du pape Alexandre VI pour “ganaran y conquistaron de las Indias.” Ou en français: “gagner et conquérir les Indes”. En d’autres termes, ceci était une concession de domination.

Notre documentaire “The Doctrine of Discovery: Unmasking the Domination Code,” basé sur mon livre Pagans in the Promised Land: Decoding the Doctrine of Christian Discovery, Fulcrum, 2008, met sous les feux de la rampe les schémas de déshumanisation impliqués dans l’affirmation du droit de la découverte chrétienne et de la domination sur des terres peuplées de soi-disants païens, infidèles et peuples non-baptisés. Ceci est un point d’attention sur lequel nous nous concentrons depuis plus de 20 ans à l’Institut de Droit Indigène (Indigenous Law Institute, dont Steven Newcomb est le co-fondateur)

Mon ami et mentor Birgil Kills Straight est un leader spirituel de la nation Oglala Lakota (Sioux). En 1992, lui et moi avons fondé l’Indigenous Law Institute. En 1993, nous avons participé à l’assemblée des religions mondiales à Chicago. Birgil y parla des Sept Lois Spirituelles des Oceti Sakowin et nous parlâmes de ces bulles pontificales. Nous avons fait part à la communauté mondiale de notre campagne d’appel au pape Jean-Paul II à la répudiation du décret/bulle Inter Caetera de 1493. Notre campagne contre le paradigme de domination et de déshumanisation ainsi que leur institutionalisation dans les lois et les politiques, continue aujourd’hui avec la papauté de François 1er.

Mesdames et messieurs, j’aimerai avoir plus de temps pour approfondir plus en détail, mais devant le peu de temps qui m’ait imparti, je vous laisserai sur cette réflexion: En 1954, le ministère de la justice des Etats-Unis envoya une ordonnance à la Cour Suprême des Etats-Unis, dans laquelle il fut argumenté que les Indiens Tee Hit d’Alaska ne méritaient aucune compensation financière pour la prise du bois sur leurs terres parce que “les nations chrétiennes d’Europe avaient découvert ces terres de païens et d’infidèles”. En 1955, l’année de ma naissance, la Cour Suprême tomba d’accord avec cette argumentation, se référant au Elements of International Law de Henry Wheaton dans lesquels il disait ceci: “Les nations païennes des quatre coins du monde furent les proies, les récompenses et le butin légaux de leurs conquérants civilisés.” Ce schéma de domination chrétienne fut une nouvelle fois soutenu par une décision de la Cour Suprême des Etats-Unis en 2005 dans son rendu de l’affaire City of Sherrill v. Oneida Indian Nation of New York.

Je désire conclure en disant qu’il est grand temps pour les chrétiens et les églises qui pratiquent cette déshumanisation qu’il faut arrêter de mentir au sujet de nos cérémonies traditionnelles. Ils doivent arrêter de dire à notre jeunesse et aux autres, que nos cérémonies sont sataniques ou l’œuvre du diable. Ceci tue bon nombre de nos jeunes qui, privés de leur identité spirituelle et culturelle et dans le sillage du traumatisme généré par les programmes de pensionnats de la domination pour Indiens (aux Etats-Unis et au Canada), mettent prématurément fin à leur vie.

De plus, les gouvernements et les églises doivent commencer à consacrer du temps et des efforts, de l’énergie et de l’argent dans l’assistance à la revitalisation de nos langues, de nos cultures et de nos traditions spirtituelles, les mêmes efforts et énergie consacrés à la destruction de nos places sacrées et de nos cultures en première instance. Nos nations originelles n’ont pas besoin de réconciliation, mais de décolonisation ! Nous et la planète devons cicatriser du traumatisme amené sur nous par ces schémas chroniques et incessants de domination et de veulerie avérées.

Merci à tous les chrétiens et églises chrétiennes qui ont exprimé leur soutien à nos efforts, sachez que nous apprécions cela à sa juste valeur. Nous vous invitons tous à marcher avec nous sur le chemin sacré en honneur du tout premier principe de nos nations originelles: “Respectons la Terre notre Mère et ayons un regard sacré pour tout être vivant. Mettons fin à toute domination. Nous sommes tous inter-reliés. Wanishi.”