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Pistes pour trouver la voie de la société des sociétés : une réflexion critique ~ 2ème partie ~

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, crise mondiale, démocratie participative, militantisme alternatif, pédagogie libération, philosophie, politique et social, politique française, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , , on 20 septembre 2021 by Résistance 71

TAZ
Des Zones Autonomes Temporaires (ZAT)…
à une Zone Autonome Permanente Planétaire (ZAPP)

Pour une solution vers la société des sociétés par-delà les impostures et les guéguerres de clochers stériles qui divisent le mouvement de résistance radicale au système étatico-capitaliste.
Seul mot d’ordre viable pour notre émancipation finale :
A bas l’État ! A bas la marchandise ! A bas l’argent ! A bas le salariat !
Tout le reste n’est que pisser dans un violon. N’oubliez pas ça alors que commence à donner la fanfare de la mascarade étatico-politico-marchande du cirque électoral pour 2022. Mettre à bas dictature et illusions !
Vive la Commune Universelle de notre humanité réalisée dans la complémentarité de notre diversité !
~ Résistance 71 ~

Anarchisme

Hakim Bey

2009

Qu’est-ce que l’anarchisme ?

Le Prophète Mahomet a dit que tous ceux qui vous saluent par « Salam ! » (paix) doivent être considérés comme musulmans. De la même manière, tous ceux qui s’appellent eux-mêmes « anarchistes » doivent être considérés comme des anarchistes (à moins qu’ils ne soient des espions de la police) – c’est-à-dire, qu’ils désirent l’abolition du gouvernement. Pour les soufis, la question « Qu’est-ce qu’un musulman? » n’a absolument aucun intérêt. Ils demandent, au contraire, « Qui est ce musulman ? Un dogmatique ignorant ? Un coupeur de cheveux en quatre ? Un hypocrite ? Ou bien est-ce celui qui tend à expérimenter la connaissance, l’amour et la volonté comme un tout harmonieux ? »

« Qu’est-ce qu’un anarchiste ? » n’est pas la bonne question. La bonne question c’est : « Qui est cet anarchiste ? Un dogmatique ignorant ? Un coupeur de cheveux en quatre ? Un hypocrite ? Celui-là qui proclame avoir abattu toutes les idoles, mais qui en vérité n’a fait qu’ériger un nouveau temple pour des fantômes et des abstractions ? Est-ce celui qui essaye de vivre dans l’esprit de l’anarchie, de ne pas être dirigé / de ne pas diriger – ou bien est-ce celui qui ne fait qu’utiliser la rébellion théorique comme excuse à son inconscience, à son ressentiment et à sa misère ? »

Les querelles théologiques mesquines des sectes anarchistes sont devenues excessivement ennuyeuses. Au lieu de demander des définitions (des idéologies), posez la question : « Qu’est-ce que tu sais ? », « quels sont tes véritables désirs ? », « que vas-tu faire à présent ? » et, comme Diaghilev le dit au jeune Cocteau : « Étonne-moi ! »

Qu’est-ce que le gouvernement ?

Le gouvernement peut être décrit comme une relation structurée entre les êtres humains par laquelle le pouvoir est réparti inégalement, de telle manière que la vie créatrice de quelques-uns est réduite pour l’accroissement de celle des autres. Ainsi, le gouvernement agit dans toutes les relations dans lesquelles les intervenants ne sont pas considérés comme des partenaires à part entière agissant dans une dynamique de réciprocité. On peut ainsi voir à l’œuvre le gouvernement dans des cellules sociales aussi petites que la famille ou « informelles » comme les réunions de voisinage – là où le gouvernement ne pourra jamais toucher des organisations bien plus grandes comme les foules en émeute ou les rassemblements de passionnés par leur hobby, les réunions de quaker ou de soviets libres, les banqueteurs ou les œuvres de charité.

Les relations humaines qui s’engagent sur un tel partenariat peuvent, au travers d’un processus d’institutionnalisation, sombrer dans le gouvernement – une histoire d’amour peut évoluer en mariage, cette petite tyrannie de l’avarice de l’amour ; ou bien encore une communauté spontanée, fondée librement afin de rendre possible une certaine manière de vivre désirée par tous ses membres, peut se retrouver dans une situation où elle doit gouverner et exercer une coercition à l’encontre de ses propres enfants, au travers de règles morales mesquines et des reliquats d’idéaux autrefois glorieux.

Ainsi, la tâche de l’anarchie n’est jamais destinée à perdurer qu’à court terme. Partout et toujours les relations humaines seront concrétisées par des institutions et dégénéreront en gouvernements. Peut-être que l’on pourrait soutenir que tout cela est « naturel »… Mais quoi ? Son opposé est tout aussi « naturel ». Et s’il ne l’était pas, alors on pourrait toujours choisir le « non-naturel », l’impossible.

Cependant, nous savons que les relations libres (non gouvernées) sont parfaitement possibles, car nous en faisons l’expérience assez souvent – et plus encore lorsque nous luttons pour les créer. L’anarchiste choisit la tâche (l’art, la jouissance) de maximiser les conditions sociales afin de provoquer l’émergence de telles relations. Puisque c’est ce que nous désirons, c’est ce que nous faisons.

Et les criminels ?

Les considérations ci-dessus peuvent être comprises comme impliquant une forme d’« éthique », une définition mutable de la justice dans un contexte existentiel et situationniste. Les anarchistes ne devraient probablement considérer comme « criminels » que ceux qui contrarient délibérément la réalisation des relations libres. Dans une société hypothétique sans prison, seuls ceux que l’on ne peut dissuader de telles actions pourront être livrés à la « justice populaire » ou même à la vengeance.

Aujourd’hui, cependant, nous ferions bien de réaliser que notre propre détermination à créer de telles relations, même de manière imparfaite et utopique, nous placera inévitablement dans une position de « criminalité » vis-à-vis de l’État, du système légal et probablement de la « loi non écrite » du préjugé populaire. Depuis longtemps être un martyr révolutionnaire est passé de mode – le but présent est de créer autant de liberté que possible sans se faire attraper.

Comment fonctionne une société anarchiste ?

Une société anarchiste œuvre, partout où deux ou plusieurs personnes luttent ensemble, dans une organisation de partenariat original, afin de satisfaire des désirs communs (ou complémentaires). Aucun gouvernement n’est nécessaire pour structurer un groupe de potes, un dîner, un marché noir, un tong (ou une société secrète d’aide mutuelle), un réseau de mail ou un forum, une relation amoureuse, un mouvement social spontané (comme l’écosabotage ou l’activisme anti-SIDA), un groupe artistique, une commune, une assemblée païenne, un club, une plage nudiste, une Zone Autonome Temporaire. La clé, comme l’aurait dit Fourier, c’est la Passion – ou, pour utiliser un mot plus moderne, le désir.

Comment pouvons-nous y parvenir ? En d’autres termes, comment maximiser la potentialité que de telles relations spontanées puissent émerger du corps putrescent d’une société asphyxiée par la gouvernance ? Comment pouvons-nous desserrer les rênes de la passion afin de recréer le monde chaque jour dans une liberté originelle du « libre esprit » et d’un partage des désirs ? Une question à deux balles – et qui ne vaut réellement pas beaucoup plus puisque la seule réponse possible ne relève que de la science-fiction.

Très bien. Mon sens de la stratégie tend vers un rejet des vestiges des tactiques de l’ancienne « Nouvelle Gauche » comme la démo, la performance médiatique, la protestation, la pétition, la résistance non-violente ou le terrorisme aventurier. Ce complexe stratégique a été depuis longtemps récupéré et marchandisé par le Spectacle (si vous me permettez un excès de jargon situationniste).

Deux autres domaines stratégiques, assez différents, semblent bien plus intéressants et prometteurs. Le premier est le processus résumé par John Zerzan [1] dans Elements of Refusal – c’est-à-dire, le refus de mécanismes de contrôle étendus et largement apolitiques inhérents aux institutions comme le travail, l’éducation, la consommation, la politique électorale, les « valeurs familiales », etc. Les anarchistes pourraient tourner leur attention vers des manières d’intensifier et de diriger ces « éléments ». Une telle action pourrait bien tomber dans la catégorie traditionnelle de l’« agitprop », mais éviterait la tendance « gauchiste » à institutionnaliser ou « fétichiser » les programmes d’une élite ou avant-garde révolutionnaire autoproclamée.

L’action dans le domaine des « éléments du refus » est négative, « nihiliste » même, tandis que le second secteur se concentre sur les émergences positives d’organisations spontanées capables de fournir une réelle alternative aux institutions du Contrôle. Ainsi, les actions insurrectionnelles du « refus » sont complétées et accrues par une prolifération et une concaténation des relations du « partenariat original ». En un sens, c’est là une version mise à jour de la vieille stratégie « Wobbly » [2] d’agitation en vue d’une grève générale tout en bâtissant simultanément une nouvelle société sur les décombres de l’ancienne au travers de l’organisation des syndicats. La différence, selon moi, c’est que la lutte doit être élargie au-delà du « problème du travail » afin d’inclure tout le panorama de la « vie de tous les jours » (dans le sens de Debord).

J’ai essayé de faire des propositions bien plus spécifiques dans mon essai Zone Autonome Temporaire (Autonomedia, NY, 1991) ; donc, je me restreindrai ici à mentionner mon idée que le but d’une telle action ne peut être désigné proprement sous le vocable de « révolution » — tout comme la grève générale, par exemple, n’était pas une tactique « révolutionnaire », mais plutôt une « violence sociale » (ainsi que Sorel l’a expliqué). La révolution s’est trahie elle-même en devenant une marchandise supplémentaire, un cataclysme sanglant, un tour de plus dans la machinerie du Contrôle – ce n’est pas ce que nous désirons, nous préférons laisser une chance à l’anarchie de briller.

L’anarchie est-elle la Fin de l’Histoire ?

Si le devenir de l’anarchie n’est jamais « accompli » alors la réponse est non – sauf dans le cas spécial de l’Histoire définie comme auto-valorisation privilégiée des institutions et gouvernements. Mais, l’histoire dans ce sens est déjà probablement morte, a déjà « disparu » dans le Spectacle, ou dans l’obscénité de la Simulation. Tout comme l’anarchie implique une forme de « paléolithisme psychique », elle tend traditionnellement vers un état post-historique qui refléterait celui de la préhistoire. Si les théoriciens français ont raison, nous sommes déjà entrés dans un tel état. L’histoire comme l’histoire (dans le sens de récit) continuera, car il se pourrait que les humains puissent être définis comme des animaux racontant des histoires. Mais l’Histoire, en tant que récit officiel du Contrôle, a perdu son monopole sur le discours. Cela devrait, sans aucun doute, travailler à notre avantage.

Comment l’anarchie perçoit-elle la technologie ?

Si l’anarchie est une forme de « paléolithisme », cela ne signifie nullement que nous devrions retourner à l’Âge de la pierre. Nous sommes intéressés par un retour au Paléolithique et non en lui. Sur ce point, je crois que je suis en désaccord avec Zerzan et le Fifth Estate [3] ainsi qu’avec les futuro-libertariens de CaliforniaLand. Ou plutôt, je suis d’accord avec eux tous, je suis à la fois un luddite et un cyberpunk, donc inacceptable pour les deux partis.

Ma croyance (et non ma connaissance) est qu’une société qui aurait commencé à approcher une anarchie générale traiterait la technologie sur la base de la passion, c’est-à-dire, du désir et du plaisir. La technologie de l’aliénation échouerait à survivre à de telles conditions, alors que la technologie de l’amélioration survivrait probablement. La sauvagerie, cependant, jouerait aussi nécessairement un rôle majeur dans un tel monde, car la sauvagerie est le plaisir. Une société basée sur le plaisir ne permettra jamais à la techné [4] d’interférer avec les plaisirs de la nature.

S’il est vrai que toute techné est une forme de médiation, il en va de même de toute culture. Nous ne rejetons pas la médiation per se (après tout, tous nos sens sont une médiation entre le « monde » et le « cerveau »), mais plutôt la tragique distorsion de la médiation en aliénation. Si le langage lui-même est une forme de médiation alors nous pouvons « purifier le langage de la tribu » ; ce n’est pas la poésie que nous haïssons, mais le langage en tant que contrôle.

Pourquoi l’anarchie n’a-t-elle pas marché auparavant ?

Qu’est-ce que vous voulez dire par là ? Elle a marché des milliers, des millions de fois. Elle a fonctionné durant 90 % de l’existence humaine, le vieil Âge de la pierre. Elle marche dans les tribus de chasseurs/cueilleurs encore aujourd’hui. Elle marche dans toutes les « relations libres » dont nous avons parlé auparavant. Elle marche chaque fois que vous invitez quelques amis pour un piquenique. Elle a « marché » même dans les « soulèvements ratés » des soviets de Munich ou de Shanghai, de Baja California en 1911, de Fiume en 1919, de Kronstadt en 1921, de Paris en 1968. Elle a marché pour la Commune, les enclaves de Maroons, les utopies pirates. Elle a marché dans les premiers temps du Rhodes Island et de la Pennsylvanie, à Paris en 1871, en Ukraine, en Catalogne et en Aragon.

Le soi-disant futur de l’anarchie est un jugement porté précisément par cette sorte d’Histoire que nous croyons défunte. Il est vrai que peu de ces expériences (sauf pour la préhistoire et les tribus primitives) ont duré longtemps – mais cela ne veut rien dire quant à la valeur de la nature de l’expérience, des individus et des groupes qui vécurent de telles périodes de liberté. Vous pouvez peut-être vous souvenir d’un bref, mais intense amour, un de ces moments qui aujourd’hui encore donne une certaine signification à toute votre vie, avant et après – un « pic d’expérience ». L’Histoire est aveugle à cette portion du spectre, du monde de la « vie de tous les jours » qui peut aussi devenir à l’occasion la scène de l’« irruption du Merveilleux ». Chaque fois que cela arrive, c’est un triomphe de l’anarchie. Imaginez alors (et c’est la sorte d’histoire que je préfère) l’aventure d’une importante Zone Autonome Temporaire durant six semaines ou même deux ans, le sens commun de l’illumination, la camaraderie, l’euphorie – le sens individuel de puissance, de destinée, de créativité. Aucun de ceux qui ont jamais expérimenté quelque chose de ce genre ne peut admettre, un seul moment, que le danger du risque et de l’échec pourrait contrebalancer la pure gloire de ces brefs moments d’élévation.

Dépassons le mythe de l’échec et nous sentirons, comme la douce brise qui annonce la pluie dans le désert, la certitude intime du succès. Connaître, désirer, agir – en un sens nous ne pouvons désirer ce que nous ne connaissons déjà. Mais nous avons connu le succès de l’anarchie pendant un long moment maintenant – par fragments, peut-être, par flashes, mais réel, aussi réel que la mousson, aussi réel que la passion. Si ce n’était pas le cas, comment pourrions-nous la désirer et agir peu ou prou à sa victoire ?

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Il n’y a pas de solution au sein du système, n’y en a jamais eu et ne saurait y en avoir ! (Résistance 71)

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

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4 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie

vivre_libre

resistanceA

Pistes pour trouver la voie de la société des sociétés : paléolithisme et technologie… une réflexion critique ~ 1ère partie ~

Posted in actualité, altermondialisme, militantisme alternatif, pédagogie libération, philosophie, politique et social, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , on 16 septembre 2021 by Résistance 71

HakimBey1

Reconnaître, analyser et contre-carrer l’écrasement technologique totalitaire qui mène le monde à la perte de l’humanité et à la dictature technotronique en proposant une solution pour la réalisation de notre être et donc de notre humanité. Dans ce monde qui s’enferme dans la dictature sanitaire, outil de l’oppression finale par une « élite » auto-proclamée, psychopathe et hors sol, ce texte de Hakim Bey résonne on ne peut plus juste.
~ Résistance 71 ~

Paléolithisme et Technologie : un papier engagé 

par Hakim Bey

2008

Ce n’est pas parce que l’A.O.A. (1) parle sans cesse de « Paléolithisme » que vous devez penser que nous avons l’intention de nous projeter en arrière dans l’Âge de la Pierre.

Nous n’avons aucun intérêt à revenir « à la campagne » si le deal doit comprendre la vie barbante d’un enfoiré de paysan – nous ne voulons pas non plus du « tribalisme » s’il nous vient avec les tabous, les fétiches et la malnutrition. Nous n’avons aucune querelle avec le concept de culture – en ce compris la technologie ; pour nous le problème commence avec la civilisation.

Ce que nous aimons dans la vie paléolithique a été résumé par l’École des Peuples Sans Autorité de l’anthropologie : l’élégante nonchalance de la société de chasseurs/cueilleurs, la journée de travail de deux heures, l’obsession de l’art, la danse, la poésie et l’amour, la « démocratisation du chamanisme », la culture de la perception – en bref, la Culture.

Ce que nous n’aimons pas au sujet de la civilisation peut être réduit à la progression suivante : la « Révolution Agraire » ; l’émergence des castes ; la Cité et son culte du contrôle hiérarchique (« Babylone ») ; l’esclavage ; le dogme ; l’impérialisme (« Rome »). La suppression de la sexualité au « travail » sous l’égide de l’« autorité ». « L’Empire n’a jamais pris fin ».

Un paléolithisme psychique basé sur la haute technologie – post-agraire, post-industrielle, « Zéro-travail », nomade (ou « Cosmopolite sans Racine ») – une Société du Paradigme Quantique – ceci constitue la vision idéale du futur selon la Théorie du Chaos aussi bien que de la « Futurologie » (selon le sens du terme donné par R.A. Wilson & T. Leary).

Pour le présent : nous rejetons toute collaboration avec la Civilisation de l’Anorexie et de la Boulimie, avec les personnes, si honteuses de ne jamais souffrir, qu’elles s’inventent des tuniques de pénitence pour elles-mêmes et pour les autres – ou avec ceux qui se gargarisent sans compassion et ensuite gerbent le vomi de leur culpabilité réprimée par de longs joggings et de longues diètes. Tous nos plaisirs et toutes nos auto-disciplines nous appartiennent par la Nature – nous ne nous nions jamais nous-mêmes, nous n’abandonnons jamais rien ; mais certaines choses nous ont abandonnés et nous ont quittés, car nous sommes trop grands pour elles. Je suis à la fois l’homme des cavernes et le mutant explorateur d’étoiles, homme de confiance et le prince libre. Un jour, un chef indien fut invité à la Maison Blanche pour un banquet. Alors que la nourriture circulait, le Chef remplit son plateau, trois fois. À la fin, la personne à côté de lui dit, « Chef, he he, ne pensez-vous pas que c’est un peu beaucoup ? » « Ugh » répond le chef, « un peu beaucoup c’est juste assez pour le Chef ! »

Néanmoins, certaines doctrines de la « Futurologie » restent problématiques. Par exemple, même si nous acceptons le potentiel libératoire de nouvelles technologies comme la télé, les ordinateurs, la robotique, l’exploration spatiale, etc., nous voyons toujours un gouffre entre le potentiel et la réalité. La banalisation de la télé, la yuppification des ordinateurs et la militarisation de l’espace suggèrent que ces technologies en elles-mêmes ne fournissent aucune garantie « déterminée » par leur utilisation libératoire.

Même si nous rejetons l’holocauste nucléaire comme une autre Diversion Spectaculaire orchestrée afin de distraire notre attention des problèmes réels, nous devons néanmoins admettre que la « Destruction Mutuelle Assurée » et la « Guerre Propre » tendent à enflammer notre enthousiasme pour certains aspects de l’Aventure High-Tech. L’Anarchisme Ontologique garde son affection pour le Ludique en tant que tactique : si une technologie donnée, peu importe combien admirable soit-elle en potentiel (dans le futur), est utilisée afin de m’opprimer ici et maintenant, alors je dois soit utiliser les armes de sabotage ou bien me saisir des moyens de production (ou peut-être, encore plus important, des moyens de communication). Il n’y a pas d’humanité sans technique – mais, il n’y a aucune technique qui vaille plus que mon humanité.

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Nous rejetons l’anarchisme anti-technologie irréfléchi – pour nous-mêmes, du moins (il y en a qui aiment jouer aux cultivateurs) – et nous rejetons le concept de déterminisme technologique. Pour nous, toutes les formes de déterminisme apparaissent tout aussi bêtes – nous ne sommes les esclaves ni de nos gènes ni de nos machines. Ce qui est « naturel » est ce que nous imaginons et ce que nous créons. « La Nature n’a pas de Lois – seulement des habitudes ».

La vie pour nous n’est ni le Passé – ce pays de fantômes légendaires amassant leurs biens sépulcraux ternis – ni le Futur, dont les citoyens mutants aux cerveaux bulbeux gardent si jalousement les secrets de l’immortalité, du vol au-delà de la vitesse de la lumière, du génie génétique et de la disparition de l’État. Aut nunc aut nihil (2). Chaque moment contient une éternité qui doit être pénétrée – cependant, nous nous perdons dans des visions perçues au travers des yeux du corps, dans une nostalgie de perfections à naître.

Les réalisations de mes ancêtres et de mes descendants ne sont rien de plus pour moi qu’un conte amusant ou instructif – je ne les appellerai jamais mes réussites, même pour excuser ma propre petitesse. Je me forge à moi-même une licence pour leur voler tout ce dont j’ai besoin – le paléolithisme psychique ou la haute technologie – ou, pour ce qui concerne le splendide détritus de la civilisation elle-même, les secrets des Maîtres Occultes, les plaisirs de la frivole noblesse et la vie bohème (3).

La décadence (4) joue un grand rôle dans la santé de l’Anarchie Ontologique – nous prenons ce que nous voulons de chaque côté. Les esthètes décadents n’engagent pas de guerres stupides ou ne submergent pas leur conscience avec une avidité et un ressentiment microcéphaliques. Ils cherchent l’aventure dans l’innovation artistique & dans la sexualité non-ordinaire plutôt que dans la misère des autres. L’A.O.A. admire et est l’émule de leur paresse, de leur dédain pour la stupidité de la normalité, de leur expropriation des sensibilités aristocratiques. Pour nous, ces qualités s’harmonisent paradoxalement avec celles de l’Antique Âge de la Pierre et de sa santé débordante, de son ignorance de la hiérarchie, de la culture de la vertu plutôt que de la Loi. Nous demandons la décadence dans la maladie, et la santé dans l’ennui !

Ainsi, l’A.O.A. offre un support sans réserve à tous les peuples indigènes et tribaux dans leurs luttes pour une autonomie complète – et en même temps, aux plus sauvages et plus irréalistes spéculations et demandes des futurologues. Le paléolithisme du futur (qui pour nous, en tant que mutants, existe déjà) sera atteint sur une grande échelle uniquement au travers d’une technologie massive pour l’Imagination & d’un paradigme scientifique qui va au-delà de la mécanique quantique dans le royaume de la théorie du chaos et des hallucinations de la fiction spéculative.

En tant que Cosmopolites sans Racine nous posons la réclamation pour toutes les beautés du passé, de l’orient, des sociétés tribales – tout cela doit et peut être nôtre, même les trésors de l’Empire : à nous de les partager. Et, en même temps, nous demandons une technologie qui transcende l’agriculture, l’industrie, la simultanéité même de l’électricité, un hardware qui se recoupe avec le corps spongieux de la conscience, qui embrasse la puissance des quarks, des particules voyageant en arrière dans le temps, des quasars et des univers parallèles.

Les idéologues querelleurs de l’anarchisme & du libertarianisme prescrivent tous la même utopie congénitale à leurs diverses marques de visions étriquées, allant de la commune de paysans à la Cité Spatiale L-5. Nous disons que mille fleurs éclosent – sans jardinier pour tailler leurs tiges et lutter pour quelque schéma moralisateur ou eugénique. Le seul véritable conflit est celui entre l’autorité du tyran et l’autorité du moi réalisé – tout autre conflit est une illusion, une projection psychologique, un verbiage pompeux.

En un sens, les fils & les filles de Gaïa n’ont jamais quitté le paléolithique ; en un autre sens, toutes les perfections du futur sont déjà nôtres. Seule l’insurrection « résoudra » ce paradoxe – seul le soulèvement contre la fausse conscience en nous-mêmes et dans les autres balayera la technologie de l’oppression et de la pauvreté du Spectacle. Dans cette bataille, un masque peint ou un fouet de chamane peut se révéler aussi vital que la confiscation des communications satellites ou du réseau d’ordinateurs secret.

Notre seul critère pour juger d’une arme ou d’un outil est sa beauté. Les moyens sont déjà la fin, en un certain sens ; l’insurrection est déjà notre aventure ; Devenir C’EST Être. Passé et Futur existent en nous et pour nous, l’alpha et l’oméga. Il n’y a pas d’autres dieux devant ou après nous. Nous sommes libres dans le TEMPS – et nous serons libres dans l’ESPACE aussi.

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Il n’y a pas de solution au sein du système, n’y en a jamais eu et ne saurait y en avoir ! (Résistance 71)

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

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4 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

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