Archive pour EZLN petite école zapatiste

Et pendant ce temps là dans les communautés zapatistes…

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ARMÉE ZAPATISTE DE LIBÉRATION NATIONALE.

Mexique.

12 Mai 2016

url de l’article en français:

http://enlacezapatista.ezln.org.mx/2016/05/12/et-dans-les-communautes-zapatistes/?utm_source=feedburner&utm_medium=email&utm_campaign=Feed%3A+EnlaceZapatista+%28Enlace+Zapatista%29

Aux Compañer@s de la Sexta:

A qui de droit:

Compañeroas, compañeros et compañeras:

Maintenant nous allons vous parler un peu de comment vont les communautés zapatistes où résistent et luttent les bases de soutien.

Ce que nous allons vous relater maintenant vient des rapports des propres compañeras et compañeros zapatistes, responsables dans les villages, responsables de commissions (par exemple santé, éducation, jeunes etc.), autorités autonomes et responsables organisateurs. Mais avec les Comp@s du Comité nous l’avons vérifié pour voir si ce ne sont pas des mensonges, ou s’ils ne les changent pas pour que ça paraisse bien et cacher ce qui ne va pas. Le travail de ces écrits, ce n’est pas de dire des mensonges à nos comp@s de la Sexta, ni à ceux qui soutiennent et sont solidaires. Ni à vous, ni à eux, ni à elles, ni à personne d’autre.

Si nous n’avançons pas correctement, nous le disons clairement, non pas pour que vous vous sentiez plus tristes que vous ne l’êtes à cause de tout ce qui se passe là-bas, dans vos géographies et dans vos calendriers. Nous le disons car c’est notre manière de vous rendre des comptes, c’est-à-dire de vous informer, et que vous sachiez si nous prenons le chemin que nous vous avions dit, ou bien si en fait nous sommes passés à autre chose, peut-être en répétant les mêmes vices que nous critiquons.

Mais si nous avançons correctement, et bien nous voulons aussi que vous le sachiez, pour qu’ainsi vous vous réjouissiez avec le cœur collectif que nous sommes.

Comment savons-nous si nous avançons correctement ou non ? Et bien pour nous, femmes et hommes zapatistes, c’est très simple : les peuples parlent, les peuples commandent, les peuples font, les peuples défont. Au moment où quelqu’un prend le mauvais chemin, rapidement le collectif lui donne comme qui dirait sa remontée de bretelles, et ou il se corrige, ou il prend la porte de sortie.

C’est ça notre autonomie : le chemin c’est le nôtre, c’est nous qui le prenons, nous qui faisons les bons choix, nous qui nous trompons, nous qui nous corrigeons.

En résumé nous vous disons la vérité, car vous devez en avoir vraiment marre des mensonges et en être lassés. Et bien qu’elle fasse parfois mal, la vérité soulage toujours.

C’est à dire que nous ne voulons pas faire comme les mauvais gouvernements qui se sont beaucoup maquillé ces derniers jours, soit-disant pour faire plaisir au visiteur de passage, pour qu’il ne voit pas ce qu’il se passe en bas[1]. Mais ce maquillage n’a servi qu’à démontrer combien les gouvernements sont faux. Vous croyez vraiment que n’importe qui de modérément intelligent ne verrait pas la réalité? Qu’il se manifeste ou pas par rapport à cette réalité, et la forme avec laquelle il le fait, c’est autre chose, et c’est son problème.

Bon, en un peu de mots. Ce que nous vous racontons maintenant vient en complément de ce qui a déjà été expliqué dans les livres de la Petite École Zapatiste. Si vous n’avez pas assisté à la Petite École Zapatiste, que ce soit en communauté ou extra-muros, ou bien si vous ne connaissez pas ce que disent les livres de texte, et bien nous vous recommandons de les lire. Á l’intérieur, vous allez apprendre comment s’est déroulé le processus de construction de l’autonomie.

Ce qu’il se passe là, c’est nouveau, ce sont des nouvelles choses qui apparaissent, c’est à dire que ça n’existait pas il y a un ou deux ans :

  • La croissance zapatiste se maintient. Il y a de plus en plus de jeunes hommes et jeunes filles qui rentrent.
  • Pour ce qui est de la santé, les compañeras et les compañeros sont sur le bon chemin. Ce qu’on voit, c’est que dans leurs cliniques autonomes il y a moins de personnes qui arrivent car le travail de prévention a beaucoup augmenté, grâce aussi au suivi que procurent les promoteurs de santé autonome. C’est à dire que les gens sont moins malades. Dans les cliniques zapatistes autonomes, ceux qui arrivent de plus en plus fréquemment ce sont les gens des partis politiques.
  • Pour ce qui est de l’éducation, pour l’éducation primaire c’est pareil. Mais maintenant il y a une nouvelle exigence des communautés: le collège et le lycée. Dans certaines zones il y a un collège, mais pas partout. Maintenant, il y a des jeunes hommes et des jeunes femmes qui demandent l’éducation supérieure. Ils ne veulent pas des ateliers, mais des études supérieures dans les Sciences et dans les Arts. Mais pas des études selon le mode capitaliste des universités institutionnelles, mais des études selon notre mode. Sur ce point on a encore beaucoup à faire.
  • Pour ce qui est de l’économie, sans vous raconter ce qui existe déjà et qui se maintient en termes de travaux collectifs et individuels (milpa, haricot, plants de café, volaille, banane, mouton, bétail, boutique, miel d’abeille, potager, achat et vente de bétail, et autres types de produits), ce qu’on a constaté c’est que leur production a augmenté, ce qui a amélioré l’alimentation et la santé, surtout chez les jeunes et les enfants.
  • Dans certaines zones les promoteurs de santé autonome sont déjà en train de se former en échographie, en étude de laboratoire, en consultation générale, en odontologie et en gynécologie. De plus des campagnes de santé préventive sont réalisées dans les régions. Dans une zone, avec les bénéfices obtenus par le travail collectif, du bétail, du matériel de laboratoire et des appareils d’échographie ont déjà pu être acquis. Ils ont déjà des compañeros et compañeras formés à l’usage de ces appareils, produit de l’enseignement réciproque entre promoteurs de santé d’un caracol à l’autre, c’est-à-dire qu’ils se sont donnés des cours entre eux -mêmes. Et une autre clinique-hôpital est déjà en construction, pour qu’à partir de maintenant on puisse y faire de petites chirurgies, comme cela se fait déjà à la Realidad ou à Oventik.
  • Pour ce qui est du travail de la terre, les collectifs de milpa [culture de maïs et de plantes associées] et de bétail se sont beaucoup développés. Avec les bénéfices, en plus de se procurer des appareils et des médicaments pour les cliniques, ils se sont acheté un tracteur.
  • Pour le commerce, les épiceries coopératives ont obtenu leur indépendance économique, et ont maintenu des prix bas pour les familles zapatistes. Cela c’est possible car il n’y a personne qui s’enrichit sur la hausse des produits de consommation de base.
  • Dans les boutiques autonomes, il n’y pas de vêtements de marques exclusives ni les dernières modes pour s’habiller, mais il ne manque ni les naguas [jupes traditionnelles], habits, blouses, pantalons, chemises, chaussures (la majorité fabriquées dans les cordonneries autonomes), ni de ce que chacun utilise pour couvrir ses parties intimes.
  • Dans les collectifs de production et de commerce, ce sont les compañeras qui ont le plus avancé. Il y a quelques années, une quantité résultant du travail collectif de la comandancia, des comités et des insurgé-e-s, (oui, nous aussi nous travaillons pour produire et obtenir de l’argent), a été destinée à chaque municipalité autonome, pour que les compañeras bases de soutien la travaillent en collectif dans ce qui serait décidé par elles-mêmes.

Et il se trouve qu’elles s’en sont sorties meilleures administratrices que les hommes, car dans une municipalité les compañeras ont non seulement mis en place avec succès un collectif de bétail, mais maintenant elles sont tellement avancées qu’elles mettent leurs vaches «à partager» dans d’autres villages avec des collectifs de femmes («à partager» disent les zapatistes, quand ce qui a été obtenu se partage en deux, et que cette moitié est donnée à une autre «partie » ).

  • Il s’est passé la même chose avec les épiceries coopératives: elles en sont déjà à faire des prêts aux autres collectifs de région ou aux villages, et même à des compañeras
  • Toutes les municipalités autonomes effectuent un travail collectif de milpa, et d’autres ont du bétail. Toutes les régions ont un travail collectif qui donne des bénéfices. Par exemple, lors de la dernière célébration, les régions ont coopéré pour la vache qu’ils ont mangé durant la fête et pour les musiciens.
  • La grande majorité des villages effectuent des travaux collectifs. Dans certains villages, les hommes ne travaillent pas en collectif mais les compañeras si, et il y a des villages où se sont 2 collectifs, un collectif de compañeros et un collectif de compañeras. Individuellement tous luttent pour aller bien, et ils ont réussi à aller de l’avant et s’en sortir. Tant les milicien-e-s que les insurgé-e-s travaillent dans des collectifs de production pour subvenir à leurs besoins et soutenir les villages.
  • Dans le caracol d’Oventik, il ont déjà une tortilleria Nous ne savons pas combien coûte actuellement le kilo de tortilla dans vos géographies, mais à Oventik il est à 10 pesos le kilo. Et elles sont de maïs, pas de farine industrielle. Les transports publics font même des voyages spéciaux pour aller y acheter leurs tortillas. Dans la zone de Los Altos au Chiapas, là oú se trouve le caracol d’Oventik, on ne produit pas de maïs. Le maïs est produit dans les régions de la Selva et est commercialisé entre les collectifs de zone, pour que les familles zapatistes aient du maïs à bon prix et sans intermédiaires. Pour ça, on utilise des camions qui ont été donnés aux Conseils de Bon Gouvernement par des personnes bien attentionnées dont on ne va pas dire le nom, mais elles et nous savons de qui il s’agit.
  • Dans beaucoup de villages zapatistes, environ 50% travaille en collectif, et le reste en individuel. Dans d’autres, la majorité travaille en individuel. Bien que l’on promeuve le travaille collectif, le travail individuel qui n’exploite pas d’autres individus est respecté. Tant dans le travail collectif que dans le travail individuel, non seulement ils se maintiennent, mais en plus ils progressent.
  • Suivant chaque endroit, c’est comme cela que s’organisent les travaux collectifs. Il y a des collectifs dans les villages, et dans certains, il y a des collectifs d’hommes, des collectifs de femmes et des collectifs de jeunes. Il y a des collectifs de région ou de commune. Il y a des collectifs de zone ou de Conseil de Bon Gouvernement. Quand un collectif est plus avancé, il soutient les autres collectifs qui sont plus en retard. Ou bien, comme dans certaines régions, le travail collectif de production alimentaire est destiné aux internats qui existent pour les écoles secondaires autonomes.

-*-

Tout ce que nous vous racontons sur ces avancées ne vient pas du commandement zapatiste, c’est-à-dire que ce n’est pas sorti de la tête de quelques-uns, mais provient des réunions de partage entre les villages eux-mêmes.

Lors de ces réunions de partage, ils se racontent leurs travaux, leurs avancées, leurs problèmes et  leurs erreurs. De là sortent de nombreuses et de nouvelles idées qu’ils échangent entre eux. En d’autres mots, les compañeros et compañeras s’apprennent les uns les autres.

Et on vous dit bien sûr que nous, en tant que commandants, nous apprenons aussi, et beaucoup, de nos compañeras et compañeros zapatistes.

C’est terrible et merveilleux ce que nous regardons et ce que nous écoutons, ça l’est tellement que nous ne savons pas ce qui va ressortir de toute cette avancée.

Nous ne vous parlons pas pour le moment du réarmement des paramilitaires, de l’augmentation des patrouilles militaires, aériennes et terrestres, et de tout ce que font les mauvais gouvernements pour essayer de nous détruire. Nous ne vous donnons pas plus de détails, parce que nous savons bien que pour vous non plus ce n’est pas facile, que vos résistances et rébellions endurent des agressions tous les jours, à toutes heures et de toutes parts. Et que, quoi qu’il en soit, vous restez rebelles et en résistance.

Mais nous savons que vous savez que tout ce que nous vous racontons se déroule au milieu des agressions, des attaques, des harcèlements, des calomnies et des silences complices. Au milieu d’une guerre, donc.

Et bien que lors des périodes sombres, comme celle qu’on subit en ce moment, surgissent des « commerçants de l’espoir », nous, l@s zapatistes, nous ne nous laissons pas emporter par les balivernes ecclésiales, séculières ou laïques de soi-disant « nouveaux constituants » qui veulent « nous sauver » et qui ont recours aux mêmes vieilles méthodes de coercition qu’ils disent critiquer, et qui mentent sur de soi-disant soutiens de l’EZLN, tandis qu’ils tentent de rééditer l’histoire avec le soutien d’ « avant-gardes » obsolètes, qui ne sont plus depuis longtemps à la hauteur de leur propre héritage.

L’EZLN ne soutien aucune vente de bijoux de pacotille. Nous sommes en 2016, pas en 1521, réveillez-vous.

-*-

Compas de la Sexta, Frères et Sœurs du Congrès National Indigène :

De toutes nos forces, et au milieu de toutes ces turpitudes, nous les femmes et les hommes zapatistes nous nous préparons au pire, pour ce qui arrive.

Nous n’avons pas peur. Pas parce que nous sommes téméraires, mais parce que nous avons confiance en nos compañer@s.

C’est comme si, face à la tempête qui secoue déjà les ciels et les sols du monde, les bases de soutien zapatistes avaient grandi. Que c’est maintenant que brille le plus leur habilité, leur sagesse, leur imagination et leur créativité.

En réalité ce que cherche ces paroles, plus que d’informer ou de rendre des comptes, c’est de vous embrasser, vous tous, vous toutes et touzes, et vous rappeler qu’ici, dans ce recoin du monde, vous avez des compas qui ne vous oublient pas, malgré les distances entre les calendriers et les géographies.

Mais tout ne va pas bien. Pour être clair, il faut vous dire qu’il y a un défaut que nous voyons : les femmes zapatistes sont en train d’avancer plus que les hommes. C’est-à-dire que ça n’avance pas au même rythme.

Le temps où l’homme était le seul à rapporter la paye pour la maison s’estompe de plus en plus. Maintenant, dans certaines zones, les collectifs de femmes donnent du travail aux hommes. Et ils sont nombreux, les foyers zapatistes où la femme est celle qui va donner de l’argent à l’homme pour qu’il s’achète tant sa chemise que son pantalon, son bandana et puis son peigne, pour qu’il soit bien bel homme, lors des prochaines activités que nous annoncerons bientôt.

Parce que, peut-être que nous sommes sales, laids et mauvais, mais en tous cas : nous sommes bien peignés.

Depuis les montagnes du sud-est mexicain.

Sous-commandant Insurgé Moisés. Sous-commandant Insurgé Galeano.

Mexique, février 2016.

Du Carnet de Notes du Chat-Chien :

Fragment de la conversation entre quelques partidistes et quelques zapatistes :

Partidistes : En tant qu’EZLN, vous ne recevez pas de programme du gouvernement comme Procampo, Prospera, Nuevo Amanecer de los Ancianos?

Zapatistes : Non.

Partidistes : En tant qu’organisation, qui les subventionne?

Zapatistes : Nous sommes organisés et nous avons des bases de soutien qui travaillons ensemble et nous gouvernons, et nous avons des travaux collectifs et avec ça nous obtenons des ressources économiques pour soutenir notre résistance.

Partidistes : -Et de quelle manière nous en tant que société civile pouvons-nous nous organiser, et comment pouvez-vous nous conseiller, nous guider et nous enseigner ?

Zapatistes : Faites-vous votre idée de la situation avec les médias libres ou avec le Congrès National Indigène. Nous nous ne sommes pas là pour dire et pour décider comment vous allez vous organiser ni pour donner un nom à votre organisation. Que le peuple pense et décide quoi faire et comment il va s’organiser.

Partidistes : Que devons-nous faire?

Zapatistes:  Notre idée est de faire tomber le système capitaliste.

-*-

Rapport sur la discussion tenue, un matin très tôt du mois de février, entre celui qu’on appelle Sous-commandant Insurgé Moisés et le dénommé SupGaleano :

SupMoy : Le rapport dit qu’il y a des menaces de mort et que le gouvernement veut attaquer les caracoles pour en finir une fois pour toutes avec le zapatisme, que c’est parce qu’ils font mauvaise impression aux gouvernements.

SupGal : …

SupMoy : Qu’ils nous cherchent toi et moi pour nous tuer.

SupGal : « Nous tuer » ? C’est pas plutôt « nous arrêter » ?, « nous capturer » ?

SupMoy: Non, le rapport dit, « pour les tuer ».

SupGal : Ptain d’sa mère, et pourquoi moi ? Ça c’est du racisme-colonialiste-hétéro-patriarcal-eurocentré. Si c’est toi le porte-parole, c’est toi qui prends. Moi je suis que le dernier bastion du machisme zapatiste, et t’as vu qu’on est en franc déclin. En plus, pourquoi la violence ? Avant, ils disaient seulement « arrêter », « convocation », « détention », maintenant « tuer ». Et en plus moi je suis déjà mort plusieurs fois, ils ne me le prennent pas en compte ? C’est bon, qu’ils le classifient et mettent « mission accomplie ». Mais ne change pas de sujet, je te dis qu’il ne faut pas mettre dans le communiqué l’histoire des collectifs de femmes.

SupMoy : Et pourquoi non?

SupGal: Ben parce que si on le dit on va avoir des problèmes avec le genre masculin. Toute une tradition de films de Pedro Infante et de chansons de José Alfredo Jiménez risquent de disparaître. Toi tu es d’accord avec le fait que disparaissent des cultures ancestrales ? Non, n’est-ce pas ?

SupMoy: Ben comme disait le défunt : les dés sont jetés, parce que je l’ai déjà mis.

SupGal: Comment?!! Et la solidarité de genre?

SupMoy : Vaut mieux que tu réfléchisses à quoi faire pour que les hommes se motivent plus et fassent avancer leurs collectifs.

SupGal: Ok, ok, ok. On a besoin de retourner à nos racines, comme on dit. Je vais faire un programme spécial pour Radio Insurgente. Rien de Games of Thrones ni rien de rien ; que des chansons du grand camarade et dirigeant, premier du nom, roi de Garibaldi, père des dragons, et seigneur des sept lieux : Pedro Infante.

SupMoy: Hahahahahaha. Ils ne vont pas te le diffuser. C’est une compañera qui s’occupe de la programmation.

SupGal: P’tain d’sa mère, maudite loi révolutionnaire des femmes! Et de José Alfredo Jiménez?

SupMoy: Uuy ! De lui encore moins.

SupGal: Mmh… Les Bukis alors ?…  Les Téméraires ?… Brindis?… Los Tigres del Norte? Piporro?

La discussion a continué jusqu’à ce que le chat-chien, se faisant les ongles, conclue : ouaf-miaou.

C’était tôt le matin, il faisait très froid et, malgré le fait qu’une ombre se dressait sur la face de la terre, une petite lumière réchauffait le mot « résistance ».

J’atteste sur l’honneur de genre.

Note : Cet écrit a été réalisé sur un logiciel libre de traitement de textes à code source ouvert, avec un système d’exploitation GNU/Linux sous distro UBUNTU 14.04 LTS, sur un ordinateur de la marque très célèbre et très select « La Migaja Z.A. de C.V. de R.L » (note : « Z.A » ce sont les initiales de « Zapatiste Autonome » ; « C.V » de « Coopération Virtuelle » ; « R.L. » de « Rébellion Ludique »), modèle « Deus Ex Machina 6.9 », reconstruit (c’est-à-dire qu’il s’est cassé, mais qu’on l’a remonté comme un casse-tête) au Département de Haute Technologie Alternative Zapatiste (DATAZ, de par ses initiales en espagnol). Ok, ok, ok, au final ça donne une figure géométrique tridimensionnelle que nous appelons « KEKOSAEDRO » -parce que personne ne sait ce que c’est-, et il y a quelques câbles et quelques vis qui nous sont restés dans les mains, mais il marche bien… jusqu’à ce qu’il ne marche plus. « UBUNTU », en langue zoulou, signifie aussi « Je suis parce que nous sommes ». Dîtes « OUI » au logiciel libre. ¡Fuck Microsoft, Apple and so forth (if you know what I mean)! ¡Linux rules!

[1]Référence à la visite du pape François au Chiapas durant le mois de février 2016.

Résistance politique et organisation: Second niveau de la escuelita zapatista…

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… parce que savoir et pratiquer, c’est se libérer ! Excellente méthode, les zapatistes ne cesseront de nous étonner et de nous épater !

— Résistance 71 —

 

Deuxième niveau de la petite école zapatiste

 

Lundi 3 août 2015, par EZLN

 

Armée zapatiste de libération nationale
Mexique

 

27 juillet 2015.

 

url de l’article:

http://www.lavoiedujaguar.net/Deuxieme-niveau-de-la-petite-ecole

 

À la Sexta nationale et internationale,
Aux ex-élèves de la petite école zapatiste,

Compas,

Bon, eh bien les dates de ce qui constituera le deuxième niveau de la petite école zapatiste (réservé à celles et ceux qui ont été admis au premier niveau) se rapprochent.

Comme nous l’avions annoncé auparavant, ce sera le 31 juillet, le 1er et le 2 août 2015.

Non, ne vous dépêchez pas. Il ne s’agit pas de venir en terres zapatistes. Il s’agit plutôt de ne pas venir jusqu’ici, ou tout au moins pas pour la petite école. Le deuxième niveau sera universel et aura lieu à l’extérieur des terres zapatistes.

On vous explique :

Bon comme on l’a déjà dit, nous nous rendons compte que la situation économique est difficile. En fait, pas seulement la situation économique : la répression gouvernementale contre les peuples originaires yaquis (dans le Sonora) et nahuas (à Santa María Ostula, Michoacán, et à Ayotitlán, Jalisco), ainsi que contre le professorat démocratique (à Oaxaca dans un premier temps, mais cela touchera ensuite les autres entités de l’État mexicain) nous rappelle à toutes et tous que ceux d’en haut ne respectent pas leur parole, et que la trahison fait déjà partie intégrante de leur manière de faire de la politique.

Au niveau économique, bon on sait bien que ce n’est pas évident de trouver l’argent pour survivre au quotidien, et encore moins pour voyager facilement et rester plusieurs jours par ici.

Nous le savons bien, nous autres les femmes et les hommes zapatistes, que si nous appelons à venir à la petite école pour continuer à apprendre à nous regarder, il y en aura, c’est sûr, qui pourront se le permettre.

Mais la majorité de celles et de ceux qui ont été admis au premier niveau sont des compas qui n’ont pas de moyens et/ou qui ont des engagements à tenir vis-à-vis des tâches qu’ils accomplissent dans les géographies dans lesquelles ils luttent. C’est-à-dire que, comme on dit, ils ne peuvent pas passer leur temps à venir par ici. Pas parce qu’ils ne le veulent pas, mais parce qu’ils ne peuvent pas. Il y en a qui ont déjà fait tout ce qu’ils ont pu pour venir à la pépinière d’idées du mois de mai dernier, et du coup c’est assez difficile qu’ils puissent venir de nouveau cette année.

L’objectif, ce n’est pas que la petite école soit réservée à celles et ceux qui n’ont pas de problèmes d’argent pour voyager. Ce que nous les femmes et les hommes zapatistes nous voulons, c’est que nos compas de la Sexta puissent nous voir, nous regarder et nous écouter de manière directe, et, comme cela devrait aller de soi, en retirent ce qu’ils pensent pouvoir leur être utile, et laissent de côté ce qu’ils pensent ne pas être utile pour eux, ou bien ce qui les gêne.

Comme nous prenons tout cela en compte, eh bien nous devons réfléchir à comment faire pour continuer à parler avec vous et continuer à apprendre de manière mutuelle.

Et donc nous avons organisé les prochains niveaux (du deuxième au sixième) de façon à ce que vous n’ayez pas besoin de venir à tout bout de champ, mais on va dire une fois par an. Évidemment, en vous avertissant à l’avance, lorsque se présente la possibilité qu’on puisse vous recevoir par ici.

Voilà la situation, et donc nous vous informons que, pour le deuxième niveau, il n’y a pas de classe en territoire zapatiste. Bien sûr, si vous voulez venir à la fête des Caracoles, avec plaisir. Mais vous n’avez pas besoin de venir à l’école, quoi.

Mais par contre si, il va bien y avoir cours et, bien entendu, examen. On va faire les choses de cette manière :

  1. Celles et ceux qui ont validé le premier niveau recevront à partir du 30-31 juillet et du 1er août de cette année 2015 un courrier électronique (au cas où vous en avez un, et sinon et bien on l’enverra à ceux qui vous ont contacté pour le premier niveau). Dans ce courrier électronique, il y aura une adresse électronique sur laquelle sera hébergée une vidéo. Dans cette vidéo, un groupe spécial de professeurs et professeures zapatistes vous expliqueront ce qu’ils vous expliqueront. Pour pouvoir regarder cette vidéo, vous aurez besoin d’un code ou d’un « mot de passe » comme on dit, qui vous sera fourni dans ce même courrier que vous aurez reçu.

Bon, la vidéo, vous n’êtes pas obligé de la voir tout seul. Vous pouvez vous retrouver entre collectifs, groupes ou bien organisations pour la regarder. Vous pouvez le faire dans les locaux des équipes de soutien de la commission Sexta de l’EZLN présentes dans différents endroits du Mexique, ou bien dans les locaux des groupes et des collectifs et organisations de la Sexta dans le reste du monde.

Jusque-là, il n’y a pas de problèmes. Que ce soit de manière individuelle ou que ce soit en collectif, vous allez voir et écouter nos compañeras et compañeros vous dire quelque chose et vous expliquer une partie de la généalogie de la lutte zapatiste. Parce que vous, vous avez déjà écouté, vu et même partagé le quotidien des bases de soutien zapatistes, en compagnie de vos votanes et de leurs familles. Mais cela n’est qu’une partie de la lutte pour la liberté selon le zapatisme. Il manque d’autres parties.

C’est comme si nous ne vous avions donné qu’une partie du puzzle. C’est-à-dire comme on dit, qu’il manque ce qu’il manque encore.

Vous aurez également à étudier le chapitre I du livre La Pensée critique face à l’hydre capitaliste, les parties intitulées « Un peu de ce qui a changé » ; « Vers une généalogie de la lutte des femmes zapatistes » et « Notes de résistance et d’autonomie ». Si vous n’avez pas le livre en question, ne vous tracassez pas, parce que ces parties sont déjà en ligne sur la page Enlace Zapatista, même si c’est mieux que vous vous procuriez le livre, parce qu’à l’intérieur il y a l’idée intégrale, comme on dit.

  1. Après avoir vu, écouté et étudier ce que disent les compañeras et compañeros dans la vidéo, et après avoir étudié ces parties du livre, vous devrez écrire INDIVIDUELLEMENT six questions. Pas plus, pas moins. Six questions quant à ce que vous avez écouté et regardé dans la vidéo. Ces six questions, vous allez les envoyez à une adresse mail qui sera communiquée dans le courrier que vous allez recevoir. La date pour répondre est n’importe quel jour et n’importe quelle heure entre le 3 août 2015 et le 3 octobre 2015 inclus.
  2. Il n’y aura pas de réponse individuelle aux questions, mais des réponses collectives. C’est-à-dire qu’ici nous allons rassembler les questions et nous allons faire des écrits, des vidéos et des enregistrements qui répondront à ces questions. Lorsque vous lirez un texte de la comandancia, ou écouterez un enregistrement des votanes, vous saurez qu’ils répondent à votre question. Sinon, ne désespérez pas, cela veut dire qu’il y aura une autre parole où on vous répondra. Il n’y aura pas de réponses individuelles, mais des réponses générales et collectives.
  3. Les questions sont importantes. Comme c’est le cas dans notre style zapatiste, celles-ci sont plus importantes que les réponses. C’est-à-dire que ce sont les questions que vous ferez qui détermineront votre passage au troisième niveau.
  4. C’est-à-dire que, comme on dit, ce dont il s’agit, c’est que vous vous rendiez compte que ce qui intéresse les femmes et les hommes zapatistes, ce ne sont pas les certitudes, mais les doutes. Parce que nous pensons que les certitudes immobilisent, c’est-à-dire qu’elles rendent tranquille, content•e et fixe, sans mouvement, comme si la personne en question était déjà parvenue à terme ou savait déjà la réponse. En échange, les questions font qu’une personne se bouge, cherche, qu’elle ne se sente pas tranquille et ne soit pas satisfait•e, comme tracassé•e durant le jour ou durant la nuit. Et les luttes d’en bas à gauche, compas, naissent de ces inquiétudes, des doutes, de l’absence de tranquillité. Si une personne se sent satisfaite, c’est parce qu’elle est train d’attendre qu’on lui dise ce qu’il faut faire, ou qu’on lui a déjà dit ce qu’il faut faire. Si une personne ne se sent pas satisfaite, cela veut dire qu’elle cherche ce qu’il faut faire.
  5. Et donc dès à présent, on vous fait savoir ce qui sera évalué pour passer au troisième niveau : les six questions que vous, individuellement, allez faire. C’est cela que les votanes prendront en compte pour savoir s’ils vous intègrent dans la liste qui dit « admis au troisième niveau ».

Bon, c’est tout ce que nous avons à vous dire pour le moment, compas. Et puis, malgré tout cela et la petite école, il faut bien continuer à nous soutenir mutuellement et à soutenir ceux qui luttent pour vérité et justice, comme le village nahua d’Ostula qui exige justice pour l’attaque qu’ils ont subi, durant laquelle a été assassiné l’enfant Edilberto Reyes García par l’armée fédérale ; comme le village nahua d’Ayotitlán, attaqué par des hommes de main et des policiers au service de la multinationale minière Ternium ; comme les proches des 47 absents d’Ayotzinapa ; comme les proches des enfants de la garderie ABC (ce n’est pas parce que la nouvelle n’est pas diffusée dans les journaux qu’ils ont cessé de lutter pour obtenir justice) ; comme les proches des prisonniers, prisonnières et disparu•e•s politiques du monde entier ; comme le professorat rebelle ; comme la Grèce d’en bas à gauche, qui ne s’est pas fait bernée par la fable du référendum ; comme les prisonniers et prisonnières qui continuent à tenir tête au Pouvoir et à l’État, même derrière les barreaux ; comme celles et ceux qui lui tiennent tête, dans les rues et dans les champs de toutes les géographies ; comme les peuples originaires qui maintiennent leur défense de la Terre-Mère ; comme celles et ceux qui ne se vendent pas, qui ne titubent pas, qui ne se rendent pas.

Parce que c’est la résistance et la rébellion qui rompent les géographies d’en haut. Parce qu’en haut, lorsqu’ils prédisent la défaite, le découragement et le manque de fermeté, il y a toujours un•e, une ou un qui dit « NON ». Parce que regardez-bien comment sont les choses : aux racines de la liberté, il y a toujours un « NON » qui se cramponne à la terre, qui s’en nourrit, et qui grandit avec elle.

Voilà voilà. Et n’oublions ni l’aujourd’hui ni l’hier, c’est comme cela que nous nous souviendrons demain de ce qui reste à faire.

Sous-commandant insurgé Moisés,
directeur de la petite école.

Sous-commandant insurgé Galeano, 
concierge de la petite école.

Mexique, juillet 2015.

Note de Résistance 71: Rappelons que le SCI Galeano est l’ex-SCI Marcos, qui n’est plus le porte-parole emblématique de l’EZLN et a laissé la place au SCI Moisés en 2014…

Cas particuliers

29 juillet 2015.

Si vous n’avez pas reçu le courrier d’admission au deuxième niveau cela peut être dû au fait que…

… l’adresse du courrier électronique avec lequel vous vous êtes enregistré•e n’est plus valide, ou bien a été effacée, ou bien que le mot de passe a été oublié.

… que vous avez encore la même adresse mais que vous n’avez pas reçu l’admission parce que nous nous somme emmêlé les pinceaux et que nous avons de nouveau besoin de vos données personnelles… ou bien parce que vous n’avez pas été admis•e au deuxième niveau. Si, après avoir effectué ce que nous précisons plus bas, vous n’avez toujours pas reçu dans une période d’un mois le courrier d’admission, c’est parce que vous n’avez pas validé le premier niveau.

Dans tous les cas, la manière de résoudre cela est très simple : il suffit d’envoyer un nouveau courriel à l’adresse casosespeciales@ezln.org.mx , depuis une nouvelle adresse électronique, dans laquelle vous allez détailler :

– votre nom complet et votre date de naissance ;
– votre lieu de résidence ;
– votre clé d’enregistrement, si vous vous en souvenez ou si vous l’avez encore ;
– la date à laquelle vous avez suivi le cours ;
– le lieu où vous avez suivi le cours (si c’était dans une communauté, en précisant le nom de la communauté et le nom du caracol auquel appartient la communauté) ; (si c’était par vidéoconférence, le nom du lieu, du quartier, de la ville, du pays et du continent où vous avez assisté à la vidéoconférence) ;
– le nom de votre votán.

Source du texte d’origine :Enlace Zapatista

Traduction : CSPCL.

Résistance politique: Soutenir les Zapatistes du Chiapas, s’inspirer de leur lutte universelle et adapter la méthode…

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, démocratie participative, France et colonialisme, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, militantisme alternatif, N.O.M, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, philosophie, police politique et totalitarisme, politique et lobbyisme, politique et social, résistance politique, société libertaire, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , on 4 novembre 2014 by Résistance 71

Si nous sommes tous des colonisés, nous ne sommes pas, bien évidemment, tous des « zapatistes », des amérindiens ou des peuples autochtones de nations sous domination coloniale directe. Le message de lutte est universel à tous les peuples. La réalité pratique se doit d’être adaptée à l’environnement géographique et socio-politique de chacun des peuples concernés. Inspirons-nous du Chiapas et créons le confédéralisme démocratique en contre-pouvoir efficace au marasme systémique ambiant et sclérosé.

— Résistance 71 —

 

Chiapas

 

Alternative Libertaire

 

22 Octobre 2014

 

url de l’article:

http://www.alternativelibertaire.org/?Chiapas

 

Une compilation d’articles et de communiqués, ainsi que sur les luttes politiques au Mexique et des peuples indigènes du continent sud-américain. En rejoignant la « Sexta » des Zapatistes, Alternative libertaire entend défendre l’autonomie des peuples et les expériences d’auto-organisation et d’autogestion.

Le soulèvement

Le soulèvement zapatiste du 1er janvier 1994 a permis de mettre en lumière des problématiques sociales et politiques propres aux peuples indigènes, du Mexique comme d’ailleurs. Usage du territoire, représentation politique, perte des cultures, discrimination raciale, ces thèmes se sont retrouvés sur le devant de la scène mexicaine et internationale, et le soulèvement a provoqué ou renforcé de nombreux autres mouvements indigènes, ainsi que suscité une grande vague de solidarité internationale.

Les relations développées avec la société civile mexicaine et internationale, ainsi que l’intense préparation politique des zapatistes pendant les dix ans précédents le soulèvement, ont débouché sur un mouvement avec une forte capacité organisationnelle, un large soutien populaire, et un discours inspirateur pour de nombreuses luttes. Le discours anticapitaliste, les pratiques horizontales, les revendications d’autonomie, ont participé entre autres à populariser ce mouvement dans les milieux libertaires du monde entier.

Le but n‘est pas de retracer ici l’histoire du mouvement, mais de voir où il se situe aujourd’hui et ce qu’il peut nous apporter dans nos luttes.

Un nouveau cycle du mouvement zapatiste

Dès la fin des combats de 1994, l’EZLN à tissé des liens avec la société civile mexicaine et les mouvements altermondialistes au travers des marches du Chiapas jusqu’à Mexico ou de rencontres internationales sur leur territoire. Dans le même temps les zapatistes ont organisé leur autonomie dans les « territoires récupérés » lors de l’insurrection. Après deux années d’intense travail avec la société civile mexicaine et internationale (autour de la 6ème déclaration) en 2006 et 2007, ils et elles se sont concentré-e-s sur le développement de leurs capacités productives, politiques, sociales.

Vous êtes en territoire rebelle zapatiste. Ici le peuple commande et le gouvernement obéit.

Le « pouvoir » de l’EZLN (Armée Zapatiste de Libération Nationale) a été transmis à des instances civiles, les Juntas de buen gobierno (conseils de bon gouvernement), et de nombreux projets d’éducation, de santé, d’agriculture, de communication ont été mis en place ou renforcés. Les conditions de vie des communautés zapatistes se sont améliorées, malgré la répression constante du mouvement de la part des gouvernements local et fédéral. Les médias et nombre de mouvements politiques hostiles aux zapatistes ont profité de ce moment de moindre visibilité pour déclarer la disparition du mouvement. Mais le déclenchement d’une nouvelle phase de mobilisation depuis décembre 2012 leur a donné tort.

Le 21 Décembre 2012, environ 40.000 bases de apoyo (bases de soutien) zapatistes ont défilé silencieusement dans les cinq villes que l’EZLN avait prises par les armes le 1er janvier 1994. Le communiqué émis ce jour-là disait seulement « VOUS AVEZ ENTENDU ? C’est le son de votre monde en train de s’effondrer, C’est celui du notre qui resurgit. Le jour qui fut jour, était nuit, Et nuit sera le jour qui sera le jour. ».

Quelques jours après, l’EZLN a commencé à émettre des communiqués à un rythme soutenu, expliquant le relatif silence des années précédentes et la volonté de reprendre le travail de communication national et international, la nomination d’un nouveau subcomandante, et l’entrée dans une nouvelle phase de leur mouvement : « le temps du oui ». C’est-à-dire une phase de construction active d’une autre société et non plus de simple opposition ou résistance à la société existante. Puis, détaillant les premières étapes de cette nouvelle phase : 
 la escuelita (petite école), sorte d’université populaire organisée par les zapatistes dans leurs communautés depuis août 2013 jusqu’au début 2014 pour partager leur expérience avec des individu-e-s et des organisations sociales nationales et internationales qui les soutiennent. 
 la reprise d’un travail unitaire avec d’autres mouvements indigènes mexicains, notamment au travers de la Catedra Tata Juan Chavez des 17 et 18 août 2013.

Le moment d’entrée dans cette nouvelle phase de mobilisation répond à un contexte particulier.

D’une part, la généralisation de la violence. Le Mexique est devenu ces dernières années l’un des pays les plus violents au monde, avec le déclenchement de la « guerre contre le narcotrafic » sous le mandat du président Calderón (2006-2012) du PAN (Parti Action Nationale, droite conservatrice catholique), qui a fait 60 000 morts dont bon nombre de « dommages collatéraux ». Cette violence s’est ajoutée à la corruption et à l’autoritarisme de la classe politique mexicaine, détruisant encore plus le tissu social du pays, et masquant la répression (assassinats, disparitions, emprisonnements) dont souffrent les mouvements sociaux et indigènes.

D’autre part, le retour du PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel) au pouvoir. Le PRI a gouverné le Mexique pendant 70 ans d’affilés jusqu’à l’arrivée du PAN au pouvoir en 2000. Il symbolise la corruption, le clientélisme, la répression, le virage néolibéral, l’état mafieux (pratiques que le PAN a perpétuées avec plaisir), et son retour au pouvoir fin 2012 ne peut faire que craindre le pire.

Enfin, la mise en place de l’agenda néolibéral des élites nord-américaines. Intégration commerciale profitant aux multinationales, extraction sauvage des ressources naturelles, pillage des ressources biologiques, privatisations (éducation, énergie, etc.), aux conséquences socio-économiques désastreuses pour la majorité de la population, et notamment pour les peuples indigènes dépossédés de leurs territoires et de leurs cultures.

Un élément primordial dans cette nouvelle phase de mobilisation est aussi d’ordre culturel et spirituel. Le 21 décembre 2012 représente dans la cosmovision maya le passage à un nouveau cycle de leur calendrier, le 14eme Baktun, chaque baktun durant environ 394 ans. Cet aspect culturel a déterminé le choix de la date de la mobilisation du 21 décembre, et donne le sens du communiqué émis à cette occasion, l’entrée dans un nouveau cycle devant s’accompagner de l’entrée dans un autre modèle de société que les zapatistes s’efforcent de construire.

Plus récemment, suite à l’attaque du Caracol La Realidad et de l’assassinat du compa Galeano, perpétué par des paramilitaires, les zapatistes, par la voix du Sous-commandant Marcos, ont confirmé l’engagement dans cette nouvelle étape du mouvement. En effet, en décidant la « disparition » du personnage de Marcos, ils montrent au monde que leur mouvement est autogestionnaire et horizontal. L’évolution est notoire, comme le montre cet extrait du communiqué Ombre et Lumière de l’EZLN :

« Au cours de ce ces vingt dernières années, une relève complexe et à plusieurs niveaux s’est opérée au sein de l’EZLN. 
Certains n’ont vu que ce qu’il y avait de plus évident : la relève générationnelle. 
Aujourd’hui, en effet, ce sont celles et ceux qui étaient tout jeunes ou qui n’étaient pas encore nés au début de notre soulèvement qui luttent et conduisent la résistance. 
Cependant, certains lettrés n’ont pas eu conscience des autres relèves qui ont eu lieu : 
Une relève de classe : le passage d’une origine de la classe moyenne éclairée à une origine indigène paysanne. 
Une relève de race : de dirigeants métis, on est passé à des dirigeants nettement indigènes. 
Et le plus important, une relève dans la pensée. De l’avant-gardisme révolutionnaire, on est passé au « commander en obéissant » ; de la prise du Pouvoir d’en Haut à la création du pouvoir d’en bas ; de la politique professionnelle à la politique quotidienne ; des leaders aux communautés ; de la ségrégation de genre à la participation directe des femmes ; de la moquerie envers l’autre à la célébration de la différence. »

Aternative libertaire adhère à la Sexta, c’est-à-dire à la Sixième Déclaration de la Selva Lacandona, rédigée en 2005. Ce texte avait contribué à créer un nouveau réseau fédérant les groupes en lutte.

L’EZLN et le mouvement zapatiste ont montré au cours de ces dernières décennies qu’il n’y avait pas de fatalité dans ce monde dominé par le néolibéralisme, les injustices et les gouvernements à la botte des capitalistes. Même les plus pauvres, les plus oublié-e-s, peuvent se lever et crier Ya Basta ! Assez ! Et choisir une autre voie, basée sur la justice, la démocratie, la dignité, la solidarité, l’égalité.

Ce qu’ont réussi à construire les zapatistes depuis la création de l’EZLN représente une source d’optimisme et d’inspiration pour tous ceux et toutes celles qui luttent pour un monde meilleur. Les conditions politiques, sociales, culturelles, ne sont pas les mêmes en France et au Chiapas, et n’appellent pas les mêmes réponses, mais un désir commun doit nous animer, comme partout sur cette planète : reprendre le contrôle de nos vies. Et sur ce plan là, les zapatistes sont un exemple.

Alternative libertaire lutte depuis longtemps contre toutes les oppressions : capitaliste, étatique, patriarcale, raciste. Nous participons dans la mesure de nos capacités aux mouvements sociaux et aux luttes sur nos lieux de travail, et diffusons autant que possible nos idées communistes libertaires pour créer une société libre de toute forme de domination.

Depuis le soulèvement zapatiste, nous avons suivi avec intérêt et solidarité l’évolution de cette lutte, et l’avons diffusée dans les pages de notre journal. Mais nous n’avons jamais formalisé notre solidarité, ni n’avons participé aux rencontres et activités organisées par les zapatistes ou les mouvements de solidarité. Il est malheureusement difficile de s’engager sur tous les fronts. Mais aujourd’hui, alors que les conséquences économiques, sociales et écologiques du néolibéralisme se font de plus en plus dramatiques et irréversibles, il nous semble important de participer à la nouvelle dynamique que les zapatistes essayent d’impulser. C’est pourquoi nous avons décidé de rejoindre la Sexta Declaración de la Selva Lacandona.

Ces derniers mois, à l’occasion des 20 ans du soulèvement, nous avons participé dans différentes villes de France à des activités de solidarité en commun avec d’autres groupes et collectifs de soutien aux zapatistes, avec des débats publics, des repas de solidarité, et la participation à des rassemblements de soutien. Avec ces collectifs, nous tentons tant bien que mal d’apporter notre aide.

Nous souhaitons ainsi diffuser la lutte zapatiste et les revendications d’autonomie des peuples indigènes du Chiapas et d’ailleurs, et exiger l’application des accords de San Andres, la libération des prisonniers politiques et la fin du harcèlement militaire et de la violence politique dont sont trop souvent victimes les peuples du Chiapas et du reste du Mexique.

Résistance politique: Application française de la petite école zapatiste du Chiapas…

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, écologie & climat, économie, crise mondiale, démocratie participative, militantisme alternatif, pédagogie libération, philosophie, politique et social, politique française, résistance politique, société libertaire, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , on 23 octobre 2014 by Résistance 71

Des Cévennes à l’Ariège en Juillet 2014: La “petite école buissonnière”

 

La Voie du Jaguar

 

20 Octobre 2014

 

url de l’article original:

http://www.lavoiedujaguar.net/Petite-ecole-buissonniere-des

 

Nous étions quelques-uns à avoir participé à l’école « La Liberté selon les zapatistes » dont les sessions ont eu lieu début août 2013, fin décembre 2013 et début janvier 2014 dans les zones zapatistes des cinq Caracoles au Chiapas. C’était pour nous comme un engagement moral, pris auprès des zapatistes qui nous avaient reçus, de transmettre autour de nous (dans la mesure du possible) ce que nous avions appris au cours de cette semaine de « classe ». Outre cet engagement, nous étions aussi animés par l’idée d’une rencontre avec celles et ceux qui, au cœur du monde capitaliste, dans des conditions difficiles et contraires, cherchent à construire, à inventer une vie commune.

Nous pensions qu’un échange entre les luttes et les résistances des peuples zapatistes du lointain Mexique face à l’offensive du monde marchand et la recherche d’alternatives de vie ici, dans la vieille Europe (limitée au Sud-Ouest français), pouvait être fructueux, cela malgré la disproportion qui pouvait exister entre les deux expériences : celle des peuples indiens cherchant à reconstruire une vie sociale autonome dans des conditions extrêmement hostiles (présence de l’armée mexicaine, groupes paramilitaires) mais en s’appuyant sur une tradition de vie commune forte ; celle de groupes et d’associations d’individus qui trouvent dans la lutte la matière d’un savoir-vivre ensemble. C’est ainsi que des contacts furent pris avec des associations, des collectifs, des groupes et qu’une tournée d’une dizaine de jours fut organisée. Elle nous a conduits des Cévennes aux Pyrénées du 17 juillet au 26 juillet de l’année 2014.

Dans la salle communale de Saint-Privat-de-Vallongue, en Lozère, nous avons guidé la visite d’une exposition de photos et textes sur l’Escuelita et les écoles zapatistes et nous avons informé les gens rencontrés sur la reconstruction de la clinique et de l’école à La Realidad suite à l’agression des paramilitaires.

Nous avons rencontré à Saint-Victor-et-Melvieu, en Aveyron, des membres d’associations en lutte contre un projet de transformateur et contre la construction d’éoliennes. L’opposition des peuples zapotèque et huave de l’isthme de Tehuantepec à l’envahissement de leurs terres communales par les aérogénérateurs, présentée à partir du petit documentaire Somos viento a donné une dimension internationale aux luttes locales.

À Marcillac, nous avons été reçus au Guingois, lieu de rencontre où l’expérience de construction d’une autonomie sociale par les peuples zapatistes a particulièrement intéressé les habitants de la ferme de Pruines, ferme achetée et gérée collectivement depuis trois ans et demi.

Le 21 juillet nous nous trouvions à la librairie Plume(s) à Millau pour la présentation du livre de Guiomar Rovira Femmes de maïs ; un débat s’engagea ensuite avec des membres du réseau des faucheurs volontaires anti-OGM, du réseau antifasciste No pasarán et de la radio libre Radio Larzac sur la place des femmes dans le mouvement zapatiste.

La rencontre avec L’Ouvert du Canal, association de voisins habitant un espace collectif à Ramonville-Saint-Agne, près de Toulouse (à laquelle s’étaient joints des amis toulousains), a permis une discussion sur la notion de territoire comme lieu de vie.

Le mercredi 23 juillet, nous étions invités dans le Tarn, à La Fontié, ferme rachetée il y a peu de temps par un collectif inspiré par le mouvement zapatiste cherchant à se doter des moyens d’une vie collective en « ruptures » avec les injonctions du monde marchand. Ils nous ont fait part des difficultés rencontrées et des compromissions qu’ils sont amenés à faire.

Ensuite nous sommes allés à Vaour. Nous avons été reçus à la ferme de Martre où une discussion s’est engagée sur la différence entre le mouvement zapatiste et les expériences de « revitalisation » des liens sociaux entreprises par de petits groupes d’individus de-ci de-là. Le soir, à Vaour, ceux qui avaient participé à l’Escuelita ont raconté leur séjour dans une communauté zapatiste, les initiatives qui y sont prises et l’organisation politique.

L’École buissonnière s’est terminée le 26 juillet à Saint-Girons, en Ariège (Pyrénées). Un passionnant débat s’est engagé au Palmier, lieu autogéré, sur les luttes et les résistances sociales d’un côté à l’autre de l’Océan, entre la résistance des peuples indiens face à l’offensive destructrice de l’environnement du monde capitaliste (mines, éoliennes, barrages, destruction des forêts…) et la résistance des villages pyrénéens (gaz de schiste, exploitation de la biomasse, déforestation…), comme celle de la commune de Camarade s’opposant à l’installation d’éoliennes sur ses terres.

Résistance politique: Un exemple de société autogérée, non pyramidale, non coercitive: Le Chiapas (Mexique) depuis 1994…

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, démocratie participative, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, philosophie, politique et social, résistance politique, société libertaire, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , on 6 mai 2014 by Résistance 71

“Nous montrons au pays (Le Mexique) et au monde, que pour être capable de développer une bien meilleure vie, vous pouvez parfaitement le faire sans la participation aucune du mauvais gouvernement (l’État). Le progrès en éducation, santé, commerce, sont des projets que nous abordons et menons avec une société civile nationale et internationale, parce qu’ensemble nous construisons ce que nous pensons être bon pour le peuple. Pourquoi le peuple mexicain et les autres peuples d’autres pays nous soutiennent-ils ? Nous pensons que c’est parce qu’ils voient bien que rien de ce que nous faisons est seulement à cause de nous, pour nous. Nous disons simplement que tout le monde peut planifier et décider comment leur économie et leur gouvernement devraient être et nous travaillons dans la pratique à cette forme de gouvernement.”

-o-o- Subcomandante Moisés, EZLN, 2004 –o-o-

 

Rebeldia Zapatista la parole de l’EZLN

 

Subcomandante Insurgente Moisés

 

Mexique, Avril 2014, 20ème année de la guerre contre l’oubli

 

url de l’article:

http://bsnorrell.blogspot.com/2014/05/rebeldia-zapatista-word-of-ezln.html

 

article original en espagnol:

http://enlacezapatista.ezln.org.mx/2014/04/24/editorial-2-rebeldia-zapatista-la-palabra-del-ezln/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Compañeras et compañeros de la sixième (declaration) et de la petite école zapatiste:

Nous continuons ici de rapporter les paroles des compañeras et compañeros, des familles, des gardiens et des enseignants sur la façon dont ils ont vu et évalué leurs élèves de la petite école. Comme ils disent ici dans ces terres rebelles, il n’y a pas de répis, on doit continuer à travailler dur.

Nous mentionnons ceci parce qu’il y a toujours plus de travail qui arrive avec les compañeras et compañeros du Congrès National Indigène (CNI). Donc vous voyez bien, c’est vrai… Pas de répis. Et même lorsqu’il y a une coupure dans ces tâches, le temps est utilisé pour travailler à soutenir les familles, mais aussi pour penser, pour étudier et à faire de nouveaux plans pour la lutte.

Ceci est important du simple fait que les capitalistes néolibéraux ne prennent pas de repos non plus et pensent toujours au comment étendre leur domination à l’infini.

Comme le dirent si bien les Compañeras et compañeros dans un des “partages” que nous avons eu ici: en juste 19 ans, nous avons mis à la poubelle le mauvais système de 520 ans d’âge de domination et nous tenons maintenant notre proppre liberté et notre propre démocratie entre nos mains et nous ne sommes juste que quelques milliers d’hommes et de femmes qui gouvernons nos propres communautés, imaginez si nous nous organisions avec quelques autres millions de personnes dans les campagnes et dans les villes.

Comme ces mêmes compañeras et compañeros le disent, ceci est grâce au fait que nous nous sommes organisés et avons compris ce que la dignité et la résistance veulent véritablement dire. Nous ne nous résignons plus aux miettes, aux dons, aux pitances qui nous étaient jetés au fur et à mesure des déceptions et des mensonges du mauvais gouvernement.

Comme le disent les zapatistes, nos arrières arrières grand-parents, nos arrières grands-parents, nos grand-parents, n’ont jamais rien reçu à manger. Bien au contraire, ce qu’ils produisaient leur était enlevé et on leur laissait des miettes afin qu’ils puissent retourner au travail le lendemain pour leur propriétaire terrien. C’est comme cela qu’ils ont vécu: exploités par le patron et le mauvais gouvernement. Pourquoi penserions-nous que le mauvais gouvernement soit diférent aujourd’hui ? Qu’il serait bon alors qu’il est constitué des arrières arrières petits-enfants des mêmes exploiteurs et qui sont les plus corrompus de notre temps ?

C’est pourquoi les nouveaux patrons sont étrangers, enfin si nous les laissons faire, si nous les pauvres hommes et femmes de la campagne et de la ville nous résignons à cela.

Il est grand temps pour les pauvres des campagnes et des villes de s’auto-organiser, temps pour les gens des campagnes et des villes de reprendre leur destinée en mains. C’est à dire, il est temps pour le peuple de se gouverner lui-même au lieu d’être gouverné par quelques individus du haut de la pyramide qui essaient juste d’être toujours plus riches. C’est facile de le voir, de le comprendre et de confirmer en pratique que c’est de fait, la seule raison de leur présence.

C’est pourquoi les compañeras et compañeros des bases de support zapatistes se sont organisés eux-mêmes et ont rêvé et ont travaillé ensemble pour déterminer leurs propres destinées, cette destinée est maintenant totalement visible. Leur façon de se gouverner eux-mêmes comme peuple et comme communautés est totalement différent ; ils gouvernent en tant que peuple et leurs représentants leur obéissent (NdT: Retour à la société traditionnelle où les “chefs” n’ont aucun pouvoir et ne font que représenter leur peuple, cf Pierre Clastres et ses études sur le changement de direction de la dette que nous avons publiées..), c’est à dire que leur gouvernement obéit au peuple. Ceci est le véritable changement, pas seulement un changement de couleurs et de logos. Qui dit que cela ne peut pas être accompli, Compañeras et compañeros de la Petite Ecole ? Cela peut-être fait, parce que c’est le peuple lui-même qui décide, de manière organisée, ce qu’il veut et ce dans tous les aspects de sa vie…

Pourquoi avoir peur de laisser les gens décider eux-mêmes du comment leur nouvelle vie sera ? Comment ne pouvons-nous pas avoir peur de la grande atrocité commise par les trois niveaux de mauvais gouvernement qui décident de notre futur contre le bien et l’intérêt général ? C’est là que les Compañeras et compañeros de l’EZLN disent que le peuple doit avoir le pouvoir de décision sur sa propre vie, parce que les gens prennent les décisions pour le bien de la communauté et non pas pour profiter de leur propres vices. Et s’ils font des erreurs, et bien ils les corrigent d’eux-mêmes. Mais les trois niveaux du mauvais gouvernement n’ont pas d’yeux ni d’oreilles pour voir et entendre, ils refusent de reconnaître toute erreur commise au sein de leur monde de domination et de mensonge. Laissons ce monde derriere nous, laissons les seuls et voyons s’ils peuvent survivre, arrêtons de nous laisser exploiter. Les Compañeras et compañeros des communautés zapatistes ont fourni un exemple à suivre.

Voilà pourquoi nous continuons à partager ici les mots des Compañeras et compañeros des bases de soutien de l’EZLN.

Ceci continuera encore et encore.

Subcomandante Insurgente Moisés.

Mexique, Avril 2014. Vingtième année de la guerre contre l’oubli.

 = = =

A lire:

“EZLN 20 et 10, le Feu et la Parole”, Gloria Muñoz Ramirez, éditions Nautilus, 2005

A notre sens le meilleur bouquin écrit sur l’histoire du mouvement zapatiste par une journaliste mexicaine qui a passé 7 ans au Chiapas entre 1997 et 2004 et a rencontré les protagonistes, vécu avec eux… longtemps.

Résistance politique à l’oligarchie mondiale: Les Zapatistes du Chiapas (Mexique) montrent la voie…

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, démocratie participative, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, ingérence et etats-unis, militantisme alternatif, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, philosophie, politique et lobbyisme, politique et social, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , , on 23 mars 2014 by Résistance 71

… d’un nouveau paradigme politique par la résurgence indigène et l’enseignement de la pratique démocratique réelle.

Excellente analyse de la situation mondiale par le Sub Moisès.

L’avenir de l’humanité demeure dans les peuples occidentaux, libérés de l’idéologie colonialiste, se tenant aux côtés de leurs frères indigènes pour gérer ensemble la planète de manière égalitaire, fraternelle et libre.

— Résistance 71 —

 

Rebeldia Zapatista

La Parole de l’EZLN

 

22 mars 2014

 

url de l’article original en français:

http://www.lavoiedujaguar.net/Rebeldia-Zapatista-La-parole-de-l

 

 

Éditorial

Nous sommes les femmes et les hommes zapatistes, rebelles en notre propre patrie, le Mexique, parce que nous sommes menacés de destruction, au même titre notre terre-mère, menacés sous terre et sur nos terres par les personnes mauvaises riches et par les mauvais gouvernants qui ne pensent qu’à convertir tout ce qu’ils voient en marchandises pour leur seul profit : ce sont les capitalistes néolibéraux.

Ils veulent posséder tout.

Ce sont des destructeurs, des assassins, des criminels, des violeurs. Ils sont cruels et inhumains ; ce sont des tortionnaires ; ils font disparaître les gens ; ce sont des corrompus qui concentrent tout ce que l’on peut imaginer de pire. Ils sont comme ça, ils n’ont rien à faire de l’humanité. Ils sont plutôt antihumains.

Ils ne sont qu’une poignée, mais qui décide de tout ; ils décident de comment dominer les pays qui se laissent dominer : ils ont fait des pays sous-développés leur chasse gardée, leur propriété privée, et ont fait des gouvernements capitalistes sous-développés de simples contremaîtres à leur service.

C’est le cas chez nous, au Mexique. Le patron, ce sont les néolibéraux sans frontières ; leur hacienda s’appelle le Mexique ; leur contremaître de service aujourd’hui s’appelle Enrique Peña Nieto ; leurs majordomes, ce sont Manuel Velasco, au Chiapas, et tous les autres gouverneurs, comme on les appelle, de chacun des États mexicains ; leurs capitaines, ce sont les mal nommés « présidents municipaux » (maires) et autres autorités municipales.

C’est contre une telle situation, contre ce système, que nous nous sommes insurgés à l’aube du 1er janvier 1994.

Cela fait maintenant trente ans que nous construisons et mettons en pratique notre idée d’une vie meilleure, à la vue de tout le monde : le peuple mexicain et le monde entier peuvent venir voir par eux-mêmes ce qu’il en est. Humblement mais sagement, différents peuples réunis, des dizaines de milliers de femmes et d’hommes décident et choisissent comment se gouverner de façon autonome.

Nous ne cachons rien de ce que nous faisons, des buts que nous poursuivons, de ce que nous voulons ; tout est visible, à la vue de tous.

Il n’en est pas de même avec les mauvais gouvernants, à savoir, les trois mauvais pouvoirs [1] : le système capitaliste, lui, fait tout en cachette, derrière le dos du peuple.

Nous, nous partageons avec les compañeros et les compañeras du Mexique et du monde notre humble façon d’envisager ce monde nouveau que nous imaginons et désirons ardemment.

C’est pour cette raison que nous avons décidé, après réflexion, de créer l’école zapatiste.

Un lieu où il est question de la liberté et de la construction d’un monde nouveau différent de celui dans lequel nous maintiennent les capitalistes néolibéraux.

Et ensuite, chez nous, c’est le peuple qui en discute, la base directement et non pas uniquement ses représentants. Ce sont les communautés qui disent si tout va bien ou si l’organisation actuelle leur convient, et non leurs représentants. En d’autres termes, c’est la base qui vérifie si les choses se passent comme le disent ses représentants.

compañeros de la ville et de la campagne, vous méritez de partager tout cela avec nous tous, parce que c’est nous tous ensemble qui devons penser à comment doit être ce monde nouveau que nous voulons et non pas seulement nos représentants ou des dirigeants. Ce n’est pas à eux de le penser et de le dire et encore moins de nous dire si c’est bien ou non la manière dont tout est organisé. C’est au peuple, à la base, d’en juger.

Alors, à vous de dire si c’est utile pour vous d’avoir participé à l’école zapatiste.

Comme vous le verrez en lisant les textes publiés dans ce numéro de Rebeldía Zapatista, notre revue, cela a servi à ce que des personnes bonnes aux Mexique et dans le monde connaissent nos compañeros et compañeras des bases de soutien, parce que aucun gouvernement, au Mexique même, ne veut reconnaître l’existence des indigènes. Ils ne se souviennent d’eux qu’en période d’élections, comme s’ils n’étaient que des bulletins de vote.

C’est seulement en s’organisant comme ils l’ont fait, avec leur lutte, qu’ils ont pu se défendre pendant trente ans.

Ils font tout ce qui est possible, réalisent l’impossible, et ils l’ont largement démontré tout au long de ces trente ans d’existence. C’est ce qu’ils partagent et communiquent ici.

Avec cette école, nous avons fait en sorte que la parole de nos compañeras et de nos compañeros des bases de soutien zapatiste voyage beaucoup plus loin et franchissent des milliers et des milliers de kilomètres, contrairement aux balles de nos fusils à l’aube du mois de janvier 1994. Certaines n’ont parcouru que 50 mètres à peine, d’autres 100 mètres et au mieux certaines ont franchi jusqu’à 300 ou 400 mètres de distance ; les paroles, l’idée de l’école zapatiste traverse des océans, des frontières et des espaces énormes pour vous rejoindre, compañeras, compañeros.

Nous les indigènes rebelles, nous le savons bien et nous savons qu’il y a d’autres femmes et d’autres hommes rebelles qui sont indigènes et qui savent aussi ce qu’est le capitalisme néolibéral.

Et il y a d’autres frères et sœurs qui sont aussi des rebelles, sans être indigènes, qui peuvent aussi écrire et partager dans cette revue pour faire savoir leur pensée et ce qu’ils pensent du système actuel qui veut détruire la planète Terre. C’est pour cela que nous donnons également la parole, dans ce numéro de notre revue, à des compañeras et à des compañeros anarchistes.

Bien, compañeros de la Sexta, le mieux c’est que ceux qui ont assisté aux discussions et ont pu le voir avec leurs propres yeux et l’entendre avec leurs propres oreilles et en ont été satisfaits se chargent de le communiquer et de l’expliquer à ceux qui ne peuvent pas venir.

Dans ce premier numéro de notre revue, on trouvera retranscrites les paroles et la pensée de nos compañeras et compañeros des bases de soutien zapatistes, des familles, des gardes d’enfants, des instituteurs et institutrices, qui donnent leur avis sur l’école où ils partagent leurs points de vue et aussi sur les compañeras et compañeros élèves. Dans les prochaines livraisons, nous publierons l’évaluation recueillie de la bouche des professeurs, des guides, des familles et des chargés de coordination de cette école dans chacune des zones des cinq caracoles.

De la même façon que vous avez discuté entre vous ou publié ce que vous avez vécu, vu et entendu dans nos terres zapatistes, vous pourrez lire ici comment l’ont vu et entendu celles et ceux qui ont brandi l’étendard de la RÉBELLION ZAPATISTE.

Sous-commandant insurgé Moisés

Mexique, janvier 2014. 
An XX après le début de la guerre contre l’oubli.

Traduit par SWM.

Source du texte d’origine : 
Enlace Zapatista

Notes

[1] Le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire (NdT).

Résistance politique: Mondialisation de la rébellion pour un changement de société…

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, crise mondiale, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , on 10 mars 2014 by Résistance 71

“La forme de capitalisme liée à la mondialisation néolibérale est fondée sur l’exploitation, le pillage, le mépris, et la répression de ceux qui s’y opposent. En d’autres termes, la même chose qu’auparavant, mais maintenant à l’échelle planétaire… Mais ce n’est pas si facile pour cette mondialisation néolibérale, parce que ceux qui sont exploités dans chaque pays ne s’assoient pas à attendre leur triste sort, ils se rebellent et ceux qui ne s’intègrent pas et se retrouvent sur le chemin du néolibéralisme résistent et refusent d’être éliminés ; tout comme il y a une mondialisation néolibérale, il y a également une mondialisation de la rebellion…”

~ Extrait de la 6ème déclaration zapatiste de la jungle de Lacandon, Juin 2005 ~

 

Rebeldia Zapatista, La parole de l’EZLN

 

Editorial de Rebeldia Zapatista, la parole de l’EZLN

 

Subcomandante Insurgente Moisés

 

3 Mars 2014

 

url de l’article:

http://bsnorrell.blogspot.com/2014/03/rebeldia-zapatista-word-of-ezln.html

 

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Nous, les rebelles zapatistes, ainsi que notre terre-mère, sommes menacés de destruction dans notre patrie mexicaine. A la fois au dessus et en dessous de la surface de la Terre, les mauvais gouvernements, les mauvais riches, tous les capitalistes néo-libéraux, veulent transformer en commodités tout ce qu’ils voient.

Ils veulent tout posséder.

Ils sont destructeurs, ce sont des assassins, des criminels, des violeurs. Ils sont cruels et inhumains, ils torturent, font disparaître des gens, ils sont corrompus. Ils sont tout ce que vous pouvez imaginer de mauvais, ils se moquent éperdument de l’humanité. Ils sont en fait, inhumains.

Ils sont peu nombreux, mais ils décident de tout, de la façon dont ils vont dominer les pays qui se laissent dominer. Ils ont fait des pays sous-développés leurs plantations et ont assujettis les soi-disants gouvernements des pays capitalistes sous-développés. C’est ce qui s’est passé au Mexique. Les corporations néolibérales transnationales sont les patronnes, leur plantation s’appelle le Mexique, le délégué en charge actuel s’appelle Enrique Peña Nieto, les administrateurs sont Manuel Velasco au Chiapas et les autres soi-disants gouverneurs des états et les “présidents” municipaux ces mal-nommés sont les contremaîtres du système.

C’est pour cela que nous nous sommes soulevés contre ce système à l’aube du 1er Janvier 1994.

Pendant 30 ans (NdT: la phase préparatoire clandestine de la rebellion zapatiste s’est tenue entre 1984 et 1994…), nous avons construit ce que nous pensons être une meilleure façon de vivre et ce que nous avons construit est disponible pour tout le peuple du Mexique et pour le monde a voir et à analyser. C’est une chose humble, mais déterminée sainement par des dizaines de milliers d’hommes et de femmes qui décident ensemble comment nous voulons nous gouverner de manière autonome et autogérée. Rien ne cache ce que nous faisons, ce que nous voulons, ce que nous recherchons. Tout est bien visible. Le mauvais gouvernement d’un autre côté, les trois mauvais pouvoirs que sont le système capitaliste, fait tout derrière le dos des gens.

Nous partageons notre humble idée du nouveau monde que nous imaginons et désirons avec les compañeros et les compañeras du Mexique et de partout dans le monde.

C’est pourquoi nous avons décidé de créer la “Petite École Zapatiste” (escuelita zapatista). Cette petite école est à propos de la liberté et de la construction d’un monde différent de celui des capitalistes néo-libéraux. De plus, ce sont les gens eux-mêmes, c’est à dire, la base de soutien populaire qui partagent ces idées et non pas juste leurs représentants. Ces gens, et non pas leurs représentants, sont ceux qui diront s’ils font bien ou si la façon dont ils sont organisés fonctionne bien. De cette façon, les autres peuvent voir si les choses sont réellement comme les représentants des gens disent qu’elles sont.

Ce grand “partage” entre nous, compañeros des villes et de la campagne est nécessaire parce que nous sommes ceux qui doivent penser comment le monde que nous désirons devrait être. Ce ne peut pas être nos représentants ou nos leaders qui pensent et décident comment le monde devrait être et ils ne peuvent certainement pas être ceux qui disent comment nous réussissons en tant qu’organisation. C’est le peuple, la base, qui doit adresser ce sujet.

Ceux qui ont participé peuvent nous dire si tout cela a aidé et a été utile.

Comme vous le lirez dans ce numéro de notre magazine “Rebeldia Zapatista”, ce processus a aidé les compañeros et les compañeras qui sont la base du soutien, à rencontrer d’autres personnes venant d’autres parties du Mexique et du monde entier. Ceci est très important parce qu’au Mexique, il n’y a pas de gouvernement qui reconnaisse les peuples indigènes. Le gouvernement ne s’en souvient qu’au moment des élections, comme s’ils n’étaient que des ustensiles à voter.

Ce n’est qu’au travers de l’organisation et de la lutte que les bases du soutien se sont elles-mêmes défendues depuis maintenant 30 ans. Ces bases de soutien populaire ont fait tout ce qui était en leur pouvoir et tout ce qui était possible, ces 30 dernières années et c’est cela qu’elles partagent aujourd’hui.

Nous avons travaillé à la création de la Petite École Zapatiste de façon à ce que les mots des compañeros et des compañeras qui sont la base de soutien de l’organisation zapatiste, puissent parvenir au plus grand nombre. Avec la Petite Ecole, leurs voix portent à des milliers et des milliers de kilomètres, non pas comme nos balles en ce 1er Janvier 1994, qui n’allèrent que 50 ou 100m devant nous, au plus loin, 400m. Les enseignements de la Petite Ecole Zapatiste traversent les océans, les frontières et les cieux pour vous atteindre, vous, les compañeros et les compañeras.

Nous les autochtones rebelles, savons qu’il y a d’autres rebellions indigènes, qui savent également ce qu’est vraiment le capitalisme néolibéral.

Il y a aussi des frères et sœurs en rebellion qui ne sont pas indigènes, mais qui écrivent pour partager avec nous dans cette édition ce qu’ils pensent et comment ils voient ce système qui est en train de détruire la planète. C’est pourquoi nous incluons également les mots de compañeros et compañeras anarchistes dans cette édition du magazine.

Et bien compañeros de la 6ème (NdT: Référence à la sixième déclaration zapatiste de la jungle de Lacandon de Juin 2005, qui déclarait l’ouverture du mouvement zapatiste vers l’extérieur), il est très bon que ceux qui sont venus aient pu voir de leurs propres yeux et entendre de leurs propres oreilles ce qu’il se passe ici et qu’ils soient repartis prêts et désireux de communiquer tout cela à ceux qui n’ont pas pu venir.

Dans cette première édition de ce magazine, nous allons commencer à partager quelques mots et idées de nos compañeras et de nos compañeros qui sont la base du soutien zapatiste, les familles, les gardiens, les gardiennes et les enseignants, sur la façon dont ils ont perçu les étudiants de la Petite École Zapatiste. Dans les premières publications de notre magazine, nous allons partager les évaluations faites par les enseignants de la petite école, les votanes, les familles d’accueuil et les coordinateurs des zones des cinq caracoles (NdT: Le Chiapas zapatiste est divisé en 5 zones d’autodétermination populaire de bon gouvernement: les “caracoles” ou “escargots” en espagnol).

De la même manière que vous avez pu parler ou publier ce que vous avez vécu, vu ou entendu dans notre territoite zapatatiste, vous pourrez lire ici comment nous avons vu et entendu ceux qui sont venus et ont levé le drapeau de la rebellion zapatatiste.

Subcomandante Insurgente Moisés

Mexique, Janvier 2014, 20 ans après le débur de la guerre contre l’oubli.

2000ème article… Honneur aux 20 ans de la lutte autogestionnaire zapatiste autochtone du Chiapas…

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Il y a avec cet article 2000 articles en archives sur Résistance 71… Bonne lecture !

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Le salut de l’humanité viendra des peuples occidentaux rejetant l’idéologie colonialiste des oligarques qui les oppriment tout autant que les peuples colonisés, se rangeant aux côtés de ces peuples, pour changer unis et à jamais le paradigme politique et social qui régit les sociétés humaines. L’occident ne peut mûrir qu’au contact et en symbiose avec les peuples qu’il a opprimé pendant plus de 500 ans.

Alors oui… ¡Ya Basta!

~ Résistance 71 ~

 

Le mouvement zapatiste célèbre ses 20 ans

 

Pablo Vivanco (notes de proceso.mx.com)

 

22 janvier 2014

 

url de l’article:

http://tworowtimes.com/news/international/zapatistas-celebrate-20-year-anniversary/

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

Le 1er Janvier, les gouvernements du Canada, du Mexique et des Etats-Unis ont marqué le 20ème anniversaire du traité de libre échange entre les pays (NAFTA).

Au Chiapas, l’état le plus méridionnal du Mexique, c’est un aniversaire bien différent qui y fut célébré.

L’Ejercito Zapatista de Liberación Nacionale (EZLN), souvent appelée les Zapatistes, a célébré ses 20 ans depuis le début de l’insurrection armée ; disant qu’aujourd’hui “¡Ya Basta!” (“Assez c’est assez !”), l’EZLN a déclaré la guerre au gouvernement mecixain le 1er janvier 1994.

Parmi les trois principes  de base zapatistes figurait la défense des droits collectifs et individuels des peuples autochtones historiquement refusés par tous les gouvernements mexicains. Le traité NAFTA attaquait non seulement la classe ouvrière des trois pays, mais aussi les droits terriens communaux traditionnels des Indiens du Mexique.

La base sociale zapatiste est essentiellement constituée des populations indiennes rurales du Chiapas soient environ 957 000 des 3,5 millions personnes de l’état, qui parlent une des 56 différentes langues de la région. Un tiers de ces gens ne parlent pas du tout l’espagnol. Des 111 municipalités, 22 ont des populations autochtones allant jusqu’à 90% et 36 autres municipalités comptent une population indienne de plus de 50%.

L’état du Chiapas compte environ 13,5% de toute la population autochtone indienne du Mexique. La plupart des groupes indigènes au Chiapas inclus les Tzeltal, Tzotzil, Ch’ol, Zoque, Tojolabal et les Lacandon, tous descendent des Mayas.

L’EZLN accuse le gouvernement fédéral mexicain de maintenir une stratégie de guerre contre eux et veut reprendre les terres récupérées par les Zapatistes durant leur insurrection. Les Zapatistes ont aussi émis un nouvel appel à la rebellion et ont déclaré leur intention de renforcer l’autonomie de leur peuple.

Devant une assemblée de plusieurs milliers d’invités et des centaines de membres, la Commandante Hortencia a lu une déclaration qui insistait sur la lutte pour le maintien de l’autonomie et de l’autogestion. “Nous apprenons à nous gouverner nous-mêmes en accord avec nos façons de penser et de vivre. Nous essayons d’aller de l’avant en nous améliorant et en nous renforçant ensemble, femmes, hommes, enfants, jeunesse et anciens. Il y a 20 ans nous disions ¡Ya Basta!” Hortencia, une femme Tzotzil et une porte-parole de l’EZLN a dit que les Zapatistes doivent continuer d’organiser le renforcement de la rebellion et de l’autogestion.

Nous partageons notre expérience avec la nouvelle génération d’enfants et de jeunes. Nous préparons notre peuple à résister et à se gouverner. Dans nos zones zapatistes, nous n’avons plus de mauvais gouvernement, il n’y a plus non plus de partis qui règnent et manipulent.”

Des festivités ont duré toute la journée et dans la nuit, dans le brouillard et la bruine constante, festivités auxquelles assistèrent des milliers de jeunes de presque tous les états du pays ainsi que des étudiants venant d’autres pays, élèves des cours de la “petite école zapatiste” (NdT: qui devient internationalement populaire…)

A ces visiteurs, la Commandante Hortencia parla de la possibilité pour l’expérience autonome et autogestionnaire zapatiste de s’appliquer n’importe où.

Résistance politique: 2014… 20 ans d’insurrection au Chiapas (EZLN), petit bilan…

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« Pourquoi serons-nous pardonnés ? De quoi  devons-nous demander pardon ? De ne pas être mort de faim ? De ne pas rester silencieux devant notre misère ? De ne pas avoir accepté humblement la gigantesque charge historique de haine et d’abandon qui nous échoit ? D’avoir pris les armes lorsque nous avons compris que tout autre chemin était barré ? Pour ne pas avoir suivi le code pénal de la province du Chiapas, le plus absurde et répressif de notre temps ? Pour avoir démontré au reste du pays et au monde que la dignité humaine existe toujours et est toujours présente dans ses plus pauvres habitants ? De nous être préparés conscienscieusement avant de bouger ? D’avoir pris des fusils pour combattre au lieu d’arcs et de flèches ? Pour avoir appris à combattre avant de la faire ? Pour être tous des Mexicains ?  Pour être pour la plupart des autochtones indiens ? Pour appeler le peuple mexicain à combattre de toutes les manières possibles pour ce qui leur appartient ? De lutter pour la liberté, la démocratie et la justice ? De ne pas suivre les schémas classiques de la guerilla ? De ne pas abandonner ? De ne pas être corrompus ? De ne pas trahir notre cause ?… Qui a besoin de demander pardon et qui peut le donner ?.. »
~ Communiqué de l’EZLN du 18 Janvier 1994 ~

 

« L’EZLN identifia la société civile (mexicaine) comme étant son unique interlocutrice. Dans ces conditions, aucun dialogue n’était possible avec le gouvernement… La stratégie du gouvernement mexicain en 1998, fut d’annihiler la base des communautés zapatistes et de démanteler les communes autonomes, ceci échoua et ce malgré la violence extrême avec laquelle la tentative fut faite. L’EZLN survécût à une des plus féroces offensives qui fut jamais déclenchée contre elle. Non seulement cela, mais elle parvint à conserver sa capacité militaire, à étendre sa base populaire et à croître politiquement en démontrant la justesse de ses revendications. »
~ Gloria Muñoz Ramírez ~ « Le Feu et la Parole », 2004 ~

 

Note de Résistance 71: Le livre de Gloria Muñoz Ramírez « Le Feu et la Parole », publié en français aux éditions Nautilus en 2004, est certainement le meilleur ouvrage à ce jour sur le mouvement zapatiste du Chiapas et son expérience autogestionnaire de lutte indigène. Un excellent cadeau de fin d’année pour en savoir plus sur un mouvement bien sûr « oublié » des médias,  provenant d’une journaliste de qualité qui s’est immergée dans le mouvement zapatiste sur place entre 1997 et 2004…

 

20e anniversaire de l’insurrection zapatiste – « Liberté, Démocratie, Justice ! »

 

Bernard Duterme

 

15 décembre 2013

 

url de l’article:

http://www.cetri.be/spip.php?article3313&lang=fr

 

Article publié (en versions adaptées) par La Revue Nouvelle (novembre 2013), Altermondes (Paris, décembre 2013), Demain Le Monde (janvier-février 2014).

« Vous êtes néophyte dans la connaissance du zapatisme ? (…) Vous n’êtes jamais allé dans un village zapatiste ? Vous n’étiez pas encore né quand l’EZLN (Armée zapatiste de libération nationale) est apparue au grand jour ? Vous ne vous étiez rendu compte de rien jusqu’au jour de la fin du monde, ni même après ? (…) Voici ce que vous auriez toujours dû savoir à propos du zapatisme  »(1). Le sous-commandant Marcos, porte-parole des Indiens insurgés du Sud-Est mexicain, n’a pas son pareil parmi les leaders révolutionnaires d’hier et d’aujourd’hui, pour ré-attirer l’attention sur sa rébellion.

« Le jour de la fin du monde  » auquel il fait allusion dans cet extrait d’une nouvelle série de longs communiqués incoercibles rendus publics en juillet dernier, c’est le 21 décembre 2012, le solstice d’hiver choisi par plus de 40 000 zapatistes encagoulés pour occuper pacifiquement et silencieusement cinq villes du Chiapas. Impressionnante démonstration de force, après quatre ans de relative discrétion. D’autant que l’on savait le mouvement rebelle miné par les stratégies de division et de pourrissement du pouvoir mexicain, le quadrillage militaire et le harcèlement paramilitaire, ainsi que le découragement de certaines « bases d’appui » zapatistes.

Aujourd’hui donc, sur le clavier du « SupMarcos » comme dans les cinq « caracoles » (sièges des « conseils de bon gouvernement » qui gèrent l’« autonomie de fait » de centaines de communautés rebelles réparties sur un territoire fragmenté de la taille de la Belgique), c’est de nouveau l’effervescence. Lancement des « petites écoles zapatistes » ouvertes aux « zapatisants » du monde entier, relance du « Congrès national indigène (CNI) » qui fédère les peuples indiens du Mexique en lutte contre l’exploitation minière, agro-industrielle, énergétique, touristique transnationale qui mange leurs territoires, mais aussi célébrations en cascade du triple anniversaire de la rébellion : les dix ans de l’autogouvernement de fait, les vingt ans du soulèvement armé, les trente ans de la fondation de l’EZLN.

Novembre 1983, décembre 1993, août 2003

C’est en novembre 1983 en effet qu’une poignée de guérilleros issus des Forces de libération nationale (FLN), rejoints l’année suivante par l’universitaire citadin qui deviendra le « sous-commandant Marcos », créent au fin fond de l’État du Chiapas l’« Armée zapatiste de libération nationale », avec la ferme intention, à la mode de Che Guevara, d’y « allumer » la révolution. Marcos et ses camarades ne seront toutefois pas les seuls à « travailler » aux côtés des Mayas tzotziles, tzeltales, tojolabales, choles de la région. Les animateurs sociaux du très concerné diocèse catholique de San Cristobal de Las Casas, dont les frontières coïncident précisément avec la zone d’influence actuelle des zapatistes, sont aussi à l’œuvre dans les villages indigènes, depuis de nombreuses années.

Dix ans plus tard, forts de ces influences multiples mais contrecarrés dans leurs projets d’émancipation par l’autoritarisme d’une élite locale raciste et par les effets de la libéralisation de l’économie mexicaine, la chute du prix du café et la réforme constitutionnelle de 1992 qui casse tout espoir de réforme agraire, d’importants secteurs de la population indigène du Chiapas vont se soulever en armes (avec les moyens du bord, souvent de vieilles pétoires) dans les principales villes de la région. « Démocratie, liberté, justice ! ». Et ce, le jour même de l’entrée en vigueur des Accords de libre-échange nord-américain (Alena) qui ouvrent les richesses du Mexique aux États-Unis et au Canada. Mais le coup d’éclat zapatiste de la nuit du 31 décembre 1993 au 1er janvier 1994 fera long feu. Lourdement réprimés, les Indiens insurgés vont rapidement se replier et réintégrer leurs villages. Débutera alors un long processus de militarisation de la région par les autorités, de négociation erratique et de mobilisation pacifique de l’EZLN au retentissement mondial.

Dix ans plus tard, en août 2003, déçus, voire trahis par la non-application des « accords de San Andrés » (seuls accords signés à ce jour entre gouvernement mexicain et commandants rebelles, sur la reconnaissance des « droits et cultures indigènes »(2)), les zapatistes rendent publique la création de leurs propres organes d’autogouvernement, radicalement étanches aux instances et interventions de l’État, au mal gobierno. C’est l’« autonomie de fait », celle que la Constitution ne veut pas leur reconnaître. Le « mandar obedeciendo  » (commander en obéissant), ici et maintenant. La pratique politique expérimentée alors dans les villages zapatistes rejette toute forme de confiscation du pouvoir, d’abandon de souveraineté dans des structures en surplomb. Elle s’organise dans la rotation incessante et la révocabilité immédiate de tous les mandats, de toutes les « charges » qu’à tour de rôle les délégués indigènes – hommes et femmes – assument bénévolement au sein des cinq « conseils de bon gouvernement », où l’on administre l’autonomie éducative, sanitaire, juridique et, autant que faire se peut, productive et commerciale des communautés rebelles. Le bilan qu’en dressent aujourd’hui les zapatistes eux-mêmes est plutôt positif : en dépit de bien des difficultés, non éludées, les indicateurs sociaux progressent…

La portée mondiale d’un mouvement paradoxal

Toute l’originalité, la force et la faiblesse de la rébellion zapatiste résident dans l’évolution et les réalités auxquelles renvoie ce triple anniversaire. Une avant-garde révolutionnaire léniniste classique fait place à une révolte indienne massive, déterminée, presque suicidaire, qui elle-même, au gré des circonstances, des rapports de force, de rencontres « intergalactiques(3) » avec des bus entiers de rebelles venus du reste du pays et du monde, va s’affirmer en un mouvement à la fois ouvert et autonome, radicalement démocratique et profondément identitaire, nationaliste mexicain autant qu’ethnique et altermondialiste, imprégné d’un esprit libertaire, de clés de lecture marxiste, d’une culture chrétienne émancipatrice, d’idéaux féministes et de références mayas. Une addition de combinaisons plutôt inédites. Le mouvement zapatiste garde en tout cas le mérite d’avoir donné vie, à partir de son ancrage local, à un idéal éthique et politique désormais universel : l’articulation de l’agenda de la redistribution à celui de la reconnaissance. « Nous sommes égaux parce que différents  ».

En cette année d’anniversaires, le sous-commandant Marcos continue à cultiver l’« indéfinition » de la rébellion et à jouer de son humilité (« le chemin se fait en marchant  », « venez le discuter avec nous  », « que faut-il faire ? avec qui ? »), l’un des ressorts sans doute de son écho international si positif des premières années. Dans le même temps, force est de reconnaître que celui qui reste le porte-parole des commandants indigènes et le chef militaire de l’EZLN (4) balise aussi la voie à suivre (« en bas à gauche  », en marge de toute représentation, médiation ou institution politiques, en « réseau » avec les luttes « anticapitalistes » d’ici et d’ailleurs) et clive volontiers le panorama (en caractérisant les « véritables zapatistes » et ceux qui ne peuvent l’être), avec ou sans second degré, selon l’humeur. Ses postures lui valent depuis quelques années déjà de fortes inimitiés au sein des gauches mexicaines – radicales et modérées – qui lui reprochent sa « superbe », ses « zigzags politiques  », voire son « antipolitisme inconséquent  ».

Reste que la priorité donnée par les zapatistes à l’expérimentation d’« une autre manière de faire de la politique » dans les communautés autonomes – ce que la sociologie anglo-saxonne appelle les « politiques de préfiguration » (commencer par fonctionner soi-même démocratiquement) – est en partie le résultat de l’inconséquence des principaux partis mexicains, y compris de gauche (PRD(5)), qui n’ont pas respecté, sur le plan national, les « accords de San Andrés » et, dans le Chiapas, agressent régulièrement l’EZLN ou ses « bases d’appui »… Au-delà, le contexte demeure extrêmement problématique pour les indigènes de la région, zapatistes ou non. Ils figurent toujours parmi les populations les plus pauvres du Mexique, souvent encore sans accès aux services de base, marginalisés ou instrumentalisés par un modèle de développement prédateur – « extractiviste », forestier, agricole, touristique… – qui profite des multiples richesses naturelles et culturelles du Chiapas, au détriment de ses premiers habitants.

Notes

(1) Tiré d’un communiqué du sous-commandant Marcos de juillet 2013, publié sur www.enlacezapatista.ezln.org.mx le 1er août.
(2) Les accords de San Andrés, qui portaient donc sur l’affirmation des identités indigènes, datent de février 1996. Les autres thèmes prévus par les négociations entre rebelles et gouvernement n’ont jamais pu aboutir. Ils étaient censés porter sur les dimensions plus politiques (démocratisation) et socioéconomiques (redistribution) des revendications zapatistes.
(3) Du nom donné par Marcos à la « Première rencontre intercontinentale pour l’humanité et contre le néolibéralisme » convoquée par l’EZLN en 1996 dans le Chiapas, qui sera suivie de multiples initiatives similaires.
(4) Au côté désormais, depuis début 2013, du sous-commandant Moises, indigène tojolabal.
(5) PRD pour Parti de la révolution démocratique, fondé en 1989 à partir d’une dissidence du PRI (Parti révolutionnaire institutionnel, à la tête du Mexique de 1930 à 2000 et de nouveau depuis 2012). Le candidat du PRD aux élections présidentielles de 2006, Lopez Obrador, perdant d’extrême justesse (les résultats furent contestés plusieurs mois par des millions de Mexicains de pratiquement toutes les gauches), n’a pas reçu l’appui des zapatistes, mobilisés à cette époque dans une démarche nationale parallèle, intitulée « l’autre campagne ».

Résistance politique et renouveau sociétaire… Petite école zapatiste deviendra grande…

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Une fois de plus le mouvement natif du Chiapas (Mexique) nous montre le chemin… Ce qui a été accompli là-bas depuis 1984 sur le plan de l’auto-détermination, de l’autogestion et de la participation du peuple a bon gouvernement.

Le modèle est tout à fait adaptable à nos sociétés occidentales pourvu qu’on veuille lâcher-prise du futile et du dérisoire de notre système étatique de mauvais gouvernement, oppresseur et criminel.

¡Ya Basta!

— Résistance 71 —

 

Les petites écoles d’en bas

Escuelita Zapatista (petite école zapatiste)

 

25 septembre 2013, par Raúl Zibechi

 

url de l’article:

http://www.lavoiedujaguar.net/Les-petites-ecoles-d-en-bas

 

Il y aura un avant et un après les petites écoles zapatistes. Pour celles d’aujourd’hui et celles de demain. Leur effet se diffusera lentement et ne sera sensible que dans quelques années, mais il marquera la vie de ceux d’en bas pour les décennies à venir. Nous y avons expérimenté une éducation non institutionnelle, pour laquelle la communauté est actrice de l’éducation. Une auto-éducation où l’on apprend d’égal à égal en s’investissant corps et âme, comme dirait le poète.

Il s’agit d’une « non-pédagogie » qui s’inspire de la culture paysanne : on sélectionne les meilleures semences, on les sème en terre fertile et on arrose le sol afin de provoquer le miracle de la germination, toujours incertain et imprévisible.

L’école zapatiste a représenté, pour plus de mille élèves, une forme différente d’apprentissage et d’enseignement, sans tableau ni salle de classe, sans maître ni professeur, sans CV ni qualification. Le vrai apprentissage commence par la création d’un climat de fraternité autour de la diversité des personnes, plutôt qu’avec la division entre, d’une part, l’éducateur qui possède pouvoir et savoir, et, d’autre part, les élèves ignorants auxquels on doit inculquer des connaissances.

Parmi les divers enseignements à en tirer, impossibles à énumérer en quelques lignes, cinq points ont retenu mon attention, peut-être influencée par le contexte que nous traversons au sud du continent.

Le premier, c’est que les zapatistes ont fait échouer les politiques sociales qui constituent, pour ceux d’en haut, un moyen d’étouffer la révolte en divisant, cooptant et soumettant les peuples qui se soulèvent. Toutes proches des communautés zapatistes se trouvent des communautés affiliées au mauvais gouvernement, des quartiers de blocs de petites maisons identiques, qui reçoivent des bons de subsides et où le travail de la terre est presque absent. Des milliers de familles ont succombé un peu partout, en acceptant ces cadeaux d’en haut. Il est donc remarquable, et même exceptionnel, de voir que des milliers d’autres continuent de ne rien accepter.

Je ne connais aucune autre expérience, dans toute l’Amérique latine, qui soit ainsi parvenue à neutraliser les politiques sociales. C’est le plus grand mérite du zapatisme, acquis grâce à la fermeté militante, la clairvoyance politique et une force d’abnégation inépuisable. C’est la première leçon qu’il nous apporte : il est possible de vaincre ces politiques sociales.

Le deuxième enseignement, c’est l’autonomie. Cela fait des années qu’on entend des discours sur l’autonomie dans les mouvements les plus divers, et c’est tant mieux. Dans les communautés et les communes autonomes qui constituent le Caracol Morelia, je peux témoigner de la construction d’une autonomie sur le plan économique, de la santé, de l’éducation et du pouvoir. Il s’agit d’une autonomie intégrale, qui couvre tous les aspects de la vie. Aucun doute que le même phénomène existe dans les quatre autres Caracoles.

Quelques mots sur l’économie, c’est-à-dire la vie matérielle. Les familles des communautés ne « touchent » pas à l’économie capitaliste. Elles effleurent à peine le marché. Elles produisent tous leurs aliments, y compris des protéines en bonne quantité. Elles achètent dans les magasins zapatistes ce qu’elles ne produisent pas (sel, huile, jambon, sucre). Les excédents des familles et des communautés et la vente de café permettent une épargne sous forme de têtes de bétail, qu’on peut vendre pour des besoins de santé ou ceux de la lutte.

L’autonomie dans l’éducation et la santé est possible grâce au contrôle communautaire. La communauté choisit ceux qui enseigneront à ses enfants, et ceux qui prendront soin de sa santé. Il y a une école dans chaque communauté, et le centre de santé regroupe des sages-femmes, des guérisseuses et des spécialistes en plantes médicinales. La communauté les entretient tout comme elle le fait pour ses autorités.

Le troisième enseignement concerne le travail collectif. Comme le dit un Votán (accompagnant) : « Les tâches collectives sont le moteur de notre processus. » Les communautés ont leurs propres terres grâce à l’expropriation des expropriateurs, un premier pas incontournable pour créer un monde nouveau. Hommes et femmes ont leurs tâches respectives et leurs espaces collectifs.

Les tâches collectives sont le ciment de l’autonomie, dont les fruits sont dévolus aux hôpitaux, aux cliniques, à l’éducation primaire et secondaire, au renforcement des communes et des conseils de bon gouvernement. Sans ce travail collectif d’hommes et de femmes, des enfants aux plus âgés, rien de ce qui s’est construit n’aurait pu voir le jour.

Le quatrième point, c’est cette nouvelle culture politique qui prend sa source dans les relations familiales et se divulgue dans toute la « société » zapatiste. Les hommes collaborent au travail domestique qui néanmoins reste dévolu aux femmes, ils gardent les enfants lorsqu’elles sortent de la communauté pour leur participation aux autorités. Les relations de respect et d’affection sont de mise entre parents et enfants, dans un climat d’harmonie et de bonne humeur. Je n’ai remarqué aucun geste de violence ou d’agressivité dans les foyers.

L’immense majorité des zapatistes sont jeunes voire très jeunes, et il y a autant d’hommes que de femmes. Il est évident que la révolution ne peut être portée que par des jeunes. Ceux qui dirigent obéissent, ce n’est pas qu’un discours. Ils s’impliquent corps et âmes, c’est une des clés de cette nouvelle culture politique.

Le cinquième point, c’est le miroir. Les communautés sont un double miroir : nous pouvons nous y voir et les y voir. Non pas à tour de rôle, mais simultanément. On s’y voit en les voyant. Dans cet aller-retour, on apprend en travaillant ensemble, on dort et on mange sous le même toit, dans les mêmes conditions, on utilise les mêmes toilettes, on marche dans la même boue et sous la même pluie.

C’est la première fois qu’un mouvement révolutionnaire réalise une expérience de ce style. Jusqu’à présent, l’enseignement entre révolutionnaires reproduisait les modèles intellectuels universitaires, verticaux, échelonnés et pétrifiés. Ici c’est différent : on apprend avec son corps et sa sensibilité.

Enfin, il y a une question de méthode et de façon de travailler. L’EZLN est née dans le camp de concentration des relations violentes et verticales imposées par les grands propriétaires. Ils ont appris à travailler dans les familles, en secret, transformant les modes d’action des mouvements antisystème. Alors que le monde s’apparente de plus en plus à un camp de concentration, leurs méthodes peuvent s’avérer fort utiles pour ceux qui s’évertuent encore à créer un monde nouveau.

Raúl Zibechi

Traduit par Ana. 
Texte espagnol d’origine : 
La Jornada, Mexico, 23 août 2013