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Texte inspirateur : La déclaration de guerre de l’EZLN et du Chiapas au gouvernement mexicain et au capitalisme du 1er janvier 1994 : la première déclaration de la jungle de Lacandon, Mexique (EZLN)

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, crise mondiale, démocratie participative, guerres imperialistes, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, politique et social, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , on 6 juillet 2022 by Résistance 71

EZLN1

“Le cri des opprimés, des pauvres et des exploités n’est pas toujours juste, mais si vous ne l’écoutez pas, vous ne saurez jamais ce qu’est vraiment la justice…”
~ Howard Zinn ~

“D’après Marcos, de nos jours, la planète est le champ de bataille de la quatrième guerre mondiale (la troisième ayant été la “guerre froide”). Le but de cette guerre est la conquête du monde entier au moyen du marché. Les armes y sont essentiellement financières, bien que des millions de personnes soient estropiées ou tuées à chaque moment. Ceux qui mènent cette guerre veulent faire converger toute la planète vers une grande entreprise planétaire unique ayant la Banque Mondiale, le FMI, l’OMC, l’OCDE et le président des Etats-Unis comme comité directeur…”
~ Ziga Vodovnik, Ph.D sciences sociales, université de Llubjana, Slovénie ~

-[]- Voir notre note sous le texte (Résistance 71) -[]-

Chapas1

Première déclaration de la jungle de Lacandon

1er janvier 1994

Déclaration de guerre de l’EZLN

“Aujourd’hui nous disons : “Assez est assez !” (¡Ya Basta!)

Au peuple du Mexique

Traduction de Résistance 71

Juillet 2022

Frères et sœurs mexicains,

Nous sommes le produit de 500 ans de lutte : d’abord contre l’esclavage, puis durant la guerre d’indépendance contre l’Espagne menée par des insurgés, puis pour éviter d’être absorbés par l’impérialisme nord-américain, puis pour promulguer la constitution et expulser l’empire français de notre sol, puis plus tard la dictature de Porfirio Diaz nous a refusé la juste application des lois de réforme et le peuple s’est rebellé et des leaders comme Pancho Villa et Emiliano Zapata ont émergé, des pauvres, tout comme nous. On nous a refusé la plus élémentaire des préparations de façon à ce qu’ils puissent nous utiliser comme chair à canon et piller la richesse de notre terre. Ils ne se préoccupent pas si nous n’avons rien, absolument rien, pas même un toit au dessus de nos têtes, pas de terre, pas de travail, pas de service de santé, pas de nourriture ni d’éducation. Nous ne pouvons pas non plus librement et démocratiquement élire nos représentants politiques ; il n’y a pas non plus d’indépendance des étrangers, ni n’y a t’il de paix et de justice pour nous et nos enfants.

Mais aujourd’hui, nous disons assez est assez !

Nous sommes les héritiers des véritables bâtisseurs de notre nation. Les dépossédés, nous sommes des millions et appelons donc nos frères et sœurs à rejoindre cette lutte et de la reconnaître comme la seule voie, ainsi nous ne mourrons pas de faim à cause de l’insatiable ambition d’une dictature vieille de 70 ans et menée par une clique de traîtres qui ne représentent que des groupes les plus conservateurs et les plus corrompus. Ce sont les mêmes qui se sont opposés à Hidalgo et Morelos, les mêmes qui ont trahi Vincente Guerrero, les mêmes qui ont vendu la moitié de notre pays à un envahisseur étranger, les mêmes qui ont importé un prince européen pour diriger notre pays, les mêmes qui ont formé la dictature “scientifique” Porfiriste, les mêmes qui se sont opposés à l’expropriation pétrolière, les mêmes qui ont massacré les cheminots en 1958 et les étudiants en 1968, les mêmes qui aujourd’hui nous prennent tout, absolument tout.

Pour prévenir que tout ce qui précède ne continue et comme dernier espoir, après avoir essayé d’utiliser des moyens légaux fondés sur la constitution, nous nous tournons vers l’article 39 de notre constitution qui nous dit : “La souveraineté nationale essentiellement et originellement réside dans le peuple. Tout pouvoir politique émane du peuple et son but est d’aider le peuple. Le peuple a, à tout moment, le droit inaliénable d’altérer et de modifier sa forme de gouvernement.

Ainsi, en accord avec notre constitution, nous déclarons ce qui suit à l’armée fédérale mexicaine, le pilier de la dictature mexicaine dont nous souffrons, monopolisée par un système de parti unique emmené par Carlos Salinas de Gortari, le chef de l’exécutif fédéral maximum et illégitime qui détient le pouvoir aujourd’hui.

En accord avec cette déclaration de guerre, nous demandons que tous les autres pouvoirs de la nation se fassent l’avocat de la restauration de la légitimité et de la stabilité de la nation en renversant le dictateur.

Nous demandons aussi que les organisations internationales et la Croix Rouge Internationale surveillent et régulent nos combats de façon à ce que nos efforts soient validés tout en protégeant les populations civiles. Nous déclarons que maintenant et toujours, nous sommes soumis à la convention de Genève en formant l’Ejecito Zapatista de Liberaciòn Nacionale (EZLN) comme notre bras armé dans notre lutte de libération. Nous avons le peuple mexicain de notre côté, nos combattants insurgés aiment le drapeau tricolore de notre nation qui est hautement respecté. Nous utilisons les couleurs rouge et noire sur nos uniformes comme symbole de nos travailleurs en grève. Notre drapeau est imprimé des lettres suivantes : “EZLN” pour Armée Zapatiste de Libération Nationale (AZLN) et nous portons toujours notre drapeau au combat.

D’emblée, nous rejetons tout effort et volonté de nous disgracier et de nous calomnier en nous accusant d’être des trafiquants de drogue, des narco-guerillas, des voleurs ou toutes autres insultes qui pourraient être utilisées par nos ennemis. Notre lutte suit la constitution que nous respectons pour son appel à la justice et à l’égalité.

Ainsi, en accord avec cette déclaration de guerre, nous donnons à nos forces militaires de l’EZLN les ordres suivants :

Premièrement : Avancez jusqu’à la capitale du pays en submergeant les forces armées fédérales mexicaines tout en protégeant dans notre avancée les populations civiles et en permettant aux habitants des zones libérées d’élire librement et démocratiquement leurs propres autorités administratives.

Deuxièmement : Respectez la vie de nos prisonniers et transférez les blessés à la Croix Rouge Internationale.

Troisièmement : Mettez en place des jugements rapides contre les soldats de l’armée fédérale mexicaine et de la police politique qui ont reçu une formation ou ont été payés par des étrangers, accusés d’être des traîtres à notre pays et contre tous ceux qui ont réprimé et maltraité la population civile, qui ont volé ou tenté de commettre des crimes contre le bien du peuple.

Quatrièmement : Formez de nouvelles troupes avec les Mexicains démontrant un intérêt à rejoindre notre lutte, incluant ceux des soldats ennemis qui se tournent vers nous sans nous avoir combattu et promettant de recevoir des ordres du commandement général de l’EZLN.

Cinquièmement : Nous demandons la rédition sans conditions des quartiers généraux de l’ennemi avant même que nous ne commencions tout combat, ce afin de sauver des vies humaines.

Sixièmement : Mettez un terme au pillage de nos ressources naturelles dans les zones contrôlées par l’EZLN.

Au peuple du Mexique,

Nous, les hommes et les femmes, souverains et libres, sommes conscients que cette guerre que nous avons déclarée est notre dernière possibilité, mais qu’elle est aussi juste. Les dictateurs mettent en application une guerre génocidaire non déclarée contre notre peuple, ce depuis bien des années. Ainsi, nous demandons votre participation, votre décision de soutenir ce plan qui lutte pour la terre, l’habitat, le travail, la nourriture, la santé, l’éducation, l’indépendance, la liberté, la démocratie, la justice et la paix. Nous déclarons que nous ne cesserons de lutter jusqu’à ce que les demandes de base de notre peuple aient été remplies en formant un gouvernement pour notre pays qui est libre et démocratique.

REJOIGNEZ LES FORCES INSURGEES DE L’ARMEE ZAPATISTE DE LIBERATION NATIONALE.

Le commandement général de l’EZLN.

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= = =

Notes de Résistance 71 :

Cette première déclaration zapatiste de la jungle de Lacandon fut suivie par cinq autres, plus élaborées que celle-ci, contenant des préambules et scindées en plusieurs parties. Chacune des déclarations suivantes analysent et enrichit les précédentes.

La seconde déclaration fut émise le 10 juin 1994, six mois après la première. Comparée à la première, la seconde déclaration fait 8 pages.

La troisième déclaration de 6 pages fut émise en janvier 1995.

La quatrième date du 1er janvier 1996, elle fait 10 pages et est divisée en un préambule et trois parties.

La cinquième déclaration fait 12 pages et fut émise en juillet 1998. Elle contient un court préambule et 6 parties.

La sixième et courante déclaration fut émise en juin 2005 et est connue sous le vocable de référence de “la Sixta” par les Zapatistes. Elle est essentiellement la plus aboutie au fil du temps et n’a pas nécessité d’amendements depuis 17 ans maintenant. Elle est loin de la première déclaration (de guerre) traduite ci-dessus. Elle est l’aboutissement politico-social de 11 ans de lutte et de réalisations de terrain, de succès et d’échecs, d’analyse et d’éducation de la génération zapatiste suivante. La Sixta est une analyse et un déni du système étatico-marchand, de son bras armé néoliberal et une fenêtre ouverte sur la réalisation factuelle de la société des sociétés libre et émancipée. La Sixta est le texte moderne le plus abouti pour une compréhension et une action directe politiques émancipatrices. C’est un document historique qui n’est pas fait pour rester dans les tiroirs, mais pour être adapté et vivre dans sa chair sociale organique à l’échelle planétaire.

Vous pouvez la lire sur Résistance 71 ainsi que la télécharger ici, ainsi que la comparer avec la 1ère publiée ci-dessus…

Ce qu’il est essentiel de comprendre est que le monde zapatiste incluant tous les mondes n’est pas un “produit fini”, une révolution achevée et (déjà) sclérosée, il est organique et en perpétuel mouvement et évolution constante. La société zapatiste est propre à son environnement socio-culturel et il est évident que leur mode de fonctionnement ne peut en aucun cas être directement appliqué à toute autre société, il contient néanmoins des éléments de gouvernance universels à l’humain qui peuvent être repris comme structure sociale tout en adaptant la forme à une société particulière.

Si seuls les Zapatistes peuvent faire du zapatisme, nous pouvons, à leur instar, tous fonctionner dans une société horizontale non hiérarchisée et non-autoritaire. Il suffit de le vouloir une fois la réalité oppressive bien appréhendée. Rappelons-nous toujours que le pouvoir est inhérent à la société humaine. Il n’y a pas de société sans pouvoir. Nous devrons toujours prendre des décisions pour le bien commun et les mettre en application. Le but n’est pas d’abolir le pouvoir, ceci est impossible à réaliser, car il n’y a pas de société sans pouvoir, mais de mettre un terme au règne du pouvoir coercitif et de faire retourner la société humaine dans un monde de fonctionnement horizontal non-coercitif  qui est conforme à sa nature profonde (cf Pierre Clastres). 

Nous avons adressé ce sujet dans deux essais (2017 et 2019), compilés dans ce PDF : “Du chemin de la société vers son humanité réalisée” (2020), à (re)lire et aussi à diffuser au grand large sans aucune modération. 

Voir également notre page essentielle : Textes fondateurs pour un changement politique ainsi que notre page sur les “communes libres zapatistes”.
Et cette compilation : « Chiapas, feu et parole d’un peuple qui dirige et d’un gouvernement qui obéit ! »

Vive la Commune Universelle de notre humanité enfin réalisée !

A bas l’État ! A bas la marchandise ! A bas l’argent ! A bas le salariat !

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« C’est notre conviction et notre mode de pratique que
pour se rebeller et lutter, aucun leader, patron, messie,
ou sauveur n’est nécessaire. Pour lutter, les gens ont besoin
d’un sens de la honte, d’un peu de dignité et de beaucoup
d’organisation, Pour le reste, cela sert le collectif… ou pas. »

Marcos1
¡YA BASTA!

Histoire, mémoire, état, société.. comme un périscope inversé (SCI Marcos, EZLN)

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Marcos a écrit ça il y a un quart de siècle !… Visionnaire ?… non, simplement 100% alerte et critique sur la réalité globale qui affecte sa réalité locale déjà à l’époque. La lucidité, la non-complaisance, la solidarité et la désobéissance individuelle et collective sauveront les peuples de ce marasme en progression.
Le 1er janvier 1994, le jour de la mise en application des accords scélérats de “libre-échange” du NAFTA, le monde et le continent américain s’est réveillé au son du cri :
¡Ya Basta!
Les zapatistes nous montrent une certaine voie lumineuse depuis 28 ans.
“Il suffit de passer le pont…” chantait le grand Georges B., de fait qu’attendons-nous ?
~ Résistance 71 ~

“Là où cesse l’État, c’est là que commence l’Homme, celui qui n’est pas superflu : là commence le chant de ce qui est nécessaire, la mélodie unique et irremplaçable. Là où cesse l’État — regardez donc mes frères ! Ne les voyez-vous pas, l’arc-en-ciel et les ponts du surhumain ?”
~ Friedrich Nietzsche ~

relatos_elviejo_antonio

Un périscope inversé ou la mémoire, clef enfouie

(Extraits)

SCI Marcos

24 février 1998

Publié dans le journal mexicain “La Jordana”

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 depuis le livre compilation des textes du sub Marcos “¡Ya Basta!, 10 ans de révolte zapatiste”, 2004” ~

[Marcos commence son essai comme souvent, avec une histoire allégorique de son personnage du “vieil Antoine”, el viejo Antonio, que nous ne traduirons pas ici, Marco a publié un livre sur les histoires du vieil Antoine : “Relatos de el Viejo Antonio”. Marcos a créé une pléiade de personnages qu’il met souvent en scène, souvent de manière allégorique]

II. La coquille chaotique de la mondialisation

Le processus mondial d’homogénéisation / fragmentation amené par la néolibéralisme a balayé les vieilles évidences du pouvoir et les a ré-ordonnées ou remplacées par de nouvelles. Parmi les victimes de cette nouvelle guerre mondiale se trouve l’état-nation et la trilogie sur laquelle reposait sa survie : le marché intérieur, la langue nationale et la culture ainsi que la classe politique locale. Afin de maintenir et de renforcer ces trois aspects, les états-nations se reposaient sur des forces de police et militaire, des gouvernements, des institutions et des lois, des médias et sur des intellectuels, ceci fut brièvement l’essence même de l’état moderne. FUT, car ceci n’est plus.
Le processus complexe de mondialisation, vu pour ce qu’il est, est une guerre de destruction et de ré-agencement, qui pulvérise les marchés intérieurs, il tend à diluer en une brutale homogénéisation les langues nationales et les cultures et insiste sur le déplacement et la destruction des classes politiques locales.
Avec la crise, qui a aussi liquidé les trois fondations des états nationaux, de ses soutiens : l’armée, la police, le gouvernement, les institutions, les législations, les médias et les intellectuels entrent aussi en crise.

Les espaces laissés par cette crise anihilatrice ne demeurent pas vides. 

“La mondialisation financière a créé, d’un autre côté, son propre État. Un état multinational qui a ses propres instruments, ses réseaux et des médias d’action. Il s’agit de la constellation formée par le FMI, l’OCDE et l’OMC.” (Ignacio Ramonet, “Disarming the Markets”, “Le Monde Diplomatique”, décembre 1997)

[…]

La logique de la mondialisation néolibérale n’est pas seulement économique, elle est aussi politique. L’imposition d’une économie trans-frontalières n’est pas seulement une ouverture forcée du capillaire des marchés nationaux, c’est aussi et par dessus tout, un combat contre le responsable de l’émergence et de la protection de ces marchés, l’état-nation. L’homogénéisation de l’économie est en parallèle avec la fragmentation et la pulvérisation de la “vieille” politique et de son remplacement par une classe politique “moderne”. […] Les vieux politiciens sont remplacés par de nouveaux politiciens aux mille visages…

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III. La nouvelle politique et ses souteneurs illégaux. Les 7 visages des politiciens professionnels

Dans le même temps où les états-nations sont détruits, l’État Mondial est consolidé. Mais de dernier n’a besoin d’aucune société, il peut faire sans parce que le pouvoir dont il est dépositaire est celui donné et garantit par les marchés financiers et les mega-corporations. Au lieu d’élire, la bourse accorde la seule et nécessaire légitimité : celle du pouvoir économique.
Les choses étant ce qu’elles sont, l’État Mondial a besoin et produit de nouveaux politiciens pour le mener. Des politiciens qui sont des non-politiciens (car la pierre angulaire de la politique, le citoyen, a été éliminé), qui sont une sorte de mutants cybernétiques capables de remplir plusieurs fonctions après avoir été au préalable programmés selon le logiciel néolibéral bien entendu. Ces non-politiciens sont produits dans des centres éducatif hautement technocratique comme Oxford, Harvard, Yale et sont exportés dans des pays variés pour continuer la destruction des états-nations. Pour ce faire, ils doivent avoir :

1er visage : le gérant-politicien:
Dans l’état-nation “moderne”, la politique est fondamentalement l’économie de marché. Le pays doit être construit comme une entreprise, PME ou plus grande et géré de la même façon. Les plans politiques ressemblent à des budgets d’investissements et des estimations de coûts et profits. La soi-disante “administration publique” devient de plus en plus administrative et de moins en moins publique.
Comme dans une entreprise, le facteur le plus important devient la productivité, tirer le plus de bénéfices au moindre coût. Tout est subordonné à ces critères, des programmes sociaux aux alliances internationales en passant par le processus électoral.
Pour le politicien-gérant, le citoyen n’est guère plus qu’un employé et les fonctionnaires deviennent les contre-maîtres ayant un pouvoir de décision fluctuant. La nation et ses priorités sont vues au travers de critères de “marketing moderne”. Les seules personnes ayant un semblant de valeur sont celles qui pèsent en tant que producteurs/consommateurs. Ceux qui ne valent rien ou pas grand chose peuvent être écartés voire éliminés.

2ème visage : l’avocat-politicien :
Pour la mondialisation de l’économie, la structure législative de l’ancien état-nation devient une camisole et un obstacle à surmonter.
En général, les législations nationales répondent à un triple aspect. D’un côté, l’aspect historique qui collecte le passé de la nation et qui consiste en une assimilation judiciaire de ce passé. D’un autre côté, l’aspect qui incorpore les luttes populaires et leurs demandes et régule au travers des normes judiciaires, la satisfaction de telles demandes et/ou leur redéfinition. A un troisième niveau, gérer les formes judiciaires avec lesquelles les classes politiques dominantes “légalisent” leur pouvoir et leur légitimité.

Mais la structure judiciaire, la force cohésive primordiale de l’état-nation, est un obstacle légal pour amener à la dissolution des nations que la mondialisation assume et dont elle a besoin. De telle façon, que le néolibéralisme rompt avec ce corps légal et en construit un à sa taille. Au nom du “libre échange”, les “législatures” nationales sur l’éducation, le travail, l’environnement, la santé publique, la possession de la terre, l’utilisation des ressources naturelles, la migration etc sont répudiées / abrogées. Pour ce faire, des instruments judiciaires transnationaux sont créés. Un exemple ? Dans l’OCDE, le Multilateral Agreement on Investments ou MAI, secrètement négocié depuis 1995 et devant être signé par les pays membres en 1998. Cet accord donne aux investisseurs plus de pouvoir que les gouvernements dans des affaires d’investissements, de contrats et de bénéfices manageuriaux.
Voilà pourquoi le politicien moderne doit aussi être un avocat des échanges internationaux, un avocat du diable.

3ème visage : L’agent de publicité-politicien :
“L’explosion des marchés” ne fonctionnent pas toute seule. Elle va la main dans la main avec la “révolution technologique” et avec la création résultante de super autoroutes de la communication. Ainsi, la politique mondiale est pratiquée en tant que “publicité mondiale”.
Le leader politique est fabriqué au moins de la publicité. Des personnes bien ternes et médiocres simulent d’avoir une stature d’homme ou de femme d’état (comme le cas typique Ernesto Zedillo ici au Mexique), ce grâce à l’utilisation de techniques de théâtre et de publicité. (NdT : regardons aujourd’hui, un quart de siècle après ces propos lumineux de Marcos, ce que sont les Macron, Zemour, Zelensky et autres Trump…) La “légalité” du gouvernement (et non pas sa légitimité) est plus dépendante chaque jour de la machine publicitaire, qui est aussi capricieuse que le marché qu’elle sert.

[…]

4ème visage : le général-politicien :
La politique depuis le départ de l’histoire de l’humanité, est avant tout l’exercice de la violence organisée. C’est pourquoi le politicien moderne est aussi un général. Si hier la “nation” était le prétexte de la guerre, aujourd’hui c’est la “liberté bien ordonnée”. L’assassinat de masse et la destruction sont aussi des “médias publicitaires” de marketing. Les Etats-Unis y sont exemplaires en ce domaine. Au Mexique, Acteal et la guerre que Zedillo mène contre les populations natives indiennes lui ont valu les louanges des commentateurs télévisés, des journaux intellectuels, des managers des grandes entreprises, du haut clergé et des juristes décadents.

Les monstres que créent ces généraux n’ont rien ou très peu à voir avec “l’ordre”. Le désordre est la règle et le chaos est administré attentivement par une économie mondiale qui continue à soutenir de manière importante le marché de la guerre. Après la fin de la 3ème guerre mondiale, appelée la “guerre froide”. Les dépenses en armement dans le monde ont quelque peu diminué, mais elles ont recommencé de plus belle vers 1994.
[…]

5ème visage : l’ambassadeur-politicien :
Une fois que les frontières sont détruites pour les capitaux et le marché est redéfini comme maître suprême, l’internationalisation des forces politiques force le politicien moderne à devenir toujours plus un représentant de commerce itinérant, parlant plusieurs langues et adepte de la diplomatie de salon. Le politicien moderne n’a pas de nationalité bien définie et pas d’autre leitmotiv que le marché. Il est nord-américain aux Etats-Unis et en Amérique du Sud, en Europe, en Asie et en Afrique ainsi qu’en Océanie. Sa seule patrie est Wall Street (NdT: succursale de la City de Londres ne l’oublions jamais…), sa couleur le vert du dollar, il pense en anglais et vit selon la mode et les rythmes du Dow Jones et du Nikkei.

6ème visage : l’historien-politicien :
En néolibéralisme, l’histoire se recycle elle-même afin de se nier et de provoquer la repentance. Le sacrifice généralisé des utopies inclut de brûler les drapeaux de la rébellion et les bannières du cynisme et de la conformité sont adoptées en lieu et place. La connaissance se recycle et recycle ses “prêtres”. La nouvelle vérité, celle des marchés financiers, a besoin de nouveaux prophètes. Le nouveau politicien est aussi un historien, mais dans un sens opposé. Pour lui, seul le présent a une valeur et le passé doit être vu comme responsable de tout ce qui se produit de mal. “La véritable histoire”, nous raconte et se raconte à lui-même le néo-politicien, “commence avec moi”.

7ème visage : le généraliste-politicien :
Alors que la logique de marché envahit tout le social et que le politicien est transformé en “chef d’orchestre” d’une telle invasion, sa “connaissance” doit tout couvrir, c’est pourquoi il sent qu’il a la capacité de donner son opinion sur tout. Et si une partie de “cette connaissance générale toute inclusive” n’est pas traduisible en termes de marché, alors cette partie ne mérite aucune attention particulière.

Voilà les 7 visages du politicien moderne. Vous voulez le boulot ? Pas besoin de cerveau ni d’intelligence, regardez Menem en Argentine, Fujimori au Pérou et Zedillo au Mexique. Tout ce qu’il y a à faire c’est d’obéir aveuglément aux marchés.

R71 ON NE SE SOUMETTRA PAS

IV. Le vieux politicien et ses cadavres vivants

La vieille politique, celle des principes et des programmes, se sacrifie à l’autel du marché mondial. Il s’agit maintenant d’une libre interaction entre l’offre et la demande qui détermine l’orientation idéologique des partis politiques “modernes”. Avoir un bon produit pour entrer en compétition avec les autres dans “les choix de consommateurs” est tout ce qui importe. Il s’avère que la proposition politique devient un objet à être consommé, digéré et jeté. Chaque jour, toujours moins de citoyens savent ce que sont de fait l’histoire, les principes et les programmes des organisations politiques.

[…]

La politique moderne est devenue et ne cesse de devenir une expérience de l’élite… La société est passée d’être un acteur sporadique à être un spectateur permanent.

Bientôt la “politique” des citoyens se pratiquera de manière électronique. Devant un ordinateur, le citoyen “votera”, c’est à dire… validera et garantira le système. Plus de rues barrées, plus de manifestations, plus de meetings politiques, plus de prises de bâtiments, plus de perturbations, qui ne font que perturber les marchés, la “nation”. Le citoyen choisira une option politique comme il choisit un produit au supermarché local, il le fera depuis chez lui.

[…]

Il n’y a plus de transformation de pensée historique en théorie politique et de là en des principes et un programme de lutte. Maintenant, la politique “moderne” n’est que la traduction de l’étude de marché en un programme marketing et ce dernier en une campagne politique publicitaire (NdT : plus bel exemple récent donnant raison à Marcos : Macron et la Macronie, pas de parti juste une nébuleuse tendance à géométrie variable, ne réagissant qu’aux diktats de “marché” ultra-libéraux et un “programme politique” constitué de slogans marketing poussant un agenda de destruction socio-culturelle liberticide, nécessité du marché dans son parcours programmé vers son implosion finale…).

L’atrophie est vertigineuse. La machine partisane devient omnipotente et piétine la philosophie politique…

Une amnésie chronique affecte les organisations politiques dans le monde entier. Si quelqu’un mentionne le passé, ce doit être avec un mélange de condamnation, de honte et de repentance.

Le code culturel de base contient des éléments fixes comme par exemple :

Gauche = révolution = violence = chaos = catastrophe…

“Le bien de l’élite” se transforme en “bien commun”. La conservation du pouvoir est dite équivalente à la consolidation du progrès, de la sécurité et du développement. Une fois de plus, le Mexique prouve être le plus brillant des élèves dans la maîtrise des leçons “politiques” néo-libérales.

[…]

masquecarte

V. Les courants sous-terrains de résistance critique

L’écrivain portugais Jose Saramago dit que “Contrairement à ce qu’il voudraient vous faire croire, il n’y a rien de plus facile à comprendre que l’Histoire du monde, bien que bon nombre de gens éduqués affirment toujours que c’est bien trop compliqué pour la faible capacité de compréhension des masses.

La peur néolibérale de l’histoire n’est pas tant une peur de son existence (après tout, le pauvre existe aussi et il ne peut être ignoré), mais une peur qu’on peut connaître et apprendre d’elle.

Afin d’éviter cela, l’Histoire est kidnappée par ces “érudits” et adéquatement maquillée pour qu’elle ne soit pas reconnue par ceux d’en bas.

Le kidnapping de l’Histoire par l’élite est fait pour remodeler sa consommation afin de faire disparaître le patrimoine fondamental de l’être humain : la mémoire.

Dans la “nouvelle histoire mondiale”, le présent défait le passé et prend le contrôle du futur. Aujourd’hui est le nouveau tyran, c’est à lui qu’on prête allégeance et obéissance. Mais partout dans le monde, des taupes de toutes les couleurs et de toutes tailles fouillent l’histoire cachée et trouvent et comprennent. De temps en temps, ces taupes émergent et ouvrent des fenêtres de lumière sous-terraines qui illuminent la grisaille de surface du chaos néolibéral.

En plus d’essayer de les tuer, le pouvoir mondialisant forme ses “penseurs” à essayer d’isoler ces taupes de l’Histoire. Les intellectuels modernes déterminent, avec de sombres jurys et jugements, la banalisation et la disqualification de la pensée critique. “Poésie, utopie, messianisme” sont en général les accusations typiques. La peine ? Persécution et calomnie.

On doit bien comprendre que l’émergence constante de ces taupes coïncide scandaleusement avec l’apparence de mobilisations sociales. Et celles-ci défient l’ordre établi parce qu’elles défient aussi les comportement politiques modernes. Les “intrus” de la politique sont derrière chaque coin de l’Histoire.

Contre la politique moderne et avec l’Histoire comme drapeau, la société civile du monde insiste sur sa ré-émergence une fois de plus. Cela pétille au dessus de la surface et plonge de nouveau afin de réapparaître de nouveau.

Cette Phœnix (la société civile) se reconstruit dans le nid de l’Histoire…

[Marcos remet ici une histoire allégorique…]

Ceci me paraît d’une grande évidence ! Celui qui complote, le fait sous la surface et non pas au grand jour. Ceci est connu depuis le début de notre temps. La domination du monde est la domination de ce qui est sous-jacent, des courants sous-terrains.” (Umberto Eco, “Le pendule de Foucault”)

Finalement, je pense que le vieil Antoine a raison quand il dit qu’en dessous de nous, il y a un monde meilleur que celui dans lequel nous souffrons, que la mémoire est la clef du future et que (j’ajoute) l’Histoire n’est rien d’autre qu’un périscope inversé…

Depuis (sous) les montagnes du sud-est mexicain

Subcommandante Marcos,

Planète Terre, février 1998

= = =

Lire notre page sur “Les communes autonomes du Chiapas, Mexique”

« La 6ème déclaration Zapatiste de la jungle de L’abandon »

« Chiapas, feu et parole d’un peuple qui dirige et d’un gouvernement qui obéit »

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Sexta Zapatiste : Marche contre toutes les guerres du dimanche 13 mars 2022

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masquecarte

Résistance 71

16 mars 2022

Nous sommes en osmose avec le message Zapatiste : à bas toutes les guerres, soutien inconditionnel aux peuples ukrainiens, russes et tous les peuples opprimés du monde contre l’imposture et la dictature étatico-marchande.

En images en en vidéo la manifestation Zapatiste à San Cristobal de las Casas au Chiapas (sud-est mexicain) du dimanche 13 mars 2022 : ¡Ya Basta!

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zapatistescontreguerre

Zapatistes_contre_la_guerre_mars2022
« Les mauvais gouvernements et les entreprises transnationales
détruisent la terre mère dans le monde entier. »

EZLN2
note : cette photo n’est pas du 13/3/22

Vidéo :

R71slogan
Réseau de Résistance et de Rébellion International

Commission Sexta Zapatiste : ¡Communiqué contre toute guerre!

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caracole1

COMMISSION SEXTA ZAPATISTE
Mexique,

le 9 mars 2022


DIMANCHE 13

À la Sexta nationale et internationale,
À celles et ceux qui ont signé la Déclaration pour la vie,
Aux personnes honnêtes du monde entier,

En accord avec quelques personnes, groupes, collectifs, organisations et mouvements de Slumil
K’Ajxemk’Op, les communautés zapatistes ont convenu de convoquer des mobilisations et des manifestations contre TOUTES LES GUERRES capitalistes actuellement en cours dans plusieurs endroits de la planète. Pas seulement en Ukraine. Aussi en Palestine, au Kurdistan, en Syrie, sur les territoires Mapuche et autochtones de toute la planète et là où tant et tant de processus libertaires sont attaqués, poursuivis, assassinés, réduits au silence, perturbés.

En réponse à cet appel, nous avons convenu de participer aux mobilisations du dimanche 13 mars 2022 et de continuer les actions contre les guerres que le système perpétue dans le monde entier.
Nous proposons donc de démarrer une campagne mondiale contre les guerres du capital, quelle que soit leur géographie. D’organiser des concerts, des rencontres, des festivals, des réunions, etc. En bref, les arts contre les guerres.

Nous appelons toutes les personnes honnêtes, les groupes, les collectifs, les organisations et les mouvements au Mexique et dans le monde à se joindre aux activités pour exiger l’arrêt des guerres à partir du dimanche 13, à leur rythme et à leur manière et en préservant leur indépendance et leur autonomie.
Pour leur part, les communautés zapatistes se manifesteront, le dimanche 13 mars 2022, dans leurs Caracoles, dans les chefs-lieux municipaux de San Cristóbal, Yajalón, Palenque, Ocosingo, Las Margaritas, Altamirano et dans les communautés situées le long de la route, avec plusieurs milliers de zapatistes.

Contre toutes les guerres : tous les arts, toutes les résistances, toutes les rébellions !
Depuis les montagnes du Sud-Est mexicain,
Commission Sexta zapatiste,
Mexique, mars 2022.

= = =

Textes fondateurs pour un changement de paradigme politique

ZapatistasMujeres

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L’État contre l’autonomie des institutions, une analyse sur les zones autonomes zapatistes du Chiapas et les communes libres du Rojava avec Pierre Bance (PDF)

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, crise mondiale, démocratie participative, gilets jaunes, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, militantisme alternatif, pédagogie libération, politique et lobbyisme, politique et social, politique française, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , on 22 janvier 2022 by Résistance 71

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Résistance 71

22 janvier 2022

Il y a quelques jours nous publiions ce texte essentiel d’Errico Malatesta « Les deux routes » dans lequel l’anarchiste italien, en 1921, année de la répression sanglante de la commune de Cronstadt par le pouvoir capitaliste d’état bolchévique et en prémisse de ce qui arriverait aux communes libres espagnoles 15 ans plus tard, expliquait les deux chemins empruntés par le socialisme et pourquoi le chemin vers l’anarchie était la seule possibilité émancipatrice pour la société humaine.
En complément de ce texte, nous publions ci-dessous sous sa forme pdf mise en page par l’auteur, Pierre Bance, une excellente analyse moderne de mise en parallèle de deux sociétés actuelles tentant de mettre en place l’émancipation de l’imposture étatico-marchande qui nous est imposée depuis des siècles. Ces deux sociétés en question sont la société zapatiste du Chiapas et la société du confédéralisme démocratique (CD) de la région du Rojava, cette zone sous stress géopolitique impérialiste depuis 2011 comprise entre les entités étatiques syrienne et turque et soumise à une guerre de contrôle territorial depuis plus de 10 ans.
A Résistance 71, depuis le départ, nous soutenons les Zapatistes du Chiapas et avons soutenu et soutenons encore le CD tel que préconisé et envisionné par Abdullah Öcalan à la fin des années 90, début des années 2000. Depuis 2016, bien des choses se sont produites au Rojava qui font questionner son évolution et nous avons émis bien des réserves sur le projet dès lors qu’il a été manifestement approprié par l’empire anglo-américano-sioniste dans sa mise en place de terrain du « contrat social du Rojava », sorte d’entité proto-étatique n’ayant plus, en apparence, grand chose à voir avec le CD d’Öcalan et la confédération des communes libres.
Pierre Bance dans le texte ci-dessous, fait une remarquable analyse-synthèse de cette évolution, et remet certaines pendules à l’heure en replaçant l’affaire dans son contexte géopolitique et en faisant un parallèle avec la société zapatiste du Chiapas dans le sud-est mexicain. Une excellente analyse à lire, relire et à faire circuler au grand large pour nous aider à comprendre le chemin à suivre par delà les aléas géopolitiques du moment. Ce texte est le meilleur que nous ayons lu sur le sujet depuis un bien long moment. Merci à Pierre pour ce superbe effort de synthèse tout à fait réussie.
Définitivement un texte à lire et diffuser parmi les Gilets Jaunes !

Le texte de Pierre Bance « Autonomie des institutions Chiapas, Rojava »
Format PDF
Autonomie des institutions Chiapas-Rojava – Fédéchose n° 190 – page 31-35

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Gardons toujours présent à l’esprit ceci :

Il n’y a pas de solution au sein du système, n’y en a jamais eu et ne saurait y en avoir ! (Résistance 71)

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

+

4 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie

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ZapatistasMujeres

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Communiqué EZLN – Chiapas – Mexique

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, politique et lobbyisme, politique et social, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , on 23 septembre 2021 by Résistance 71

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COMMUNIQUÉ DU COMITÉ CLANDESTIN RÉVOLUTIONNAIRE INDIGÈNE – COMMANDEMENT GÉNÉRAL DE L’ARMÉE ZAPATISTE DE LIBÉRATION NATIONALE

LE CHIAPAS AU BORD DE LA GUERRE CIVILE

Source :
http://enlacezapatista.ezln.org.mx/2021/09/21/le-chiapas-au-bord-de-la-guerre-civile/?utm_source=feedburner&utm_medium=email&utm_campaign=Feed%3A+EnlaceZapatista+%28Enlace+Zapatista%29


MEXIQUE.

19 SEPTEMBRE 2021.

AU PEUPLE DU MEXIQUE,

AUX PEUPLES DU MONDE,

À LA SEXTA NATIONALE ET INTERNATIONALE,

À L’EUROPE D’EN BAS À GAUCHE,

PREMIÈREMENT.– LE 11 SEPTEMBRE 2021, LE MATIN ET ALORS QUE LA DÉLÉGATION ZAPATISTE AÉRIENNE SE TROUVAIT DANS LA VILLE DE MEXICO, DES MEMBRES DE L’ORCAO, ORGANISATION PARAMILITAIRE AU SERVICE DU GOUVERNEMENT DE L’ÉTAT DU CHIAPAS, ONT SÉQUESTRÉ LES COMPAÑEROS SEBASTÍAN NUÑEZ PEREZ ET JOSE ANTONIO SANCHEZ JUAREZ, AUTORITÉS AUTONOMES DU CONSEIL DE BON GOUVERNEMENT DE PATRIA NUEVA, CHIAPAS.

L’ORCAO EST UNE ORGANISATION POLITICO-MILITAIRE À CARACTÈRE PARAMILITAIRE ; ELLE A DES UNIFORMES, DES ÉQUIPEMENTS, DES ARMES ET DES MUNITIONS ACQUISES AVEC L’ARGENT QU’ELLE REÇOIT DES PROGRAMMES SOCIAUX. ELLE EN GARDE UNE PARTIE ET DONNE L’AUTRE AUX FONCTIONNAIRES POUR QU’ILS COMMUNIQUENT SUR LE FAIT QUE LA POLITIQUE D’ASSISTANAT SE RÉALISE BIEN. AVEC CES ARMES, ELLE TIRE TOUTES LES NUITS SUR LA COMMUNAUTÉ ZAPATISTE DE MOISÉS Y GANDHI.

L’EZLN A ATTENDU AVEC PATIENCE JUSQU’À CE QUE S’ÉPUISENT TOUTES LES VOIES POSSIBLES VERS LA SOLUTION. PENDANT QUE LE GOUVERNEMENT DE L’ÉTAT DU CHIAPAS SABOTAIT ET ENTRAVAIT LA LIBÉRATION, CE SONT DES ORGANISATIONS DE DÉFENSE DES DROITS HUMAINS ET L’ÉGLISE CATHOLIQUE PROGRESSISTE QUI ONT ÉVALUÉ AVEC JUSTESSE CE QU’IL POURRAIT SE PASSER.

DEUXIÈMEMENT.– LOS COMPAÑEROS ONT ÉTÉ PRIVÉS DE LEUR LIBERTÉ PENDANT 8 JOURS ET ONT ÉTÉ LIBÉRÉS AUJOURD’HUI, LE 19 SEPTEMBRE 2021, GRÂCE À L’INTERVENTION DES PRÊTRES DE SAN CRISTÓBAL DE LAS CASAS ET D’OXCHUC, QUI FONT PARTIE DU DIOCÈSE DE SAN CRISTÓBAL DE LAS CASAS. LES COMPAÑEROS ONT ÉTÉ DÉPOUILLÉS D’UNE RADIO DE COMMUNICATION ET DE 6000 PESOS EN LIQUIDE QUI APPARTIENNENT AU CONSEIL DE BON GOUVERNEMENT.

TROISIÈMEMENT.– LE DÉLIT DE SÉQUESTRATION EST PUNI PAR LES LOIS DU MAUVAIS GOUVERNEMENT ET PAR LES LOIS ZAPATISTES. PENDANT QUE LE GOUVERNEMENT DE L’ÉTAT DU CHIAPAS COUVRE ET ENCOURAGE CES CRIMES, ET NE FAIT RIEN, L’ARMÉE ZAPATISTE DE LIBÉRATION NATIONALE A PROCÉDÉ À LA PRISE DES MESURES NÉCESSAIRES POUR LIBÉRER LES SÉQUESTRÉS ET ARRÊTER ET SANCTIONNER LES RESPONSABLES DU CRIME.

QUATRIÈMEMENT.- SI L’ESCALADE DU CONFLIT N’A PAS DÉBOUCHÉ SUR UNE TRAGÉDIE, C’EST GRÂCE À L’INTERVENTION DES PRÊTRES MENTIONNÉS, DES ORGANISATIONS DE DÉFENSE DES DROITS HUMAINS ET GRÂCE AUX MOBILISATIONS ET AUX DÉNONCIATIONS RÉALISÉES AU MEXIQUE, ET SURTOUT EN EUROPE.

CINQUIÈMEMENT.– LA MAUVAISE ADMINISTRATION DE RUTILIO ESCANDÓN EST EN TRAIN DE FAIRE TOUT SON POSSIBLE POUR DÉSTABILISER LE SUD-ORIENTAL ÉTAT MEXICAIN DU CHIAPAS :

ELLE RÉPRIME AVEC LUXE DE VIOLENCES LA COMMUNAUTÉ DES ÉCOLES NORMALES RURALES ;

ELLE SABOTE LES ACCORDS PRIS ENTRE LE PROFESSORAT DÉMOCRATIQUE ET LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL, POUSSANT LES INSTITUTEURS À SE MOBILISER RADICALEMENT POUR QUE SOIENT RESPECTÉS LES DITS ACCORDS ;

SES ALLIANCES AVEC LE NARCOTRAFIC FONT QUE LES COMMUNAUTÉS ORIGINELLES SE VOIENT OBLIGÉES DE FORMER DES GROUPES D’AUTODÉFENSE, PARCE QUE LE GOUVERNEMENT NE FAIT RIEN POUR PRÉSERVER LA VIE, LA LIBERTÉ ET LES BIENS DES HABITANTS. NON SEULEMENT LE GOUVERNEMENT DU CHIAPAS COUVRE LES GANGS DE NARCOTRAFIQUANTS, MAIS IL ENCOURAGE, PROMEUT ET FINANCE AUSSI DES GROUPES PARAMILITAIRES COMME CEUX QUI ATTAQUENT CONTINUELLEMENT DES COMMUNAUTÉS À ALDAMA ET À SANTA MARTHA.

IL MÈNE UNE POLITIQUE VACCINALE INTENTIONNELLEMENT LENTE ET DÉSORDONNÉE QUI EST EN TRAIN DE PROVOQUER DES DÉSACCORDS PARMI LA POPULATION RURALE ET QUI NE TARDERA PAS À EXPLOSER. PENDANT CE TEMPS, LE NOMBRE DE MORTS DUES À LA COVID AUGMENTE DANS LES COMMUNAUTÉS SANS QU’ELLES SOIENT PRISES EN COMPTE.

SES FONCTIONNAIRES SONT EN TRAIN DE VOLER TOUT CE QU’ILS PEUVENT DU BUDGET DE L’ÉTAT DU CHIAPAS, SE PRÉPARANT PEUT-ÊTRE À UN EFFONDREMENT DU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL OU PARIANT SUR UN CHANGEMENT DE PARTI AU POUVOIR.

IL A MAINTENANT ESSAYÉ DE SABOTER LA SORTIE DE LA DÉLÉGATION ZAPATISTE QUI PARTICIPE À LA TRAVERSÉE POUR LA VIE, CHAPITRE EUROPE, EN ORDONNANT À SES PARAMILITAIRES DE L’ORCAO L’ENLÈVEMENT DE NOS COMPAGNONS, LAISSANT LE CRIME IMPUNI ET ESSAYANT DE PROVOQUER UNE RÉACTION DE L’EZLN DANS LE BUT DE DÉSTABILISER UN ÉTAT DONT LA GOUVERNANCE NE TIENT QU’À UN FIL.

SIXIÈMEMENT.– SI L’OBJECTIF DU PARTI VERT ÉCOLOGISTE DU MEXIQUE (PVEM) EST DE PROVOQUER UN PROBLÈME QUI AURA DES RÉPERCUSSIONS INTERNATIONALES, AINSI QUE DE DÉSTABILISER LE RÉGIME AU POUVOIR, IL FERAIT MIEUX DE RECOURIR À LA CONSULTATION DE RÉVOCATION DE MANDAT.

LE PVEM EST UN DES NOMS QUE LE VIEUX PRI UTILISE SUR CES TERRES. PARFOIS C’EST LE PAN, PARFOIS LE PRD, MAINTENANT C’EST LE PVEM, MAL DÉGUISÉ EN PARTI DE MOUVEMENT DE RÉGÉNÉRATION NATIONALE. CE SONT LES MÊMES DÉLINQUANTS D’HIER ET MAINTENANT ILS FONT PARTIE DU MAL NOMMÉ MOUVEMENT «D’OPPOSITION», COMME «CINQUIÈME COLONNE» DANS LA 4T.

LES RESPONSABLES SONT : Rutilio Escandón et Victoria Cecilia Flores Pérez.

SI CE QUE VOUS VOULEZ C’EST FAIRE TOMBER L’ACTUEL GOUVERNEMENT FÉDÉRAL, OU LUI CAUSER DES DIFFICULTÉS EN REPRÉSAILLES DES INVESTIGATIONS PÉNALES À VOTRE ENCONTRE, OU QUE VOUS ÊTES EN TRAIN DE JOUER DANS L’UNE DES FACTIONS QUI SE DISPUTENT LA SUCCESSION DE 2024, UTILISEZ LES CANAUX LÉGAUX AUXQUELS VOUS AVEZ ACCÈS ET CESSEZ DE JOUER AVEC LA VIE, LA LIBERTÉ ET LES BIENS DES CHIAPANÈQUES. VOTEZ ET APPELEZ À VOTER POUR LA RÉVOCATION DU MANDAT ET CESSEZ DE JOUER AVEC LE FEU CAR VOUS ALLEZ VOUS BRÛLER.

SEPTIÈMEMENT.– NOUS APPELONS L’EUROPE D’EN BAS ET À GAUCHE ET LA SEXTA NATIONALE ET INTERNATIONALE À MANIFESTER DEVANT LES AMBASSADES ET CONSULATS DU MEXIQUE, ET LES CASAS DEL GOBIERNO DE L’ÉTAT DU CHIAPAS, POUR EXIGER QU’ILS CESSENT DÈS MAINTENANT LES PROVOCATIONS ET QU’ILS ABANDONNENT LE CULTE DE LA MORT QU’ILS PROFESSENT. LA DATE FIXÉE EST LE VENDREDI 24 SEPTEMBRE 2021.

DEVANT L’ACTION ET L’OMISSION DES AUTORITÉS D’ÉTAT ET FÉDÉRALES FACE AU CRIME ACTUEL ET AUX CRIMES ANTÉRIEURS, NOUS PRENDRONS LES MESURES PERTINENTES POUR QUE LA JUSTICE SOIT APPLIQUÉE AUX CRIMINELS DE L’ORCAO ET AUX FONCTIONNAIRES QUI LES PARRAINENT.

C’EST TOUT. LA PROCHAINE FOIS IL N’Y AURA PLUS DE COMMUNIQUÉ. C’EST-À-DIRE, IL N’Y AURA PAS DE MOTS, MAIS DES ACTES.

Depuis les montagnes du Sud-est mexicain

Au nom du CCRI-CG de l’EZLN

Sous-commandant insurgé Galeano

Mexique, 19 septembre 2021.

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Lecture complémentaire :

6ème déclaration zapatiste d ela forêt de Lacandon (2005)

Mouvement Zapatiste : le feu et la parole

Réseau de Résistance et de Rébellion Internationales

maison_caracole

MarcosC

Résistance au colonialisme : 5ème AG du Conseil National Indigène CNI/EZLN

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, canada USA états coloniaux, colonialisme, crise mondiale, démocratie participative, gilets jaunes, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, politique et lobbyisme, politique et social, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , on 28 décembre 2020 by Résistance 71

 

 

 

Convocation à la 5ème assemblée générale du Conseil National Indigène 

 

CNI / EZLN

 

22 décembre 2020

 

Source de l’article en français:
https://www.lavoiedujaguar.net/Convocation-a-la-Cinquieme-Assemblee-nationale-du-Congres-national-indigene

 

Nous, peuples, nations, tribus et quartiers originaires qui constituons le Congrès national indigène, le Conseil indigène de gouvernement et l’Armée zapatiste de libération nationale, alors que nous nous confrontons à la maladie de notre Mère Terre qui s’est traduite en une grave pandémie frappant la vie et l’économie de nos communautés et le monde entier, nous nous faisons entendre dans la voix des peuples originaires qui crient depuis les géographies où ils luttent et résistent contre la guerre capitaliste visant à l’appropriation des territoires indigènes et paysans par d’agressives politiques d’extraction d’un bout à l’autre de la géographie nationale, par des mégaprojets de mort appelés Couloir interocéanique dans les États d’Oaxaca et de Veracruz, Projet intégral Morelos dans les États de Morelos, Puebla et Tlaxcala, Train maya dans les États du sud-est du Mexique ou Aéroport international de Mexico dans le centre du pays, par la mise en œuvre d’un ensemble de politiques et de mécanismes pour la continuation du « libre commerce » subordonné aux États-Unis et au Canada, pour contenir la migration et pour empêcher ou affaiblir l’organisation et la résistance de nos peuples en supplantant les autorités traditionnelles et en réalisant des simulacres de consultation indigène.

Il s’agit de politiques et de mégaprojets impulsés par le gouvernement néolibéral de la Quatrième Transformation au service des grands capitaux mondiaux contre l’organisation autonome de nos peuples, et ce en s’appuyant sur la militarisation, la mise en place de la Garde nationale et la militarisation de tout le territoire national, la complicité État cartels criminels, la création de programmes visant à briser l’organisation communautaire comme le programme Sembrando Vida (Semant la vie) et l’approbation de lois favorables aux grands consortiums transnationaux comme la Loi fédérale pour le développement et la protection du maïs natif.

Le CNI et le CIG — avec les communautés zapatistes —, en tant que congrès quand nous sommes ensemble et en tant que réseau quand nous sommes séparés, nous sommes cette parole collective que non seulement nous faisons nôtre, mais aussi dans et avec laquelle nous nous entrelaçons, déterminés à accroître notre résistance autant que s’accroîtra la menace capitaliste contre la vie.

Car pour nos peuples il n’y a pas de possibilité de nous rendre, de nous vendre ou de capituler quand ce sont la Mère Terre et la vie dont gouvernements, entreprises, militaires et cartels de drogues veulent faire le butin de leur vol et ;

Considérant que :

1. La répression, les menaces, la formation de groupes de choc et la criminalisation s’intensifient contre les communautés qui résistent au Projet intégral Morelos que le mauvais gouvernement fédéral a décidé d’imposer illégalement en utilisant son groupe armé de choc appelé Garde nationale, et malgré cela, l’héritage héroïque de Samir Flores Soberanes reste vivant parmi les sœurs et frères du Front des peuples en défense de la terre et de l’eau des États de Morelos, Puebla et Tlaxcala qui ne se rendent pas, ne se vendent pas et ne capitulent pas ;

2. La guerre contre les communautés autonomes et les communautés des peuples originaires du CNI dans l’État du Chiapas s’exacerbe, tandis que les gouvernements garantissent l’impunité des groupes paramilitaires, financés par eux, qui attaquent jour et nuit les peuples et communautés sœurs ;

3. Le mauvais gouvernement fédéral et ses forces armées, en alliance cynique avec les obscurs intérêts économiques qui spéculent sur l’appropriation du territoire des peuples indigènes et paysans, sème la peur et la terreur en violant systématiquement les lois, verdicts et suspensions judiciaires pour imposer ses mégaprojets qui livrent le territoire du pays aux intérêts économiques transnationaux ;

4. La résistance et la rébellion s’accroissent dans la géographie des peuples originaires car s’accroissent aussi le pillage et la répression violente de la part du mauvais gouvernement à tous ses niveaux, en complicité avec des groupes paramilitaires et narco-paramilitaires, qui rendent possibles ses projets d’extractions polluants, et y compris dans les grandes villes, nos peuples résistent, comme le démontre la communauté otomí habitant Mexico ;

5. Depuis les luttes que nous sommes, nous, peuples originaires, voyons que dans le monde s’allument des espoirs face à cette guerre qui est la même, et depuis des géographies lointaines nous nous tournons vers ceux-ci, c’est-à-dire vers la lutte pour la vie, qui devient une langue où nous nous voyons les uns les autres et ;

6. Il existe la convocation zapatiste au lancement au mois d’avril 2021 d’une tournée planétaire commençant par le continent européen, pour laquelle le CNI est invité à former une délégation qui accompagne ce cheminement et porte notre parole collective ;

Nous convoquons

les délégué·e·s et les conseillères et conseillers du CNI-CIG pour qu’ils assistent à la

Cinquième Assemblée nationale du Congrès national indigène
et du Conseil indigène de gouvernement

qui aura lieu à :

« La Quinta Piedra », territoire récupéré du peuple nahua de l’ejido Tepoztlán, dans l’État de Morelos
les 23 et 24 janvier 2021

Selon le programme suivant :

23 janvier

Inauguration

Commissions de travail :

  • Bilan du pillage et de la guerre capitaliste contre nos peuples
  • Proposition pour la participation d’une délégation du CNI-CIG à la tournée planétaire zapatiste

24 janvier

Session plénière ouverte :

  • Conclusion des commissions de travail
  • Accords et résolutions
  • Communiqué public
  • Clôture

Note 1 : Compte tenu des circonstances sanitaires actuelles, nous invitons à nommer un·e ou deux délégué·e·s par peuple, communauté ou organisation indigène, selon le cas, afin de réaliser une assemblée amplement représentative mais moins nombreuse. Celles et ceux qui y assisteront devront respecter les mesures d’utilisation de masques, de saine distance, de lavage fréquent des mains et du visage. Et celles qui pourront être prises sur place.

Note 2 : Celles et ceux qui ne sont pas délégué·e·s ou conseillers et conseillères du CNI ou du CIG ne pourront assister à l’assemblée que sur invitation de la Commission de coordination et suivi.

Respectueusement

Décembre 2021

Pour la reconstitution intégrale de nos peuples
Jamais plus un Mexique sans nous

Congrès national indigène – Conseil indigène de gouvernement
Armée zapatiste de libération nationale

Traduit de l’espagnol (Mexique)

par Joani Hocquenghem

Texte d’origine :

Enlace Zapatista

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Lectures complémentaires :

Notre page « Réseau de Résistance et de Rébellion International » 3RI

5 textes pour comprendre et éradiquer le colonialisme

« Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte », Steven Newcomb, 2008

« Comprendre le système de l’oppression coloniale par mieux le démonter », Steven Newcomb

« Comprendre le système de l’oppression coloniale pour mieux le démonter », Peter d’Errico

« Effondrer le colonialisme », Résistance 71

« Nous sommes tous des colonisés ! », Résistance 71

 

Et pendant ce temps là… la guerre de l’eau continue de faire rage… (CNI-EZLN)

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, crise mondiale, démocratie participative, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, politique et social, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , on 4 décembre 2020 by Résistance 71

La guerre de l’eau fait rage, marchandisation à l’extrême de la vie sur cette planète. Plus que grand temps de dire NON ! Ensemble !
Solidarité, Entraide, Coopération, Fraternité
A bas la marchandise et l’État ! Vive la Commune Libre de notre humanité réalisée !
~ Résistance 71 ~

POUR LA VIE ET CONTRE L’ARGENT

LE CNI-CIG ET L’EZLN APPELLENT À LA SOLIDARITE AVEC LE FRONT DES PEUPLES EN DÉFENSE DE LA TERRE ET DE L’EAU DES ÉTATS DE MORELOS, PUEBLA ET TLAXCALA.

Novembre 2020

Source du communiqué en français :

http://enlacezapatista.ezln.org.mx/2020/11/30/pour-la-vie-et-contre-largent-le-cni-cig-et-lezln-appellent-a-la-solidarite-avec-le-front-des-peuples-en-defense-de-la-terre-et-de-leau-des-etats-de-morelos-puebla/?utm_source=feedburner&utm_medium=email&utm_campaign=Feed%3A+EnlaceZapatista+%28Enlace+Zapatista%29

Au peuple du Mexique,

Aux peuples du monde,

A la Sexta nationale et internationale,

Aux médias,

Nous, Congrès national indigène – Conseil indigène de gouvernement et EZLN, dénonçons la lâche expulsion des compañeros du campement en résistance de San Pedro Apatlaco, dans l’État du Morelos, perpétrée par la Garde nationale à l’aube du 23 novembre dans le but de reprendre illégalement la construction du conduit qui détourne l’eau de la rivière Cuautla vers la centrale thermoélectrique de Huexca.

Avec quel cynisme le gouvernement néo-libéral, qui prétend diriger ce pays, obéit à ses patrons qui sont le grand capital, avec quel cynisme les forces armées, sous les ordres du contremaître, agressent les peuples pour livrer l’eau du Cuautla, volée aux villages paysans de la région d’Ayala, aux entreprises qui profitent du Plan Intégral Morelos (PIM), telles que Elecnor et Enagasa, à qui on a donné en concession le gazoduc ; Bonatti et Abengoa, entreprises de construction du gazoduc et de la centrale thermoélectrique à Huexca ; et celles qui profiteront de la consommation de gaz, comme Saint Gobain, Nissan, Burlington, Continental et Gas Natural del Noreste.

Avec le PIM, les forces armées et le gouvernement néo-libéral, utilisant des survols militaires, progressent dans la répression et l’imposition de l’infrastructure énergétique en s’appuyant sur la destruction et la spoliation du territoire des peuples originaires afin de rendre possible, au prix du sang des nôtres comme le compañero Samir Flores Soberanes, l’exploitation de la nature. Tout cela pour que les patrons du capital transnational détruisent les monts avec leurs concessions minières et qu’ils s’emparent de l’eau au bénéfice des corridors industriels de Cuautla, Yecapixtla, Cuernavaca et de toute la région, dans les États de Morelos, Puebla et Tlaxcala. Avec quel cynisme et quelle impunité le contremaître, qui doit diriger le gouvernement fédéral, ordonne de piétiner le soi-disant état de droit, violant les 8 suspensions judiciaires des chantiers de l’aqueduc destiné à voler l’eau polluée par la centrale thermoélectrique de Huexca, ainsi que deux autres suspensions de plus contre le gazoduc sur les flancs du volcan sacré Popocatepetl, et contre la pollution du fleuve Cuautla, dans le cadre du Projet intégral Morelos.

Au vu de ce qui a été dit antérieurement et au vu de la tension croissante et de la violation de l’état de droit, nous rendons le mauvais gouvernement fédéral et le mauvais gouvernement de l’État du Morelos responsables de toute agression ou attentat perpétré contre les compañeros et compañeras qui luttent et résistent contre ce mégaprojet mortifère. Nous appelons tout particulièrement à la solidarité avec le Front des peuples en défense de la terre et de l’eau des États de Morelos, Puebla et Tlaxcala.

Bien à vous,

Novembre 2020.

Pour la reconstitution intégrale de nos peuples

Jamais plus un Mexique sans Nous

Congrès national indigène – Conseil indigène de gouvernement

Armée zapatiste de libération nationale

Mexique, novembre 2020

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A lire aussi:

6ème déclaration de la forêt de Lacandon

Viva Zapata !

Chiapas, feu et parole d’un peuple qui dirige et d’un gouvernement qui obéit

Unification de la rébellion contre le système étatico-capitaliste

Zone Autonome Temporaire

Tintin Vive la Révolution !

Le Rojava de l’intérieur avec « Lutte Anarchiste »

et aussi…

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

+

4 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie

Par delà tous les antagonismes induits… La marche zapatiste sur les 5 continents en 2021 pour une société des sociétés

Posted in actualité, altermondialisme, colonialisme, crise mondiale, démocratie participative, gilets jaunes, guerres imperialistes, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, pédagogie libération, politique et social, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , on 14 octobre 2020 by Résistance 71

Pour la vie, les Zapatatistes parcoureront les cinq continents

“Une montagne en haute mer”


Communiqué du Comité clandestin révolutionnaire indigène
Commandement général de l’Armée zapatiste de libération nationale


Mexique, 5 octobre 2020


Source: 
https://www.lavoiedujaguar.net/Sixieme-partie-Une-montagne-en-haute-mer

Au Congrès national indigène – Conseil indigène de gouvernement,
À la Sexta nationale et internationale,
Aux réseaux de résistance et de rébellion,
Aux personnes honnêtes qui résistent dans tous les coins de la planète,

Sœurs, frères, sœurs-frères,

Compañeras, compañeros, compañeroas,

Nous, peuples originaires de racine maya et zapatistes, vous saluons et vous disons que ce qui est venu à notre pensée commune, d’après ce que nous voyons, entendons et sentons.

Un. Nous voyons et entendons un monde malade dans sa vie sociale, fragmenté en millions de personnes étrangères les unes aux autres, s’efforçant d’assurer leur survie individuelle, mais unies sous l’oppression d’un système prêt à tout pour étancher sa soif de profits, même alors qu’il est clair que son chemin va à l’encontre de l’existence de la planète Terre.

L’aberration du système et sa stupide défense du « progrès » et de la « modernité » volent en éclat devant une réalité criminelle : les féminicides. L’assassinat de femmes n’a ni couleur ni nationalité, il est mondial. S’il est absurde et déraisonnable que quelqu’un soit persécuté, séquestré, assassiné pour sa couleur de peau, sa race, sa culture, ses croyances, on ne peut pas croire que le fait d’être femme signifie une sentence de marginalisation et de mort.

En une escalade prévisible (harcèlement, violence physique, mutilation et assassinat), cautionnée par une impunité structurelle (« elle le méritait », « elle avait des tatouages », « qu’est-ce qu’elle faisait à cet endroit à cette heure-là ? », « habillée comme ça, il fallait s’y attendre »), les assassinats de femmes n’ont aucune logique criminelle si ce n’est celle du système. De différentes strates sociales, d’âges qui vont de la petite enfance à la vieillesse et dans des géographies éloignées les unes des autres, le genre est la seule constante. Et le système est incapable d’expliquer pourquoi cela va de pair avec son « développement » et son « progrès ». Dans l’indignante statistique des morts, plus une société est « développée », plus le nombre des victimes augmente dans cette authentique guerre de genre.

Et la « civilisation » semble dire aux peuples originaires : « La preuve de ton sous-développement, c’est ton faible taux de féminicides. Ayez vos mégaprojets, vos trains, vos centrales thermoélectriques, vos mines, vos barrages, vos centres commerciaux, vos magasins d’électroménager — avec chaîne de télé inclue —, et apprenez à consommer. Soyez comme nous. Pour payer la dette de cette aide progressiste, vos terres, vos eaux, vos cultures, vos dignités ne suffisent pas. Vous devez compléter avec la vie des femmes. »

Deux. Nous voyons et nous entendons la nature mortellement blessée, qui, dans son agonie, avertit l’humanité que le pire est encore à venir. Chaque catastrophe « naturelle » annonce la suivante et fait oublier, de façon opportune, que c’est l’action d’un système humain qui la provoque.

La mort et la destruction ne sont plus une chose lointaine, qui s’arrête aux frontières, qui respecte les douanes et les conventions internationales. La destruction dans n’importe quel coin du monde se répercute sur toute la planète.

Trois. Nous voyons et nous entendons les puissants se replier et se cacher dans les prétendus États nationaux et leurs murs. Et, dans cet impossible saut en arrière, ils font revivre des nationalismes fascistes, des chauvinismes ridicules et un charabia assourdissant. C’est là où nous apercevons les guerres à venir, celles qui s’alimentent d’histoires fausses, vides, mensongères et qui traduisent nationalités et races en suprématies qui s’imposeront par voie de mort et de destruction. Les différents pays vivent la bataille entre les contremaîtres et ceux qui aspirent à leur succéder, qui occulte le fait que le patron, le maître, le donneur d’ordre, est le même et n’a d’autre nationalité que celle de l’argent. Tandis que les organismes internationaux languissent et se convertissent en simples appellation, des pièces de musée… ou même pas.

Dans l’obscurité et la confusion qui précèdent ces guerres, nous entendons et nous voyons l’attaque, l’encerclement et la persécution de toute lueur de créativité, d’intelligence et de rationalité. Face à la pensée critique, les puissants demandent, exigent et imposent leurs fanatismes. La mort qu’ils sèment, cultivent et récoltent n’est pas seulement la mort physique ; elle inclut aussi l’extinction de l’universalité de l’humanité elle-même — l’intelligence —, ses avancées et ses succès. De nouveaux courants ésotériques, laïcs ou non, déguisés en modes intellectuelles ou en pseudosciences renaissent ou sont créés ; et on prétend soumettre les arts et les sciences à des militantismes politiques.

Quatre. La pandémie du Covid 19 a non seulement montré les vulnérabilités de l’être humain, mais aussi la cupidité et la stupidité des différents gouvernements nationaux et de leurs supposées oppositions. Des mesures du plus élémentaire bon sens ont été sous-estimées, le pari étant toujours que la pandémie allait être de courte durée. Quand la présence de la maladie s’est prolongée de plus en plus, les chiffres ont commencé à se substituer aux tragédies. La mort s’est ainsi convertie en un nombre qui se perd quotidiennement parmi les scandales et les déclarations. Une sinistre comparaison entre nationalismes ridicules. Le pourcentage de strikes et de home runs qui détermine quelle équipe de base-ball, ou quelle nation, est meilleure ou pire.

Comme il a été précisé dans l’un des textes précédents, au sein du zapatisme nous optons pour la prévention et l’application de mesures sanitaires qui, en leur temps, ont fait l’objet de consultation avec des scientifiques femmes et hommes qui nous ont orientés et nous ont offert leur aide sans hésiter. Nous, peuples zapatistes, leur en sommes reconnaissants et nous avons voulu le montrer. À six mois de la mise en œuvre de ces mesures (masques ou leur équivalent, distance entre personnes, arrêt des contacts personnels directs avec des zones urbaines, quarantaine de quinze jours pour qui a pu être en contact avec des personnes infectées, lavages fréquent à l’eau et au savon), nous déplorons le décès de trois compagnons qui ont présenté deux symptômes ou plus associés au Covid 19 et qui ont été en contact direct avec des personnes infectées.

Huit autres compañeros et une compañera, qui sont morts durant cette période, ont présenté un des symptômes. Comme nous n’avons pas la possibilité de faire des tests, nous présumons que la totalité des douze compañer@s sont morts du dit coronavirus (des scientifiques nous ont recommandé de supposer que tout problème respiratoire serait dû au Covid 19). Ces douze disparitions sont de notre responsabilité. Ce n’est ni la faute de la 4T [1] ou de l’opposition, des néolibéraux ou des néoconservateurs, des chairos ou des fifis [2], de conspirations ou de complots. Nous pensons que nous aurions dû prendre encore plus de précautions.

À l’heure actuelle, du fait de la disparition de ces douze compañer@s, nous avons amélioré dans toutes les communautés les mesures de prévention, maintenant avec le soutien d’organisations non gouvernementales et de scientifiques qui, à titre individuel ou en tant que collectif, nous orientent sur la façon d’affronter plus fermement une possible nouvelle vague. Des dizaines de milliers de masques (conçus spécialement pour éviter qu’un probable porteur ne contamine d’autres personnes, peu coûteux, réutilisables et adaptés aux circonstances) ont été distribués dans toutes les communautés. D’autres dizaines de milliers sont produits dans les ateliers de broderie et de couture des insurgé·e·s et dans les villages. L’usage massif de masques, les quarantaines de deux semaines pour qui pourrait avoir été infecté, la distance et le lavage régulier des mains et du visage à l’eau et au savon, et la limitation autant que possible des déplacements dans les villes sont les mesures recommandées y compris aux frères et sœurs des partis pour stopper l’expansion des contagions et permettre de maintenir la vie communautaire.

Le détail de ce qu’a été et est notre stratégie pourra être consulté en temps voulu. Pour le moment nous disons, avec la vie qui palpite dans nos corps, que selon notre évaluation (sur laquelle probablement nous pouvons nous tromper), le fait d’affronter la menace en tant que communauté, et non comme un problème individuel, et de faire porter notre effort principal sur la prévention nous permet de dire, en tant que peuples zapatistes : nous sommes là, nous résistons, nous vivons, nous luttons.

Et maintenant, dans le monde entier, le grand capital veut que les personnes retournent dans les rues pour assumer à nouveau leur condition de consommateurs. Parce que qui le préoccupe, ce sont les problèmes du Marché : la léthargie de la consommation de marchandises.

Il faut reprendre les rues, oui, mais pour lutter. Parce que, nous l’avons dit auparavant, la vie, la lutte pour la vie, n’est pas une question individuelle, mais collective. On voit maintenant que ce n’est pas non plus une question de nationalités, elle est mondiale.

Nous voyons et entendons bien des choses à ce sujet. Et nous y pensons beaucoup. Mais pas seulement…

Cinq. Nous entendons et voyons aussi les résistances et les rébellions qui, même réduites au silence ou oubliées, n’en sont pas moins des clefs, des pistes d’une humanité qui se refuse à suivre le système dans sa marche précipitée vers l’effondrement : le train mortel du progrès qui avance, arrogant et impeccable, vers le gouffre. Tandis que le chauffeur oublie qu’il n’est qu’un employé parmi d’autres et croit, ingénument, que c’est lui qui décide de la route à suivre, alors qu’il ne fait que suivre la prison des rails vers l’abîme.

Résistances et rébellions qui, sans oublier les pleurs dus aux disparus, s’efforcent de lutter pour ce qu’il y a de plus subversif — qui le dirait — dans ces mondes divisés entre néolibéraux et néoconservateurs : la vie.

Rébellions et résistances qui comprennent, chacune selon sa façon, son temps et sa géographie, que les solutions ne se trouvent pas dans la foi en les gouvernements nationaux, qu’elles ne se génèrent pas à l’abri des frontières et ne revêtent ni drapeaux ni langues différentes.

Résistances et rébellions qui nous apprennent à nous, femmes, hommes, femmes-hommes zapatistes, que les solutions pourraient se trouver en bas, dans les sous-sols et les recoins du monde. Et non dans les palais gouvernementaux. Et non dans les bureaux des grandes corporations.

Résistances et rébellions qui nous montrent que, si ceux d’en haut rompent les ponts et ferment les frontières, il nous reste à naviguer sur les fleuves et les mers pour nous rencontrer. Que le remède, s’il y en a un, est mondial, et qu’il a la couleur de la terre, du travail qui vit et meurt dans les rues et les quartiers, dans les mers et les cieux, dans les montagnes et dans leurs entrailles. Que, comme le maïs originaire, ses couleurs, ses tonalités et ses sons sont multiples.

Nous voyons et nous entendons tout cela, et plus. Et nous nous voyons et nous nous entendons tels que ce que nous sommes : un nombre qui ne compte pas. Parce que la vie n’importe pas, ne fait pas vendre, elle n’est pas une nouvelle, elle ne tient pas dans les statistiques, ne se compare pas dans les enquêtes, n’est pas évaluée dans les réseaux sociaux, ne provoque pas, ne représente pas un capital politique, le drapeau d’un parti, un scandale à la mode. À qui importe qu’un petit, un tout petit groupe de gens originaires, d’indigènes, vive, c’est-à-dire lutte ?

Parce qu’il s’avère que nous vivons. Que malgré les paramilitaires, les pandémies, les mégaprojets, les mensonges, les calomnies et les oublis, nous vivons. C’est-à-dire nous luttons.

Et c’est à quoi nous pensons : nous continuons à lutter. C’est-à-dire nous continuons à vivre. Et nous pensons que, durant toutes ces années, nous avons reçu l’embrassade fraternelle de personnes de notre pays et du monde entier. Et nous pensons que, si ici la vie résiste et, non sans difficultés, fleurit, c’est grâce à ces personnes qui ont affronté les distances, formalités, frontières et différences de cultures et de langues. Grâce à elles, eux, elles-eux — mais surtout à elles —, qui ont bravé et vaincu les calendriers et les géographies.

Dans les montagnes du Sud-Est mexicain, tous les mondes du monde ont trouvé, et trouvent, une écoute dans nos cœurs. Leur parole et leur action ont été l’aliment pour la résistance et la rébellion, qui ne sont autres que la continuation de celles de nos prédécesseurs.

Des personnes suivant la voie des sciences et des arts ont trouvé le moyen de nous embrasser et nous encourager, même si c’était à distance. Des journalistes, fifis ou non, qui ont relaté la misère et la mort d’avant, la dignité et la vie de toujours. Des personnes de toutes les professions et métiers qui, beaucoup pour nous, peut-être un peu pour elles-eux, ont été là, sont là.

Et nous pensons à tout cela dans notre cœur collectif, et il est venu à notre pensée qu’il est grand temps que nous, femmes, hommes, femmes-hommes zapatistes, répondions à l’écoute, la parole et la présence de ces mondes. Ceux proches et ceux lointains dans la géographie.

Six. Et nous avons décidé ceci :

Qu’il est temps à nouveau que les cœurs dansent, et que leur musique et leurs pas ne soient pas ceux de la lamentation et de la résignation.

Que diverses délégations zapatistes, hommes, femmes et femmes-hommes de la couleur de notre terre, iront parcourir le monde, chemineront ou navigueront jusqu’à des terres, des mers et des cieux éloignés, cherchant non la différence, non la supériorité, non la confrontation, et moins encore le pardon et la compassion.

Nous irons à la rencontre de ce qui nous rend égaux.

Non seulement l’humanité qui anime nos peaux différentes, nos façons distinctes, nos langues et couleurs diverses. Mais aussi, et surtout, le rêve commun que nous partageons en tant qu’espèce depuis que, dans l’Afrique qui pourrait sembler lointaine, nous nous sommes mis en marche depuis le giron de la première femme : la recherche de la liberté qui a impulsé ce premier pas… et qui est toujours en marche.

Que la première destination de ce voyage planétaire sera le continent européen.

Que nous naviguerons vers les terres européennes. Que nous partirons et que nous appareillerons depuis les terres mexicaines, au mois d’avril de l’année 2021.

Qu’après avoir parcouru différents recoins de l’Europe d’en bas et à gauche, nous arriverons à Madrid, la capitale espagnole, le 13 aout 2021 — cinq cents ans après la prétendue conquête de ce qui est aujourd’hui Mexico. Et que, tout de suite après, nous reprendrons la route.

Que nous parlerons au peuple espagnol. Non pas pour menacer, reprocher, insulter ou exiger. Non pas pour exiger qu’il nous demande pardon. Non pas pour les servir ni pour nous servir.

Nous irons dire au peuple d’Espagne deux choses simples :

Un. Qu’ils ne nous ont pas conquis. Que nous sommes toujours en résistance et en rébellion.

Deux. Qu’ils n’ont pas à demander qu’on leur pardonne quoi que ce soit. Ça suffit de jouer avec le passé lointain pour justifier, de façon démagogique et hypocrite, les crimes actuels et qui continuent : l’assassinat de lutteurs sociaux, comme le frère Samir Flores Soberanes, les génocides que cachent des mégaprojets conçus et réalisés pour contenter le puissant — celui-là même qui sévit dans tous les coins de la planète —, l’encouragement par le financement et l’impunité des paramilitaires, l’achat des consciences et des dignités pour trente deniers.

Nous, hommes, femmes, femmes-hommes zapatistes, nous NE voulons PAS revenir à ce passé, ni seuls ni encore moins en compagnie de qui veut semer la rancœur raciale et prétend alimenter son nationalisme réchauffé avec la supposée splendeur d’un empire, celui des Aztèques, qui a crû au prix du sang de leurs semblables, et qui veut nous convaincre qu’avec la chute de cet empire nous, peuples originaires de ces terres, avons été vaincus.

Ni l’État espagnol ni l’Église catholique n’ont à nous demander pardon de quoi que ce soit. Nous ne nous ferons pas l’écho des charlatans qui se valent de notre sang et ainsi cachent que leurs mains en sont tachées.

De quoi l’Espagne va-t-elle nous demander pardon ? D’avoir enfanter Cervantès ? José Espronceda ? León Felipe ? Federico García Lorca ? Manuel Vázquez Montalbán ? Miguel Hernández ? Pedro Salinas ? Antonio Machado ? Lope de Vega ? Bécquer ? Almudena Grandes ? Panchito Varona, Ana Belén, Sabina, Serrat, Ibañez, Llach, Amparanoia, Miguel Ríos, Paco de Lucía, Victor Manuel, Aute toujours ? Buñuel, Almodóvar et Agrado, Saura, Fernán Gómez, Fernando León, Bardem ? Dalí, Miró, Goya, Picasso, Le Greco et Velázquez ? Une des meilleures parts de la pensée critique mondiale, sous le sceau du Ⓐ libertaire ? L’exil ? Le frère maya Gonzalo Guerrero ?

De quoi va nous demander pardon l’Église catholique ? De la venue de Bartolomé de las Casas ? De don Samuel Ruiz García ? D’Arturo Lona ? De Sergio Méndez Arceo ? De la sœur Chapis ? Des présences des prêtres, sœurs religieuses et séculaires qui ont cheminé au côté des peuples originaires sans les diriger ni les supplanter ? De ceux qui risquent leur liberté et leur vie pour défendre les droits humains ?

En l’année 2021 il y aura vingt ans de la Marche de la couleur de la terre, celle que nous avons réalisée avec les peuples frères du Congrès national indigène pour exiger une place dans cette nation qui maintenant est en train de s’effondrer.

Vingt ans après nous naviguerons et marcherons pour dire à la planète que, dans le monde que nous sentons dans notre cœur collectif, il y a de la place pour toutes, tous, tou·te·s. Purement et simplement parce que ce monde n’est possible que si toutes, tous, tou·te·s, nous luttons pour le construire.

Les délégations zapatistes seront conformées en majorité de femmes. Non seulement parce qu’elles veulent ainsi rendre l’embrassade qu’elles ont reçue dans les rencontres internationales précédentes. Mais aussi, et surtout, pour que nous, hommes zapatistes, manifestions clairement que nous sommes ce que nous sommes, et que nous ne sommes pas ce que nous ne sommes pas, grâce à elles, à cause d’elles et avec elles.

Nous invitons le CNI-CIG à former une délégation pour nous accompagner et qu’ainsi notre parole soit plus riche pour l’autre qui lutte au loin. Nous invitons en particulier une délégation des peuples qui portent haut le nom, l’image et le sang du frère Samir Flores Soberanes, pour que leur douleur, leur rage, leur lutte et leur résistance parvienne plus loin.

Nous invitons ceux qui ont pour vocation, engagement et horizon les arts et les sciences à accompagner, à distance, nos navigations et notre marche. Et qu’ainsi ils nous aident à diffuser qu’en ceux-ci, les sciences et les arts, existe la possibilité non seulement de la survie de l’humanité, mais aussi celle d’un monde nouveau.

En résumé : nous partons pour l’Europe au mois d’avril de l’année 2021. La date et l’heure ? Nous ne le savons pas… encore.

Compañeras, compañeros, compañeroas,

Sœurs, frères et sœurs-frères,

Ceci est notre détermination :

Face aux trains puissants, nos canots.

Face aux centrales thermoélectriques, les petites lumières que nous, femmes zapatistes, avons données à garder aux femmes qui luttent dans le monde entier.

Face aux murs et frontières, notre navigation collective.

Face au grand capital, une parcelle de maïs en commun.

Face à la destruction de la planète, une montagne naviguant au point du jour.

Nous sommes zapatistes et porteur·se·s du virus de la résistance et de la rébellion. En tant que tels, nous irons dans les cinq continents.

C’est tout… pour l’instant.

Depuis les montagnes du Sud-Est mexicain.

Au nom des femmes, des hommes et des autres zapatistes.

Sous-commandant insurgé Moisés

Mexique, octobre 2020.

P-S : Oui, c’est la sixième partie et, comme le voyage, elle continuera en sens inverse. C’est-à-dire que la suivra la cinquième partie, puis la quatrième, ensuite la troisième, elle continuera avec la deuxième et finira avec la première.

Traduit de l’espagnol (Mexique)

par Joani Hocquenghem

Texte d’origine :

Enlace Zapatista

Notes

[1] López Obrador présente le projet de son propre gouvernement comme celui de la « Quatrième Transformation » : 4T ; il suppose ainsi l’inscrire dans l’histoire révolutionnaire du Mexique : le premier moment étant celui de l’Indépendance, en 1810 ; le deuxième, celui de la Réforme (séparation de l’Église et de l’État), au milieu du XIXe siècle ; le troisième, celui de la révolution de 1910 (NdT).

[2] Chairos : suivistes, l’expression a été employée en particulier pour les inconditionnels de López Obrador ; fifis : gens chics, BCBG (NdT).

= = =

5 textes pour comprendre et éradiquer le colonialisme

« Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte », Steven Newcomb, 2008

« Comprendre le système de l’oppression coloniale par mieux le démonter », Steven Newcomb

« Comprendre le système de l’oppression coloniale pour mieux le démonter », Peter d’Errico

« Effondrer le colonialisme », Résistance 71

« Nous sommes tous des colonisés ! », Résistance 71

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

+

4 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie


La marche vers la société des sociétés

Résistance politique : Déclaration EZLN 1er janvier 2020… 26 ans de guerre contre l’oubli

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, crise mondiale, démocratie participative, gilets jaunes, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, politique et social, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , on 6 janvier 2020 by Résistance 71

 

 

Paroles du comité révolutionnaire indigène clandestin du commandement général de l’Armée Nationale de Libération Zapatiste (EZLN) à l’occasion du 26ème anniversaire du début de la guerre contre l’oubli

 

Subcommandante Moisès, EZLN

 

1er janvier 2020

 

Bonsoir, bonjour, bonne nuit et aube à toutes, à tous et à tou*te*s,

Compañeras et compañeros bases d’appui zapatistes,

Compañeros et compañeras commandantes et commandants zapatistes,

Autorités autonomes zapatistes,

Compañeras et compañeros miliciens, miliciennes, insurgées et insurgés,

Congrès national indigène – Conseil indigène de gouvernement,

Sexta nationale et internationale,

Réseaux de résistance et de rébellion,

Sœurs et frères du Mexique et du monde,

Par ma voix parle la voix de l’Armée zapatiste de libération nationale.

« Canek a dit :

Dans un livre que j’ai lu, qu’autrefois dans les temps anciens les seigneurs ont voulu former des armées pour défendre les terres qu’ils gouvernaient.

Ils ont d’abord convoqué les hommes les plus cruels car ils supposaient qu’ils étaient accoutumés au sang ; et ainsi ils ont recruté leurs troupes parmi les gens des prisons et des abattoirs.

Mais il est bientôt arrivé que, lorsque ces gens se sont trouvés face à l’ennemi, ils ont pâli et jeté leurs armes.

Ils ont alors pensé aux plus forts : aux travailleurs des carrières et aux mineurs.

Ils leur ont donné des armures et des armes lourdes.

Ainsi ils les ont envoyés se battre.

Mais il est arrivé que la seule présence de l’adversaire a rendu leurs bras faibles et leurs cœurs défaillants.

Puis ils ont recouru, sur de bons conseils, à ceux qui, sans être sanguinaires ni forts, étaient courageux et avaient quelque chose à défendre en justice : comme la terre qu’ils travaillent, la femme avec laquelle ils dorment et les enfants dont la grâce les réjouit.

C’est ainsi que, le moment venu, ces hommes se sont battus avec une telle fureur qu’ils ont dispersés leurs adversaires et se sont libérés à jamais de leurs menaces et de leurs discordes. »

Sœurs, frères,

Il y a vingt-six ans, un soir comme celui-ci, nous sommes descendus de nos montagnes vers les grandes villes pour défier le puissant.

Nous n’avions alors rien d’autre que notre mort.

Une mort double, car nous mourions de la mort et nous mourions de l’oubli.

Et nous avons dû choisir.

Choisir entre mourir comme des animaux ou mourir comme des êtres humains qui se battent pour la vie.

Alors le jour s’est levé sur ce 1er janvier avec le feu dans nos mains.

Le puissant que nous affrontions alors était le même qui nous méprise aujourd’hui.

Il avait un autre nom et un autre visage, mais il était et il est toujours le même aujourd’hui.

Il s’est passé alors ce qui s’est passé et s’est ouvert un espace pour la parole.

Nous avons alors ouvert notre cœur au cœur frère et compagnon.

Et notre voix a trouvé soutien et réconfort dans toutes les couleurs du monde d’en bas.

Le puissant a triché, il a joué un tour, il a menti et il a suivi son plan pour nous détruire.

Tout comme le fait le puissant d’aujourd’hui.

Mais nous avons résisté et brandi bien haut le drapeau de notre rébellion.

Avec l’aide de toutes les couleurs du monde entier, nous avons commencé à construire un projet de vie dans ces montagnes.

Persécutés par la force et le mensonge du puissant, alors comme maintenant, nous nous sommes obstinés tenacement à construire quelque chose de nouveau.

Nous avons connu des échecs et des erreurs, c’est vrai.

Nous en ferons sûrement d’autres sur notre long chemin.

Mais nous ne nous sommes jamais rendus.

Nous ne nous sommes jamais vendus.

Nous n’avons jamais capitulé.

Nous avons cherché toutes les voies possibles pour que la parole, le dialogue et l’accord soient les voies pour construire la paix avec justice et dignité.

Mais, alors comme maintenant, le puissant a fait la sourde oreille et s’est caché derrière le mensonge.

Comme pour le puissant de maintenant, le mépris a été et est encore l’arme qui accompagne ses militaires, policiers, gardes nationaux, paramilitaires et programmes anti-insurrectionnels.

Tous les puissants, ceux qui ont été en place et ceux de maintenant, ont fait la même chose.

Autrement dit, ils ont essayé et essayent de nous détruire.

Et chaque année tous les puissants se consolent et se font des illusions en pensant qu’ils en ont fini avec nous.

Ils disent qu’il n’y a plus de zapatistes.

Que nous ne sommes plus que très peu en résistance et en rébellion.

Qu’il ne reste peut-être plus qu’un seul zapatiste.

Et ils célèbrent chaque année leur victoire.

Et chaque année, les puissants se félicitent en disant qu’ils en ont fini avec les rébellions indigènes.

Que nous sommes déjà vaincus, disent-ils.

Mais chaque année, nous, zapatistes, nous nous montrons et nous crions :

Nous sommes là !

Et nous sommes de plus en plus nombreux.

Comme toute personne au cœur honnête peut le voir, nous avons un projet de vie.

Dans nos communautés fleurissent les écoles et les hôpitaux.

Et la terre est travaillée collectivement.

Et nous nous soutenons collectivement.

Nous sommes donc une communauté.

Une communauté de communautés.

Les femmes zapatistes ont leur propre voix, leur propre chemin.

Et leur destin n’est pas la mort violente, l’enlèvement, l’humiliation.

L’enfance et la jeunesse zapatistes ont santé, éducation et différentes options d’apprentissage et de diversion.

Nous conservons et défendons notre langue, notre culture, notre façon de faire.

Et nous accomplissons tenacement notre devoir de peuples gardiens de la Terre Mère.

Tout cela a été possible grâce à l’effort, au sacrifice et au dévouement des peuples organisés.

Et tout cela a été possible grâce au soutien d’individus, de groupes, de collectifs et d’organisations du monde entier.

Avec eux, elles, elleux, nous nous sommes engagés à construire la vie avec leur soutien.

Ainsi nous pouvons dire sans honte que nos avancées, nos réalisations, nos victoire se doivent à leur soutien et à leur aide.

Les erreurs, les revers et les échecs sont de notre seule responsabilité.

Mais, de même que notre vie a avancé et grandi, la force de la bête qui veut tout manger et tout détruire elle aussi a grandi.

La machine de mort et de destruction qu’on appelle le système capitaliste a grandi elle aussi.

Et la faim de la bête n’est pas rassasiée.

Elle est prête à tout pour son profit.

Peu lui importe de détruire la nature, des peuples entiers, des cultures millénaires, des civilisations entières.

La planète elle-même est détruite par les attaques de la bête.

Mais l’hydre capitaliste, la bête destructrice, cherche d’autres noms pour se cacher, attaquer et vaincre l’humanité.

Et un de ces noms derrière lesquels se cache la mort est « mégaprojet ».

« Mégaprojet » signifie détruire un territoire entier.

Tout.

L’air, l’eau, la terre, les gens.

Avec le mégaprojet, la bête ne fait qu’une bouchée des villages entiers, des montagnes et des vallées, des rivières et des lacs, des hommes, des femmes, des autr@s, des petits garçons et petites filles.

Et une fois qu’elle a fini de détruire, la bête va ailleurs en faire autant.

Et la bête qui se cache derrière les mégaprojets a sa ruse, son mensonge, sa tricherie pour convaincre.

La bête dit que c’est pour le progrès.

Elle dit que, grâce à ces mégaprojets, les gens auront un salaire et les nombreux avantages de la modernité.

Et sur ce discours de progrès et de modernité nous voulons nous rappeler ici un compañero du Congrès national indigène qui a été assassiné cette année : notre frère et compañero Samir Flores Soberanes.

Et nous nous souvenons de lui parce qu’il se demandait et demandait pour qui est ce progrès dont on parle tant.

Autrement dit notre frère Samir demandait où va cette route qu’ils appellent « progrès », ce nom que porte comme une enseigne la bête des mégaprojets.

Et il se répondait que cette route mène à la destruction de la nature et à la mort des communautés originaires.

Alors il a dit clairement qu’il n’était pas d’accord, et il s’est organisé avec ses compañeras et compañeros, et a résisté, et n’a pas eu peur.

Et c’est pourquoi le puissant qui est en place maintenant l’a fait tuer.

Il a été assassiné par le mauvais gouvernement parce que le travail de contremaître du mauvais gouvernement est de veiller à ce que la bête, le puissant, obtienne son profit.

Regardez et écoutez : le premier à saluer les mégaprojets et à dire qu’ils sont bons, c’est le grand capital, le grand patron.

Et il a le cœur content, le grand capitaliste, parce qu’avec les mégaprojets il va faire de gros profits.

Mais ni le contremaître ni le puissant ne disent clairement que ces mégaprojets vont semer la mort partout où ils avancent.

Il y a quelques jours, nos sœurs zapatistes ont organisé une Rencontre internationale de femmes qui luttent.

Elles nous disent, nous parlent, nous enseignent, nous éduquent avec ce qu’elles ont vu et entendu dans cette rencontre.

Et ce qu’elles nous montrent est comme un enfer pour les femmes et les enfants.

Elles nous parlent de meurtres, de disparitions, de viols, de mépris et de violence diabolique.

Et toute cette horreur se produit dans le progrès et ce qu’ils appellent la civilisation moderne.

Et il y a quelques jours, nous étions aussi avec les peuples compañeros du Congrès national indigène – Conseil indigène de gouvernement.

Et nous étions aussi au Forum pour la défense du territoire et de la Terre Mère.

Et dans ces rencontres, nous avons écouté avec inquiétude ce qu’ils racontent.

Et ils nous parlent de villages désertés, de leurs habitants expulsés.

De tueries des délinquants, parfois illégales et parfois légales. En d’autres termes, il n’est pas rare que ce soit les gouvernements eux-mêmes qui font ces atrocités.

De petites filles et petits garçons victimes d’abus et vendus comme des animaux.

De jeunes hommes et femmes dont la vie a été détruite par les drogues, la délinquance et la prostitution.

De commerces subissant des extorsions, de la part parfois de voleurs et parfois de fonctionnaires.

De sources polluées.

De lacs et de lagunes asséchés.

De rivières qui charrient des ordures.

De montagnes détruites par les mines.

De forêts rasées.

D’espèces animales en extinction.

De langues et de cultures assassinées.

De paysannes et de paysans qui avant travaillaient leurs propres terres, et qui maintenant sont des péons qui travaillent pour un patron.

Et de la Mère Terre qui meurt.

Alors, en tant que zapatistes que nous sommes, nous disons clairement que seul un imbécile peut dire que les mégaprojets sont bons.

Un imbécile ou un être malveillant et rusé qui sait qu’il ment et peu lui importe que sa parole cache la mort et la destruction.

Alors le gouvernement et tous ses défenseurs devraient dire clairement ce qu’ils sont : si ce sont des imbéciles ou des menteurs.

Il y a un an, en décembre 2018, le contremaître qui commande maintenant l’hacienda qui s’appelle « Mexique » a fait un simulacre pour demander la permission de la Terre Mère de la détruire.

Alors il s’est trouvé quelques personnes déguisés en Indiens et ils ont posé sur la terre un poulet, une boisson et des tortillas.

Ainsi le contremaître croit que la Terre Mère lui donne la permission de la tuer et de faire un train qui devrait porter le nom de famille du contremaître.

Il le fait parce qu’il méprise les peuples originaires et parce qu’il méprise la Terre Mère.

Et de plus, le contremaître ne s’en tient pas là, il a aussi défié tous les peuples indiens et dit que peu lui importait ce que nous pensons et ressentons, que « cela plaise ou non » aux indigènes, il va faire ce que lui a ordonné son patron, c’est-à-dire le puissant, c’est-à-dire le grand capital.

Tout comme les contremaîtres du temps de Porfirio Díaz.

C’est ce qu’il a dit, et c’est ce qu’il dit, car il y a quelques semaines il a fait un autre simulacre, une prétendue consultation où il a seulement informé qu’il y a beaucoup de bonnes choses dans les mégaprojets, mais il n’a rien dit de tous les malheurs qu’entraînent ces mégaprojets pour les gens et la nature.

Et de toute façon, seules quelques personnes ont participé à cette consultation pour dire qu’elles voulaient les mégaprojets.

Si c’est ainsi qu’il méprise les pensées et les sentiments des gens, alors il va mépriser tout autant la nature et les villages.

Et il le fait parce que son patron n’a rien à faire des gens ou de la nature, il ne se soucie que de ses profits.

« Que cela leur plaise ou non », dit le gouvernement.

Ça veut dire « que vous soyez vivants ou morts », on va le faire.

Et nous, les peuples zapatistes, nous l’entendons comme un défi, comme s’il disait qu’il a la force et l’argent, et à voir qui s’oppose à son mandat.

Il dit que ce qui va se faire, c’est ce qu’il dit, pas ce que disent les peuples, et que peu lui importe leurs raisons.

Alors nous, les peuples zapatistes, nous relevons notre part de ce défi.

Et nous savons que le contremaître actuel des puissants nous pose certaines questions.

Autrement dit, il nous demande ceci :

« Les peuples zapatistes sont-ils prêts à perdre tout ce qu’ils ont avancé avec leur autonomie ? »

« Les peuples zapatistes sont-ils prêts à subir des disparitions, des emprisonnements, des assassinats, des calomnies et des mensonges pour défendre la terre qu’ils gardent et dont ils prennent soin, la terre où ils naissent, élèvent leurs enfants, croissent, vivent et meurent ?

Et avec ces questions, le contremaître et ses gardes nous donnent le choix « vivants ou morts, mais il faut obéir ».

En d’autres termes, il nous demande si nous sommes prêts à mourir en tant que société alternative, en tant qu’organisation, en tant que peuples originaires aux racines mayas, en tant que gardiens de la Terre Mère, en tant qu’individus et individues zapatistes.

Alors nous, peuples zapatistes, nous continuons notre façon d’être et notre calendrier.

Dans nos montagnes, nous avons fait l’offrande à la Terre Mère.

Au lieu de boisson, nous lui avons donné à boire le sang de nos morts dans la lutte.

Au lieu de poulet, nous lui avons offert notre chair.

Au lieu de tortillas, nous avons fait l’offrande de nos os, car nous sommes faits de maïs.

Et nous avons fait cette offrande non pour demander à la terre la permission de la détruire, ou de la vendre, ou de la trahir.

Nous avons fait cette offrande seulement pour avertir la Terre Mère que nous la défendrons.

Nous la défendrons jusqu’à la mort si nécessaire.

Et alors nous avons compté le nombre de personnes qu’il faut pour défendre la terre.

Et il s’est avéré qu’il suffit d’une seule personne zapatiste.

Il suffit d’une femme zapatiste, ou un homme zapatiste, ou un*e zapatiste, qu’il soit vieux, ou jeune, ou enfant.

Il suffit qu’une personne zapatiste s’obstine à défendre la terre pour qu’elle, notre mère, sache qu’elle n’est pas seule et abandonnée.

Il suffit qu’une personne s’obstine dans la résistance et la rébellion.

Alors nous sommes allés chercher dans le cœur collectif que nous sommes.

Nous cherchons seulement une personne qui soit zapatiste et qui soit prête à tout.

À tout.

Et nous avons trouvé non une, ni deux, ni cent, ni mille, ni dix mille, ni cent mille.

Nous avons trouvé tout ce qui s’appelle Armée Zapatiste de Libération Nationale, prête à tout pour défendre la terre.

Alors nous avons la réponse à la question que nous pose le contremaître.

Et la réponse est :

« Oui, nous sommes prêts à disparaître comme proposition d’un nouveau monde. »

« Oui, nous sommes prêts à être détruits en tant qu’organisation. »

« Oui, nous sommes prêts à être anéantis en tant que peuples originaires aux racines mayas. »

« Oui, nous sommes prêts à mourir en tant que gardiens et gardiennes de la terre. »

« Oui, nous sommes prêts à être battus, emprisonnés, séquestrés et assassinés en tant qu’individus zapatistes. »

Ainsi le contremaître a sa réponse.

Mais comme c’est notre façon d’être, à nous zapatistes, notre réponse comporte aussi une question que nous posons aux contremaîtres :

« Les mauvais gouvernements sont-ils prêts à essayer de nous détruire À TOUT PRIX, à nous battre, à nous emprisonner, à nous faire disparaître et à nous assassiner ? »

Sœurs, frères, frères*sœurs,

Compañeros, compañeras et compañeroas,

Vous vous appelons,

En tant que Congrès national indigène – Conseil indigène de gouvernement,

En tant qu’individus, groupes, collectifs et organisations de la Sexta nationale et internationale…

En tant que réseaux de résistance et de rébellion…

En tant qu’êtres humains…

À vous demander à quoi vous êtes prêts, prêtes et prêt*e*s pour arrêter la guerre menée contre l’humanité, chacun dans sa propre géographie, son propre calendrier et à son propre mode.

Et quand vous aurez votre réponse selon votre pensée, faites-la connaître aux patrons et contremaîtres.

Tous les jours et en tous lieux, la bête pose à l’humanité la même question.

Il ne manque que la réponse.

C’est tout.

Depuis les montagnes du Sud-Est mexicain.

Au nom des femmes, hommes et autres zapatistes.

Sous-commandant insurgé Moisés.

Mexique, 31 décembre 2019 – 1er janvier 2020.

Source:

https://www.lavoiedujaguar.net/Paroles-du-Comite-clandestin-revolutionnaire-indigene-Commandement-general-de-l

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Murray_Bookchin_Le_municipalisme_libertaire

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