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Une communauté en armes et en rébellion, les racines indigènes de l’EZLN zapatiste, Chiapas, Mexique 2/2 (Tikva Honig-Parnass)

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, crise mondiale, démocratie participative, guerres hégémoniques, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, philosophie, politique et social, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , on 8 avril 2023 by Résistance 71

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“Vous devriez tous disparaître, pas seulement parce que vous représentez une aberration historique, une négation de l’humain et une cruauté cynique, mais aussi parce que vous êtes une insulte à l’intelligence. Vous et votre système nous rendez possibles, vous nous faites grandir. Nous sommes votre alter-ego, votre frère siamois opposé. Pour nous faire disparaître, vous devez disparaître…”
~ Communiqué zapatiste lors de l’intronisation du président mexicain Ernesto Zedillo, 1er décembre 1994 ~

Une communauté en armes, les racines indigènes de l’EZLN

Tikva Honig-Parnass*

2019

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

Avril 2023

1ère partie

2ème partie

(*) Née et élevée dans une famille ultra-sioniste dans la pré-Palestine de 1948, elle fut secrétaire du parti de gauche Mapam (parti unifié des travailleurs) et membre du parlement de la Knesset entre 1951 et 1954. Elle rompt définitivement avec le sionisme en 1960 et devient activiste politique et écrivain pro-palestinienne. Elle travaille avec le mouvement Matzpen et publie plusieurs livres dont “Between the Lines” (2007), titre homonyme de la revue qu’elle a créée avec le Palestinien Toufik Haddad.

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Chiapas, Mexique et Amérique latine : le radicalisme anti-capitaliste

Incidemment, le soulèvement zapatiste se fit le jour où les accords du NAFTA furent confirmés. Cela représentait symboliquement

Cela représentait symboliquement l’anti-capitalisme et anti-impérialisme profondément ancrés que le Chiapas partageait avec “d’autres peuples indigènes du Mexique et ailleurs en Amérique Latine », que le Chiapas partageait avec “d’autres peuples indigènes du Mexique et ailleurs en Amérique Latine”, comme le fit remarquer Cleaver. C’était un cri de rage contre le capitalisme en tant que tel, et pas seulement contre les formes spécifiques proéminentes dans l’ère de l’économie dite néo-libérale ou contre ses effets sur les seuls peuples indigènes.

En même temps, ils avaient suffisamment bien compris son potentiel désastreux pour eux-mêmes qui étaient la première cible de ces politiques de dépossession.

La compréhension du but du capitalisme à éliminer la résistance indigène et la vie communale est présentée dans une lettre du Subcomandante Marcos adressée à l’écrivain et supporteur John Berger en décembre 1993, moins de un mois avant le soulèvement :

“Le néolibéralisme se déguise en défense de la souveraineté qui a été vendue en dollars sur le marché international… Ces peuples indigènes irritent la logique de modernisation du néo-mercantilisme. Leur rébellion, leur défi, leur résistance, leur résilience les irrite. L’anachronisme de leur existence au sein d’un projet de mondialisation, projet politico-économique qui, bientôt, va décider que les pauvres, tous les gens en opposition, c’est à dire la vaste majorité de la population sont des obstacles.

Une excellente source pour apprendre au sujet du radicalisme politique du peuple du Chiapas et de leurs leaders au moment du soulèvement est l’entretien d’Augusta Dwyer avec les leaders militants indigènes pour la revue “Socialist Review” (SWP GB). Dans cet entretien, qui eut lieu quelques mois après le soulèvement de janvier 1994, les militants expriment leur implication totale dans une guerre contre le capitalisme et ses manifestations dans l’expression du néolibéralisme économique comme celui du NAFTA.

Ils citent Marcos disant après la capture d’une station de radio lors du soulèvement : “L’accord de libre-échange [NAFTA] est l’arrêt de mort des peuples indigènes du Mexique, qui sont périssables pour le gouvernement de Carlos Salinas de Gortari. Nous nous soulevons donc en armes contre cet arrêt de mort.

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NdR71 : de la même manière, aujourd’hui en 2023, l’ensemble des institutions étatico-marchandes livrent une guerre sans merci aux peuples de la terre à grand renfort d’armes biologiques (SRAS-CoV2 / COVID, injections ARNm), d’empoisonnement chimique, de guerres perpétuelles, de crises économiques provoquées et dévastatrices, de pénuries fabriquées en tout domaine. En cela nous sommes tous des Zapatistes et l’heure est venue pour les peuples de la terre de se soulever en armes contre l’arrêt de mort pris par le système à notre encontre. Nous sommes en état de légitime défense permanent face à l’État et à la marchandise dominants et exploiteurs nous agressant tout azimut. Se défendre PHYSIQUEMENT devient une obligation quasi survivaliste…

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Les activistes indigènes interviewés insiste sur la fausse conscience partagée par la classe laborieuse, qui dans les grandes largeurs, a accepté des idéologies trompeuses et de fausses promesses en ce qui concerne le système capitaliste. Et donc, “l’énorme défi que présente le soulèvement à la toile soigneusement tissée de la répression et du mensonge par le gouvernement et le refus d’accepter ces conditions plus avant, devraient être une inspiration pour tous les socialistes où qu’ils soient.

Ils argumentent qu’ils ne sont pas seulement un mouvement “indigène ou ethnique”. Leurs objectifs et leurs stratégies sont adressés “à toute la classe laborieuse et à ceux qui sont opprimés, réprimés.”, tout en insistant dans le même temps sur la plus brutale des oppressions au Chiapas et autres communautés indigènes au Mexique et en Amérique Latine : “la distribution des terres est largement biaisée pour favoriser les riches et les puissant éleveurs de bétail ; ceci représente une vieille tradition de plusieurs siècles de discrimination contre les peuples indigènes et la pauvreté dans sa très vaste majorité.

De la même manière, leurs demandes ciblant le gouvernement ne furent pas limitées aux seuls peuples indigènes : “Les demandes zapatistes pour la terre, un habitat décent, des écoles, des cliniques, des salaires décents, l’égalité, la liberté, la justice, des élections saines et un gouvernement transitoire, sont simples et pourtant révolutionnaires.” Elles “exposent le grand fossé entre les riches et les pauvres, le contrôle des salaires qui fait du travailleur mexicain un des moins bien payés au monde, tout autant que la corruption et l’hypocrisie qui sont les marques de fabrique du parti politique qui a monopolisé le pouvoir pendant des décennies.

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Résistance et construction durant les années de négociation

La décennie qui suivit le soulèvement de 1994 fut témoin d’un dialogue intermittent entre l’EZLN et le gouvernement fédéral mexicain.. Les Zapatistes demandèrent l’autonomie complète du Chiapas, des droits sur la terre dans d’autres endroits du pays et la démolition en règle des accords du NAFTA et autres politiques néolibérales, ainsi que la demande pour des droits véritablement démocratiques pour tous les citoyens mexicains. Mais ces demandes n’étaient pas faites pour n’être mises en place qu’au Mexique.

La Première Rencontre Intercontinentale de 1996 organisée par les Zapatistes, convoqua plus de 3000 activistes de plus de 400 pays à se réunir et discuter, entre eux, de la nature du néolbéralisme et des luttes menées contre lui. De cela émana le Congrès National Indigène (CNI), qui, durant les années de négociation, fut consulté au sujet de l’introduction de changements dans la constitution qui amélioreraient considérablement la condition des peuples indigènes.

Dans le même temps, le mouvement de solidarité avec le Chiapas en Amérique Latine grandissait. Ce mouvement joua un rôle central dans le soutien constant des Zapatistes, les défendant contre les attaques incessantes de l’armée mexicaine et leur permettant de continuer leur projet égalitaire autonome. Les attaques par l’armée mexicaine allaient continuer pendant des années, persistant jusqu’à aujourd’hui sans être jamais mentionnées dans la presse occidentale.

Après presque une décennie de fausses négociations avec l’état, la cassure inévitable se produisit. Le 1er janvier 2003, les Zapatistes du Chiapas décidèrent d’abandonner “la politique de la demande est avec elle, tout contact avec l’état mexicain”. En lieu et place, ils choisirent de se concentrer sur la construction de leur propre autonomie, des formes horizontales d’auto-gouvernement au sein de leurs propres territoires et par leurs propres moyens.

Le 9 août 2003, les Zapatistes annoncèrent l’établissement des Conseils de Bon Gouvernement (Juntas de Buen Gobierno), chacun basé dans les caracoles (escargots) ou centres administratifs des zones rebelles. Un total de cinq caracoles furent créés, chacun avec son propre conseil de bon gouvernement et chacun responsable de sa propre Municipalité Rebelle Autonome Zapatiste (MAREZ)

Chaque Caracol possède trois niveaux de gouvernement autonome : la communauté, la municipalité et le conseil de bon gouvernement. Les deux premiers sont fondés sur une base populaire d’assemblées volontaires. Les décisions prises par chacun des cinq conseils de bon gouvernement sont basées sur des lignes de conduite préalablement déterminées au niveau de la communauté. Les membres du conseil sont élus, mais avec l’intention d’avoir le plus de participants possibles dans ces conseils au fil des années sur le principe de la rotation.

Chaque Caracol possède ses propres systèmes éducatif, de santé et de justice, ainsi que des coopératives produisant du café, créant des objets d’artisanat et du bétail, entre autres choses. Toutes les décisions sont prises en accord avec des lignes de conduite préalablement décidées par les assemblés volontaires au niveau de la communauté, “un modèle révolutionnaire pour organiser un auto-gouvernement” d’après le Comité de Soutien au Chiapas (CSC), une organisation basée à Oakland en Californie.

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Émancipation et dignité des femmes dans les Caracoles rebelles

Le défi de l’égalité pour les femmes a trouvé une acceptation et un soutien de l’EZLN et de ses leaders. La prise de la ville de San Cristobal de Las Casas, le ville la plus importante occupée par l’EZLN en 1994, fut commandée par la Comandante Ana Maria et une autre figure de proue du mouvement était la Comandante Ramona, qui fut la toute première zapatiste envoyée à Mexico-City pour représenter le mouvement dans les négociations avec le gouvernement mexicain.

Les femmes ont été traitées en véritables égales au point que beaucoup de femmes ont un statut d’officier et tant les hommes que les femmes doivent porter la responsabilité du travail et du combat de manière égale. Quand les femmes se sont organisées dans des douzaines de comités pour produire un code des droits des femmes, le leadership de l’EZLN composé de leaders Mayans, le CCRI-CG, a adopté le code à l’unanimité.

Cette “loi révolutionnaire des femmes” a inclus les droits de toutes les femmes “sans regard pour la race, couleur ou affiliation politique”, à participer à la lutte “de toute manière que dicte leur désir et leur capacité”. Ceci inclut le droit “de travailler et de recevoir un juste salaire”, le droit de “décider du nombre d’enfants qu’elles auront et prendront soin”, le droit de “participer aux affaires de la communauté et d’avoir des charges si elles sont élues librement et démocratiquement”, le droit (avec les enfants) “de toute première attention en matière de nutrition et de santé”, le droit “de choisir leur partenaire et de ne pas être obligée de se marier”, le “droit de ne pas subir de violence domestique de la part de proches ou d’étrangers. Le viol et la tentative de viol seront sévèrement punis.”, le droit “d’occuper des postes de leadership au sein de l’EZLN et de tenir un haut rang d’officier dans les forces armées révolutionnaires” et finalement “tous les droits et obligations que donnent les lois et les règlements révolutionnaires.”

Aujourd’hui, des femmes participent à tous les niveaux du gouvernement et sont à la tête de coopératives et de structures économiques. Elles forment une grande partie des rangs de l’EZLN et prennent de hautes positions dans le commandement militaire.

Faisant face à la politique néolibérale qui a établi la dépossession et l’extraction agressive des ressources de leurs territoires, les Caracoles rebelles ont fonctionné lentement, silencieusement et efficacement pour plus de deux décennies. Leurs stratégies allèrent plus loin, plus profond et personnifiaient une culture que l’État fut obligé de reconnaître et surtout de respecter.

Ainsi, le 24 février 2016, un juge fédéral du Mexique a admis qu’il n’avait pas d’autre choix que d’accepter que l’affaire judiciaire entre l’État et l’EZLN ne pouvait pas aller plus loin. Les accusations de terrorisme, de sédition, d’émeutes, de rébellion et de conspiration enregistrés sous une plainte par le Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI) en 1994 contre le Subcomandante Insurgente Marcos et les leaders indigènes de la résistance étaient nulles et non avenues : le statut de la date butoir ayant été dépassé.

Les conclusions de Gonzalez Casanova furent larges : “Plus qu’une idéologie sur le pouvoir du gouvernement de et par les peuples, les caracoles construisent et expriment une culture du pouvoir émanant de 500 ans de résistance des peuples indiens des Amériques.” Les caracoles du Chiapas sont au centre du mouvement indigène de toute l’Amérique Latine.

Le Mexique et l’Amérique Latine

Les Zapatistes du Chiapas ne sont pas surgis de nulle part, mais sont apparus dans une région où les mouvements sociaux indigènes luttant pour la terre contre le racisme et la discrimination furent très présents depuis les années 1970, plus d’une décennie avant l’avènement de l’EZLN, comme grande partie du mouvement de résistance du Chiapas. Les Zapatistes furent d’abord inspirés par leur militantisme résolu et avec le temps, devinrent eux-même un modèle pour eux.

Poussant à renforcer la lutte unifiée indigène, le peuple Maya du Chiapas développait des réseaux de coopération et de lutte conjointe avec d’autres communautés mexicaines luttant pour le retour des terres volées, une éducation et de l’eau potable parmi d’autres besoins notoires et contre l’oppression de masse commise par la classe dirigeante du PRI au service absolu des monopoles multinationaux.

Au Mexique et à travers toute l’Amérique Latine, les communautés indigènes ont été exposées à l’attaque du trafic de la drogue par les cartels, les gangs criminels, les gardes de sécurité privés des corporations, des entreprises multinationales, ainsi que  par les forces de sécurité étatiques comme la police et l’armée. Les leaders indigènes de la résistance organisée ont souvent été assassinés dans un effort de supprimer tout obstacle aux projets du pillage de leurs territoires.

De manière intéressante, les mouvements indigènes latinos furent durement touchés par la chute des gouvernements de centre-gauche de la “marée rose” entre les années 2000 et 2005, ce qui en un sens a permis toujours plus de résistance locale. Les mouvements ont persisté dans la construction de leurs communautés de telles façons qu’elles s’adaptent constamment aux requis de défense toujours changeants contre les massacres qui leur étaient infligés quotidiennement.

Quelques unes des communautés les plus affectées ont trouvé un système de garde-fou qui est soumis au peuple, développant des structures de pouvoir communal en parallèle de celles de l’état, mais opérant de manière bien différente de celles de l’état. Comme dit plus haut, le rôle de l’EZLN fut largement celui d’une force de défense militaire jusqu’à la décision prise par les communautés indigènes de prendre les armes.

D’autres communautés en Amérique latine ont adopté la culture politique synthétisée par les Zapatistes dans leur expression de “diriger en obéissant” (mandar obedeciendo). Ces systèmes se sont vus ancrés dans des pratiques communautaires qui doivent même être différenciées des partis de gauche et des syndicats, car ceux-ci “sont toujours marqués par une tentation sous-jacente de devenir le véritable pouvoir, construit à l’image de l’État.”, comme l’écrit Raúl Zibechi.

Au contraire de ces formes, la structure de ces gardes-fou indigènes dans les communautés a été fondée sur des principes similaires de ceux des caracoles du Chiapas, elle vise à maintenir les membres de la communauté comme les preneurs de décision qui exercent leur pouvoir en contrôlant leurs représentants choisis [NdT : sur une base de rotation pour impliquer la totalité de la communauté politiquement…] Chaque assemblée de communauté choisit 10 gardes et un coordinateur. Un second coordinateur est ensuite choisi le Comité Régional Clandestin (CRC) et un troisième des Conseils de Bon Gouvernement (CBG)

La région de Colombie du Cauca du Nord par exemple, a 3500 gardes indigènes, correspondant au conseil de gouvernement local. La participation dans les groupes de défense est volontaire et n’est pas payée et les voisinages dans chaque communauté aident dans la logistique et dans la maintenance dub lopin de terre familial de chaque garde et parfois accomplissent les taches de base comme semer et récolter les cultures.

“Ces pratiques et procédures, nous dit Zibechi, visent à éviter de faire l’erreur de distribuer le pouvoir à des institutions qui sont des rouages efficaces de la machine d’état.” Qui empêcherait toute autonomie de la base dans la prise de décision. De fait, l’échec des conseils communaux au Venezuela démontre les conséquences d’une telle erreur de distribution du pouvoir décisionnaire : à cause de leur dépendance au financement de l’état, les conseils sont partie intégrante de la structure organisationnelle de l’état et aident à sécuriser son pouvoir plutôt que de le transcender.

Dans le temps, ils sont devenus plus homogènes et ont perdu leur indépendance. Bien qu’il y ait une forte culture égalitaire dans les voisinages au Venezuela, une culture d’horizontalité et d’absence de hiérarchie, la contradiction entre la base populaire et le leadership a été résolue par des directives qui mettent des limites et contrôlent les espaces égalitaires.

Bien d’autres cas indiquent que l’intervention de gouvernements, même de services sociaux “bien pensants” et de bons “projets de développement”, a eu pour conséquence la perte d’indépendance de la communauté. D’un autre côté, il y a des contre-exemples comme la Guardia Indigena, le cœur du pouvoir du peuple Nasa qui a été à l’avant-garde du mouvement indigène en Colombie.

Zibechi dépeint le Chiapas zapatiste comme un remarquable exemple d’un système social totalement horizontal. Les caracoles sont “le seul cas en Amérique Latine ou autonomie et auto-gouvernement sont exprimés à trois niveaux différents avec la même logique d’assemblée en rotation des communautés.” Le modèle zapatiste de démocratie d’en bas (à gauche) demeure vivant et actif jusqu’à aujourd’hui, 30 ans plus tard. A juste titre, ils attribuent leur succès au fait que depuis le départ ils ont été déterminés de garder une complète déconnexion d’avec l’État et ses institutions, incluant les partis politiques de la “gauche” mexicaine, qui ont soutenu les gouvernements néolibéraux (NdT : comme partout ailleurs dans le monde, la gauchiasse étatique de partis et de syndicats inféodés, des marxistes aux socialos, n’a fait que trahir encore et toujours les peuples et la révolution sociale…).

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Au-delà du cadre marxiste

Le Chiapas et la plupart des mouvements indigènes d’Amérique Latine ont été à l’avant-garde de la lutte révolutionnaire mondiale contre le capitalisme et sa forme actuelle “d’accumulation par dépossession”. Ces mouvements ont été une réponse à un type différent “d’exploitation” que celui de la classe laborieuse qui est associée à la valeur ajoutée produite par le travail.

Ici, nous sommes les témoins d’entières communautés indigènes qui sont les cibles de l’extraction. Elles sont les victimes de massacres quotidiens commis par leurs “employeurs directs”, les industries d’extraction et les cartels de la drogue que les gouvernements impérialistes locaux ont soutenu. Le besoin d’une défense continue de leurs vies et de leurs terres a fait croître le pouvoir communal personnifié par les caracoles et le système social de démocratie d’en bas, ancré profondément dans la tradition indigène.

Les mouvements indigènes ont été les moyens courageux de confrontation de cette guerre totale qui est livrée contre eux. Ils continuent de servir de puissante ressource pour la mobilisation d’une résistance continuelle et déterminée qu’ils ont mené contre l’économie néolibérale. [NdT : qui n’est quelle phase conjoncturelle de l’oppression capitaliste dans son ensemble, le capitalisme n’étant qu’un avatar historique du système marchand qu’il faut impérativement mettre à bas…]

Les Zapatistes, qui sont devenus un avec les communautés du Chiapas, n’étaient en rien similaires aux mouvements de guérilla qui importèrent de l’extérieur une version du marxisme, qu’ils tentaient d’inculquer aux gens en supervisant sa mise en place d’en haut. Ces mouvements de guérilla visaient à changer le système socio-politique en occupant le pouvoir d’état dans une révolution future menée par le parti des travailleurs.

Au lieu de cela, les indigènes zapatistes ont combiné l’autodéfense avec une résistance résolue, qui, avec la lutte latino-américaine, peuvent créer des fissures dans le système capitaliste.

De nombreuses tendances de la gauche marxiste se sont souvent focalisées sur le court soulèvement du Chiapas en 1994, mais n’ont pas engagé le mouvement zapatiste plus loin que de commémorer cette date. Elles n’ont pratiquement jamais parlé des années avant et après ce soulèvement. Elles ne l’ont pas vu non plus comme un projet unifié, des années de résistance tout en construisant dans le même temps un Chiapas autonome.

Le projet au Chiapas de “la démocratie d’en bas [à gauche]”, le système horizontal de prise de décision de la communauté, n’ont pas été reconnus comme une lutte “révolutionnaire” contre le capitalisme. Ni du reste n’ont été considérées comme révolutionnaire la résistance quotidienne démontrée par les groupes de résistance des mouvements indigènes à travers l’Amérique Latine et leurs tentatives de suivre le Chiapas dans la construction des caracoles.

Les mouvements de résistance indigènes utilisent la seule armure disponible : les sages stratégies autonomes de la “démocratie d’en bas” et la cohésion des communautés. C’est un combat pour leur vie même en tant qu’individus et communautés, tout en ciblant directement les forteresses du capitalisme et de l’impérialisme, les multinationales et spécifiquement ces industries d’extraction soutenues par les Etats-Unis. Ceci en fait d’admirables frères et sœurs de notre lutte partagée, qui mérite bien plus qu’une franche solidarité.

Si tu es venu ici pour m’aider,
Tu perds ton temps…
Mais si tu es venu parce que
Ta libération est liée à la mienne,
Alors, travaillons ensemble.
Groupe d’activistes aborigènes, Queensland, Australie, 1970

Le texte complet en PDF :

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¡Viva Zapata!

“Vous et votre système avez peur parce qu’ils disent qu’alors que nous passons, les pauvres vont se soulever et demander rétribution pour toutes les fautes et malveillances commises contre eux. Vous avez peur parce que vous comprenez et reconnaissez que les conditions de vie de la majorité des Mexicains, pas seulement celles des peuples indigènes, sont très mauvaises et pourraient bien mener à la rébellion.”
~ SCI Marcos, 5 mars 2001 ~

“Ce qui caractérise l’esprit de la société, c’est l’unification des concepts humains, l’esprit social constructeur est une compréhension du Tout dans un universel vivant ; c’est en cela que la société humaine, dans son collectif pensant et agissant, est organique, contrairement à l’État, mécanisme de l’aliénation et de la coercition. En passant du mode organisationnel étatique à celui de la société des sociétés, l’humanité passe du non-esprit à l’esprit retrouvé, de la mort à la renaissance sociale. Elle passe de l’éphémère à l’universel. La réalité sociale du vivant est présente en nous à chaque instant, ainsi que l’esprit communal que nous devons laisser émerger de nouveau.”
~ Résistance 71, “Manifeste pour la société des sociétés”, 2017 ~

Lectures complémentaires :

Il n’y a pas de solution au sein du système ! (Résistance 71)

Comprendre et transformer sa réalité, le texte:

Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »

+

5 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:

Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être

Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche

Manifeste pour la Société des Sociétés

Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie

Société des sociétés organique avec Gustav Landauer

5 textes pour comprendre et éradiquer le colonialisme

« Païens en terre promise, décoder la doctrine chrétienne de la découverte », Steven Newcomb, 2008

« Comprendre le système de l’oppression coloniale par mieux le démonter », Steven Newcomb

« Comprendre le système de l’oppression coloniale pour mieux le démonter », Peter d’Errico

« Effondrer le colonialisme », Résistance 71

« Nous sommes tous des colonisés ! », Résistance 71

“Nous distinguons trois grandes stratégies ces dix dernières années :

  • La stratégie que nous appelons “le Feu”, qui se réfère à l’action militaire, à la préparation, aux batailles, aux mouvements militaires
  • La stratégie que nous appelons “La Parole”, qui se réfère aux réunions, aux dialogues, aux communiqués, qu’il y ait une parole ou un silence organisé, qui est l(‘absence de parole.
  • La stratégie qui est la colonne vertébrale de tout ce qui précède, celle de “L’Organisation”, le processus organisationnel développé dans le temps par les communautés zapatistes.

Ces stratégies, le feu et la parole, articulées autour d’une organisation populaire, sont ce qui marque ces dix années de vie publique zapatiste et de l’EZLN entre 1994 et 2004.”
~ EZLN, 2008 ~

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Réseau de résistance politique: Pour une carte contemporaine des résistances et rébellions planétaires (Chiapas zapatiste)

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d’une société de la Société

 

Pour un Réseau de Résistance et de Rébellion International

 

Un défi, une autonomie réelle, une réponse, diverses propositions et quelques anecdotes sur le nombre 300

 

mercredi 28 novembre 2018, par SCI Galeano, SCI Moisés

 

Suite et fin de la participation de la Commission Sexta de l’EZLN à la rencontre des réseaux de soutien au Conseil indigène de gouvernement et à sa porte-parole.

 

Août 2018.

 

Source:

https://www.lavoiedujaguar.net/Un-defi-une-autonomie-reelle-une-reponse-diverses-propositions-et-quelques

 

300

Troisième et dernière partie

 

Et maintenant ?

Ramer à contre-courant. Rien de nouveau pour nous autres zapatistes.

Nous voulons le réitérer — nous en avons discuté avec nos peuples : nous nous confronterons à tout contremaître, quel qu’il soit ; pas seulement celui qui propose une bonne administration et une répression correcte — autrement dit cette lutte contre la corruption et le plan de sécurité fondé sur l’impunité —, mais aussi ceux qui derrière des rêves avant-gardistes tentent d’imposer leur hégémonie et de nous homogénéiser.

Nous ne changerons pas notre histoire, notre douleur, notre rage, notre lutte pour le conformisme « progressiste » et sa marche derrière le leader.

Il se peut que les autres l’oublient, mais nous, nous n’oublions pas que nous sommes zapatistes.

Et dans notre autonomie et à propos d’elle — vu qu’on discute de savoir si elle va être reconnue ou ne va pas être reconnue —, nous avons fait ce raisonnement : l’autonomie officielle et l’autonomie réelle. Celle qui est officielle est celle qui est reconnue par les lois. La logique serait : vous avez une autonomie, maintenant je la reconnais dans une loi, alors votre autonomie commence à dépendre de cette loi et ne conserve plus ses formes, puis, quand il va y avoir un changement de gouvernement, alors vous devez soutenir le « bon » gouvernement, et voter pour lui, promouvoir le vote pour lui, car si arrive un autre gouvernement, ils vont vous enlever la loi qui vous protège. Ça fait donc de nous les pions des partis politiques, comme cela s’est produit pour des mouvements sociaux dans le monde entier. Ce qui compte, ce n’est plus ce qui s’effectue dans la réalité, ce qui est défendu, mais ce que la loi reconnaît. La lutte pour la liberté se transforme ainsi en lutte pour la reconnaissance légale de la lutte elle-même.

On a parlé à nos chefs femmes et hommes. Ou plutôt nous avons parlé avec les peuples qui nous donnent le pas, le cap et le destin. Avec leur regard, nous voyons ce qui vient.

Nous avons discuté, et nous avons dit, eh bien, si nous disons cela, que va-t-il se passer ?

Nous allons rester seuls, on va nous dire que nous sommes marginalisés, que nous restons en dehors de la grande révolution… de la « Quatrième Transformation » ou de la nouvelle religion (quel que soit le nom qu’on lui donne), et il nous faudra encore une fois ramer contre le courant.

Mais ça n’a rien de nouveau pour nous, de nous retrouver seuls.

Et puis nous nous sommes demandé : bon, avons-nous peur de nous retrouver seuls ? Avons-nous peur de nous en tenir à nos convictions, de continuer à nous battre pour elles ? Avons-nous peur que ceux qui étaient en notre faveur se retourne contre nous ? Avons-nous peur de ne pas nous rendre, de ne pas nous vendre, de ne pas capituler ? Et finalement nous avons conclu : bon, nous sommes en train de nous demander si nous avons peur d’être zapatistes.

Nous n’avons pas peur d’être zapatistes et nous allons continuer à l’être.

C’est comme ça qu’on s’est demandé et qu’on s’est répondu.

Nous pensons qu’avec vous (les réseaux), envers et contre tout, parce que vous n’aviez pour vous ni moyens, ni consensus, ni mode, ni salaire — vous avez même dû payer de votre poche —, que malgré tout ça, autour d’un collectif d’indigènes et d’une petite femme chaparrita, et, elle, réellement morena [1], de la couleur de la terre, nous avons dénoncé un système prédateur et défendu la raison d’être d’une lutte.

Et donc nous cherchons d’autres personnes qui n’aient pas peur. Nous vous demandons donc à vous (les réseaux) : vous avez peur ?

Pensez-y, si vous avez peur, eh bien on cherchera ailleurs.

Nous pensons que nous devons continuer aux côtés des peuples originaires.

Peut-être que certains parmi les réseaux pensent encore que nous apportons un appui aux peuples originaires. Ils vont se rendre compte, à mesure que le temps va passer, que c’est le contraire : ce sont eux qui vont nous aider avec leur expérience et leurs formes d’organisation, c’est-à-dire que c’est nous qui allons apprendre. Car si quelqu’un est expert en matière de tourmentes ce sont bien les peuples originaires — ils ont été attaqués de tant de manières et ils sont toujours là, ou plutôt, nous sommes toujours là.

Mais nous pensons aussi — et vous le disons très clairement, compañer@s — que cela ne suffit pas, que nous devons intégrer à notre horizon l’ensemble de nos réalités avec leurs douleurs et leurs rages, c’est-à-dire que nous devons cheminer vers l’étape suivante : la construction d’un Conseil qui intègre les luttes de tous les opprimés, ceux qui sont traités comme des déchets, les disparues et les assassinées, les prisonniers politiques, les femmes agressées, l’enfance prostituée, de tous les calendriers et de toutes les géographies qui tracent une carte impossible pour les lois des probabilités, les enquêtes et les votes : la carte contemporaine des rébellions et des résistances sur la planète entière.

Si vous et nous, ensemble, allons défier la loi des probabilités qui dit qu’il n’y a aucune chance, ou très peu, que nous réussissions, si nous allons défier les enquêtes, les millions de votes, et tous ces chiffres que le Pouvoir accumule pour que nous nous rendions ou pour que nous nous évanouissions, alors nous devons faire que le Conseil devienne plus grand.

Pour le moment, ce n’est qu’un point de vue que nous exprimons ici, mais nous voulons construire un Conseil qui n’absorbe ni n’annule les différences, et qui au contraire permette de les renforcer dans le cheminement avec d’autres qui partagent le même effort.

Selon un tel raisonnement, ces paramètres ne devraient pas avoir pour limite la géographie imposée par les frontières et les drapeaux : il faudrait donc viser qu’il devienne international.

Ce que nous proposons, c’est non seulement que le Conseil indigène de gouvernement cesse d’être indigène, mais aussi qu’il cesse d’être national.

C’est pourquoi, nous les zapatistes — hommes, femmes et différents — proposons de soumettre à une consultation, outre l’ensemble des propositions formulées durant cette rencontre, ce qui suit :

1. Réaffirmer notre appui au Congrès national indigène et au Conseil indigène de gouvernement.

2. Créer et maintenir des canaux de communication ouverts et transparents entre nous qui nous sommes connus durant le cheminement du Conseil indigène de gouvernement et de sa porte-parole.

3. Commencer ou continuer l’analyse-évaluation de la réalité dans laquelle nous nous mouvons, en produisant et en partageant ces analyses et évaluations, ainsi que les propositions d’action coordonnées qui en découlent.

4. Nous proposons le dédoublement des réseaux d’appui au CIG afin que, sans abandonner l’appui aux peuples originaires, notre cœur s’ouvre aussi aux rébellions et résistances qui émergent et persévèrent là où chacun se trouve, dans les campagnes ou dans les villes, sans qu’importent les frontières.

5. Commencer ou continuer la lutte qui vise à rendre plus grandes les revendications et la nature du Conseil indigène de gouvernement, de façon à ce qu’il ne se limite pas aux peuples originaires et incorpore les travailleurs des campagnes et des villes, ainsi que tous ceux qui sont traités comme des déchets mais qui ont une histoire et une lutte propres, c’est-à-dire une identité.

6. Commencer ou continuer l’analyse et la discussion qui vise à faire naître une coordination ou une fédération de réseaux, qui évite toute direction centralisée et verticale, et qui fortifie l’appui solidaire et la fraternité entre ceux qui la forment.

7 et dernier. Célébrer une réunion internationale de réseaux, quelle que soit la façon dont ils s’appellent — quant à nous, nous proposons que, pour le moment nous nous appelions Réseau de résistance et rébellion… et, à la suite, chacun son nom —, en décembre de cette année, après avoir analysé et évalué ce que décideront et proposeront le Congrès national indigène et le Conseil indigène de gouvernement (lors de leur réunion, en octobre prochain) et aussi afin de connaître les résultats de la consultation à laquelle la présente réunion appelle. Pour cette rencontre, nous mettons à disposition, si cela vous paraît pertinent, un espace dans l’un des caracoles zapatistes.

Notre appel n’est pas seulement adressé aux peuples originaires, mais à toutes celles, à tous ceux et à toutes celles·ceux qui se rebellent et résistent dans tous les recoins du monde. À ceux qui défient les schémas tout faits, les règles, les lois, les préceptes, les chiffres et les pourcentages.

Anecdote n° 1. Dans les premiers jours de janvier 1994, les services de renseignement de l’armée fédérale ont estimé la force de la prétendue ezèdélène à « seulement » 300 transgresseurs de la loi.

Anecdote n° 2. La même année, alors qu’Ernesto Zedillo Ponce de León et Esteban Moctezuma Barragán [2] tramaient la trahison de février 1995, le groupe de la revue Nexos (qui se consacrait autrefois à chanter des louanges de Salinas de Gortari puis de Zedillo) désespérait et, avec Héctor Aguilar Camín, déclarait à peu près en ces termes : « Pourquoi ne les anéantissez-vous pas ? Ils ne sont que 300.  »

Anecdote n° 3. Le rapport de la table d’inscription à la Rencontre des réseaux de soutien au CIG et à sa porte-parole, organisée au Caracol zapatiste « Torbellino de Nuestras Palabras » du 3 au 5 août 2018, indique : « participants : 300  ».

Anecdote n° 4. Les revenus des 300 entreprises les plus puissantes de la planète : aucune idée, mais ça peut être 300, ou un nombre quelconque, suivi de plein de zéros, puis de « millions de dollars ».

Anecdote n° 5. Quantités et pourcentages « encourageants » :

● La différence quantitative entre 300 et 30 113 483 (nombre des votes obtenus, selon l’Institut national électoral, par le candidat AMLO) est de : trente millions cent treize mille cent quatre-vingt-trois ;

● 300 c’est 0,0009962323 % de ces plus de 30 millions ;

● 300 c’est 0,00052993 % des suffrages exprimés (56 611 027) ;

● 300 c’est 0,00033583 % de la liste électorale (89 332 032 032) ;

● 300 c’est 0,00022626 % de la population totale du Mexique (132 593 000, moins les sept femmes qui, en moyenne, sont tuées quotidiennement ; au cours de la dernière décennie au Mexique, en moyenne, une fille, une jeune femme, une adulte ou une femme âgée est tuée toutes les quatre heures) ;

● 300 représente 0,0000003012 % de la population du continent américain (996 000 000 en 2017) ;

● la probabilité de destruction du système capitaliste est de 0,00000003929141 %, soit le pourcentage de la population mondiale (7 635 255 247 personnes à 19 h 54 heure nationale le 20 août 2018) que représente 300 (bien sûr, si les 300 personnes supposées ne se vendent pas, ne se rendent pas et ne renoncent pas).

Oh, je sais, même la tortue qui a vaincu Achille ne pourrait servir de réconfort.

Et un escargot ?…

La Sorcière écarlate ?…

Le Chien-Chat ?…

Oubliez la question ; ce qui nous préoccupe, nous, zapatistes, ce n’est pas le défi posé par cette infime probabilité, mais comment va être le monde qui vient ; celui qui, sur les cendres encore fumantes du système, commence à émerger.

Quelles vont être ses formes ?

Des couleurs se parleront-elles ?

Quel sera son thème musical ? (Quoi ? La Fille au ruban rouge ? Pas question).

Quelle sera la formation de l’équipe, enfin complétée, de Defensa Zapatista ? Pourra-t-elle aligner l’ours en peluche d’Esperanza Zapatista et le faire coopérer avec le Pedrito ? Autorisera-t-on Pablito à porter son chapeau de cowboy et Amado Zapatista son casque de laine ? Pourquoi ce fichu arbitre ne marque-t-il pas le hors-jeu du Chien-Chat ?

Et surtout, et c’est fondamental, comment va-t-on danser ce monde ?

C’est pourquoi, quand on nous demande, à nous zapatistes : « et maintenant ? »… eh, bien, comment vous dire ?… nous ne répondons pas tout de suite, et même nous tardons à répondre.

Parce que, voyez-vous, danser un monde pose moins de problèmes que de l’imaginer.

Anecdote n° 6. Ah, vous pensiez que ce titre, « 300 » , se référait au film du même nom et à la bataille des Thermopyles, et vous vous prépariez déjà, vêtu·e·s en Léonidas ou en Gorgo (chacun à sa façon), à crier « Vas-y, Sparte ! » tout en décimant les troupes des « Immortels » du roi perse Xerxès ? Qu’est-ce que je vous disais ? Ces zapatistes, comme d’habitude, en train de regarder un autre film. Ou pire encore, de regarder et d’analyser la réalité. Tant pis.

C’est tout… pour l’instant.

Depuis les montagnes du Sud-Est mexicain,
sous-commandant insurgé Moisés, sous-commandant insurgé Galeano.
Mexique, août 2018.

= = =

Lectures complémentaires:

Paulo_Freire_La_pedagogie_des_opprimes

Chiapas-Feu-et-Parole-dun-Peuple-qui-Dirige-et-dun-Gouvernement-qui-Obeit

Ricardo_Flores_Magon_Textes_Choisis_1910-1916

Marshall-Sahlins-La-nature-humaine-une-illusion-occidentale-2008

James-C-Scott-Contre-le-Grain-une-histoire-profonde-des-premiers-etats

James_C_Scott_L’art_de_ne_pas_être_gouverné

Manifeste pour la Société des Sociétés

Abdullah-Ocalan-Confederalisme-democratique

David Graber Fragments Anthropologiques pour Changer l’histoire de l’humanité

L’anarchisme-africain-histoire-dun-mouvement-par-sam-mbah-et-ie-igariwey

Effondrer le colonialisme

40ans_Hommage_Pierre_Clastres

Clastres_Préface_Sahlins

6ème_déclaration_forêt.lacandon

Vision zapatiste de l’histoire et symbiose politique…

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, autogestion, écologie & climat, colonialisme, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, politique et lobbyisme, politique et social, résistance politique, société libertaire, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , on 24 février 2017 by Résistance 71

En traduisant ce texte, on s’est dit qu’on aurait pu l’écrire, bien sûr pas en rapport au contexte zapatiste du Chiapas, mais en rapport à la symbiose de pensée et d’analyse historico-politique… Vous verrez que, sans aucune concertation, même certaines expressions utilisées, résumant la seule conclusion politique qui s’impose à toute personne politiquement éveillée aujourd’hui, sont identiques.
Traduire ce texte nous a particulièrement touché, ceux qui nous lisent régulièrement sauront pourquoi et dans la pseudo-tourmente dans un verre d’eau que suscite ou tente de susciter le grand cirque électoral franchouillard qui bat son plein, nous ne voyons qu’une seule chose à faire, pour quelque temps, c’est de faire silence, comme les zapatistes l’avaient fait en décembre 2012. Le silence pour se faire entendre !
Méditez et faites circuler ce texte, dans cette pourriture de contexte électoral et de climat politique délétère, il en vaut la peine.

A bientôt… (nous répondrons à tout commentaire si nécessaire), jusque là… le silence est d’or…

~ Résistance 71 ~

 

A lire:

« 6ème déclaration zapatiste de la forêt de Lacandon »

Notre dossier « EZLN Chiapas »

 

marcos2

 

Les murs au dessus les fissures en bas

(Et à gauche)

 

Février 2017

 

url de l’article:

http://enlacezapatista.ezln.org.mx/2017/02/16/the-walls-above-the-cracks-below-and-to-the-left/?utm_source=feedburner&utm_medium=email&utm_campaign=Feed%3A+EnlaceZapatista+%28Enlace+Zapatista%29

 

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~

 

La tempête sur notre chemin

Pour nous, en tant que zapatistes ordinaires, la tempête, la guerre, fait rage depuis des siècles. Elle est arrivée sur nos terres avec les mensonges de la civilisation dominante et sa religion. A cette époque, l’épée et la croix ont saigné notre peuple à blanc.

Avec le temps, l’épée s’est modernisée et la croix a été détrônée au profit de la religion du capital, mais cela a continué à demander notre sang en offrande à leur nouveau dieu: l’argent.

Nous avons résisté, nous résistons toujours du reste. Nos rébellions se déplacèrent entre les forces variées du pouvoir. Ces forces, venant toujours d’en haut, nous demandèrent de lutter et de mourir pour les servir. Elles demandèrent obéissance et soumission sous le déguisement de notre libération. Comme celles qui ont dit et disent toujours qu’elles luttent, qu’elles vinrent et viennent pour dirigier. Il y a eu de supposées indépendances et fausses révolutions, celles passées et celles à venir.

Depuis lors, ceux d’en-haut ont bifurqué et continuent de le faire afin de gouverner, mal, ou tenter de le faire. Dans le présent et le passé, leur proposition continue d’être la même: que nous offrions notre sang, tandis qu’ils dirigent ou prétendent de le faire.

Avant et maintenant, ils oublient ceux d’entre nous qui n’oublient pas.

Et toujours, hier et aujourd’hui, la femme est en bas, même dans les collectifs que nous formions et formons.

Mais alors que ces agendas passèrent, ils n’apportèrent pas seulement douleur et mort à notre peuple. En étendant sa domination, le pouvoir a créé des nouveaux liens fraternels dans la tragédie.

Nous avons vu lorsque l’ouvrier et le paysan sont devenus un avec notre douleur, écrasés sous les quatre roues du carrosse du capital.

Alors que le pouvoir avançait sur son chemin dans le temps, ceux d’en-bas furent plus nombreux, élargissant la base sur laquelle le pouvoir a et est le pouvoir. Nous avons vu que nous étions rejoints par des enseignants, des étudiants, des artisans, des gens du monde des affaires, des professions libérales et ceux ayant des noms différents mais des soucis identiques.

Mais ce ne fut pas assez. Le pouvoir est un espace exclusif, discriminatoire et sélectif. Ainsi des différences diverses furent aussi ouvertement persécutées ; par couleur, race, préférence sexuelle, genre, certaines personnes furent expulsées de la terre promise et de l’enfer, donné comme résidence permanente.

Ensuite vinrent les jeunes, les enfants et les anciens. Le pouvoir a alors converti les agendas que l’on tient comme cause de persécution. Tous ceux d’en-bas sont coupables: d’être une femme, un enfant, un jeune, un adulte, un ancien ou un humain.

Mais, en étendant l’exploitation, le déplacement, la répression et la discrimination, le pouvoir a aussi étendu la résistance… et la rébellion.

Nous avons vu alors et maintenant les têtes levées de bien des muchas, muchos, muchoas. Toutes différentes, mais si similaires dans leur rage et leur refus.

Le pouvoir ne sait ce qu’il est que lorsqu’il est agité devant ceux qui travaillent. Il en a besoin. Il a répondu et répond à chaque rébellion en achetant ou en trompant quelques uns et en emprisonnant ou assassinant beaucoup. Il n’a pas peur de leurs demandes: c’est leur exemple qui le terrifie. Pourtant ce ne fut pas assez. Ayant dominé les nations, le pouvoir du capital a cherché à écraser toute l’humanité sous son joug pesant.

Même cela ne fut pas assez. Le capital essaie mantenant de gérer la nature, de la dominer, de la domestiquer, de l’exploiter. C’est à dire en fait de la détruire. L’avancée destructrice du capital, toujours au moyen de la guerre, a démoli les premiers seigneuries et royaumes. Sur leurs ruines il a construit les nations.

Plus tard, il a dévasté les nations et sur leurs ruines il a érigé un nouvel ordre mondial: le marché. Le monde entier est devenu un gigantesque hangard de commoditités (NdT: grand garage à la spéculation généralisée et institutionnalisée…). Tout peut-être acheté et vendu: l’eau, le vent, la terre, les plantes, les animaux, les gouvernements, la connaissance, le plaisir, le désir, l’amour, la haine, les humains,

Mais ce ne sont pas seulement des commodités qui sont échangées sur le grand marché du capital. “La liberté économique” n’est qu’une illusion qui ne fait que simuler un accord mutuel entre ceux qui vendent et ceux qui achètent. En réalité, le marché est fondé sur la dépossession et l’exploitation. L’échange alors n’est que celui de l’impunité. La justice est transformée en une grotesque caricature et à son échelle, l’argent pèse toujours bien plus que la vérité. La stabilité de cette tragédie appelée capitlaisme dépend de la répression et du manque de respect.

Mais ceci ne fut pas non plus suffisant. Il n’est pas possible de dominer le monde si on ne domine pas les idées. L’imposition religieuse a été intensifiée et a atteint les arts et les sciences. Des philosophies et des croyances ont émergées et émergent toujours comme des modes éphémères. Les sciences et les arts ont cessé d’être quelque chose de distinctement humain et ont été placés sur les étagères du supermarché mondial.

La connaissance est devenue propriété privée tout comme le récréatif et le plaisir.

Ainsi, le capital s’est consolidé dans son rôle de gigantesque machine à confettis, utilisant non seulement l’humanité dans sa globalité comme matière première de sa production de commodité, mais aussi l’art, la connaissance et… la Nature. La destruction de la planète, les millions de gens déplacés, la montée incessante du crime, le chômage, la pauvreté, la faiblesse des gouvernements et les guerres à venir ne sont pas des produits de l’excès du capital, ou une erreur de parcours, un détour du système qui avait promis l’ordre, le progrès, la paix et la prospérité.

Non, toutes ces tragédies sont l’essence même du système.

Il se nourrit d’elles, il croît à leurs dépends.

La destruction et la mort sont le carburant de la grande machine du Capital.

Toutes tentatives de “rationaliser” ou “d’humaniser” ses fonctions furent, sont et seront futiles. L’irrationalité et l’inhumanité en sont des parties essentielles. Il n’y a pas de réparation possible du système. Il n’y en a pas eu avant et il il n’y a aucun moyen maintenant de mitiger son chemin criminel.

Le seul moyen d’arrêter cette machine est de la détruire.

Dans la guerre mondiale actuelle, la dispute se situe entre le système et l’humanité. Voilà pourquoi la lutte anti-capitaliste est une lutte pour l’humanité.

Ceux qui essaient toujours de “réparer” ou de “sauver” le système ne font en fait que nous proposer un suicide collectif, comme un sacrifice posthume au pouvoir.

IL N’Y A PAS DE SOLUTION AU SEIN DU SYSTEME (NdT: en espagnol et en anglais dans le texte orginal !!…)

-[]- Dans le texte original espagnol: “Pero en el sistema no hay solución.” Et en anglais: “In the system there is no solution”… –[]-

Ni le sentiment d’horreur, de condamnation, de résignation n’est suffisant, ni l’espoir que le pire est passé et que les chose ne peuvent qu’aller mieux.

Non… Ce qui est certain, c’est que les choses ne peuvent être que pire.

Pour toutes ces raisons et en addition à ce que chacun d’entre nous peut ajouter de nos agendas particuliers, de nos zones géographiques et culturelles, nous devons résister, nous rebeller, dire NON, lutter et nous organiser.

C’est pourquoi nous devons faire se lever le vent d’en-bas avec résistance et rébellion, avec organisation.

C’est seulement alors que nous pourrons survivre. Seulement là sera t’il possible de vivre et seulement à ce moment là, avions-nous dit il y a 25 ans, pourrons-nous voir que… “Lorsque se calme la tempête, lorsque pluie et feu laissent la terre en paix, le monde ne sera plus le monde, mais quelque chose de beaucoup mieux.”

-*-

La guerre et les murs intérieurs et extérieurs

Provoquée par l’appât du gros pognon, l’intention d’en-haut est de faire payer ceux qui souffrent du cauchemar ambiant pour le marasme actuel. Les frontières ne sont plus justes des lignes déssinées sur des cartes et des points de passage douanier, mais des murs d’armées et de police, de ciment et de briques, de lois et de persécutions. Dans le monde d’en-haut, la chasse à l’homme augmente et elle est célébrée par des compétitions clandestines: qui expulse, incarcère, emprisonne, assigne à résidence et assassine le plus, gagne.

Comme nous le disons maintenant depuis plus de 20 ans, la mondialisation néolibérale n’a pas du tout amené le village mondial, mais plutôt la fragmentation et la dfissolution des soi-disants “états-nations”. Alors et aujourd’hui, nous appelons ce processus par le nom qui le dessert le mieux: “la guerre mondiale” (la 4ème en ce qui nous concerne…)

La seule chose qui a été mondialisée de fait c’est le marché, avec lui… la guerre.

Pour ceux qui font fonctionner la machine et donnent vie à la terre, les frontières continuent d’exister et continuent d’être ce qu’elles ont toujours été: des prisons. (NdT: tandis que la caste oligarchique elle, vit dans un monde totalement transnational où les flux de personnes privilégiées et de capitaux ne connaissent plus aucune restriction. Les restrictions en revanche s’abattent toujours plus sur nous, les gens d’en-bas de cette pyramide mortifère à abattre…)

Il y a deux décennies, notre assertion de cette réalité avait provoqué bien des sourires et des moqueries de la part de l’intelligentsia internationale, engoncée qu’elle était dans ses vieux dogmes éculés.

Ces mêmes personnes aujourd’hui n’en finissent plus de bégayer devant la dure réalité des choses, ou ils recommandent de suivre de vieilles recettes, ou ils bougent dans un endroit plus à la mode qui, au travers d’une élaboration théorique complexe, parvient à cacher la seule vérité existante: ils n’ont absolument aucune idée de ce qui est en train de se passer, encore moins de ce qui va arriver, ni ce qu’a amené le cauchemar en cours…

Ils s’en lamentent. La pensée d’en-haut leur avait promis un monde sans frontières et le résultat est en fait une planète remplies de ces tranchées chauvines.

Le monde n’a pas été transformé en une gigantesque métropole sans frontières, mais plutôt en un vaste océan en état de tempête perpétuelle. Dans cet océan, des millions de déplacés (qui sont regroupés par le pinceau magique des médias en “immigrants”) dérivent sur de frêles embarcations, attendant d’être sauvés par le colossal vaisseau du grand capital.

Non seulement il ne les sauvera pas, mais le grand capital est la cause première de la tempête qui menace l’existence de l’humanité entière.

Sous le déguisement glauque du nationalisme fasciste, les temps les plus rétrogrades sont de retour, clâmant privilèges et attentions. Fatigué de gouvernenr depuis l’ombre où il se tenait, le grand capital démantèle les mensonges de “citoyenneté” et “d’égalité” et fait prévaloir loi et marché.

Le drapeau de “liberté, égalité et fraternité” avec lequel s’est drapé le capitalisme dans sa conversion en système mondial dominant n’est plus qu’un vieux lambeau, jeté d’en haut dans la poublelle de l’histoire.

Finalement, le système bat les masques et montre son vrai visage et sa vocation réelle. “La guerre toujours, la guerre partout” peut se lire sur la proue du fier navire qui navigue sur cette mer de sang et de merde. C’est l’argent et non pas l’intelligence artificielle qui combat l’humanité dans cette bataille décisive: celle de la survie.

Personne n’est en sécurité. Pas plus le capitaliste national naïf qui a rêvé de la grosse récompense qui était offerte par l’ouverture des marchés, que le conservateur de la classe moyenne survivant entre le rêve d’être puissant et la réalité d’être membre du troupeau à son tour.

Puis la classe des travailleurs de la ville et de la campagne qui se trouve de manière croissante dans des conditions de plus en plus difficiles, si c’est même encore possible.

Et, pour faire le tour de cette image apolcalyptique, les millions de déplacés et migrants qui s’entassent aux frontières et qui sont soudain devenus aussi réels que les murs que les gouvernements et les criminels construisent pas à pas.

Dans la géographie mondiale des médias de masse et des réseaux sociaux, les fantômes déplacés et nomades sans noms ni visages, ne sont que des statistiques qui ne font qu’identifier leur place.

Le calendrier ? Juste le lendemain d’après la promesse de la fin de l’histoire, de la déclaration solennelle de la suprémacie du système qui devait garantir le bien-être de tous ceux qui travaillaient à son établissement, de la victoire sur “l’ennemi communiste” qui cherchait à restreindre la liberté, imposer des dictatures et créer la pauvreté, de l’éternelle promesse d’éternité qui annulerait toutes les généalogies. Le même calendrier qui annonça hier que l’histoire du monde ne faisait que commencer. Et en fait, non ; ceci n’était que le prélude au plus effrayant des cauchemars.

Le capitalisme, système du monde est en train de s’effondrer et les grands capitaines, maintenant désespérés, ne peuvent plus se figurer où aller. Voilà pourquoi ils se replient dans les repaires d’où ils somt sortis,

Ils offrent l’impossible: le salut local moyennant la catastrophe globale. Et toute cette connerie est très bien acceptée parmi la classe moyenne qui est en train de se confondre avec ceux plus bas en termes de ses revenus, mais qui aspire à compenser ses besoins économiques non satisfaits avec l’authentification de race, de culture chrétienne, de couleur et de sexe. Le salut venant d’en-haut est anglo-saxon, blanc, mâle et chrétien.

Bon, ceux qui vivent des miettes tombées de la table du grand capital observent désespérément, alors que des murs sont érigés tout autour d’eux également. Et le pire est qu’ils ont l’intention de mener l’opposition à cette politique de guerre. Ici nous voyons la droite intellectuelle faire des gestes contraires et tentant timidement des manifestations ridicules. Parce que non, la mondialisation ne fut aucunement le triomphe de la liberté. Ce fut et est toujours l’âge contemprain de la tyrannie et de l’esclavage.

Les nations ne sont plus des nations, bien que leurs gouvernements respectifs ne l’aient pas encore remarqué. Leurs dfrapeaux et leurs emblèmes sont en lambeaux et décolorés ; détruits par la mondialisation venue d’en-haut, malade du parasitisme du capital et ayant la corruption comme seul signe d’identité, les gouvernements nationaux essaient dans une futile et inepte hâte, de se protéger et de tenter la reconstruction impossible de ce qu’ils furent à une époque.

Dans les compartiments scellés sous vide, créés par leurs murs et leurs contrôles de frontières, douaniers et policiers, le système drogue les secteurs moyens de la société à grand renfort de l’opium d’un nationalisme réactionnaire nostalgique, fait de xénophobie, de racisme rampant, de sexisme et d’homophobie comme plan ultime de salut.

Les frontières se multiplient au sein même de tous les territoires. Pas seulement ceux qui sont dessinés sur des cartes, mais aussi et par dessus tout, ceux qui sont érigés par la corruption et le crime devenus gouvernements. La grande récompense post-moderne n’était rien d’autre qu’une baudruche gonflée de la finance et du capital ; et la réalité des choses est venue la faire péter: des millions de personnes déplacées par la grande guerre remplissent l’espace terrestre et maritime, ils s’entassent aux frontières et contrôles douaniers et commencent à fissurer les murs déjà érigés ainsi que de ceux encore en construction. Encouragés auparavant par le grand capital, les fondamentalismes trouvent du bon terreau de croissance pour leurs propositions d’unification: “de la terreur naîtra une seule façon de penser: la notre.” Après s’être repus de dollars, la bête qu’est le terrorisme menace la maison même de ses créateurs. (NdT: ce qui est voulu par le NOM ne l’oublions jamais: Ordo ab Chao telle est la devise !…)

C’est la même chose aux Etats-Unis et en Europe occidentale ou dans la Russie néo-tsariste: la bête gigote et essaie de se protéger, puis elle vante (pas seulement là) la pire des stupidités et de l’ignorance et, par ses marionnettes de gouvernement, synthétise sa proposition: “Retournons vers le passé.”

Mais non, l’Amérique ne sera pas grande de nouveau. Plus jamais ! Le système non plus et ce dans sa totalité. Il importe peu ce que font ceux d’en-haut. Le système est déjà arrivé au point de non-retour !…

[…]

Depuis le sud-est mexicain


Subcomandante Insurgente Moisés.


Subcomandante Insurgente Galeano.


Mexique,

Le 14 février 2017 (le jour de nos morts)

 

marcos2

Déclaration conjointe du Congrès national indigène et de l’EZLN concernant le crime d’Ayotzinapa et pour la liberté des leaders yaquis

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, colonialisme, démocratie participative, guerres hégémoniques, guerres imperialistes, militantisme alternatif, N.O.M, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, politique et social, résistance politique, société libertaire, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , , , , , , on 25 novembre 2014 by Résistance 71

CNI et EZLN

 

22 Octobre 2014

publié en français le 23 novembre 2014

 

url de la déclaration en français:

http://www.lavoiedujaguar.net/Declaration-conjointe-du-Congres

 

Note : Ce texte a été lu par les membres du Congrès national indigène à l’une des mobilisations qui ont eu lieu au Mexique le 22 octobre 2014, et non par des représentants de l’EZLN, comme il a été dit dans la presse corrompue.

Mexique, le 22 octobre 2014.

Aux élèves de la normale rurale Isidro Burgos, Ayotzinapa, Guerrero 
À la Tribu Yaqui 
À la Sexta nationale et internationale 
Aux peuples du monde

Parce que la peine de ceux d’en bas est faite de rage et rébellion, et non de démission et d’acceptation. EZLN, 19 octobre 2014

Réunis par la douleur et la rage qui nous envahissent, nous vous faisons parvenir notre parole, celle des peuples que nous formons dans les luttes de résistance et de rébellion, miroir de la partie de ce pays qui se nomme Congrès national indigène (CNI).

La disparition des quarante-trois compañeros élèves de l’école normale rurale Isidro Burgos d’Ayotzinapa, Guerrero, séquestrés-disparus par les mauvais gouvernements, l’ombre du deuil s’impose à nous, comme un voile d’angoisse et de rage. L’espoir de la réapparition des compañeros, c’est la douleur qui nous unit, c’est aussi la rage qui s’est révélée et qui s’est mobilisée dans tout le pays en portant un cri de dignité et de révolte dans le Mexique d’en bas.

Nous savons que tant que des criminels gouvernent ce pays, avec à leur tête le chef suprême des paramilitaires Enrique Peña Nieto, ceux qui forgent la conscience en exerçant et en défendant l’éducation sont assassinés et disparaissent, et ceux qui défendent l’eau, comme la Tribu héroïque et millénaire Yaqui, se retrouvent en prison.

Le gouvernement mexicain a essayé de minimiser la répression criminelle envers les compañeros élèves de l’école normale, propageant à travers le pays l’idée qu’il s’agissait de quelques victimes de plus de la délinquance. Seulement quelques morts de plus pour les médias, mais nous les peuples qui subissons la répression sous toutes ses formes, nous savons que les délinquants se trouvent dans tous les partis politiques, dans les chambres de députés et de sénateurs, dans les présidences municipales, dans les palais du gouvernement.

Pour les peuples originaires, Ayotzinapa est notre douleur. Les quarante-trois compañeros de l’école normale ont disparu et l’État fait comme s’il ne savait pas où ils sont, comme si ce n’était pas l’État qui les avait enlevés, prétendant faire disparaître la conscience, mais aujourd’hui les disparus sont présents dans la pensée de ce pays, dans le regard attentif et dans le cœur du Congrès national indigène.

Dans ce pays il y a des mafias dangereuses qui se font appeler État mexicain, et nous les gênons, nous qui sommes les peuples qui luttent, nous qui n’avons pas de visage — il nous est arraché — nous qui ne sommes personne, nous voyons et sentons la violence, nous subissons les attaques multiples et simultanées, nous savons que dans ce pays il se passe quelque chose de mauvais, très mauvais, qui s’appelle guerre et qui est contre tous. Une guerre qui, d’en bas, est observée et subie dans sa totalité.

Aujourd’hui nous réitérons, tant que nos compañeros de l’école normale d’Ayotzinapa n’apparaissent pas vivants, et tant que, dans l’État de Sonora, nos frères Mario Luna Romero et Fernando Jiménez sont maintenus prisonniers pour avoir défendu l’eau sacrée de la rivière Yaqui. Tant qu’ils seront séquestrés par les mauvais gouvernements, nous continuerons de répondre en conséquence.

Dans tout le pays comme au Guerrero, la répression contre les peuples, le pillage des ressources naturelles, la destruction des territoires sont opérés par le narco-État qui, sans aucun scrupule, utilise le terrorisme pour engendrer la douleur et peur. C’est leur manière de gouverner.

Plutôt que de se voir forcés à l’attente de la mort, à la dépossession, à une douleur et une rage toujours plus grande, de cette douleur et de cette rage nous faisons naître la dignité et la révolte contre cette guerre d’extermination.

Nous exigeons que les quarante-trois élèves de l’école normale disparus réapparaissent vivants !

Nous exigeons le démantèlement de toute la structure d’État qui soutient le crime organisé !

Nous exigeons la libération immédiate des compañeros Mario Luna et Fernando Jiménez !

Votre douleur est la nôtre, votre rage est la nôtre !

Le 22 octobre 2014 Plus jamais un Mexique sans nous

Congrès national indigène Comité clandestin révolutionnaire indigène, Commandement général de l’Armée zapatiste de libération nationale

Résistance politique: la volonté du peuple (du Chiapas et d’ailleurs suffit d’y réfléchir) est autogestionnaire…

Posted in actualité, altermondialisme, autogestion, économie, crise mondiale, démocratie participative, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, résistance politique, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , on 21 février 2013 by Résistance 71

Eux et Nous (VI)

Les regards

Armée zapatiste de libération nationale. 
Mexique.

14 février 2013.

 

Destinataires : les adhérent·e·s de la Sexta dans le monde entier 
Expéditeur : sous-commandant insurgé Moisés

 

Url de l’article original en français:

http://www.lavoiedujaguar.net/Eux-et-nous-VI-Les-regards-VI

 

– Extrait –

 

[…] Parce que nous croyons et avons confiance dans le peuple, il est temps maintenant de faire quelque chose face à ce que pendant tant d’années nous avons vu et vécu des dommages qu’ils nous ont causés et dont nous souffrons, il est temps d’unir notre pensée, d’apprendre, et ensuite de la travailler, de l’organiser. Nous pouvons déjà le faire bien grâce aux nombreuses expériences que nous avons accumulées et cela nous guide pour ne plus suivre les mêmes formes grâce auxquelles ils nous tenaient.

Tant que nous ne faisons pas ce qui est la pensée des villages, les villages ne nous suivent pas. Et pour ne pas retomber dans les mêmes erreurs, il n’y a qu’à regarder les nôtres dans le passé. Construire quelque chose de nouveau qui en vérité soit la parole, la pensée, la décision, l’analyse et la proposition du village, qui soit étudié par le village et soit finalement la décision du village.

C’est ainsi que pendant dix ans, nous avons travaillé dans la clandestinité, on ne nous connaissait pas. « Un jour, ils nous connaîtront », nous disions-nous, et c’est en y pensant que nous avons accompli les tâches pendant ces années. Et puis nous avons décidé un jour qu’il était temps qu’ils nous connaissent. Aujourd’hui, ça fait dix-neuf ans que vous nous connaissez, à vous de dire si c’est mauvais ou bon ce que nous sommes en train de faire. Mes compañer@s nous disent qu’ils vivent mieux avec leurs gouvernements autonomes. Elles et ils se rendent compte de ce qu’est la véritable démocratie qu’ils pratiquent avec leurs villages, qu’on ne fait pas la démocratie seulement une fois tous les trois ou six ans. La démocratie a lieu dans chaque village, dans des assemblées municipales autonomes et dans les assemblées des zones qui élisent les conseils de bon gouvernement, et on fait de la démocratie dans l’assemblée où se joignent toutes les zones qui contrôlent les conseils de bon gouvernement, c’est-à-dire que la démocratie se pratique tous les jours ouvrables dans toutes les instances de gouvernement autonome et aux côtés des villages, des femmes et des hommes. Ils traitent par la démocratie tous les sujets de la vie, ils sentent que la démocratie est à elles et à eux, parce que eux et elles discutent, étudient, proposent, analysent et décident, en fin de compte, de tous les sujets.

Elles et eux nous disent, nous demandent : il sera comment, ce pays, ce monde, si nous nous organisons avec les autres frères et sœurs indigènes, et aussi avec les frères et sœurs pas indigènes ? Le résultat est un grand sourire, comme pour nous dire leur joie, parce que les résultats du travail qu’ils sont en train de faire, elles et ils les ont entre leurs mains.

Oui, c’est comme ça, le peuple veut seulement que nous nous organisions, les pauvres de la campagne et de la ville, sans que personne d’autre que nous-mêmes et ceux que nous nommons ne nous dirige. Pas ceux et celles qui ne cherchent qu’à arriver au pouvoir, et qui, une fois au pouvoir, nous relèguent dans l’oubli ; et ensuite en arrive un autre apparenté avec qui là, oui, ça va changer pour de bon, et les mêmes escroqueries continuent. Ils ne vont pas tenir parole, nous le savons bien, ils le savent bien, autrement dit ça ne vaut pas la peine de leur écrire cela, mais en vérité c’est comme ça que ça marche dans ce pays. C’est désespérant, usant, horrible.

Nous, les pauvres, nous savons comment est la meilleure forme de vie, celle que nous voulons, mais ils ne nous laissent pas faire, parce qu’ils savent que nous allons leur faire disparaître l’exploitation et les exploiteurs, et que nous allons construire la vie nouvelle sans exploitation. Ça ne va pas nous coûter grand savoir, parce que nous savons comment doit être le changement, parce que tout ce que nous avons souffert réclame changement. Les injustices, les douleurs, les tristesses, les mauvais traitements, les inégalités, les mauvaises manipulations, les mauvaises lois, les persécutions, les tortures, les prisons, et bien d’autres mauvaises maisons que nous subissons, nous savons bien que nous n’allons pas reproduire ces choses, que nous n’allons pas nous faire le même mal. Comme nous disons par ici, nous les hommes et femmes zapatistes, si nous nous trompons, eh bien soyons assez bon•ne•s pour corriger, pas comme maintenant où les un•e•s foutent la merde et c’est les autres qui paient, c’est-à-dire que ceux qui foutent la merde maintenant, ce sont les député•e•s, les sénateurs et sénatrices et les mauvais gouvernements du monde, et ceux qui paient ce sont les peuples du monde.

Il n’y a pas besoin d’avoir fait beaucoup d’études, ni de savoir parler en bon « castilla », ni de savoir beaucoup lire. Nous ne sommes pas en train de dire que ça ne sert à rien, mais que ce qui suffit pour le travail, oui, ça sert, parce que ça nous aide à travailler en ordre, c’est-à-dire que c’est un instrument de travail pour communiquer entre nous. Ce que nous sommes en train de dire, c’est que le changement, nous savons le faire, il n’y a pas besoin que quelqu’un sorte faire sa campagne pour nous dire que lui ou elle•va être le changement, comme si nous, les exploité•e•s, nous ne savions pas à quoi ressemble le changement que nous voulons. Vous me comprenez, frères et sœurs indigènes et peuple du Mexique, sœurs et frères indigènes du monde, frères et sœurs non indigènes du monde ?

Alors, sœurs et frères indigènes et non indigènes pauvres, entrez dans la lutte, organisez-vous, dirigez-vous entre vous, ne vous laissez pas diriger ou regardez bien ceux que vous voulez qui vous dirigent, qu’ils fassent ce que vous, vous avez décidé, et vous verrez que les choses prennent petit à petit un chemin semblable à celui que nous avons pris, nous les hommes et les femmes zapatistes.

Ne cessez pas de lutter, de même que les exploiteurs ne cesseront pas de nous exploiter, mais arrivons jusqu’au bout, c’est-à-dire la fin de l’exploitation. Personne ne va le faire pour nous, sinon nous-mêmes. Nous, femmes et hommes, prenons les rênes, prenons le volant, et conduisons notre destin là où nous voulons aller, allons là où le peuple l’a décidé. Ainsi, pas de doute, le peuple c’est la démocratie, le peuple se corrige et continue. Pas comme maintenant où ce sont 500 député•e•s et 228 sénateurs et sénatrices qui font des conneries, et ceux qui subissent la peste et les toxiques sont des millions, ce sont les pauvres qui les subissent, le peuple du Mexique.

Frères et sœurs ouvrier•e•s, nous vous avons présent•e•s à l’esprit de même que tou•te•s les autres travailleurs et travailleuses, nous avons la même odeur de sueur que ceux qui travaillent pour les exploiteurs et exploiteuses. À présent que mes compañeras et compañeros zapatistes sont en train d’ouvrir la porte, si vous nous avez entendus, entrez à la Sexta et connaissez le gouvernement autonome de nos compañer@s de l’EZLN. Et la même chose si nous comprennent aussi nos sœurs et frères indigènes du monde, de même que les frères et sœurs non indigènes du reste du monde.

Nous sommes les principaux producteurs et productrices de la richesse de celles et ceux qui sont déjà riches, basta ya, ça suffit, nous savons qu’il y a d’autres exploité•e•s, nous voulons nous organiser aussi avec elles et eux, luttons pour ce peuple du Mexique et du monde, qui est à nous et pas aux néolibéraux.

Frères et sœurs indigènes du monde, sœurs et frères non indigènes du monde, peuples exploités ; peuples d’Amérique, peuples d’Europe, peuples d’Afrique, peuples d’Océanie, peuples d’Asie,

Les néolibéraux sont ceux qui veulent être les patrons du monde, c’est ça que nous disons, c’est-à-dire qu’ils veulent faire leur propriété de tous les pays capitalistes. Leurs contremaîtres sont les gouvernements capitalistes sous-développés. C’est ainsi qu’ils vont nous tenir si nous, tous les travailleurs et toutes les travailleuses, nous ne nous organisons pas.

Nous savons qu’en ce monde il y a de l’exploitation. La distance où nous nous trouvons de chaque côté du monde ne doit pas nous séparer ; nous devons nous rapprocher, en unissant nos façons de penser, nos idées, et lutter pour nous-mêmes.

Là où vous vous trouvez, il y a de l’exploitation, vous souffrez la même chose que nous.

Vous subissez la répression tout comme nous.

Ils sont en train de vous voler, tout comme nous ils nous volent depuis plus de cinq cents ans.

Ils vous méprisent, tout comme ils continuent à nous mépriser.

C’est ainsi que nous sommes, c’est ainsi qu’ils nous tiennent et c’est ainsi que nous allons continuer si nous ne nous prenons pas par la main les un•e•s et les autres.

Nous avons plus qu’assez de raisons pour nous unir et faire naître notre rébellion, et nous défendre de cette bête qui ne veut pas nous lâcher et qui ne va jamais le faire si nous ne l’y obligeons pas nous-mêmes.

Ici, nos communautés zapatistes, avec leurs gouvernements autonomes en rébellion, et avec leur union des compañeras et compañeros, elles affrontent nuit et jour le capitalisme néolibéral, et nous sommes prêt•e•s à tout, à ce qui viendra et comme ça viendra.

Voilà, c’est comme ça qu’ils sont organisé•e•s, les compañeros et compañeras zapatistes. Il n’y a besoin que de décision, d’organisation, de travail, de mise en pratique, et ainsi de corriger et améliorer sans repos, ou si on se repose c’est pour se refaire des forces et continuer, le peuple commande et le gouvernement obéit.

Oui, c’est possible, sœurs et frères pauvres du monde, vous avez ici l’exemple de vos frères et sœurs indigènes zapatistes du Chiapas (Mexique).

Il est temps que nous fassions vraiment le monde que nous voulons, le monde que nous pensons, le monde que nous désirons. Nous savons comment faire. C’est difficile, parce qu’il y a ceux qui ne veulent pas, et ce sont précisément ceux qui nous exploitent. Mais si nous ne le faisons pas, notre avenir sera plus dur et il n’y aura jamais de liberté, jamais.

C’est comme ça que nous, nous l’entendons, c’est pour ça que nous sommes en train de vous chercher, nous voulons que nous nous rencontrions, que nous nous connaissions, que nous apprenions de nous-mêmes.

Pourvu que vous puissiez arriver ! Sinon, nous chercherons d’autres façons de nous voir et de nous connaître.

Ici, nous vous attendrons depuis cette porte qu’il me revient de surveiller, pour pouvoir entrer à l’humble école de mes compañeras et compañeros qui veulent partager le peu que nous avons appris, pour voir si ça va vous servir là-bas, sur vos lieux de travail et de vie ; nous sommes sûrs que ceux qui sont déjà entrés à la Sexta, ils viendront, ou pas, mais d’une manière ou d’une autre ils entreront à la petite école où nous expliquons comment est la liberté pour les zapatistes, et qu’on puisse voir ainsi notre avancée et nos erreurs, que nous ne cachons pas, mais directement avec les meilleurs maîtres qui soient, c’est-à-dire les villages zapatistes.

Elle est humble, la petite école, comme nous l’avons commencée, mais à présent, pour les compañeras et compañeros zapatistes, elle représente la liberté pour faire ce qu’ils•elles veulent et comment ils pensent une vie meilleure.

Ils et elles sont sans cesse en train de l’améliorer, parce qu’ils en voient la nécessité et qu’en outre leur pratique est celle qui montre comment améliorer, autrement dit la pratique est la meilleure façon de travailler pour améliorer. La théorie nous donne l’idée, mais celle qui donne la manière, le comment gouverner de façon autonome, c’est la pratique.

C’est comme ce qu’on entend par ici et qui dit : « Quand le pauvre croira dans le pauvre, nous pourrons chanter liberté. » Juste que ça, non seulement nous l’avons entendu, mais nous sommes en train de le mettre en pratique. C’est ça le fruit que veulent partager nos compañeras et compañeros. Et c’est la vérité, parce que malgré toutes les mauvaisetés qu’ont faites contre nous les mauvais gouvernements, ils n’ont pas pu et jamais ils ne pourront le détruire, parce que ce qui est construit est au peuple, pour le peuple et par le peuple. Les villages le défendront.

Je pourrais vous raconter bien des choses, mais ce n’est pas la même chose que vous les entendiez, que vous les voyiez ou que vous les regardiez, et que, si vous avez une question de vive voix, vous répondent mes compañeros et compañeras bases de soutien. Ils auront peut-être du mal à vous répondre à cause de la langue, mais la meilleure réponse c’est leur pratique, aux compañer@s, et elle est à la vue de tout le monde parce qu’ils sont en train de la vivre.

C’est tout petit, ce que nous sommes en train de faire, mais c’est grand pour les pauvres du Mexique et du monde. De même que nous sommes quelque chose de très grand, car nous sommes très nombreuses et nombreux nous, les pauvres du Mexique et du monde, et nous avons besoin de construire nous-mêmes le monde où nous vivrons. On voit comme c’est tout le contraire quand ce sont les peuples qui se mettent d’accord que quand c’est un groupe qui dirige et non les villages qui se mettent d’accord. On a compris vraiment ce que c’est que représenter, on sait bien comment le mettre en pratique, c’est-à-dire les sept principes du mandar obedeciendo, commander en obéissant.

On voit déjà l’horizon de comment est ce qui d’après nous est un nouveau monde ; comme vous pourrez bien le voir, l’apprendre et le faire naître, ce monde différent que vous vous imaginez, là-bas où vous vivez, et nous faire partager les savoirs et créer nos mondes différents de ce que nous connaissons à présent.

Nous voulons nous voir, nous entendre même si c’est bien grand pour nous toutes et tous, cela nous aiderait à nous connaître avec les autres mondes, et le meilleur monde que nous voulons.

Il y a besoin d’organisation, il y a besoin de décision, il y a besoin d’accord, il y a besoin de lutter, il y a besoin de résistance, il y a besoin de se défendre, il y a besoin de travailler, il y a besoin de pratique. Et s’il manque encore quelque chose, ajoutez-le ici, compañeras et compañeros.

Bon, pour le moment, ici, nous sommes en train de nous mettre d’accord sur comment va être la petite école pour vous, de voir s’il y aura de la place. Bref, nous sommes en train de nous préparer. Et que tout compañero ou compañera invité•e et qui le voudra puisse la voir et la sentir même s’il ne peut pas venir jusqu’ici, nous sommes en train de penser à la manière d’y parvenir.

Nous vous attendons, compañeras et compañeros de la Sexta.

Nous sommes en train de nous préparer pour vous recevoir, prendre soin et nous occuper de vous comme vos compañeras et compañeros que nous sommes, comme nos compañeros et compañeras que vous êtes. Et aussi pour que notre parole arrive à votre oreille si vous ne pouvez pas venir jusqu’à chez nous, et que nous, avec votre aide allions chez vous.

Et bien sûr nous vous disons que ça va peut-être prendre du temps, mais que comme dit notre peuple frère mapuche, une fois, dix fois, cent fois, mille fois nous vaincrons, toujours nous vaincrons.

Et pour terminer — et que continue à vous parler le compañero sous-commandant insurgé Marcos sur ce qui est son tour, parce que nous allons nous relayer lui et moi pour tout vous expliquer, eh bien maintenant c’est à lui — bien que cela fasse des années que je fais ce travail, c’est la première fois que j’ai à signer publiquement comme ici, et c’est…

Depuis les montagnes du Sud-Est mexicain. 
Pour le Comité clandestin révolutionnaire indigène 
Commandement général de l’Armée zapatiste de libération nationale, 
sous-commandant insurgé Moisés 
Mexique, février 2013.