Le capitalisme est un culte de la mort et la science est une pute
Dr Bones
2015
~ Traduit de l’anglais par Résistance 71 ~
Le texte superbement mis en PDF par Jo:
Le-capitalisme-est-un-culte-de-la-mort-la-science-une-pute
Ce que l’on pourrait appeler “l’état d’esprit païen” pourrait en fait être mieux référer comme une “conscience radicale”.
Je ne me conçois pas comme un païen (je me vois plutôt comme un gnostique et un occultiste), mais dans mon travail j’en ai vu assez pour savoir que les pouvoirs et les divinités servis par ceux se considérant comme tels, sont bien réels. Ce n’est pas parce que je ne travaille pas avec eux que je doute de leur existence. Sur le plan métaphysique, j’ai plus à voir avec un polythéiste qu’avec un monothéiste quoi qu’il en soit. Ce sont deux visions du monde totalement différentes.
L’esprit païen ne fut pas quelque chose de superficiel, mais tout un nid de structures de croyance qui demeura infiltré même sous la main de fer de l’église : là résidaient les raisons pour lesquelles vous laissiez de la nourriture pour les morts, que vous ne coupiez pas certains arbres, que vous pouviez mettre la statue d’un saint à l’envers pour le punir si celui-ci ne faisait pas ce que vous lui demandiez. C’était une carte mentale remplie d’une inter-connectivité de toutes choses où même le plus commun des objets ou la créature la plus commune faisaient parties d’un tout plus grand, plus vaste, plus sacré. Ceci représentait l’affirmation de la vie et non pas la négation de celle-ci ; le monde, le “cosmos” était au-delà du bien et du mal, ses manifestations de la même façon partie d’une grande unité que ses qualités invisibles. Des puissances, que certains comprenaient d’autres pas, interagissaient les unes avec les autres et c’est de cette synthèse qu’était faite la réalité. Arlea Æðelwyrd Hunt-Anschütz a décrit ce concept en tant que Wyrd dans son “Qu’est-ce que le Wyrd ?”
“Wyrd veut dire littéralement ‘ce qui est devenu’, cela porte l’idée de “transformation” à la fois dans le sens de devenir quelque chose de nouveau et dans le sens de retourner vers un point de départ. En termes métaphysiques, wyrd personnifie le concept que tout se transforme en quelque chose d’autre tout en étant à la fois tiré vers son point de départ et s’éloignant de ses origines. Ainsi, nous pouvons penser du wyrd comme étant un processus qui travaille continuellement les schémas du passé en ceux du présent.”
Même après sa perte de pouvoir sociétal suite à des générations d’éradication et de conversion, cet état d’esprit d’affirmation et de libération continua soit à exister dans la culture populaire de manière dégradée ou fut gardé gentiment à couvert ; parfois, comme dans ce cas fascinant du culte du crâne de Fontenelle, un peu des deux. Ceci persista parce que ça marchait. Mais maintenait tout cela parmi une culture monolithique et un système de croyance qui niait littéralement les choses que vous entendiez et dont vous étiez les témoins ce qui ne fut pas une mince affaire. Cette conscience radicale fut un rejet en bloc de tout ce que la structure de croyance dominante représentait.
Lorsque le monothéisme chrétien est devenu l’idéologie dominante, il a imposé quelques uns de ses axiomes indiscutables, des schémas de pensée informant les observations quotidiennes de ceux qui y croyaient. Alors qu’auparavant il y avait multiplicité, il n’y avait dorénavant plus qu’une seule et unique explication et un code écrit pour toute chose. Par exemple, seul dieu donne leurs âmes aux humains, les animaux étaient donc des choses insensibles à des fins d’utilisation par les humains. Ceci mena à tous les abus possibles sur le règne animal. L’environnement naturel n’était là donc que pour son utilisation par l’humain et donc avec rien d’autre que quelques outils de base et des armes, l’Ouest américain, cette frontière du “Far-West” vit en son époque une destruction écologique et humaine sans précédent dans la croyance que tout cela n’était juste que des ressources à exploiter. Dans la grande hiérarchie de Jehovah, l’homme sert dieu et la femme sert l’homme, faisant de la moitié d’une espèce des serviteurs permanents de l’autre. Ces édits n’étaient fondés que sur une vision totalement négative de la vie, que le monde d’ici-bas et tout ce qu’il contient n’étaient que de “qualité inférieure” au sein d’une grande hiérarchie emplie d’anges ; plus les choses en étaient éloignées et mieux c’était. Ces idées qui naquirent dans la chrétienté du Moyen-Age, devinrent profondément ancrées dans nos psychées et continuèrent à influencer la pensée humaine, ce longtemps après la substitution des ses ancêtres… jusqu’à aujourd’hui.
“L’esprit païen” en regard de cette idéologie en est l’anti-thèse. D.H. Lawrence in Etruscan Places le décrit fort justement :
“… Le concept de la vitalité de cosmos, la myriade de vitalités dans sa confusion sauvage, qui est toujours prise en compte : et l’humain, dans le tumulte, s’aventurant, luttant pour une chose, la vie, la vitalité, toujours plus de vitalité, emmagasiner en lui toujours plus de la vitalité du cosmos. Voilà le trésor. L’idée religieuse active fut que l’humain, par vivacité et en exerçant subtilement toute sa force, pourrait attirer plus de vie pour lui-même, plus de vie, plus de vitalité resplendissante, jusqu’à ce qu’il devienne brillant comme le matin, irradiant comme un dieu.”
La bataille de l’idéologie s’est produite et s’est terminée et nous sommes victorieux.
Je ne dis pas que le fondamentalisme chrétien n’est plus une menace. Le danger rampant du dominionisme, mélange théocratique de fascisme et de christianisme, pourrait parfaitement pondre un daesh protestant si les choses deviennent par trop inconfortables et la pensée chrétienne fondamentaliste imprègne plus que certainement de très larges sections du parti républicain. Tout ceci est vrai. Mais ces gens sont des résidus ou plutôt ce qu’il se passe lorsqu’une communauté commence à fondre. Confrontés à une perte de pouvoir dans un monde changeant, les groupes tendent à placer leurs croyances en des temps de pouvoir sur un piedestal fétichiste. C’est la raison pour laquelle l’URSS devint si paranoïaque et pourquoi les Américains croient toujours que nous pouvons revivre “le bon vieux temps” si seulement nous pouvions nous débarrasser des ces stupides républicains / démocrates et la clique politique (flash Info : non, vous ne le pouvez pas…)
Les évangélistes sont une minorité. Peut-être vocale et amère, mais une minorité néanmoins. Le monde pense qu’ils appartiennent à un musée.
Parce que…
Dieu est mort…
Le grand philosophe Frédéric Nietzsche, dans son style dynamité, l’a d’abord reconnu dans son ouvrage du “Gai savoir” lorsqu’il y disait :
“Dieu est mort. Dieu restera mort et nous l’avons tué. Comment nous réconforterons-nous, meurtriers de tous les meurtriers ? Que fut le plus puissant et plus sacré de tout ce que le monde a possédé et qui fut saigné à mort de nos couteaux ; qui va nous laver du sang qui nous recouvre ? Quelle eau reste t’il pour nous laver ? Quels jeux sacrés devrons-nous inventer ? La grandeur de cet acte n’est-elle pas trop pour nous ? Ne devrions-nous pas nous-mêmes devenir des dieux simplement pour paraître le mériter ?”
Il faisait ici remarquer que le vieux monde, le monde des valeurs chrétiennes fondé sur un ordre universel absolu, physiquement maintenu par une déité vengeresse et omnisciente, était perdu à tout jamais, détruit par la popularité et la technique de la science. Le christianisme et ses diktats ne pouvaient plus être pris pour vérité, les mots d’un prêtre crus par dessus tous les autres, les écritures (saintes) n’ont simplement agi que sur une foi et un asservissement aveugles. Et que si vous commenciez à douter de quelques uns de ses segments, alors l’ensemble commençait à s’effondrer. Qui aujourd’hui peut honnêtement dire, parmi le camp fondamentaliste, qu’il ou elle a la même foi que le paysan moyen du moyen-âge ? Qui rejoindrait une croisade des enfants et attendrait que l’océan s’ouvre et les accueille en “terre sainte” ? Tout ça est bel et bien fini !
Mais la nature a horreur du vide et quelque chose d’autre a alors pris sa place. Une nouvelle conscience encore plus étrangère à la notre est montée en puissance : la conscience du capital.
Et Marx fit son entrée
“La bourgeoisie, à chaque fois qu’elle a eu le dessus, a mis fin à toutes relations patriarcales féodales, idylliques. Elle a déchiré sans pitié les liens féodaux qui liaient l’humain à ses “supérieurs naturels” et n’a laissé à ce qui restait rien d’autre que le lien entre l’homme et l’intérêt personnel, le rugueux “paiement en argent sonnant”. Elle a noyé les plus grandes extases de ferveur religieuse, d’enthousiasme chevaleresque, de sentimentalisme philistin, dans l’eau glacée du calcul égoïste. Elle a résolu la valeur personnelle en une valeur d’échange et à la place de libertés nombreuses, invincibles et répertoriées, elle a substitué la liberté unique et sans conscience, celle du libre-échange. En un mot, pour l’exploitation, voilée d’illusions religieuses et politiques, l’exploitation brute, directe, avérée et sans honte.
La bourgeoisie a arraché l’aura de toute occupation, de tout métier vu et honoré. Elle a converti le médecin, l’avocat, le prêtre, le poète, l’homme de science, en travailleurs salariés. La bourgeoisie a arraché de la famille son voile sentimental et a réduit la relation familiale à juste une relation d’échange monétaire.” – Karl Marx, “Le manifeste du parti communiste”, 1848 –
Les êtres humains ont besoin de valeur, nous recherchons et plaçons une signification pour toute chose. Forcés dans un monde avec la (fausse) compréhension que rien n’a de signification intrinsèque, qu’il n’y avait pas d’ordre ni de raison à l’univers, nous avons du créer les nôtres et en les inventant, nous avons eu besoin de mesurer à quel point cela valait la peine parce que nous existions maintenant dans un univers sans ordre moral absolu. Ainsi, l’argent devint le parfait véhicule. L’argent est un outil d’échange facile et aussi de mesure de la valeur, universelle. Tout et toute chose peuvent être mesurés par l’argent. Comme par magie, nous pouvons mettre en équation la valeur de 100 pommes de terre et utiliser ce symbole de la valeur pour acheter et obtenir des choses de valeur similaire. Nous pouvons dire quelles sont les “bonnes” choses parce que les “bonnes” choses sont plus chères. De cette manière, la valeur commerciale devient un étalon pour la valeur réelle elle-même. Le problème est que cela devient la seule mesure de la valeur. Comme l’a dit Marx : “Si l’argent est le lien qui me lie à la vie humaine, qui me lie à la société, qui me connecte avec la nature et l’homme, alors l’argent n’est-il pas le lien de tous les liens ? Ne peut-il pas dissoudre et attacher tous les liens ? N’est-il donc pas aussi l’agent universel de la séparation ?”
Si Marx n’est pas votre truc, d’autres philosophes ont aussi noté la même chose.
Tous les liens, du sacré au profane, sont réduits à leur valeur monétaire. Cette façon de penser, cette idéologie infecte toutes nos relations et les brise littéralement. La malédiction bien connue de la loterie en est la preuve. Combien d’argent cela prendrait-il pour vous faire faire quelque chose que vous regretterez le reste de votre vie ? Vendre, trahir un ami ? Être témoin d’un crime et regarder de l’autre côté ? Quelques centaines de dollars ? Milliers ?…
Le Dr Farrell dans la série sur l’Archonologie nous dit :
“Avant l’élection du cardinal Jorge Maria Bergoglio comme pape François 1er, j’ai fait remarquer qu’une chose à bien observer chez le nouveau pape serait sa position sur la banque du Vatican, qui fut, comme vous vous en souvenez, impliquée dans toujours plus de scandales dans des affaires de blanchiment d’argent et quelques transactions des plus opaques avec des banques américaines. Comme les lecteurs de mon ouvrage ‘Covert Wars and Breakaway Civilizations’ se le rappelleront, ceci est une relation remontant à au moins 1948, lorsque l’Institut des Œuvres Religieuses, l’IOR (le nom de la banque du Vatican), fut utilisée comme accessoire dans le blanchiment de fonds de la CIA entrant en Italie afin d’assurer une défaite du parti communiste italien dans les élections de cette année là.”
Aucune organisation croyant honnêtement en un dieu vengeur omniprésent, tenant les comptes de toute transaction morale, ne participerait à de telles opérations. Mais elle le ferait si elle ne croyait pas vraiment en toutes ces choses qu’elle prêche et si tout ce qui la préoccupait était l’argent. Le vieux roi est mort. Longue vie au roi !
Mais le capital en lui-même n’est pas suffisant pour façonner le monde à son image. Une nouvelle église doit être construite à la place de l’ancienne, ne serait-ce pour empêcher les gens de remarquer à quel point le roi Capital est mauvais. Et bien, dans la bataille entre dieu et la science, qui gagne ?
Construire un nouveau dieu
Il y a en fait une nouvelle religion, une nouvelle église mondiale en compétition pour une position, vous n’en avez peut-être jamais entendu parler auparavant : le scientisme. Décrit comme “la croyance en l’application universelle de la méthode et de l’approche scientifiques et la vision que la science empirique constitue la vision du monde la plus “compréhensive” ou la partie la plus valable de l’apprentissage humain, à l’exclusion de tout autre point de vue.” Ceci sonne bizarre, mais suffisamment inoffensif je pense. Analysons tout ça un peu mieux.
“La science moderne est souvent décrite comme ayant émergé de la philosophie ; bon nombre des scientifiques modernes originaux étaient engagés dans ce qu’ils appelaient “une philosophie naturelle”. Plus tard la philosophie a été vue comme une activité distincte de, mais intégrante de la science naturelle, chacune adressant des questions séparées par complémentaires, soutenant, corrigeant et soumettant une connaissance l’une à l’autre. Mais le statut de a philosophie a beaucoup perdu ces derniers temps. Ce qui est central au scientisme est la saisie d’un territoire presque entier de ce qui était considéré auparavant comme appartenant à la philosophie. Le scientisme considère la science comme non seulement meilleure pour répondre aux questions de la philosophie, mais encore comme étant le seul moyen d’y répondre. Pour la plupart de ceux qui s’immergent gentiment dans le scientisme, ce glissement est inconnu et n’est peut-être même pas reconnu comme tel. Mais pour d’autres, c’est explicite. Atkins par exemple, est très critique dans sa réfutation de tout le domaine : “Je considère qu’il est défendable de dire qu’aucun philosophe n’a aidé à élucider la nature ; la philosophie n’est que le raffinement de l’obstruction.”
Mais pas n’importe quelle science…
“Cette attitude a été articulée dans l’autre groupe principal des théories scientifiques, qui rivalise avec les compréhensions essentialistes, c’est à dire les théories “institutionnelles”, qui identifient la science avec l’institution sociale de la science et ses praticiens. L’approche institutionnelle peut-être utile aux historiens de la science, car cela leur permet d’accepter les définitions variées des domaines utilisés par les scientifiques qu’ils étudient. Mais quelques philosophes vont jusqu’à utiliser des “facteurs institutionnels” comme critères de bonne science. Ladyman, Ross et Spurrett par exemple, disent qu’ils “se démarquent de la bonne science, autour de lignes qui sont inévitablement opaques, en référence à des facteurs institutionnels et non pas à des facteurs directement épistémologiques.”
Oh, vous voulez dire ces institutions ?
“Toute discussion sur l’état de la science doit s’adresser directement à une massive expansion de la science financée de manière privée ces dernières décennies. En d’autres termes, cela doit gérer un statu quo que peu de scientifiques questionnent ni même ne reconnaissent…
“Aujourd’hui, un grand nombre de scientifiques sont employés et donc payés par Big Pharma, Big Agriculture et toutes ces entreprises ayant des agendas allant à l’encontre de l’environnement et de la justice sociale. Dans le même temps, les universitaires, bien que toujours largement financés par des fonds publics, ont leurs propres liens avec le capital. Beaucoup reçoivent des budgets de recherche et des bourses d’étude en provenance des entreprises de la biotechnologie, pharmaceutiques ou agricoles. Ils siègent dans des comités de conseil, supervisent et participent dans des évènements et des colloques financés par l’industrie et dépendent de liens avec l’industrie comme des couloirs de sortie pour l’emploi de leurs élèves et doctorants.”
Mais il y a mieux :
“Les résultats sont directement apparents. Le grand nombre de rétractations de publications pour cause de mauvaise méthodologie, d’approches erronées, et de mauvaise conduite générale dans la recherche, cette dernière décennie, est absolument époustouflant. On a vu une myriade d’erreurs et de mauvaises études dans quasiment tous les domaines de la science. Le pourcentage des articles scientifiques qui ont été rétractés a décuplé depuis 1975,”
Ainsi en va t’il de la “vérité objective”.
Une fois de plus, le capital fait levier et utilise les structures existantes pour façonner le monde à son image, faisant avancer une vision du monde en adéquation avec ses intérêts, dissolvant tous les liens sauf les siens. Quand un système d’idées et de technologies est tenu par des intérêts financiers, ils prennent une toute autre importance, même lorsqu’il s’avère être inutile et même dangereux. Ce système devient un dogme religieux, un canon de vérité indiscutable, des bulles pontificales infaillibles, un test qui sert à déterminer les gens “bons et intelligents” des “mauvais et des idiots”. Les faits, les idées et même les technologies deviennent moins important que de s’assurer que le flot de fric continue de couler et la seule façon de le faire est de faire plaisir aux gens qui ont ce fric, essentiellement en s’assurant aussi que ces personnes continuent à avoir ce fric. Vous ne me croyez pas ? Demandez à Nicolas Tesla ou Rudolf Diesel (si vous pouvez le trouver)…
Une des critiques essentielles de Nietzsche au sujet du christianisme était que cette religion niait la vie, elle était une idéologie construite pour détruire et nier les sentiments naturels de l’Homme, le monde naturel lui-même. Il identifiait dans la vie deux instincts différents : un instinct réactif et un instinct pro-actif. Le Dr W. Large dans un essai sur l’athéisme de Nietzsche dit :
Les forces réactives, comme le suggèrent les mots n’existent qu’au travers une opposition à une autre force qu’elles rejettent. Les forces réactives nous dit Nietzsche sont toujours négatives. Il serait mieux de comprendre cette relation en termes de modèle politique ou social, c’est à dire en termes de relations entre les groupes. Un groupe réactif est un groupe qui n’a un sentiment de pouvoir et de puissance qu’à travers la haine qu’il éprouve pour un autre groupe et qui ne gagne de valeur qu’à travers cette négation. Tout ce que nous faisons est bon, alors que tout ce que les autres font est mauvais. Les forces pro-actives au contraire s’affirment d’elles-mêmes ; elles possèdent leurs valeurs dès le début et ne les obtiennent pas au travers de la haine qu’ils éprouvent de ceux qui sont différents d’eux. Le christianisme, du point de vue de Nietzsche, est une philosophie réactive, se construisant toujours en insistant sur ce qu’il n’est pas, gagnant du pouvoir en niant les aspects de la vie et de la réalité en les supplantant avec sa propre interprétation et objectifs biaisés ; relevant d’une stricte dichotomie entre le nous et eux, ce monde et notre monde.
“Une défense rigide de la science empêche les scientifiques de reconnaître que Monsanto monopolise la production de graines (OGM), dicte les prix du marché pour le bénéfice exclusif des agriculteurs riches, favorise l’émergence de super mauvaises herbes résistantes, permet la transmission transgénique à des cultures sauvages dans d’autres pays et utilise l’État pour doper ses revenus… Pourtant, das le sillage de ces infos qui endettent les fermiers, bon nombre d’entre eux furent amenés au suicide, bon nombre de groupies des cultures OGM ont écrit des réfutations drastiques, refusant d’admettre que la production et l’introduction du coton Bt de Monsanto et les goûts exorbitants des graines et produits chimiques associés ont créé une véritable crise de la dette chez un grand nombre de paysans indiens… Plus troublant encore, Monsanto et autres entreprises multi-millionnaires de l’agribusiness ont supprimé la recherche indépendante sur leurs cultures génétiquement modifiées, ce depuis des décennies.” (Source)
“Cela ne peut pas être mauvais parce que seuls les non-croyants stupides en la science sont mauvais ! Si on ne la défend pas, cela veut dire qu’ils pourraient avoir raison !” C’est une attitude observée un grand nombre de fois dans le camp fondamentaliste de la “science” et pourtant cette attitude s’accentue dans le monde de la communauté scientifique, qui va même pousser le bouchon jusqu’à fabriquer des citations pour affirmer à quel point ils ont raison et à quel point ont tort les non-croyants. Le système s’auto-nourrit : vous n’obtenez des budgets financiers pour votre science que si vous êtes une personne comp´´tente et intelligente. Comment cela est-il déterminé ? Si vous croyez les mêmes choses que nous, l’establishment, parce que nous savons ce qui est vrai ou faux. Comment le savons-nous ? Parce que les gens que nous payons pour faire la recherche nous ont assuré que nous avions raison. Bien sûr, il y a eu quelques uns de ces scientifiques qui se sont trompés, qui ont eu des vues hérétiques. Mais ne vos inquiétez pas, nous savons comment nous occuper d’eux…
Les similarités entre l’establishment scientifique et le système de patronage de l’église catholique au moyen-âge sont frappantes. Mais qu’est-ce exactement que cette glorieuse vista de progrès qui nous est introduit par les meilleurs esprits que le fric puisse acheter ?
Le modèle prévalent, pas seulement pour l’esprit humain, mais pour la réalité dans son ensemble, est un modèle mécanique déterministe : l’univers opère et se régit sous des lois immuables, sur un chemin immuable et inaltérable et nous ne sommes juste qu’une bande de machines pensantes . Votre personnalité, votre caractère et vos sentiments ne sont que des ornements ; les schémas de pensée collectés au travers de vos années d’existence que vous déterminez être “vous” ne sont que de toutes nouvelles strates de poussières. La vie n’est qu’une concurrence constante entre des factions en lutte pour la survie du plus apte et il n’y a rien d’autre, alors profitez-en du mieux possible tant que ça dure.
Charmant n’est-ce pas ? Quelle belle affirmation de la vie. Pas étonnant que sa très large adoption en Europe ait mené à une baisse drastique de la démographie et à une choquante révolte parmi sa jeunesse. Pris d’un excellent article de la revue Ritual :
“Les agences de renseignement estiment que des milliers de combattants étrangers d’Europe occidentale, se sont rendus en Syrie et en Irak pour répondre aux différents appels aux armes d’organisations djihadistes variées y opérant (NdT : essentiellement créées et maintenues opérationnelles par ces mêmes services de renseignement occidentaux..)… Qu’est-ce que ces jeunes élevés dans le confort tranquille du cœur de ce qui est supposé être “le meilleur des mondes possibles”, espèrent trouver parmi les ruines et les cadavres d’Alep ? Pourquoi des milliers de personnes quittent le soi-disant rêve banlieusard pour combattre et mourir sous la bannière d’un racket brutal dont l’apparence et l’idéologie ressemblent à une ombre atavique d’un autre temps ?
“Parmi les nombreux entretiens, témoignages, documentaires et messages vidéos au sujet et de ces “combattants étrangers” en Syrie, il y a un fragment de discussion de deux djihadistes belges sur leur motivation à rester, à combattre une guerre sanglante dans une ville largement désertée avec laquelle ils n’ont absolument aucune connexion. Au départ, la conversation se focalise sur un devoir théologique, un sens d’empathie humaine pour les victimes du régime d’Al Assad et la frustration émanant de la politique étrangère occidentale, les points de discussion disons classiques. Mais bientôt, la conversation opine vers la vie quotidienne du militant. Comment ici, sur le front d’une guerre sans espoir, ils ont trouvé une communauté de croyants qui mangent ensemble, qui prient ensemble, qui s’occupent les uns des autres, qui pansent leurs blessures et qui se couvrent l’un l’autre sur le champ de bataille. Comme l’a dit un djihadiste britannique : “Nous sommes comme un seul corps, si une partie souffre, les autres parties réagissent.” Ce qu’espèrent trouver ces âmes errantes dans les runes et les morts du Levant est quelque chose en quoi ils peuvent croire, quelque chose qui sature chaque action d’un sens pérenne qui supplante le tangible et le transcient, une communauté pour laquelle cela vaut la peine de vivre et de mourir et maintenue en place par quelque chose d’autre que la règle de l’or, du fric…
“Quand des jeunes de la classe moyenne de villages endormis du cœur de l’Europe décident de prendre les armes pour un racket brutal n’offrant pas grand chose d’autre qu’une mer de décapitations et une mort sous le soleil implacable de Levant, il reste peu de chose à dire au sujet du supposé “triomphe du progrès”, du capitalisme et de la démocratie libérale. Des mots d’un imam canadien dont quelques jeunes élèves sont partis combattre pour l’EIIL / Daesh : ‘Quand vous ne trouvez pas un but, un sens à la vie, la seule chose pour laquelle vous êtes impatient, c’est la mort.”
Quand mourir dans le désert pour une cause dont vous n’avez que la plus petite des connexions devient une meilleure option que l’existence dans un vide spirituel, nous devons nous demander juste à quel point ce système mécanique déterministe est-il valide et fiable. Ici, aux Etats-Unis, la supposée “terre de toutes les opportunités” et de capitalisme à fond la caisse, les gens sont plus déprimés que jamais auparavant et si la bahut est en session cette semaine, il y a une grande chance que quelqu’un y sera tué. Entre tout ça, le taux de suicide continue de grimper, laissant dans l’expectative des communautés entières qui se demandent qu’est-ce qui a bien pu se passer pour en arriver à ce marasme là.
Peut-être est-ce parce que nous sommes forcés de nier une réalité bien plus grande.
Ne tolérez pas les hérétiques
Nietzsche, bien que virulent athée, a vu les “hommes de science” et les sceptiques de son temps comme n’étant pas meilleurs que ce qu’il pensait être les chrétiens dupés et dupeurs. Il a vu en eux la même marque de fabrique que le Vrai Croyant et a dit dans son livre “Par delà le bien et le mal” :
“L’homme objectif est un instrument, un instrument de mesure coûteux, facilement dommageable et un appareil de réflexion, qui doit être respecté et bien traité ; mais il n’est pas le but, il n’est pas l’homme complémentaire dans lequel le RESTE de l’existence se justifie de lui-même, il n’est pas la fin et pourtant moins que le commencement ou une cause première, rien de tel,
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vous, taupes pessimistes !” […]
“Quelle est la nature de la réalité ? D’où cela provient-il ? L’univers a t’il eu besoin d’un créateur ? Traditionnellement, ces questions sont pour la philosophie, mais la philosophie est morte. La philosophie ne nous a pas maintenu au niveau des développements modernes de la science, de la physique en particulier. Les scientifiques sont devenus les porteurs du flambeau de la découverte dans notre quête de la connaissance.” — Stephen Hawking et Leonard Mlodinow, The Grand Design —
Vous vous rappelez du truc au sujet des philosophies réactives ? Dans un entretien avec le quotidien The Guardian de Londres, Hawking pontifie “Je considère le cerveau comme un ordinateur qui s’arrêtera de fonctionner lorsque ses composants casseront. Il n’y a pas de vie après la mort ni de paradis pour les ordinateurs brisés. Ce n’est qu’un conte de fée pour les gens qui ont peur du noir…” Vraiment ?
Une vie après la mort, la réincarnation et les vivants parlant avec les morts ? Peut-être après tout que les sorciers et sorcières savaient quelque chose de plus que le commun des mortels.
Et ce n’est pas juste l’existence d’une vie après la mort qu’ils voudraient juste expliquer, mais la nature même de la conscience. On nous dit que nous ne sommes que des machines, que notre esprit est constitué de petites tempêtes électriques, qu’il n’y a aucune preuve que notre esprit s’étende au delà de notre corps. En fait, James Randi, le légendaire sceptique, a offert jusqu’à 1 million de dollars à quiconque pourrait prouver fausse cette vison du monde. Mais voilà, ce n’est pas si simple :
[…]
“Ne faites pas attention à cet homme derrière le rideau”
Demeure la question du pourquoi, pourquoi nous gave t’on avec un establishment scientifique qui ignore pratiquement toutes les données contraires à cette vision du monde matérialiste, qui continue à hurler (même contre des preuves du contraire) qu’un univers vide et stérile est tout ce qu’il y a ? Simple. La seule science qui s’effectue est celle qui est payée, qui reçoit des budgets. Les seules personnes qui peuvent payer pour que tout ceci soit fait sont celles appartenant à des intérêts privés ayant beaucoup de capital. Ces gens veulent qu’une certaine vision du monde soit non seulement confirmée mais aussi disséminée. Parce que tout cela sert un objectif. Nous avons déjà établi comment le système capitaliste est un système global de contrôle et d’exploitation. Il serait impossible de maintenir en place ce système de servitude si la réalité du “non visible” était non seulement prouvée, mais aussi connue dans les grandes largeurs. Vous pensez que les strates supérieures de la pyramide capitaliste ne savent pas et ignorent ce qui a trait aux esprits, aux pouvoirs magiques et aux possibilités réelles de l’esprit humain ? Diable, la CIA possède sa propre division, son propre département de parapsychologie (et l’a fermé lorsqu’un agent en a parlé publiquement) et quelqu’un comme Poutine a un magicien grassement payé dans son personnel du nom d’Alexandre Douguine.
Non, la personne qu’ils ne veulent absolument qu’elle ait des connaissances sur ces sujets c’est VOUS, les gueux, la classe travailleuse, l’homme du commun. Et pourquoi ? Et bien c’est assez simple. Cela devient très difficile d’avoir quelqu’un se concentrer neuf heures ou plus par jour dans son temps de travail lorsque cette personne sait que sa conscience peut littéralement se déplacer dans le temps… Cela devient un défi de maintenir la jeunesse focalisée essentiellement sur l’acquisition de biens de consommation absolument inutiles quand ils sont certains que cette vie n’en est qu’une parmi tant d’autres. […]
En bref, leur monde, le monde du pognonthéisme devient non seulement sans importance, mais complètement futile et obsolète.
Le monde capitaliste repose sur un vide qui ne peut être que remplit par des biens matériels, repose sur des personnes terrifiées et se sentant effroyablement seules. Il va vigoureusement écraser et annihiler tout challenge à son existence vide parce que s’il les autorise à avoir raison, ne serait-ce qu’une fois, alors cela remet tout en question. Si les gens peuvent apprendre d’un monde plus profond, bien plus riche, complètement distancié du monde mesquin de la finance, un monde qui transcende les commodités et les prix, d’une plus grande existence sur laquelle ils peuvent se brancher aujourd’hui, sans avoir à payer quoi que ce soit… alors le monde de la production capitaliste tombe comme ce jouet bon marché et sans goût qu’il est. Ainsi, la vieille conscience radicale, maintenant mise sur les rails et se développant, sera maintenue censurée et enterrée.
Et tout comme nous avons survécu à la première suppression, nous survivrons à celle qui vient.
Le texte en PDF : Le-capitalisme-est-un-culte-de-la-mort-la-science-une-pute
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Il n’y a pas de solution au sein du système ! (Résistance 71)
Comprendre et transformer sa réalité, le texte:
Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »
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4 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:
Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être
Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche
Manifeste pour la Société des Sociétés
Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie
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Deux communiqués sur la guerre en Ukraine à diffuser sans modération :
La vie est une relation extatique entre la destruction et la création…
La société marchande est la mort…
La société des sociétés est la vie…
Errico Malatesta : Capitalisme et irréconciliable contradiction…
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Malatesta (1853-1932) rejoignit la 1ère Internationale en 1871 à l’âge de 18 ans. En 1872, il rencontra Bakounine et rejoignit l’Internationale Anarchiste du congrès de St Imier. Malatesta fut longtemps un adepte de la “propagande par le fait”, c’est à dire un avocat de l’insurrection armée, mais il changea d’avis avec le temps. Il fut un des leaders anarchistes qui refusa d’accepter la 1ère guerre mondiale, argumentant que tout cela n’était qu’un accord des riches pour faire s’entretuer les pauvres au nom de leur profit et de leur richesse. Mécanicien et électricien de formation, il milita et aida à l’organisation de la lutte ouvrière dans l’optique de l’établissement de la société anarchiste dans bon nombre de pays, en Italie, son pays d’où il dût s’exiler pendant 35 ans, en Belgique, en France, en Suisse, aux Etats-Unis et en Argentine. Il passa 12 années de sa vie en prison et fut condamné 3 fois à mort.
Errico Malatesta est une des grandes figures historiques de l’anarchisme, grand organisateur et fédérateur de volonté. Il maniait le verbe et l’action avec la même efficacité. Ce n’est pas un hasard si nous le sortons du “placard” à intervalles réguliers. Quand on parle de complémentarité osmotique, il est intéressant de lire et de puiser dans les écrits et la pensée de Proudhon, Kropotkine, Bakounine, Landauer et Malatesta, le meilleur de chacun d’entre eux se cristallisera dans la société des sociétés que nous sommes déjà en train de construire, pour beaucoup sans même le savoir…
~ Résistance 71 ~
L’irréconciliable contradiction
Errico Malatesta
Mars 1900
Traduit de l’anglais par Résistance 71
Avril 2021
Ils écrivent depuis Bari en Italie :
Notre ville subit une bien triste crise. La fabrique de tonneaux, qui fut autrefois une industrie flamboyante, est de plus en plus sur le déclin. La cause de ce déclin réside dans l’introduction de nouveaux tarifs pour le transport ferrovier, qui permet le retour de tonneaux vides à un très bas prix, ce qui occasionne un déclin dans la consommation de tonneaux. Il y a quelques temps, les maîtres d’œuvre de la fabrication des tonneaux demandèrent que les prix de transport des tonneaux vides soient augmentés. Dimanche dernier, devant la préfecture, ils ont rencontré les autorités pour leur demander de les aider. Un comité de 12 membres de la corporations des tonneliers, accompagnés d’un inspecteur de la sécurité publique, fut reçu par le préfet, qui a promis de résoudre cette affaire.
Comment diable le préfet va t’il résoudre cela ?
En donnant l’ordre aux compagnies ferrovières d’augmenter encore le prix de transport des tonneaux vides ? Comment cela se peut-il, si les capitalistes sont ceux qui possèdent les chemins de fer, ceux qui commandent aux préfets et qui sont les maîtres de ceux-ci !
Et puis, augmenter le prix du retour des tonneaux vides fera immanquablement augmenter le prix du vin.
Si les consommateurs de vin en venaient à se retourner contre le préfet, leur promettrait-il ces choses aussi ?
Ce pauvre préfet doit se sentir dans la position de dieu tout puissant à qui une personne demande de la pluie et une autre le beau temps. Et il n’est même pas omnipotent !…
Mais nous nous préoccupons en vain de la position des préfets, qui savent parfaitement bien comment se sortir de tels meli-melos… en faisant des promesses à tout le monde et n’en tenant aucune !
Ce sont ces pauvres travailleurs qui méritent bien plus notre considération car, ignorants de la cause initiale de leurs problèmes, se laissent berner et moquer d’eux au point qu’ils se laissent escorter à la préfecture par un inspecteur de la sécurité publique et espèrent que les autorités vont s’occuper de leur fardeau.
Ce cas des tonneliers de Bari est un cas typique, qui montre on ne peut plus clairement la totale absurdité de la société capitaliste.
Dans ces cas similaires, il ne peut pas y avoir d’autre cure que l’abolition du capitalisme et la transformation radicale du système de production. Et chaque corps de métier, chaque forme d’activité humaine doit, tôt ou tard, se retrouver dans le même dilemme, ce qui est déjà abondamment étendu dû au fait de la surabondance de travail.
Les associations ne sont d’aucun secours, ni ne le sont les grèves, ni les coopératives ni toute autre forme de résistance dans le système.
A chaque fois qu’on n’a pas besoin du travail d’un ouvrier, celui-ci ne peut pas imposer quelque sorte d’accord que ce soit : il doit mourir de faim, plus ou moins lentement, plus ou moins convulsivement, mais il doit mourir de faim… à moins qu’il puisse se libérer du système en cours.
De plus, le progrès a la tendance à rendre le travail de plus en plus de personnes inutile.
Ceci est l’ultime et irréconciliable contradiction entre le capitalisme et le progrès. Tous deux empêchent un véritable progrès, glorifiant les castes actuelles, abolissant la concurrence entre les capitalistes, interdisant tout développement de production, toute nouvelle machine, toute application scientifique nouvelle et réduisant les ouvriers au statut d’animaux domestiques auxquels leurs maîtres donnent une pitance rationnée, en bref, un régime tel que celui mis en place par les jésuites au Paraguay. Pour en sortir, nous devons détruire le capitalisme et organiser la production non pas pour le profit du petit nombre, mais pour le plus grand bien-être de tous.
La requête des tonneliers de Bari pour augmenter le tarif de transport des tonneaux vides afin que les marchands de vin trouvent plus faciles de les brûler après usage plutôt que de les renvoyer, est la même chose que de demander aux tonneliers de n’envoyer que 10 tonneaux sur 100 qu’ils fabriquent sur le marché et de détruire les 90 autres avant qu’ils ne soient utilisés.
Est-il possible de faire cela ? Bien sûr que non, et pourtant la structure actuelle de la société est si absurde que cela rendrait bénéfique une telle mesure.
Quand des gens meurent de faim parce qu’il y a trop de choses ou parce que c’est trop facile de le produire ou parce que c’est trop durable, la destruction peut apparaître et bizarrement être plus utile que la production. Un grand incendie ou un tremblement de terre peuvent être une aubaine, amenant du travail et du pain aux sans emplois. [NdT: à noter que toutes les grandes crises modernes se sont “résolues” au sein du système par de non moins grandes guerres, détruisant beaucoup et tuant des millions de gens. Guerre et reconstruction sont faites par les mêmes entités qui profitent de tout et les banques qui les financent plus encore, le contrôle est mis d’amont en aval de toute crise, le plus souvent planifiée, rien ou si peu n’arrive par hasard…]
Mais la destruction de richesse n’est pas la manière dont les travailleurs pourront s’émanciper. Et par bonheur, le temps est passé, du moins dans les pays les plus avancés, durant lequel les ouvriers pensaient pouvoir arrêter le progrès et mettre autant d’énergie à briser les machines que cela aurait demander pour les contrôler.
Nous ne devons pas nous battre contre le progrès, mais au contraire le diriger pour qu’il profite vraiment à tout le monde.
Pour que cela se produise, il faut que les travailleurs prennent possession du capital, de toute la richesse sociale de façon à ce que ce soit dans leur intérêt de voir une abondance de produits et une production demandant le moins d’effort possible.
Voilà pourquoi il est nécessaire de faire une révolution [sociale]
L’organisation du travail, les syndicats, les grèves et toute sorte de résistance peuvent à un certain point de l’évolution capitaliste améliorer les conditions de travail et de vie des travailleurs ou empêcher que ces conditions ne se détériorent ; elles peuvent bien servir à entraîner les travailleurs à la lutte ; ils sont toujours en de bonnes mains, un bon moyen de promotion des idées ; mais ils sont sans espoir et impuissants à résoudre la question sociale. Tout cela doit donc être utilisé de façon à aider à préparer les esprits et le muscle pour la révolution, pour l’expropriation.
Quiconque ne voit pas et ne comprend pas cela en est réduit à aller mendier devant les préfets… et d’en être la risée.
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Lecture complémentaire : Nous conseillons tout particulièrement cette compilation d’écrits de Malatesta qui sont d’une justesse et d’une actualité (hélas !) sans bornes…
Errico Malatesta, écrits choisis
Il n’y a pas de solution au sein du système, n’y en a jamais eu et ne saurait y en avoir ! (Résistance 71)
Comprendre et transformer sa réalité, le texte:
Paulo Freire, « La pédagogie des opprimés »
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4 textes modernes complémentaires pour mieux comprendre et agir:
Guerre_de_Classe_Contre-les-guerres-de-l’avoir-la-guerre-de-l’être
Francis_Cousin_Bref_Maniffeste_pour _un_Futur_Proche
Manifeste pour la Société des Sociétés
Pierre_Clastres_Anthropologie_Politique_et_Resolution_Aporie
1ère action directe : dire NON !
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