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Sortir du marasme mortifère étatico-marchand par la société des sociétés : la voie du changement relationnel de Gustav Landauer 1/2 (Anarqxista Goldman)

Posted in 3eme guerre mondiale, actualité, altermondialisme, autogestion, crise mondiale, démocratie participative, gilets jaunes, militantisme alternatif, néo-libéralisme et paupérisation, neoliberalisme et fascisme, pédagogie libération, philosophie, politique et social, politique française, résistance politique, société des sociétés, terrorisme d'état with tags , , , , , , , , , , , , , , on 29 décembre 2022 by Résistance 71

GL1

“Une vie alors est comme un délai au cours duquel l’homme peut, et a le devoir, de mettre son esprit en accord avec la compréhension qu’il a du but de l’existence humaine.”
~ Andreï Tarkovski ~

“En ce monde, le bonheur n’existe pas, mais il existe la paix de l’âme et la libre volonté.”
~ Alexandre Pouchkine ~

“Nous sommes crucifiés dans une seule dimension, alors que le monde est multidimensionnel. Nous le sentons et nous souffrons de l’impossibilité de connaître la vérité. Mais il n’est pas nécessaire de connaître. Il faut aimer et croire. La foi est la connaissance acquise à l’aide de l’amour.”
~ Andreï Tarkovski ~

Gustav Landauer sur les relations anarchistes

Anarqxista Goldman

Chapitre 6 de son livre “Mini-manual of anarchists relations”, 2022

~ Traduit de l’anglais par Résistance 71

Décembre 2022

1ère partie
2ème partie

“L’État est une relation sociale ; une certaine façon qu’ont les gens à se relier les uns aux autres. Il peut être détruit en créant de nouvelles relations sociales, par exemple en faisant que les gens aient des relations différentes entre eux.” — Gustav Landauer —

Gustav Landauer était un anarchiste allemand, juif, né en 1870. Personne de très bonne éducation, il devint un des leaders théoriciens allemands de l’anarchisme vers la fin du XIXème siècle, mais il avait une vision particulière de l’anarchisme auquel il préférait se référer (ce qui est confus pour le lecteur d’aujourd’hui) au socialisme. Sans doute parce que Landauer était un pacifiste et que l’anarchisme était associé souvent dans l’esprit des gens à force de propagande capitaliste, comme étant violent, ce qu’il condamnait et contre quoi il écrivait (il fut aussi contre la 1ère guerre mondiale de par ses vues pacifistes), alors que ses idées étaient profondément anarchistes, comme nous allons le voir.

L’anarchisme de Landauer a de nombreuses sources et trahit ses attachements aux idées philosophiques et intellectuelles de Nietzsche et de Stirner mais aussi aux idées sociales et communistes anarchistes de la réunion communale telle que prônée par Kropotkine. Il a mis en avant plusieurs théories novatrices auxquelles je reviendrai ci-dessous, et créa un ethos anarchiste très distinct fondé sur l’idée, comme l’indique la citation en début de ce chapitre, disant que la “société” ou “l’État” ne sont vraiment rien d’autre que des relations sociales créées et maintenues. En tant que diffuseur de ses idées, Landauer fut condamné à plusieurs reprises et mis en prison. Il écrivit à la fois pour éduquer et pour cajoler ses lecteurs, mais il écrivit aussi très sérieusement sur l’histoire, la critique et la construction théorique. Landauer était un conservateur social qui croyait en la famille et avait un certain dégoût pour la sexualité libre ou l’emphase mise sur la sexualité, il pensait que cela mettait en place une “pornocratie”.

Il fut assassiné pour ses croyances socialistes libertaires en mai 1919 dans une cour de prison bavaroise par des membres des Corps Francs (fascistes), qui furent envoyés en Bavière pour réprimer la révolution qui s’y tenait après l’abdication du roi de Bavière après la fin de la 1ère guerre mondiale. Rudolf Rocker a décrit Landauer comme “un des plus grands esprits et meilleur homme que l’Allemagne ait connus” et “sans aucun doute le plus grand penseur parmi les socialistes libertaires allemands.

Regardons donc les idées de Landauer plus en détail pour tenter de comprendre son anarchisme des relations. Dans les citations faites, je conserverai le plus de références au “socialisme” intactes aussi loin qu’il soit bien compris que lorsque Landauer parle de “socialisme”, il veut dire une conception socialement bien comprise de l’anarchisme… De la collection aujourd’hui classique des ´´écrits de Landauer dans le texte “Révolution et autres écrits : une lecture politique”, traduite, compilée et éditée par Gabriel Kuhn qui donne une présentation chronologique et annotée des idées de Landauer avec une très bonne introduction. Je me concentrerai ici sur plusieurs morceaux de ce livre visant à présenter des idées clefs de Landauer et de sa théorie philosophique anarchiste, qui ajoute de la substance à mes propres idées sur les relations anarchistes telles que je les ai présentées.

Mais ce faisant, ceci ne veut pas suggérer que Landauer aurait soutenu mes idées (mon insistance sur la sexualité par exemple aurait sans aucun doute été un sujet de désaccord entre nous), ce dont parlait Landauer était un anarchisme des relations qui nous parle grandement aujourd’hui.

Le premier morceau choisi de Landauer que je désire analyser date de 1895 et est intitulé “Anarchisme-Socialisme” et fut originellement publié dans le “Journal Anarchisme et Socialisme” de langue allemande. Ici, établissons-nous le point de départ de la première période de sa carrière de théoricien anarchiste. Il est clair depuis le début que la vision de Landauer est une vision hybride qui rassemble des branches diverses de pensée en une idée ainsi résumée :

L’anarchisme est le but que nous poursuivons : l’absence de domination et d’état ; la liberté de l’individu. Le socialisme est le moyen par lequel nous voulons atteindre et sécuriser cette liberté : solidarité, partage et travail coopératif.”

Subséquemment, ajoute t’il, au moment ou le parti politique allemand du SPD (social-démocrate), montait comme la voix orthodoxe du socialisme démocratique allemand :

Quiconque n’est pas aveuglé par les dogmes des partis politiques reconnaîtra que l’anarchisme et le socialisme ne sont pas opposés mais co-dépendant. Le véritable travail coopératif et la véritable communauté ne peuvent exister que là où l’individu est libre et les individus libres ne peuvent exister que là où nos besoins sont satisfaits en solidarité fraternelle.

Ici Landauer argumente que l’anarchisme et le socialisme ne sont en rien opposés mais complémentaire dans une situation ou le socialisme est pris pour la collectivisation forcée et le premier est imaginé comme un individualisme qui “veut dire atomisation et égoïsme”. Ainsi le quidam moyen est toujours amené à penser que ce sont des opposés incompatibles. Landauer ne le pense pas. Se décrivant au passage comme un anarchiste socialiste, Landauer, donnant une analogie de protection d’un endroit de la pluie, décrit sa vision de cette façon :

Lorsque c’est utile nous partageons un toit commun aussi loin qu’il puisse être retiré lorsque non nécessaire. Dans le même temps, tous les individus peuvent avoir leurs parapluies et pour ceux qui veulent être mouillés, et bien nous ne les forcerons en rien à rester secs…ce dont nous avons besoin est de ceci : des associations de l’humanité dans les affaires concernant l’humanité ; les associations de personnes particulières dans des affaires qui concernent les intérêts de gens particuliers, de groupes sociaux particuliers dans des affaires qui concernent des groupes ; associations de deux personnes dans des affaires concernant deux personnes, individualisation des affaires ne concernant qu’une personne.

Puis il ajoute que “nous, les anarchistes, voulons un ordre libre d’associations multiples, imbriquées les unes dans les autres et colorées… il n’y a aucun besoin d’avoir un parlement mondial ou quelque autre institution mondiale que ce soit…” A ce niveau, Landauer pense que les choses doivent être gérées par ceux qu’elles concernent, les problèmes globaux par la communauté mondiale, les affaires locales par les associations locales etc et qu’en aucun cas des institutions et régimes fixes ne jouent un rôle dans la gestion des affaires ; ceci représente un concept tout à fait anarchiste. Par essence, il pense que “cet ordre de gestion doit être fondé sur le principe que tous les individus sont plus proches de leurs intérêts” et que les gens doivent rester focalisés sur ces intérêts et sont ceux les mieux outillés pour les gérer sans interférence aucune de sources extérieures arbitraires. Landauer parle aussi ici d’un peuple “bien éduqué” où les “talents” des personnes sont “bien développés” comme bases d’une saine société. Il dit que “le principe d’entraide y sera central” et que “il sera impossible pour des individus d’accumuler des richesses menant à l’exploitation, car tout le monde dans une société anarchiste comprendra que l’usage commun de la terre et des moyens de production va dans le sens de leur intérêt particulier.

Il veut une société où “aucun groupe ne gagnera quoi que ce soit en devenant exclusif” car ils abandonneraient la bonne volonté de leurs compagnons et voisins ce faisant. Il ne veut pas d’un système social fondé sur la nécessité du travail car il pense que cela créera un nouveau système moral de ceux qui méritent leur existence et ceux qui ne la méritent pas (ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas travailler). Ainsi, il place “la contrainte de l’intérêt particulier” au dessus de la “contrainte morale”. Fondamentalement, Landauer est convaincu que “l’anarchie n’est pas un système dénué de vie fait de pensées toutes faites. L’anarchie est la vie, la vie qui nous attend après que nous nous soyons libérés du carcan qui nous restreint.

En 1897, on demanda à Landauer d’écrire quelque chose sur l’anarchisme pour un journal libéral berlinois qui faisait une série d’articles intitulée : “Les partis politiques de leurs propres mots”. Intitulé “Quelques mots sur l’anarchisme”, Landauer commença par réfuter sa tache car l’anarchisme n’est pas et ne peut pas être conçu comme un “parti politique”. Mais il utilisa cette opportunité pour parler à une vaste audience comme une occasion de réfuter la violence imputée à l’anarchisme et son association populaire avec des assassins et des lanceurs de bombe. Il écrit : 

On ne peut pas nier que des anarchistes ont été impliqués dans un certain nombre d’assassinats ces dernières décennies, mais par principe, l’anarchisme et la violence n’ont rien en commun. L’idée anarchiste est pacifique, opposée à l’agression et à la violence. Ceci ne veut pas dire que les anarchistes sont des moutons. Cela veut dire que nous voulons vivre pleinement et brillamment, entièrement comme personnalités matures…

Mais, retour aux assassins : ils ne sont pas motivés par les idéaux anarchistes et ne poursuivent pas une intention anarchiste : en fait, l’intention n’a rien à voir avec leurs actions. Ce sont des personnes froides, fermées, haineuses. Les vagues de leurs désirs se brisent sur les digues d’une côte déprimée : le présent. Ni leurs attentes de bonheur et de liberté ni leurs besoins les plus élémentaires ne peuvent être satisfaits. Toutes leurs émotions sont concentrées et comprimées. Ils contemplent la bonne vie de l’anarchie et la réalisation de leur être intérieur alors qu’ils ne peuvent pas se nourrir ni eux ni leurs enfants. Graduellement, bien des éléments de leur personnalité meurent : réflexion, considération, empathie, même leur sens de survie. Leur vie commence à être consumée par un seul et unique sentiment : la rage de la vengeance.

Finalement arrive le moment où tout ce qui est caché surgit à la surface, quand tout ce qui a été gelé commence à bouillir et mijoter, quand tout ce qui a été durci, fond et quand tout ce qui a été supprimé explose. Alors, le monde réagit avec force et met en place des lois d’urgence pour se protéger contre la bonne vie de l’anarchie et ses adhérents secrets. Le même monde qui ne considère jamais de prendre des mesures contre lui-même, qui ne considère jamais d’opprimer l’oppression. Bien sûr qu’il ne le fera pas. S’il le faisait, ce ne serait plus le monde : tout le monde (en français dans le texte), pas seulement les lundis mais tous les jours de la semaine…

Il est facile de condamner les assassins. Mais j’essaie de les comprendre psychologiquement et si j’étais un avocat, je les défendrais contre les limites de la “justice” bourgeoise. Mes mots de fin seront : abdiquez la violence autoritaire et la protection des privilèges et du vol et il n’y a aura plus de hors-la-loi et plus de violence rebelle !

Landauer prend ainsi une position publique contre la violence, mais il comprend aussi que ces gens réagissent à une cause et ne sont pas des monstres venus de nulle part. Landauer a en fait lu plusieurs plaidoiries de défense d’anarchistes assassins incluant celles de Ravachol, d’Auguste Vaillant et d’Emile Henry et il était familier avec leurs actions et leurs revendications. Landauer n’est pas lui même une personne de “la propagande par le fait”. Ses réflexions sur la violence ici mènent à ces conclusions :

De ce que j’ai dit jusqu’ici, il s’ensuit ceci : d’abord que l’anarchisme ne peut pas être un mouvement de masse à notre époque, mais seulement ceux d’individus de pionniers… Ensuite que nous sommes des optimistes invétérés malgré notre scepticisme principal. Nous ne sommes pas des individualistes de la vieille école. Nous croyons en la bonté de l’humanité et en ses immenses capacités. Nous voulons une société anarchiste où les individus peuvent vivre ensemble sur la base des associations libres et du respect mutuel, en un autre terme (économique) : en socialisme.

Ainsi, Landauer inscrit deux marqueurs précurseurs dans sa compréhension de l’anarchisme : ce n’est pas un mouvement de masse ni une collectivité populiste mais plutôt un mouvement de pionniers individuels rendus potent par le truchement de leur association libre et de leur respect commun. En d’autres termes, c’est un mouvement éthique de certaines personnes (relativement peu nombreuses).

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Landauer est enclin à écrire de nouveau sur la violence, mais de manière différente de celle d’Emma Goldman en la même occasion, l’assassinat du président américain McKinley par Leon Czolgosz. Ici, il se démarque rhétoriquement des “anarchistes” (semblant accepter l’association des anarchistes avec la violence, si ce n’est pour un effet rhétorique) et il commence maintenant à distinguer ses propres vues de l’anarchisme de celles des autres, sur le chemin de pouvoir décrire une construction spécifique de l’anarchisme comprenant sa propre compréhension de celui-ci. Dans cet essai “Pensées anarchiques sur l’anarchisme”, Landauer commence par trouver l’idée de “l’anarchisme par la violence” quelque peu bizarre, il écrit :

Il me semble que la déclaration de Mowbray correspond à l’expression de ce qui est presque devenu le dogme anarchiste, à savoir de percevoir l’assassinat de personnes au pouvoir comme un acte anarchiste. De fait, il est vrai que la plupart des personnes impliquées dans ce genre d’action ces dernières décennies, furent motivées par des croyances anarchistes. Tout observateur objectif dira que ceci est bizarre. Qu’est-ce qu’a à voir avec l’assassinat de personnes l’anarchisme, une théorie politique désirant une société sans gouvernement ni autorité coercitive, un mouvement contre l’État et la violence légalisée ? La réponse est : rien, rien à voir. Cependant, certains anarchistes tendent à penser que discuter et éduquer n’a pas jusqu’ici porté ses fruits. Ils pensent donc que la destruction doit aller de paire avec la construction et la promotion par la parole. Ils sont trop faibles pour faire tomber les frontières, alors ils se tournent vers la propagation de la propagande par le fait. Les partis politiques s’engagent dans l’action politique, alors certains anarchistes pensent qu’ils doivent individuellement s’engager dans des formes anti-politiques, une politique négative. Ces logiques expliquent leur “action politique” : la propagande par le fait et le terrorisme individuel.

Landauer accuse de telles personnes d’avoir des motivations égocentriques et d’agir comme les États dont ils veulent se débarrasser. Il pense “l’anarchisme de la violence” comme celui de ceux qui n’ont pas suffisamment anarchisé leur pensée et ne sont devenus que le reflet de miroir de ce qu’ils détestent et méprisent. Ainsi donc, il dit ouvertement : “Ces anarchistes ne sont pas assez anarchistes à mes yeux” et il les accuse de se conduire comme “des partis politiques” et d’être “simples d’esprit”. “Qu’obtient-on par la violence ?” Est son processus de pensée. Il appelle bien des anarchistes de simples dogmatistes dans leurs croyances et leur attachement à l’action violente. Quand on lit entre les lignes, on constate que Landauer critique la psychologie de la violence et demande quel est son but final. En tant qu’homme qui se révèlera être l’homme pour qui les moyens doivent être indistincts des fins, la violence ne peut jamais être une solution pour lui. La violence ne fait que mener à un cercle vicieux de haine, de guerre, de mort, de destruction, cycle sans fin de violence. Est-ce cela que les anarchistes veulent ? Ainsi donc :

Ceci est la fallacie de base des anarchistes révolutionnaires (fallacie que j’ai longtemps partagée avec eux…) : l’idée que l’on puisse atteindre l’idéal de non-violence par la violence et des moyens violents. Dans le même temps ils objectent fondamentalement à la “dictature révolutionnaire” que Marx et Engels appellent de leurs vœux dans leur “Manifeste du parti communiste”, comme une courte période de transition après la révolution. Mais tout cela n’est qu’auto-déception. Toute forme de violence est dictatoriale, à moins qu’elle soit volontairement endurée, acceptée par des masses subjuguées. Ceci n’est pas le cas dans les assassinats anarchistes, qui ne sont que sujet de violence autoritaire. Toute violence n’est que despotisme ou autorité.

Il est important de souligner ici la position de Landauer contre la violence, parce que cela ouvre de fait la porte à la question : “Si pas de violence, alors quoi ?…” Mais Landauer a une réponse à cette question et il commence à l’articuler dans ce passage :

Ce que les anarchistes doivent comprendre c’est q’un but ne peut être atteint que s’il est déjà réfléchi dans ses moyens. La non violence ne peut pas être atteinte par la violence. L’Anarchie existe là où on trouve de véritables anarchistes : des gens qui ne s’engagent pas dans la violence. Ce que je dis ici n’est pas nouveau. C’est ce que Tolstoï nous a dit depuis longtemps… Les anarchistes révolutionnaires vont objecter : si nous sommes non violents, nous permettons notre exploitation et notre suppression et nous ne serons donc pas libres mais esclaves. Quand nous parlons de non violence, affirment-ils, cela ne concerne pas l’attitude des individus mais de l’organisation sociale. Nous voulons la société anarchiste, mais nous devons d’abord récupérer ce qui nous a été volé et ce qu’on nous refuse.

Mais ceci n’est qu’une autre fallacieuse cruciale : celle disant qu’on peut ou qu’on doit amener l’anarchie au monde, que l’Anarchie est une affaire relevante de toute l’humanité ; qu’il y aura un jour de jugement suivi par une ère millénaire. Ceux qui veulent “amener la liberté au monde”, ce qui sera toujours leur vue de la liberté, sont des tyrans et non pas des anarchistes.

L’Anarchie n’appartient pas au futur, c’est une affaire du présent. Ce n’est pas l’affaire de demander, c’est l’affaire de la façon dont les gens vivent. L’Anarchie, ce n’est pas la nationalisation des résultats du passé, mais c’est un peuple niveau naissant d’humbles débuts dans de petites communautés qui se forment au sein de l’ancien : une colonisation interne. L’Anarchie n’est pas une lutte de classes, les dépossédés contre les possesseurs, mais c’est le mouvement d’individus souverains, libres, forts et motivés qui se libèrent de la culture de masse et qui s’unissent sous de nouvelles formes. La vieille opposition (NdT : antagonisme) entre destruction et construction commence à perdre de sa signification : ce qui est en jeu ici sont de nouvelles formes d’existence sociale qui n’ont jamais existé.

Si les anarchistes comprenaient que le cœur même de l’anarchie réside dans les profondeurs de la nature humaine et s’ils pouvaient suivre cela comme guide principal de leur conduite, alors cela les mènerait loin des masses et ils comprendraient avec effroi la distance séparant leurs convictions et leurs actions présentes et ils comprendront alors que cela devient bien trop banal et fade pour un anarchiste de tuer un McKinley ou de commettre de telles actions tragiques et stériles. Quiconque tue, meurt. Ceux qui veulent créer la vie doivent aussi l’embrasser et renaître de l’intérieur.

Ceci me semble venir en droite ligne des cogitations de Max Stirner, que Landauer connaissait et de sa distinction entre “révolution” et “insurrection”. Les insurgés, comme se le rappelle sans doute mes lecteurs, ne permettent pas d’être organisés, pour paraphraser Stirner. Les révolutionnaires veulent juste imposer leur ordre et Landauer accuse bon nombre d’anarchistes d’être des “révolutionnaires” plutôt que des “insurgés”. Ceci est une ERREUR. Pour Landauer, comme nous allons le voir, l’anarchisme est essentiellement quelque chose à votre sujet, de qui vous êtes, votre éthique, qui vous êtes intellectuellement, politiquement, ces choses qui irradient de vous à travers vos relations aux autres, de et à travers de nouvelles formes sociales. Ce n’est pas, ne sera jamais, un “anarchisme” dogmatique et forcé à imposer aux autres, même en le voyant comme une manière bienveillante d’agir “pour le bien de tous”. L’anarchisme pour Landauer n’est pas du tout quelque chose d’imaginer par analogie à la “fin des temps” chrétienne ou de la guerre pour en finir avec la guerre. Ce n’est pas au sujet de “tuer les méchants” afin que seuls demeurent les “bons”. Le comment Landauer termine cette réflexion nous instruit sur la façon dont il perçoit les conceptions anarchistes des choses qu’il pense être dans l7erreur et d’un ´´état d’esprit anarchiste” qu’il pense devoir être mis à jour :

Les anarchistes ont toujours été trop attirés par des systèmes et attachés à des concepts rigides et étriqués. Ceci en fait, est la réponse finale à la question du comment les anarchistes peuvent-ils trouver une valeur quelconque à tuer des êtres humains. Ils ont pris l’habitude de ne considérer que des concepts et non plus des personnes de la vie réelle. Ils ont divisé l’humanité en deux classes statiques et hostiles. Lorsqu’ils tuent quelqu’un, ils ne tuent plus une personne mais un concept, celui de l’exploiteur, de l’oppresseur, du représentant de l’État. C’est pourquoi ceux qui sont souvent les plus doux et gentils dans leurs vies privées, commettent les actions les plus inhumaines dans la sphère publique. Là, ils ne ressentent plus, ils sont isolés de leurs sens. Ils agissent comme des êtres exclusivement rationnels, qui, comme Robespierre, sont les serviteurs de la raison ; une raison qui divise et qui juge. Cette logique froide, spirituellement vide, et destructrice est celle utilisée par les anarchistes pour condamner à mort. Mais l’anarchie n’est ni facilement atteignable ni moralement si dure, elle n’est pas non plus si définie comme ces anarchistes le pensent. Ce n’est que quand l’anarchie devient pour nous un rêve sombre et profond et non pas une vision atteignable par des concepts, que notre morale et nos actions deviennent une.

Dans son essai “La communauté par la séparation”, Landauer ne répond pas à des évènements ou des idées, mais présente sa vision de l’anarchisme et le titre choisi représente de fait l’idée. Ici, Landauer explique plus précisément sa distinction entre les gens basée sur leur conscience ou esprit (certain on dit que Landauer était un mystique anarchiste, je pense qu’il est le pourvoyeur d’un “anarchisme spirituel” si nous comprenons cela dans le sens nietzschéen, de sens “d’esprit libre” et non pas dans le sens chrétien), d’une véritable conscience active, intelligente, spatiale, d’eux-mêmes et des autres dans a société. Par exemple Landauer commence dans cet essai à distinguer le fossé entre une “avant-garde” et “le reste de l’humanité”. Ce qui distingue les gens, c’est la façon dont ils réagissent à leur contextualisation sociale. Il dit :

Ce n’est pas une question de connaissance ou de capacité, mais de perspective et d’orientation. La position sociale de l’individu de la masse dérive d’un héritage qui détermine son existence à la fois de l’extérieur que de l’intérieur : il appartient à une certaine famille, à une certaine classe, il acquiert certaines connaissances et suit une certaine foi, il se tourne vers une certaine profession, il est catholique ou protestant, allemand ou anglais, français, patriote, c’est un commerçant ou un éditeur de presse. Autorité, habitude, coutume, moralité, temps et classe définissent son existence.

Mais comme il y a peu de gens qui réagissent à leurs circonstances en les ignorant pour gagner une nouvelle conscience d’eux-mêmes et des autels dans le monde (les médias de masse, la propagande politique et maintenant les réseaux sociaux s’assurent que cela ne se produise pas ou très peu…). Que doit faire un anarchiste ? Là-dessus Landauer est très clair :

Nos âmes ne peuvent plus tolérer plus longtemps cette confusion. La conclusion est que nous devons cesser de descendre vers les masses. Nous devons les précéder. Dans un premier temps, il peut paraître que nous nous en détachions ; mais nous ne pouvons trouver la communauté que nous attendons et dont nous avons besoin si nous, la nouvelle génération, nous séparons des vieilles communautés. Si nous opérons une séparation radicale et si nous, en tant qu’individus séparés, nous plongeons dans les profondeurs de notre être afin d’atteindre le cœur même de notre nature cachée, alors nous trouverons la plus ancienne et la plus complète des communautés ; une communauté qui non seulement comprend et englobe notre humanité mais aussi l’univers entier. Quiconque découvre cette communauté en lui-même sera éternellement heureux et joyeux et le retour à des communautés communes et arbitraires telles que celles d’aujourd’hui sera impossible.

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Ici, Landauer distingue trois types de communauté : une communauté individuelle (c’est à dire une communauté d’individus) ; les états et sociétés bourgeoises et une communauté anarchiste qu’il définit comme “les associations libres momentanées d’individus basées sur des intérêts communs”. Landauer dit : “J’essaie de me construire un nouveau monde sachant que je n’ai pas vraiment de terrain pour le construire ; tout ce que j’ai est un besoin.” Il voit la communauté à construire comme “notre ouverture à ce qui est au-delà de notre “je”, en utilisant notre “je”. Nous utilisons nos sens pour nous étendre sur ce qui est au-delà d’eux ; nous essayons de comprendre le monde avec toute la richesse de nos vies, avec nos passions, et avec notre contemplation la plus profonde.” Il suggère que “Nous devons comprendre que nous ne faisons pas que juste percevoir le monde, mais que nous sommes le monde.” Il demande que “nous retournions à nous-mêmes et qu’alors nous trouverons véritablement l’univers” dans une conception qui imagine que le monde est dans tout être vivant. Il fonctionne au sein d’une notion philosophique de l’infini qui fait de nous une partie d’un “courant, d’un ruisseau éternel” :

Clarifions tout ceci et nous savons maintenant ce que signifie de clarifier, c’est à dire de créer une disposition nécessaire, que le passé, le présent et le futur, ainsi que les notions d’ “ici” et de “là-bas”, ne sont qu’un ruisseau unique/unifié éternel qui s’écoule de l’infini vers l’infini. Il n’y a ni cause ni effet de ce monde.

Ceci paraît être de circonstance pour contre-carrer une compréhension du monde purement matérialiste (et souvent simplement économique) prévalent chez les marxistes, les communistes et les anarchistes de cette époque. Landauer imagine que nous pensons de toute façon avec “un langage psychologique métaphorique”. En fin de compte, il trouve que “la matière est rigide, ce n’est donc pas surprenant que les matérialistes le soit également”. Mais ce n’est pas pour la cause de spéculations religieuses que Landauer accepte les arguments de Stirner et ce qu’il décrit comme son agenda de détrônent permanent de tous les dieux et de toute pensée “sacrée”. Il écrit :

Le dernier grand nominaliste fut Max Stirner, qui, avec la plus radicale rigueur, a libéré nos esprits du fantôme de ce que les notions abstraites sont. L’essence de ses enseignements peut être résumée dans ces quelques mots paraphrasés : “Le concept de dieu doit être détruit. Mais ce n’est pas dieu qui est l’ennemi, c’est le concept.” Stirner a découvert que toute oppression vient en fin de compte, de concepts et d’idées qui sont acceptés comme sacrés. D’une main ferme et déterminée, il démonta des notions comme celles de dieu, du sacré, de la moralité, d’état, de la société et de l’amour et démontra de manière rigolarde leur vacuité.

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Ainsi, Landauer localise la source de notre oppression dans nos idées et nos croyances, celles que nous acceptons intellectuellement et que nous justifions moralement. Mais Landauer ne s’arrête pas en si bon chemin et accuse Stirner de fabriquer une nouvelle sorte de sacré : “l’individu concret et isolé”. Landauer désire abolir aussi cela et suggère “il n’y a pas d’individus, seulement des affinités et des communautés” ; il n’y a que “vie immanente” et “forces présentes”. Un être humain n’est jamais seul mais il est un être ayant plus ou moins de connexions actives avec et envers les autres, qui ne sont pas moins vivants que lui, tout existe d’un seul coup et vous faites partie du tout :

Nous faisons partie d’une chaîne indestructible qui vient de l’infini et va vers l’infini, même si de petits segments peuvent se déchirer et avoir des complications. Tout ce que nous faisons durant notre existence nous connecte avec l’univers et même notre corps mort, sans vie, est un pont qui est utilisé pour continuer notre voyage dans l’univers.

Ainsi, le monde est un “complexe ruisseau d’âmes” et “notre monde ne peut être compris que si nous comprenons quelques parallèles, perspectives supplémentaires par lesquelles nous l’avons créé”, une sorte d’intersection anarcho-sprituelle. Vous pouvez bien vous demandez maintenant qu’est-ce que tout ce blablabla philosophico-spirituel a à faire avec l’anarchisme, mais voilà le but : “l’efficacité est réalité…ce qui est réel, ce sont les connexions et les communautés”. Donc :

Les corps individuels qui ont vécu sur terre depuis le début ne sont pas la somme d’êtres individuels isolés ; ils forment une véritable grande communauté, très réelle, un organisme ; un organisme qui change en permanence, qui se manifeste toujours en de nouvelles formes individuelles. Aussi peu que notre conscience ne connaisse habituellement au sujet de la puissante et réelle vie de nos désirs supposément inconscients, de nos désirs, nos réflexes et nos automatismes physiques et aussi peu connaissons-nous de la vie de nos ancêtres en nous-mêmes. Et pourtant leur existence est indéniable. Si nous ne reconnaissons pas cela, le sens de la vie et du monde demeurera un mystère pour nous, ils seront tous composés de matière, toute perception et fantôme. L’humanité n’est pas une abstraction, ce n’est pas un mort mort pour nous ; l’humanité est réelle et vivante et les individus le sont aussi, ainsi que leur conscience, les individus changent, ils émergent individuellement, changent et ne sont que des ombres qui disparaissent, un autre changement.”

Ainsi, Landauer voit une connexion avec les autres en chacun de nous, simplement par le vertu du fait que nous existons. Nous ne sommes pas des êtres uniques ; nous ne vivons ni ne venons d’un vide. Nous sommes des particules d’un organisme ou une communauté de nos êtres propres. Là est la connexion, un indice de nos natures inter-connectées en nous-mêmes. Ainsi, Landauer se fait l’avocat de la communauté, imaginant chacun d’entre nous être un en miniature, nos connexions sociales constituant ce qui fait de nous ce que nous sommes. Mais nous ne parlons pas ici de “commodités arbitraires renforcées par l’autorité.” Ce sont, nous dit Landauer, “la superficialité de la mentalité de troupeau” [cette dernière expression trahissant l’intégration de la lecture de Nietzsche par Landauer]. Ce que veut dire Landauer est que “la véritable individualité est celle que nous trouvons au plus profond de nous-mêmes, c’est la communauté” et par là donc :

Lorsque les individus se sont transformés en communautés, ils sont alors prêts à former des communautés plus vastes avec des individus pensant de même. Ceci sera une nouvelle forme de communautés, établies par des individus ayant le courage et le besoin de se séparer de la fadeur de la superficialité.

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Pourtant, il y a une autre chose de mystique, de spirituel qui va avec ça, une façon de ressentir et de matérialiser cette nature de communauté. Cela s’appelle “amour” :

Il y a une autre façon de sentir l’infini, la plus splendide de toutes. Nous sommes tous familiers avec elle tant que nous ne sommes pas entièrement corrompus par la décadence et la superficialité égoïste de nos communautés arbitraires et déformées. Je parle ici de l’amour. L’amour est une chose tellement merveilleuse et universelle, un sentiment qui nous chavire et nous élève jusqu’aux étoiles, parce qu’il est ce cordon ombilical qui connecte notre enfance avec l’univers. Là se trouve un sens plus profond du fait que le nom et l’expérience de la communauté, le sentiment qui nous connecte avec l’humanité : l’amour, l’amour humain, est le même terme que nous utilisons pour l’amour entre les sexes qui nous connecte avec les générations suivantes. Maudit soit le sans-âme qui ne frémit pas quand il entend parler d’amour ! Maudit soit ceux pour qui la satisfaction sexuelle n’est rien d’autre qu’un plaisir sensoriel ! L’amour illumine le monde et envoie des étincelles au travers de nos êtres. Il est le moyen le plus profond et le plus puissant pour comprendre ce que nous avons de plus précieux.

Un amour pour l’humanité”, suggère Landauer, “fait partie de notre être le plus profond. Mais attendez… Landauer n’a t’il pas commencé par dire qu’il y avait un vaste fossé de conscience entre les anarchistes et le reste ? Il n’est pas inconscient de cela :

J’ai parlé de ce fossé qui nous sépare, les nouveaux êtres humains et les masses et au sujet de la nécessité de nous séparer de ceux unifiés par l’État. Ceci pourrait sembler contredire ma pensée qu’un amour pour l’humanité fait partie de notre être le plus véritable. Laissez-moi expliquer : d’un côté, il semble clair que tous les êtres humains contemporains, les civilisés et les autres, sont si reliés à nous qu’il est difficile de ne pas les aimer comme nous aimons quiconque est plus proche de nous. D’un autre côté, la relation est difficile, aussi difficile que celle parfois avec nos proches : ils sont très proches de nous dans leurs êtres et leurs caractéristiques et nous ressentons ce lien de sang et nous les aimons, mais nous ne pouvons pas vivre avec eux. La plupart de nos contemporains ont déformé leur humanité à cause de leur étatisme et de leur bassesse sociale ainsi que leur stupidité ; ils ont aussi déformé leur animalité par leur hypocrisie, leur fausse moralité, leur couardise et leur anti-naturalisme. Mais durant les quelques occasionnelles heures de clarté ou de désespoir, ils ne peuvent pas retirer leur masque. Ils ont bloqué leur chemin vers l’univers ; ils ont oublié qu’ils peuvent se transformer en dieux. Nous voulons pourtant être tout : humains, animaux et dieux ! Nous voulons être des héros !

Ainsi, la proposition de Landauer est que ceux qui ont cette conscience anarchiste, ces esprits libres, ces “nouveaux êtres humains”, se séparent de la société et créent leurs propres et nouvelles communautés. Il justifie ceci non pas seulement par la nécessité mais “pour l’amour de l’humanité”. Ces personnes doivent vivre une nouvelle vie pour l’intérêt général et créer des “centres de nouveaux êtres” et il lance cet appel à tous ceux qui veulent entendre, qui veulent vivre une nouvelle vie anarchiste selon des valeurs et des principes différents, vivre selon une nouvelle ´´éthique et de nouveaux idéaux :

Pour l’amour de l’humanité qui a perdu son chemin, pour l’amour de ceux qui viendront après nous, pour finalement l’amour du meilleur en nous, nous voulons quitter ces gens, nous désirons notre propre compagnie et nos propres vies ! Loin de l’État, aussi loin que nous le puissions ! Loin de la marchandise et du commerce ! Loin des Philistins ! Laissez-nous, nous qui nous sentons les héritiers du millénaire, nous qui nous sentons simples et éternels, qui sommes des dieux, laissez-nous former une petite communauté de joie et d’activité. Laissez-nous nous créer comme êtres humains exemplaires. Laissez-nous exprimer tous nos désirs : le désir de quiétisme et d’activisme , le désir de réflexion et de célébration, le désir de travail et de loisir. Il n’y a pas d’autre voie pour nous ! Cette croyance intime est née du chagrin : nous voulons ressentir la plus grande joie de la création parce que nous sommes désespérés. Ceux qui en ont déjà fait l’expérience savent que la seule façon de réveiller les gens est par le génie religieux, c’est à dire par la vie exemplaire de ceux qui font tout pour se hisser hors de l’abîme. Ces individus savent que toutes ces questions sont de très sérieuses questions existentielles.

Voilà ce que veut dire Landauer par “la communauté par la séparation”

NdT: Cette conception de Landauer a été mis sous forme romanesque par l’excellente écrivaine de science-fiction Ursula K. Leguin dans son roman “The Disposessed”, “Les dépossédés” (prix Nebula du meilleur roman de science-fiction, 1974, publié en français en 1975), qui met en scène la visite sur une planète, organisée comme la nôtre, de représentants d’une communauté anarchiste s’étant “séparée”, retirée de la vie de la planète en créant, il y a des générations, une communauté séparée sur la lune, satellite naturel de cette planète, le choc des civilisations est conséquent. Excellent bouquin aux grandes ramifications anthropologiques existentielles. A lire…

Le morceau suivant que je vais considérer est l’essai historique d’amplitude écrit par Landauer en 1907 : “Révolution”. Cet essai analyse la révolution dans différentes ères historiques afin de proposer une compréhension de la révolution, ses buts et ses utilisations. Il ne devrait pas être surprenant que la conclusion ici ne peut pas être un évènement catastrophique qui change les circonstances du monde pour toujours et pour le meilleur comme une sorte d’apocalypse anarchiste, comprise de manière matérielle. Nous devons savoir maintenant que pour Landauer, les choses ne peuvent pas se dérouler de la sorte. Cela ne nous fait donc pas ici révéler la fin avant le début lorsque Landauer conclut que “aucune révolution ne remplira jamais ses buts. La révolution est un moyen en soi : elle sert la revitalisation d cela force et de l’esprit.” Ici, Landauer ne suggère pas que la révolution physique n’a pas de sens, simplement si c’est là tout ce qu’elle est, alors elle loupe complètement le coche de ce qu’il veut dire. Mais alors, qu’est-ce que la “révolution” pour Landauer ?

La révolution concerne la communauté dans toutes ses dimensions. C’est à dire pas seulement l’État, les propriétés de ce monde, les institutions religieuses, la vie économique, la vie intellectuelle, les écoles, les arts ou l’éducation, mais une combinaison de tout ceci, une combinaison qui, durant une certaine période de temps, reste dans un état relatif de stabilité autoritaire.

Ici, Landauer révèle le coté conservateur de sa société, il ira jusqu’à dire “peuple d’esprit, l’esprit étant l’amour et création de communauté, a besoin de la famille, du troupeau, de la nation (langage, coutumes, arts). Ces formes sociales sont les ponts de lumière qui connectent nos mondes différents. Ils créent aussi de nouvelles formes de communautés qui dépassent les formes rigides de la communauté créée et construite sur la haine, le manque d’esprit, et la méchanceté.” Je ne suis pas d’accord avec ceci, mais Landauer veut construire sa révolution sur ces fondations et qu’elles soient bonnes ou pas pour la révolution et l’esprit est juste la question. Ainsi, plus loin dans l’essai, il dit ceci :

Pendant une révolution, les gens sont emplis d’un esprit et sont complètement différents de ceux qui n’en ont pas. Les gens sont emplis de cet esprit qui est autrement réservé aux personnes exemplaires ; tout le monde est courageux, sauvage et fanatique, plein d’attention et d’amour dans le même temps. Une fois l’esprit parti, ils veulent tous Panem et Circenses, du pain et des jeux, une fois de plus.”

Ici, j’espère que vous pouvez voir pourquoi j’ai parlé de “conscience” en référence à Landauer car cela semble analogique à ce à quoi le mot “esprit” semble vouloir se référer. Dans les temps révolutionnaires, les gens sont possédés par une conscience, un esprit révolutionnaire. Mais en des temps non révolutionnaires, Landauer semble se référer à l’esprit en des termes plus restrictifs, plus élitistes peut-être, puisqu’il pense que ce une sont que les êtres exemplaires qui le possèdent.

Landauer cite La Boétie pour répondre à la question de savoir pourquoi les gens se laissent-ils abuser, torturer et opprimer :

Comment le tyran peut-il avoir tant d’yeux afin de vous contrôler si vous ne lui prêtez pas les vôtres ? Comment peut-il avoir tant de mains pour vous frapper si vous ne leur fournissez pas ? Comment peut-il avoir du pouvoir sur vous si ce n’est au travers vous ? Comment peut-il vous persécuter si vous ne le lui permettez pas ? Que peut-il vous faire si vous n’êtes pas le receleur des voleurs qui vous volent et l’aide des meurtriers qui vous assassinent ? Que peut-il vous faire si vous n’êtes pas votre propre traître ?

A suivre…

Gustav Landauer sur Résistance 71

Gustav Landauer, PDF :

Vie et œuvre de Gustav Landauer

Appel au socialisme (traduction partielle de R71)

RIEN ne s'oppose TOUT se compose

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En 1994, ils ont dit : ¡Ya Basta! et ils continuent !…